Émeline : « Le foot américain, ce n’est pas seulement physique, c’est mental et tactique. »Joueuse de football américain semi-pro, 30 ans, ingénieure-architecte
Le terrain du sport féminin, Émeline Dodard le connaît bien depuis qu’elle s’est jetée dans l’aventure du football américain. Passionnée par ce jeu tactique, elle met son esprit d’ingénieure au service de son poste d’attaquante. Et donne de la voix pour le médiatiser. Témoignage d’une fille aussi audacieuse que coriace.
Propos recueillis par Claire Bonnot
Publié le 31 mars 2023 à 8h53, mis à jour le 31 mars 2023 à 8h55
« Je pratiquais le rugby et c’est lorsque j’ai fait une année d’études au Canada dans mon cursus d’ingénieur-architecte que j’ai découvert le football américain. J’avais très envie de tester un sport US. Et après un cuisant échec au hockey -face à des enfants de 3 ans !-, j’ai opté pour le football américain. Mais en regardant les matchs, je ne comprenais rien…
On m’en a expliqué les règles et c’est ça qui m’a intriguée : ce n’était pas seulement un sport physique, mais un sport mental, tactique. J’ai trouvé une équipe féminine et je n’ai pas quitté le terrain. J’avais 22 ans.
Du primaire au lycée, j’ai fait du badminton, je suis allée jusqu’aux Championnats de France. Dans mon école d’architecture, j’ai aussi été coach de badminton mais le terrain me manquait…
Mes potes d’école d’ingé m’ont alors parlé de la super ambiance de l’équipe de rugby. Je me suis dit : pourquoi pas un sport d’équipe ?
Très vite, je me suis sentie mieux intégrée dans mon école d’ingénieur. Et c’est au cours de l’année d’échange que j’ai découvert le football américain. Ça a vite détrôné le rugby : je n’aimais pas le fait de devoir toujours plaquer les adversaires quand, au football américain, tu peux choisir une position. Ça correspond à mes aptitudes sportives et à ce que j’aime.
Moi, je suis receveur dans l’équipe. C’est comme les ailiers au rugby, je suis en attaque. Mon but est de catcher le ballon lancé par le quarterback, de courir très vite pour aller scorer, marquer. Il faut savoir se détacher de la défense, être explosive et rapide.
Aujourd’hui, je suis au Flash de la Courneuve en banlieue parisienne et, avant, pendant quatre ans, j’étais dans l’équipe féminine des Dragons de Paris, un club associatif avec aussi des équipes masculines. Avant la Covid, j’ai eu la possibilité – avec ma copine qui partira aux États-Unis dans l’équipe des Utah Falconz, une ligue semi-pro qui cherche à devenir professionnelle- de partir en Suède rejoindre une équipe féminine amateur.
C’était vraiment une bonne opportunité parce que, là-bas, ils ont beaucoup d’équipes féminines et plusieurs séries. Ça permet de jouer souvent, de se confronter et donc de progresser. En France, on n’a qu’une seule division.
Il faut savoir que, dans le monde, seuls les États-Unis ont un circuit professionnel pour les équipes féminines, la NWSL (National Women’s Soccer League), et semi-pros au Canada. En France ou en Suède, nous ne sommes pas professionnelles, mais seulement défrayées.
Je dois me débrouiller pour me nourrir et vivre au quotidien. C’est tout un investissement. Et même aux États-Unis, où le circuit pro existe pour les femmes, les Américains croient encore que les filles ne jouent pas…En revanche, ils connaissent l’Extrême Football League où les joueuses sont en lingerie !
La médiatisation doit vraiment aider à faire avancer les choses pour que les sportives puissent accéder à un circuit professionnel et avoir une possibilité d’en faire leur métier.
Mon rêve sportif serait de devenir pro, bien sûr. Mais pour l’instant, c’est encore compliqué d’aller aux États-Unis rien que pour faire une partie de saison, alors… C’est de la débrouille !
Moi, clairement j’ai deux vies. Je fais ma journée comme archi et, au plus tôt, soit 19h/20h, je file à la salle de sport pour m’entraîner avec mon coach sportif.
C’est comme si j’avais deux boulots mais le sport n’est pas payé. J’ai même des frais supplémentaires. Mais si je veux progresser, je n’ai pas le choix.
C’est vraiment devenu plus qu’une passion. J’ai quatre entraînements de musculation par semaine et je fais aussi de l’athlétisme pour progresser en vitesse, sans compter les entraînements de football américain le weekend. Et puis, il faut compter aussi le temps d’apprentissage de la partie purement stratégique : on est vraiment comme à l’école, avec les tableaux noirs, on apprend la théorie.
