Laurie Phaï : « Le sport tel que je le pratique peut être vu comme un sacrifice, mais qui m’est vital. »Marathonienne, pratiquante de course à pied, sur route, trail et en montagne, assistante RH et juriste, 34 ans
C’est à la force de ses pas et d’une histoire familiale de battants que Laurie Phaï, trentenaire franco-cambodgienne est devenue marathonienne et championne de trails. Après sept ans comme pongiste en équipe de France, elle s’est mise à courir pour conjurer un drame personnel et ça l’a (re)lancée sur le chemin de sa vie. Elle s’apprête aujourd’hui à représenter le Cambodge aux Jeux d’Asie du Sud-Est et s’engage, là-bas, pour le sport féminin.
Propos recueillis par Claire Bonnot
Publié le 07 juillet 2021 à 9h18, mis à jour le 16 septembre 2021 à 15h17
« J’ai toujours été sportive : petite fille déjà. À l’époque, j’avais une allure très garçon manqué avec les cheveux courts et ce, jusqu’à mes 17 ans. On m’appelait “jeune homme“ dans la rue et, franchement, ça ne me plaisait pas du tout ! J’étais une fille sportive, c’était tout.
Je suis la troisième de la fratrie avec une sœur peu sportive et un grand frère très sportif et touche-à-tout. J’ai suivi son exemple : natation, tennis puis tennis de table avec mon père et mon frère. Il était en club.
Un jour où j’allais le chercher avec mon père à l’entraînement, on m’a dit : « Et toi, quand est-ce que tu t’y mets ? ». Ni une ni deux, j’ai commencé et j’ai lancé de bons services jusqu’à mes 21 ans ans puisque j’ai intégré l’INSEP à 15 ans et passé sept ans en équipe de France.
J’ai rapidement gravi les échelons en faisant ma première médaille de bronze aux Championnats d’Europe cadettes de tennis de table et j’ai représenté la France sur les compétitions internationales pendant sept ans.
J’ai été Championne de France, en simple, double junior et double senior. Mes derniers championnats du monde étaient en 2007, en Croatie. J’ai voulu arrêter et aller en master de droit car il est compliqué de faire des résultats au niveau européen.
C’est un sport plutôt dominé par les Asiatiques dont l’entraînement est dingue et où l’investissement financier suit. Moi, je ne gagnais pas assez d’argent pour vivre donc j’avais besoin de travailler à côté ou de poursuivre mes études.
Le tennis de table, j’ai toujours vu ça comme un jeu. J’ai commencé à jouer dans le garage avec mon frère et on était ultra compétitifs, on se criait pas mal dessus !
Mais c’est en atteignant le haut niveau que j’ai appris que c’était un sport autant tactique que physique, dans lequel il faut apprendre à se maîtriser pour contrôler ses gestes et gagner.
Ayant commencé la compétition à 9 ans, j’ai un mental taillé pour la compétition. Pourtant, au tout début, on me disait que je n’étais pas assez « méchante » et que je préférais m’amuser et faire du beau jeu que gagner !
On était accompagnés par des psychologues du sport, ce qui m’a vraiment aidée à forger mon caractère et à gérer les épreuves et les émotions dans tous les secteurs de ma vie.
En tant que jeune femme, cette expérience de sport de haut niveau aide vraiment à accroître sa confiance en soi. J’ai aussi beaucoup gagné en maturité puisqu’à 14 ans je suis partie de chez mes parents, je devais faire seule mes sacs pour aller en compétition, j’ai dû chercher du boulot, gérer mes études à côté… etc.
Si j’ai arrêté cette superbe expérience de la compétition de haut niveau en 2007, j’ai continué à jouer en club par équipe jusqu’en 2010. Je cherchais à retourner dans le Sud et c’est en m’inscrivant dans un club à Toulouse que j’ai trouvé un boulot via un joueur.
En 2011, je deviens maman et je rejoins le père de mon enfant dans l’Aveyron puis je retombe enceinte d’une petite-fille qui décède à la naissance, en 2013… C’est à ce moment-là que la course à pied est entrée dans ma vie.
Ça a été un moment très douloureux à passer. Après trois jours à toucher le fond, j’ai repris le boulot et j’ai cherché autre chose pour m’aérer la tête : je me suis mise à courir. C’était le sport le plus simple, je n’avais qu’à chausser des baskets et me lancer.
En me fixant de nouveaux objectifs, cela me permettait de ne pas me laisser aller et d’avancer et, ça, c’est grâce au sport !
Là où je travaille, les collègues font du trail et de la course en montagne. Même si c’était pour oublier ma vraie douleur, la perte de ma fille, je me suis lancée avec eux. C’était ma toute première course, en 2013. J’ai couru 10 km sans préparation et ça m’a fait un bien fou !
