Louise : « Le sport, ce n’est pas que des podiums, c’est aussi une communauté. »Coach mentale, Crossfiteuse, 31 ans

Louise Retailleau : « Le miracle du coaching, c’est de faire passer les gens de la chenille au papillon ! »
La performance, l'échec, la résilience... elle a tout connu. À la suite d'un burn-out sportif, cette ex-infirmière a appris à se mettre en mouvement différemment. Devenue coach mentale, Louise Retailleau partage désormais son expérience pour aider les autres à toujours se relever pour mieux se révéler.

Propos recueillis par Claire Bonnot

Publié le 14 décembre 2023 à 18h45

« Je suis coach mentale dans le milieu sportif mais pas seulement, je travaille aussi pour des entreprises, une nouvelle activité après avoir été infirmière. C’est en fait une vraie continuité pour moi, je m’en rends compte car je suis toujours dans l’accompagnement relationnel, comme je l’étais auprès de mes patients. Je coache des sportifs amateurs, aujourd’hui essentiellement dans le milieu du CrossFit que je connais bien, ainsi que des employés au sein de diverses entreprises. Je travaille avec mon père : à moi la gestion du stress, le développement personnel, la performance et à mon père le leadership et le management. 

Le vrai miracle du coaching est d’aider les gens à prendre conscience de leur potentiel. Je dis toujours que c’est la métaphore de la chenille et du papillon. Le miracle c’est devenir le joli papillon que l’on doit être en trouvant la flamme en soi. 

J’ai opéré ma reconversion en 2022, après la naissance de ma fille. Le moteur a été un burn-out. Après avoir travaillé sur moi, j’ai eu envie d’accompagner d’autres sportifs, leur démontrer qu’on peut allier plaisir et performance, leur permettre de retrouver du bien-être, du sens, sans toujours penser à la performance qui, selon moi, doit s’inscrire dans un deuxième temps. Et ce grâce à la préparation mentale qui commence à émerger en France. 

Mon histoire avec le sport commence par la danse lorsque j’étais enfant, avec du modern jazz pratiqué pendant quinze ans. J’avais aussi testé la natation mais j’avais toujours fui les compétitions par peur de l’échec. C’est lorsque j’ai découvert le CrossFit que j’ai découvert aussi ce côté compétiteur chez moi, un côté que je ne soupçonnais pas. Le CrossFit, c’était en 2012 grâce à mon ancien compagnon qui était l’un des premiers propriétaires, en France, d’une box (nom que l’on donne à la salle de CrossFit, Ndlr). Avant, je me souviens, on s’entraînait sur des terrains de foot

Aujourd’hui, je pratique toujours cette discipline, mais pas du tout de la même manière. À un moment, je m’entraînais tellement que mon corps ne coopérait plus, j’ai d’ailleurs toujours des douleurs au dos, très typiques de la pression de la compétition. J’ai donc décidé d’arrêter, j’ai tourné une page. 

Pourtant, la beauté du CrossFit, c’est que quel que soit notre passé sportif, on se découvre un point fort et c’est très gratifiant ! J’adore regarder les gens travailler car le dépassement de soi se voit et c’est magnifique. On dit souvent aussi que c’est le plus collectif des sports individuels. On est tous liés par et dans l’effort, on s’encourage et c’est ça le sport, c’est le partage ! C’est d’ailleurs ces valeurs que je souhaite transmettre au travers de mon exposition* d’une vingtaine de dessins de Crossfiteurs : rappeler que le sport, ce n’est pas que les podiums, c’est une communauté, une vraie camaraderie qui s’installe, ça lie les êtres humains.  

Pour autant, il y a deux mondes dans le CrossFit : le monde bienveillant dont je parle et le monde des compétiteurs qui peut vite devenir malveillant lorsqu’il y a des enjeux de performance et donc de l’argent et des sponsors en jeu. Il faut faire attention à ne pas tomber dans le piège. 