Avant un match, je suis toujours un peu stressée parce que tout repose sur la cohésion d’équipe. Il faut savoir jouer ensemble. Mais dès qu’on est parties dans la première action, j’oublie tout et chaque action est très rapide, c’est un sport très explosif, je me lance, je ne réfléchis pas. Quand j’ai le ballon, je fais le job !
Il y a toujours beaucoup d’émotion parce qu’on s’encourage toutes sur le terrain, c’est motivant. Et puis, c’est incroyable comme il peut y avoir des revirements de situation et, ça, c’est vraiment lié au mental de l’équipe.
On a eu un match terrible dans lequel on a perdu avec un score catastrophique. Deux semaines après, devant 120 000 personnes, on n’était pas chez nous, à domicile, on replonge en début de match… Eh bien, on s’est regroupées, on a communiqué, on a décidé d’oublier la défaite précédente et de repartir à zéro. Et on a marqué. Les adversaires ont juste égalisé avant la fin du match. Ce qui change tout, c’est cet esprit de battante ! Et toutes les joueuses de même niveau ont les mêmes compétences.
Ce que j’aime aussi dans ce sport, c’est qu’il faut se gérer soi-même et aider ses coéquipières. Quand j’ai débuté en sport, je faisais du badminton, un sport individuel donc au début je restais de mon côté, je craignais un peu l’esprit sport Co et puis j’étais très compétitive en mode solo ! La seule fois où j’ai connu un sport collectif, c’était le foot avec les garçons à l’école et je n’ai jamais été bien intégrée donc je n’avais pas une super image des sports d’équipe.
On s’entraîne aussi avec les garçons juniors en football américain. Au début, tu sens qu’ils ne veulent pas jouer contre toi ou qu’ils se disent qu’ils vont forcément te battre.
C’est vrai que, souvent, ils courent plus vite mais, nous les filles, on est plus tactiques, plus explosives, on analyse mieux le jeu. À ce moment-là, comme ils sont compétitifs et si tu les bats, ça les intéresse de jouer avec toi.
Quand je me suis mise au football américain, je n’ai pas du tout eu à faire face à des préjugés du style : « C’est un sport de mecs et de bourrins ». C’est plutôt l’inverse même ! Quand j’en parle, on me dit « Waouh ! Tu as le casque et les épaulettes ? ».
Les gens sont très curieux. Et puis, au foot américain, c’est assez drôle de constater que chaque fille garde son look et son attitude – ultra-féminine ou pas – sous « l’armure » casque-épaulettes. Certaines sont en mode guerrière et d’autres super maquillées quand elles enlèvent leur casque.
J’ai fait du rugby en école d’ingénieur et, pour moi, ça n’a pas été une expérience concluante. En découvrant le football américain, j’ai constaté que c’était là deux univers très différents même si ce sont deux sports qui semblent avoir beaucoup de points communs.
Au foot américain, par exemple, on a toutes des positions différentes, ce qui fait qu’il y a plusieurs types de morphologies sur le terrain. Ce sport demande des compétences physiques différentes.
Aussi, on vient de métiers et de milieux différents. Au football américain, il y a un tel besoin de variétés que tu trouves forcément ta place !
Le football américain m’a permis de m’affirmer dans mon travail. Grâce à l’apprentissage des matchs en équipe, quand je travaille en groupe, j’accepte d’entendre les idées des autres, je ne prends pas mal les remarques et je sais m’exprimer clairement. Je sais aussi retourner l’issue de situations qui paraissaient insolvables, un peu comme lors de matchs qui ont mal commencé…
J’arrive à repartir à zéro : je me dis que « ça ne peut pas être pire », je retrouve mon calme et, généralement, je parviens à obtenir ce que je veux.
Comme lors d’un match, il faut savoir prendre du recul sur les situations et garder son sang-froid. Au boulot, j’ai réussi à obtenir gain de cause sur un gros dossier alors que la situation était bloquée.
Dans ce milieu, quand tu es une jeune femme, on peut avoir l’impression qu’il est facile de te mener en bateau mais je dis ce que j’ai à dire et c’est grâce à ma formation sportive. Comme disent certains de mes collègues : « Toi, si tu viens en réunion avec ton casque, tu vas rembarrer tout le monde » !
Et puis aussi, quand tu es quasiment sportive à plein temps, tu deviens hyper organisée. Du coup, je fonce au boulot aussi, je mets les bouchées doubles et j’entraîne tout le monde dans ce rythme !
C’est une expérience incroyable aussi parce que tu voyages à travers le monde, tu rencontres un tas d’autres personnes. On grandit beaucoup plus vite en côtoyant d’autres mentalités. Ça te permet de prendre du recul sur toutes les situations.
Pour les futures générations de femmes qui joueront au football américain, ce qui permettra de faire avancer les choses, c’est la médiatisation. Une médiatisation qui séduira plus de sponsors, donc de l’argent pour professionnaliser le sport au féminin.
