Marie-Laurence : « En retrouvant le terrain du sport, j’ai retrouvé comme une lumière en moi… »Pratiquante de football américain, commerciale, 36 ans

Marie-Laurence
Marie-Laurence est totalement ÀBLOCK ! sur le sport depuis le plus jeune âge. Avec lui, elle a trouvé sa bouée de sauvetage, un moyen de canaliser son énergie. Mais c’est avec le football américain qu’elle a définitivement plaqué au sol tous ses conditionnements de vie : maintenant, le sport est un pur plaisir dans lequel elle s’engage à fond, comme une professionnelle. Elle souhaite passer le ballon aux plus jeunes, filles comme garçons : le sport peut changer des vies !

Propos recueillis par Claire Bonnot

Publié le 28 juin 2021 à 12h17, mis à jour le 16 janvier 2025 à 12h36

« J’ai débuté le sport assez tard, lorsque j’étais au collège, en 6e ou 5e. Je suis haut potentiel, donc plutôt agitée, il me fallait un sport qui ait du sens pour moi et qui me défoule. On m’a conseillé le judo.

Comme je « mettais des bonnes droites », mon entraîneur a été impressionné et a évoqué la possibilité que je fasse sports études. Ça m’a enthousiasmée parce que je n’avais pas eu une enfance simple.

Le sport m’offrait une échappatoire, la possibilité de partir de chez mes parents. Comme je suis quelqu’un de perfectionniste, je m’entraînais à fond en sports études et j’ai enchaîné en Pôle Espoir à Nantes, puis à Rennes.

Je vivais pour le sport, pour le judo : je m’entraînais deux fois par jour, j’allais courir tous les midis… J’avais un bon niveau sur le plan national, mais je délaissais complètement les études. C’est vers l’âge de 18 ans que j’ai eu envie d’autre chose.

Quand on est sportif de haut niveau, on ne peut pas sortir, pas boire, pas faire la fête et j’avais un peu envie de vivre, de voir s’il y avait une autre vie possible. Alors, j’ai arrêté, j’en avais un peu marre de faire des sacrifices.

Surtout, qu’à l’époque, on s’entraînait un peu de façon « bourrine ». On n’avait pas de kiné : dès qu’on se blessait, on se remettait le plus vite possible sur le tatamis. Ce n’était pas comme aujourd’hui où les sportifs sont très suivis. Et puis, le sport était devenu une trop grosse obsession pour moi.

Par exemple, plusieurs jours avant la compétition, pour parvenir à rentrer dans ma catégorie de poids, je ne mangeais plus ou je dormais avec un duvet pour perdre des grammes. À un moment donné, j’ai perdu le goût au sport.

J’ai repassé mon Bac en candidat libre et je me suis mise à bosser à côté. J’ai poursuivi en fac de droit et je suis devenue maman. Avec tout ça, j’ai changé de vie et je n’ai plus fait de sport pendant six ans. Pour autant, je restais accro au sport à la télé et je savais que ça me manquait.

Puis, un déclic, je me suis rappelée mon envie de faire de la boxe. Mes parents n’avaient jamais voulu me laisser pratiquer ce sport de combat, ils trouvaient ça trop violent. Je m’y suis mise à 28 ans. J’ai repris l’entraînement sportif au quotidien et je me suis rendu compte que c’était ça que j’aimais vraiment faire dans la vie. Le sport est dans mon ADN.

J’ai été une maman qui travaillait de 22 à 28 ans. C’était une vie « normale » qui ne me convenait pas du tout. J’étais comme « morte », en quelque sorte. En me mettant à la boxe, en retrouvant le terrain du sport, j’ai retrouvé quelque chose en moi, comme une lumière…

Ce n’était pas de tout repos. La boxe n’est pas un sport anodin, surtout que je suis une sportive acharnée. Dès le deuxième combat, j’ai fait une commotion cérébrale, j’ai stoppé quelques mois.