Après ma lune de miel avec le CrossFit, j’ai connu un revers de la médaille : j’étais constamment dans la recherche de la perfection, de toujours plus de performance… À l’époque où j’ai débuté, il y avait beaucoup moins de filles que maintenant et dès qu’on avait un bon niveau en tant que femme, on était un peu dans le viseur, mises en avant quoi ! C’était très compliqué pour moi, je ressentais beaucoup de stress, jai alors commencé à mauto-saboter. Ce n’était pas de la faute des coachs, c’était moi, je voulais prouver que j’étais la meilleure, mon esprit était focalisé sur le résultat, la perf’.

Je me mettais tellement la pression, j’étais tellement dans la comparaison que je ne prenais même plus de plaisir dans ma pratique sportive. C’était totalement contre-performant au final. J’ai subi une prise de poids importante, un dérèglement hormonal, j’ai perdu confiance en moi, je pleurais tout le temps… C’était un cercle vicieux, un burn-out sportif. 

La première chose que j’ai faite a été de fuir les box et les réseaux sociaux. Puis, lorsque je me suis sentie mieux physiquement, en 2020, j’ai voulu reprendre et j’ai continué à m’entraîner pendant deux ans, mais là encore je pratiquais sans plaisir, j’avais la boule au ventre avant chaque entraînement. C’est quand j’ai changé de travail, en 2022, que je me suis dit que je ne pouvais pas être une maman constamment dans l’échec et la négativité. J’ai eu besoin de me reprendre en main : j’ai lu des livres autour de la préparation mentale et du développement personnel et j’ai fait appel à un préparateur mental pendant six mois, Frédéric Chevalier. Ça m’a vraiment aidé. C’est grâce à lui, à mon conjoint et à mon bébé que j’ai pu avancer.

Cette remise en question a duré cinq ans, c’est long mais je suis enfin plus en paix avec moi-même et je sais que je n’ai pas vécu ça pour rien. On se découvre dans l’adversité, je ne savais pas qui j’étais avant de faire du CrossFit et de vivre tout ça. Tout naturellement, moi aussi j’ai écrit un livre, « Révèle-toi à travers ta discipline ». L’idée, c’est vraiment d’engager les gens à y aller, que ce soit faire du sport ou se lancer dans toute entreprise ou relation qui les tentent et de voir ce qui se passe. Car même s’il y a des épreuves, on apprend toujours et on en sort grandi, je sais de quoi je parle !

Mon livre évoque la résilience et s’adresse à toute personne, sportive ou non. Ma mamie de 92 ans l’a lu et a été inspirée, vous voyez ! Nous passons tous par les mêmes étapes quand on se lance dans un projet, elles sont universelles. Le plus important est de se réaliser et de durer. Mon livre est un message d’espoir pour ceux qui ont peur de se lancer, je les motive, je les aide à ne pas baisser les bras. 

Il n’y a pas de secret : pour être bien dans sa vie, pour s’en sortir après un échec ou un burn-out comme j’ai pu le subir, c’est la volonté qui compte, mais c’est surtout celle de demander de l’aide, de changer les choses…. Récemment, une personne que je coache a fait un record sur une barre. Elle m’a dit : « C’est grâce à toi ! ». Je lui ai répondu qu’on avait planté la graine ensemble, oui, mais que c’est elle qui avait fait en sorte qu’elle pousse.

On a tous cette possibilité de résilience en nous, cette capacité d’avancer comme un bébé qui tente de marcher, tombe et se relève. Il faut trouver le côté combatif en nous et le coaching aide à ça aussi. Quand on est une femme, dans le CrossFit ou ailleurs, on porte ce poids de vouloir se montrer sous le meilleur jour et notamment côté esthétique. Moi-même, dans mon travail, je me bats tous les jours pour être crédible, pour qu’on m’écoute plutôt qu’on me regarde. Les femmes ont toujours des murs à sauter ou des barrières qui peuvent les stopper. Ce que je dirais à celles qui ont peur de se lancer, c’est de se détacher du regard des autres, car ne sont pas les autres qui vous feront avancer dans la vie, et de garder ses objectifs en tête.