Et puis, le déclic s’est fait en 2016 sur une course à côté de Montpellier où le speaker de l’événement, aussi entraîneur, me repère. J’étais arrivée 3e sur les compétitrices féminines. Il me dit qu’il entraîne des athlètes et que j’ai un sacré potentiel qu’il faudrait exploiter !
On débute alors notre collaboration. C’est Ludovic Collet, il est connu dans le monde du trail. Je gagne pour ma première course de 60km. C’est alors qu’il me propose une course au Cambodge, le pays de mes origines.
Je me prépare à ce marathon de 32km dans les temples d’Angkor avec un coach spécialisé, Sébastien Prats, qui est toujours mon entraîneur. Comme je décroche la première place, un journaliste français me dit que je devrais rencontrer le Comité Olympique car le pays recherche des athlètes.
Le Cambodge pouvait inviter deux marathoniens cambodgiens pour les Jeux Olympiques de Tokyo avant le Covid et j’étais retenue grâce à mes belles performances. Les choses ont changé après… une seule place s’est libérée et ils ont choisi le jeune sprinteur qui est un « vrai » cambodgien.
Quand j’ai eu l’info, j’ai bien sûr été déçue mais, en même temps, ça m’a ouvert d’autres perspectives. Mon compagnon est montagnard et comme nous habitons à Briançon, nous avons décidé de faire le Mont-Blanc. Le sport c’est comme la vie, il y a toujours des hauts et des bas, il faut savoir rebondir !
Et puis, JO ou pas, moi le sport j’adore ça, j’en ai besoin et je ne coupe qu’une semaine ou deux par an. Je ne pourrais pas travailler à temps plein par exemple, le sport est mon équilibre, je dois avoir le temps d’en faire entre une et trois heures par jour.
La suite pour moi, c’est quand même du lourd avec les « petits JO d’Asie » que sont les Jeux d’Asie du Sud-Est (SEA) en novembre-décembre au Vietnam. Mon rêve était de faire les JO à un moment donné mais, maintenant, je ne sais plus vraiment si j’en ai encore envie.
C’était fantastique de pouvoir courir pour le pays de mon père, mon pays de cœur, mais si je ne peux pas le faire, c’est comme ça, c’est une expérience de vie. Dans tous les cas, je saisis toujours les opportunités et je vis les choses à fond.
Je vis à 100 % pour le sport même si ce n’est pas facile pour la vie de famille. D’une certaine manière, c’est un sacrifice mais qui m’est vital. Le sport « ÀBLOCK! », c’est fort en émotions !
J’ai eu, par exemple, la chance d’être approchée pour tourner un documentaire sur ma vie de sportive, « Au-delà du temps ». Ça s’est fait sur quatre ans, de 2017 à 2021 et ça sort cette année.
C’est un film qui retrace tout mon parcours, en partant de l’histoire de mon père au Cambodge, parti pendant la guerre des Khmers rouges pour venir se réfugier en France, en 1978.
C’est une terrible épopée puisque toute sa famille a été assassinée et que lui a réussi à s’enfuir. Représenter le Cambodge en tant que sportive est donc quelque chose de très fort et symbolique pour moi !
Le film a été présenté au Winter Film Festival et a gagné le concours sur 36 documentaires, c’était fou ! Il est actuellement en visionnage chez Canal Plus.
Je vis aussi le sport comme une vocation : j’ai envie de redonner ce que j’ai reçu. J’ai donc créé une association « Trail sans frontières » pour aider à développer le sport dans le monde, à commencer par le Cambodge.
Je m’engage aussi pour le sport féminin au Cambodge : je vais préparer cinquante jeunes filles pour le 10 km de Phnom Penh dans le cadre de l’association « Toutes à l’école » créée par la journaliste Tina Kieffer. Je devais le faire avant le Covid…ça va se faire, je suis toujours en contact.
Ce que je dirais aux jeunes filles ou femmes qui n’osent pas se lancer dans le sport ? Moi j’ai cassé les codes, ça peut être une bonne option !
Même si la société met des barrières, il faut se rappeler qu’on est tous des êtres humains égaux et que les femmes peuvent tout déchirer.
Je viens encore de voir que lors d’une course très connue aux Etats-Unis, il y a eu neuf femmes parmi les vingt premiers coureurs, du jamais vu pour ce trail ! Bref, si on n’ose pas, on n’y arrivera pas.
De plus en plus de femmes n’ont plus peur d’aller se challenger sur des longues distances et plus les médias relayent ces exploits, plus les autres femmes se sentiront légitimes.