Mais, malgré ça, j’avais enfin trouvé une rigueur qui me manquait dans la vie : cette exigence du sport ! Pour m’y remettre en toute sécurité et être bien drivée, j’ai donc pris un coach dans une salle de sport. Une nouvelle vie plus équilibrée avec le sport commençait pour moi…

L’an dernier, j’ai trouvé ma voie. J’avais toujours voulu faire du football américain. Quand je me suis lancée, ça a été une révélation : enfin, je faisais du sport pour le sport, pas pour une autre raison. Le judo, c’était pour échapper à ma famille ; la boxe, c’était un défouloir…

Sur le terrain, pratiquer le football américain… j’aimais vraiment ça. Ça m’a fait bizarre parce que c’était la première fois que je faisais quelque chose à fond, pas pour le principe de bien faire les choses, mais pour le bien que ça me procurait.

J’ai intégré une équipe féminine amateur. C’est super sympa, mais trop tourné loisir pour moi. À côté, j’ai donc tout fait pour échanger sur les réseaux sociaux avec des professionnels : je rejoins, en septembre prochain, l’équipe féminine de Valence, en Espagne.

Je me lance en quelque sorte dans une carrière sportive, mon rêve. Il était temps ! J’ai trouvé un travail de commerciale là-bas et des sponsors pour m’accompagner dans mon projet.

Le sport, ça m’a vraiment éduquée, au travers de ce que m’ont appris et apporté mes différents entraîneurs, mais aussi de la vie en général. J’ai vécu une grande partie de mon enfance dans le sport. Grâce à ça, j’ai appris à être déterminée, humble, dans la recherche constante de l’effort.

Comme je suis quelqu’un qui a constamment besoin d’être stimulé, de rebondir, d’avoir des objectifs, le sport m’a offert la chance de ma vie.

Je trouve, qu’en ce sens, le système américain est génial parce qu’il permet à des jeunes en échec scolaire de se créer une vie professionnelle par le sport. J’ai moi-même envie d’utiliser mon expérience pour témoigner auprès des jeunes et les engager à aller dans une voie sportive s’ils aiment ça. Et aussi pour les jeunes filles qui veulent être sportives !

De plus en plus de filles prennent la parole aujourd’hui et témoignent sur leur parcours personnel avec le sport. Ça aide pour les prochaines générations de femmes ! J’aimerais avoir cette notoriété pour aider.

Il y a des super initiatives : le Club des Enfants de la Goutte d’Or, par exemple, fait beaucoup en matière d’insertion des jeunes filles dans le football.

Les mentalités dans la société française sont encore lentes à évoluer. Surtout quand on est une fille et qu’on veut faire certains sports. Ma petite fille de 6 ans fait de la boxe et du taekwondo et je sens bien que parfois les gens ne comprennent pas… Tout est trop connoté.

Les petites filles doivent pouvoir faire ce qu’elles veulent. La France doit sortir des sports classiques, on a vingt ans de retard sur les Etats-Unis par exemple. Ici, on a les meilleurs théoriciens du sports mais pas les bons accompagnements : sponsors, mentalités…

Moi, j’ai pu être très complexée par ma musculature. On m’a déjà dit que je ressemblais à un garçon, mais jamais dans le milieu sportif. Entre sportifs, on parle le même langage. Mais c’est un microcosme, on a une vie particulière et ce n’est pas toujours facile de composer avec le reste de la société.

Même à la salle, parfois, on me demande pourquoi je m’entraîne autant, on me dit que se faire défoncer sur un terrain du football américain, c’est dommage pour une femme.

Je ne peux tout simplement pas concevoir le sport comme un sport loisir. Je ne m’entoure plus que de sportifs, de gens qui ont les mêmes objectifs que moi. C’est vrai que, dans ma famille, on me voit un peu comme une extraterrestre, mais j’assume.

C’est ma manière de fonctionner depuis toujours : je fais les choses à fond ou je ne les fais pas du tout. Ma seule limite, c’est mon corps. Je ne veux pas avoir de regret, je veux aller au bout de moi-même !

Ce que je dirais aux filles qui n’osent pas se lancer dans le sport ou dans certains sports dits « réservés aux mecs » ? Faites ce que vous avez envie de faire au plus profond de vous, votre vie vous appartient ! Le sport est un moyen de s’affirmer et de découvrir qui l’on est. Vous découvrirez un tout nouvel univers et deviendrez une nouvelle personne. »

Retrouver la vie sportive de Marie-Laurence sur son compte Instagram : @marielolife

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