Quand je me suis mise à écrire mon livre, j’ai fait face à de nombreux obstacles dont la légitimité. Quand j’étais à fond dans le CrossFit avant mon burn-out, j’avais un besoin presque obsessionnel d’avoir des likes sur mes réseaux sociaux. Aujourd’hui, même si ça n’a pas complètement disparu, moins je poste sur les réseaux, mieux je me porte.

Si on est en phase avec ses convictions personnelles, on n’a pas besoin de prouver quoi que ce soit aux autres. Foncez avec vos valeurs intérieures, osez briller et vous inspirerez ces autres, justement ! » 

  • « Révèle-toi à travers ta discipline. Bien plus qu’une simple histoire de performance, l’effort physique nous mène aussi vers la réalisation de soi » de Louise Retailleau
  • *Exposition du samedi 3 au vendredi 16 février, de 14h à 17 h sauf le dimanche, à l’Espace Rosa Bonheur, à Roissyen-Brie. 

Elles aussi sont inspirantes...

Guila Clara Kessous : « En montant à la corde, j'ai osé faire ce qui me freinait depuis des années. »

Guila Clara Kessous : « En montant à la corde, j’ai osé faire ce qui me freinait depuis des années. »

Formée à Harvard et par le théâtre, elle a plusieurs cordes à son art. Guila Clara Kessous, entrepreneure diplomatique, s’engage depuis plus de quinze ans pour les droits des femmes. Et voilà que le sport entre dans la danse en un geste politico-artistique : grimper à la corde. Une ascension symbolique, une allégorie de la difficulté des femmes à s’élever dans la société. Prenons de la hauteur.

Lire plus »
Lison Bornot : « Je veux mettre en avant l’Ultimate. C’est lui qui m’anime. »

Lison Bornot : « Je veux mettre en avant l’Ultimate. C’est lui qui m’anime. »

Avec sa sœur Éva, elle truste les premières places depuis 2015 en Ultimate. Membre essentiel de l’équipe de France, Lison Bornot est Championne d’Europe outdoor 2023 et championne du monde d’Ultimate sur sable 2023. La voici maintenant en piste pour les World Games, l’antichambre des JO, qui se déroulent en Chine, du 7 au 17 août 2025. Témoignage d’une fille pétillante devenue l’une des ambassadrices françaises d’un sport trop peu connu.

Lire plus »
Diane Servettaz : « Avec le vélo, j’ai compris que même si ça flanche côté mental, t’en as encore sous la pédale. »

Diane Servettaz : « Avec le vélo, j’ai compris que même si ça flanche côté mental, t’en as encore sous la pédale. »

En à peine trois ans, cette passionnée de vélo a décroché un podium sur 500 kilomètres et bouclé sa première course d’ultra, la fameuse BikingMan, en tant que première féminine. Carburant aux défis, pédalant sans relâche, surmontant tous les obstacles grâce à un mental d’acier, la Savoyarde n’a pas fini d’enfiler les kilomètres dans ce sport de l’extrême. En piste !

Lire plus »
Emelyne Heluin: « Je sais pourquoi je cours, pourquoi je lutte. »

Emelyne Heluin : « Je sais pourquoi je cours, pourquoi je lutte. »

Gymnaste jusqu’à son adolescence, Emelyne Heluin a dû raccrocher le justaucorps après une prise de poids inexpliquée et d’autres symptômes invalidants. Diagnostiquée d’une maladie endocrinienne chronique et évolutive, le SOPK, à l’âge de 17 ans, elle erre pendant des années entre perte de confiance en elle et détresse psychologique avant de retrouver le chemin du sport comme outil de santé. Ce sera la marche, puis la course à pied jusqu’à se lancer sur des marathons.

Lire plus »

Vous aimerez aussi…

Sasha DiGiulian

Sasha DiGiulian, la première de cordée qui donne de la “voie”

À tout juste 28 ans, l’Américaine est l’une des figures les plus célèbres du monde de l’escalade. Sasha DiGiulian gravit les montagnes à la force de ses bras et de son mental de roc. Icône de l’ascension, elle a pour ambition d’entraîner d’autres femmes dans sa cordée. Et ainsi de féminiser un milieu encore peu ouvert à la diversité.