Les femmes sportives qui m’inspirent ne sont pas forcément celles qui ont atteint le haut niveau. Mais plutôt celles qui parviennent à faire des super trails – 165 km !- après avoir enduré des cancers, de longs traitements, qui travaillent et ont une vie de famille. Ce sont ces défis sportifs exceptionnels qui me portent ! »
Pour suivre la coureuse à la trace à travers le monde, suivez-la sur son compte Instagram @lauriephai
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Le terrain du sport féminin, Émeline Dodard le connaît bien depuis qu’elle s’est jetée dans l’aventure du football américain. Passionnée par ce jeu tactique, elle met son esprit d’ingénieure au service de son poste d’attaquante. Et donne de la voix pour le médiatiser. Témoignage d’une fille aussi audacieuse que coriace.
Amoureuse du ballon rond, c’est elle qui le dit. D’aussi loin qu’elle se souvienne, au Canada comme en France, Jessica Silva a toujours été une footeuse passionnée. Avec ses joueuses du FC Metz, cette entraîneure ambitieuse se bat pour son club mais aussi pour le développement du foot féminin.
Elle a tout quitté pour vivre de sa passion pour le sport. Céline Martin officiait dans le domaine de l’informatique jusqu’à ce que la découverte du CrossFit en décide autrement. Aujourd’hui coach sportive, elle a fait le pari de lancer sa propre salle à Limonest près de Lyon.
À l’âge de 8 ans, elle est entrée dans la vague. Aujourd’hui, à 19 ans, Oïana Trillo voue une passion sportive au sauvetage côtier. En équipe de France ou au pôle sport de Montpellier, elle fait figure d’espoir de la discipline. Témoignage d’une fille qui se sent comme un poisson dans l’eau.
Depuis ses 9 ans, elle fonce sur sa moto. Balayant d’un revers de gant en cuir les commentaires sexistes, Justine Pedemonte, 15 ans au compteur, se balade de circuits en circuits et ramène un paquet de trophées à la maison. Témoignage d’une fille qui vit à 200 à l’heure.
Tout comme son compagnon, elle s’est élancée ce week-end pour une nouvelle Grande Odyssée. La musher française Aurélie Delattre, tenante du titre de la catégorie Limited, a toujours le même objectif : gagner, en mettant le plaisir de ses chiens au coeur de l’aventure. Rencontre avec une reine des neiges.
Perdue dans un tourbillon, égarée dans un trop-plein de vie, Adeline s’est (re)trouvée grâce au yoga. Généreuse et légère, elle offre désormais les clés de la connaissance de soi à tous ceux qui ont la même quête. Douceur, apaisement, alignement… Chut, elle raconte.
Elle s’appelle Aurélie Hoffmann alias Lil’Viber. Mais sur les circuits, on l’appelle aussi « Wonder Lili ». Elle, c’est une super héroïne de la bécane qui se déguise comme ça lui chante pourvu que ce soit haut en couleur. Cette nana qui affole les chronos casse les codes à toute berzingue. Ultra féminine, elle est une motarde jusqu’au bout des ongles. Faites de la place !
Victime d’une agression sexuelle dans le métro, elle naviguait entre détresse, rage et culpabilité. La découverte de la boxe lui a rendu une sérénité qu’elle ne pensait plus possible. Témoignage.
Entre les ciseaux et les baskets, elle est toujours ÀBLOCK! Coiffeuse de métier et sportive de coeur depuis toujours, cette fan du challenge vient d’accomplir (en partie) un des plus grands défis de sa vie : la Diagonale des Fous. Et si elle n’a pu boucler la course, l’année prochaine, elle compte bien finir le travail !
Elle fait partie d’une asso qui met notamment en avant les sports de glisse et plus particulièrement du wakeboard. Plus largement, elle s’engage pour que les filles se fassent une place dans tous les sports extrêmes. Capucine est une « Demoiselle Shreddeuse » qui ne veut plus avoir peur de rien.
Il y a six mois, elle apprenait qu’elle était atteinte d’un cancer du sein. Battante, cette dingue de CrossFit a décidé de continuer à bouger pour donner du rythme à ses journées. Mais aussi pour entretenir son mental et rester femme. Témoignage.
Le rugbyman et N°2 de la fédé de rugby a accepté de se confier sur la place du ballon ovale dans sa vie, mais aussi sur le rugby féminin. Un face à face percutant, sensible et chaleureux avec…sa fille.
Première femme à accéder aux instances dirigeantes de la FIFA depuis sa création en 1904, Fatma Samoura est de ces personnalités féminines qui font avancer le monde (sportif). Désignée « femme la plus puissante du sport mondial » par le magazine Forbes, elle s’engage avec force pour la parité dans le football.
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Entre le 1er et le 3 avril, préparez-vous pour un S’Cape Run antique. Cette nouvelle formule de l’escape game va vous transporter dans l’univers de la mythologie grecque. L’occasion idéale d’allier sport, esprit d’équipe et digital. On vous dit tout.
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Enfant, ado, enceinte ou jeune maman, Alexandra n’arrête jamais le sport. Gants aux poings ou baskets aux pieds, cette fille ÀBLOCK! s’épanouit dans l’effort et ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.
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