J’essaye d’y contribuer à ma petite échelle en utilisant les réseaux sociaux et notre nouvelle chaîne YouTube avec ma copine Sophie. Parce que personne, et surtout pas les filles, ne sait que le football américain déclinée au féminin existe et partout dans le monde ! »
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Aussi solaire que son Sud natal et dopée à l’énergie du sport-passion, elle envoie du lourd. Mais désormais, c’est tout en douceur. Ou presque. La coach Jessica Vetter, ex-gymnaste et championne de CrossFit, désire aujourd’hui aider les autres à se sentir bien dans leur corps, sans jamais se départir de son humour communicatif. Les muscles n’ont qu’à bien se tenir !
Le foot, pour elle, c’est une longue histoire. Elle s’appelle Karine Van den Eynde et a quitté sa Belgique natale il y a quinze ans pour s’installer en France. Ex-joueuse de football, elle a monté une équipe destinée aux femmes de plus de 50 ans en Dordogne. Dans le but de renouer avec le ballon rond, celui qui lui donne des ailes.
Elle a donné un an de sa vie pour la Transat Jacques Vabre qui vient de s’élancer du Havre. Elle, c’est Charlotte Cormouls-Houlès, 27 ans, navigatrice passionnée qui n’aurait jamais imaginé pouvoir s’embarquer dans pareille aventure. Nous l’avons rencontrée deux jours avant son grand départ. Avec sa co-skippeuse Claire-Victoire de Fleurian, la voilà à flot pour voguer vers un rêve devenu réalité.
Elle a déjà eu mille vies. Océanographe, éducatrice sportive en voile légère et croisière avant de travailler sur un chantier d’IMOCA pour finalement se lancer dans le commerce de voiles. Hélène Clouet, 34 ans, n’a de cesse, à travers ses aventures, d’assouvir sa passion pour la navigation. Engagée au départ de la Mini Transat en 2021, la Caennaise, Rochelaise d’adoption, a monté une association, « Famabor », afin d’inciter d’autres filles à se lancer !
En juin dernier, elle est arrivée première de l’Ironman de Nice dans la catégorie 40-44 ans, la voilà maintenant en route pour les Championnats du monde de la spécialité qui se dérouleront à Hawaï le 14 octobre. Adeline Trazic, professeure d’arts plastiques, n’a qu’une ambition : franchir la ligne d’arrivée et faire le plein d’émotions sur la terre du triathlon.
Amoureuse du ballon rond, c’est elle qui le dit. D’aussi loin qu’elle se souvienne, au Canada comme en France, Jessica Silva a toujours été une footeuse passionnée. Avec ses joueuses du FC Metz, cette entraîneure ambitieuse se bat pour son club mais aussi pour le développement du foot féminin.
Elle a tout quitté pour vivre de sa passion pour le sport. Céline Martin officiait dans le domaine de l’informatique jusqu’à ce que la découverte du CrossFit en décide autrement. Aujourd’hui coach sportive, elle a fait le pari de lancer sa propre salle à Limonest près de Lyon.
À l’âge de 8 ans, elle est entrée dans la vague. Aujourd’hui, à 19 ans, Oïana Trillo voue une passion sportive au sauvetage côtier. En équipe de France ou au pôle sport de Montpellier, elle fait figure d’espoir de la discipline. Témoignage d’une fille qui se sent comme un poisson dans l’eau.
Depuis ses 9 ans, elle fonce sur sa moto. Balayant d’un revers de gant en cuir les commentaires sexistes, Justine Pedemonte, 15 ans au compteur, se balade de circuits en circuits et ramène un paquet de trophées à la maison. Témoignage d’une fille qui vit à 200 à l’heure.
Tout comme son compagnon, elle s’est élancée ce week-end pour une nouvelle Grande Odyssée. La musher française Aurélie Delattre, tenante du titre de la catégorie Limited, a toujours le même objectif : gagner, en mettant le plaisir de ses chiens au coeur de l’aventure. Rencontre avec une reine des neiges.
Perdue dans un tourbillon, égarée dans un trop-plein de vie, Adeline s’est (re)trouvée grâce au yoga. Généreuse et légère, elle offre désormais les clés de la connaissance de soi à tous ceux qui ont la même quête. Douceur, apaisement, alignement… Chut, elle raconte.
Elle s’appelle Aurélie Hoffmann alias Lil’Viber. Mais sur les circuits, on l’appelle aussi « Wonder Lili ». Elle, c’est une super héroïne de la bécane qui se déguise comme ça lui chante pourvu que ce soit haut en couleur. Cette nana qui affole les chronos casse les codes à toute berzingue. Ultra féminine, elle est une motarde jusqu’au bout des ongles. Faites de la place !
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