Lire plus »
Caroline Ciavaldini : « En escalade, quoi qu’il m’arrive, c’est mon choix et je l’assume. »

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une championne attirée par les hauteurs (Caroline Ciavaldini sur notre photo), une passionnée de danse, 5 infos sur une patronne des parquets, une définition de saison et une compétition en roue libre, c’est le meilleur d’ÀBLOCK!. Enjoy !

Lire plus »
Fiona : « Le vélo m'a appris qu'on a plus de ressources que ce que l’on pense. »

Fiona : « Le vélo m’a appris qu’on a plus de ressources que ce que l’on pense.”

À 22 ans, Fiona Colantuono, future ingénieure en énergies renouvelables, a décidé de prendre une année sabbatique pour mener à bien un projet un peu fou : parcourir l’Europe de l’Ouest en vélo solaire. Un défi de 8 000 kilomètres pour aller au bout d’elle-même, mais aussi pour mettre en lumière des initiatives locales consacrées à la transition énergétique. On vous embarque !

Lire plus »
Lauriane Lamperim

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une ex-gymnaste devenue surfeuse (Lauriane Lamperim sur notre photo), une basketteuse emblématique, une parachutiste qui a fait du ciel son univers, une patineuse qui a bousculé l’ordre établi, une Simone qui a roulé sa bosse ou encore une championne de karaté qui se raconte dans notre podcast, c’était le menu de la semaine dernière sur ÀBLOCK! et c’est à (re)découvrir sans modération…

Lire plus »
Vercors Bike Festival 2023, tous en selle !

Vercors Bike Festival 2023 : en selle, les filles !

Les amateurs de VTT font déjà chauffer les pédales. Le week-end du 18 mai, le Vercors Bike Festival 2023 propose à toutes et tous de s’aérer la tête en s’en mettant plein les mirettes. Et les filles, même hautes comme trois pommes, vous êtes invitées à rouler toujours plus loin !

Lire plus »
Catherine Tanvier : « Avec Godard, nous parlions tennis avec passion. »

Catherine Tanvier : « Avec Godard, nous parlions tennis avec passion. »

Elle a été N°1 française de tennis dans les années 80, médaillée de bronze aux Jeux de Los Angeles en 1984 avant de mettre un terme à sa carrière sept ans plus tard, à 26 ans, en raison d’une blessure au genou. L’après tennis sera rude pour Catherine Tanvier dite « Cathy » qui trouvera un exutoire dans l’écriture. Son dernier ouvrage relate son expérience d’actrice aux côtés de Jean-Luc Godard.

Lire plus »
Nelofar Sorosh : « En Afghanistan, je me suis entraînée au marathon sous les jets de pierres. »

Nelofar Sorosh : « En Afghanistan, je me suis entraînée au marathon sous les jets de pierres. »

Elle est née à Mazar-i-Sharif, en Afghanistan. Première Afghane à avoir bouclé, en 2015, un ultra-marathon, elle est aussi celle qui a mis les femmes en mouvement dans son pays. Aujourd’hui, et après la prise de contrôle des talibans, Nelofar Sorosh poursuit, au sein de l’UNESCO, sa mission de défense des droits des femmes à travers le sport depuis les États-Unis où elle s’est réfugiée. Rencontre avec une femme intrépide et déterminée.

Lire plus »
Sophia Flörsch, la pilote qui vit pied au plancher

Sophia Flörsch, la pilote qui vit pied au plancher

Les sports motorisés et les femmes, ça a toujours été compliqué. Mais aujourd’hui, certaines se frottent à l’asphalte et n’hésitent plus à rouler sur les préjugés. En pôle position, l’Allemande Sophia Flörsch, une prodige du volant pour qui la ligne d’arrivée n’est rien moins que la Formule 1.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner