JujuFitcats « Le sport a été ma porte de sortie de l’anorexie. »

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Elle affiche des mensurations sociales impressionnantes : 3,2 millions de followers sur Tik Tok, 2,3 millions sur YouTube, autant sur Instagram ; près de 45 000 abonnés sur Twitter et sur Facebook. Au total, près de 10 millions d’ados suivent les aventures de Justine alias JujuFitcats. Tout à la fois admirée, méprisée, jugée, elle est à 25 ans, de celles que l’on appelle « les influenceuses ». Adoubée (aimée) par un autre poids lourd des réseaux sociaux, le coach Tibo InShape, cette girl next door fait la promo du sport à sa façon. Conversation avec un « petit chat » pas si "fit" que ça et qui, désormais, le revendique haut et fort.

Publié le 18 septembre 2020 à 10h19, mis à jour le 29 juillet 2021 à 14h59

Petite puis ado, tu faisais de l’équitation. C’est bien loin de la musculation ou du CrossFit que tu pratiques aujourd’hui…

Ça oui ! J’ai commencé l’équitation lorsque j’avais quatre ans et j’en ai fait jusqu’à mes dix-huit ans. J’étais amoureuse des chevaux. Avec eux, je ne me sentais jamais seule. On apprend le respect, la bienveillance. On apprend à s’occuper de quelqu’un d’autre que soi. 

Ceci dit, je pratiquais d’autres sports, souvent pour faire comme mon frère qui a dix ans de plus que moi. J’ai fait du tennis, du taekwondo. Puis, je me suis lancée dans la danse, j’aimais bouger.

Mais l’équitation, c’était ma passion. J’ai participé plusieurs fois aux Championnats de France de concours complet. Il y avait une ambiance particulière, on se retrouvait entre copines dans des endroits loin de chez nous. J’étais animée par ça, les compétitions me motivaient à m’entraîner plus dur.

J’ai toujours eu un tempérament de compétiteur, pas pour écraser les autres, mais pour devenir meilleure, pour me dépasser. Pour cela, j’ai besoin d’avoir un objectif car je ne sais pas faire de sport juste pour pratiquer, j’associe la compétition au plaisir et pour moi, le plaisir provient de la compétition. Sinon, j’ai du mal à m’entraîner. 

JujuFitcats
©DR/JujuFitcats

Tu as pourtant laissé tomber l’équitation après l’adolescence, pourquoi ? 

L’équitation est un sport qui prend beaucoup de temps. Un cheval, il faut s’en occuper tous les jours et pas seulement lors des entraînements. J’étais en licence de biologie santé, option biochimie et nutrition sportive. Quand je n’étais pas en cours, j’étais à la bibliothèque.

C’est devenu compliqué, je n’y trouvais pas moins de plaisir, mais je n’avais malheureusement plus le temps de m’occuper correctement de mon cheval et ce n’était donc pas possible pour moi de continuer. Comme j’ai beaucoup de mal à faire les choses à moitié, j’ai arrêté.

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©DR/JujuFitcats

Tu dis alors avoir connu une période à vide… 

Les études scientifiques, j’adorais ça, mais il fallait m’y consacrer à 100 %, je commençais à étouffer. J’avais besoin de bouger, de me vider la tête. D’autant que j’avais une relation difficile avec ma maman.

Elle était très attentive à mon poids, à ce que je mangeais. Je sentais aussi qu’elle souhaitait que je sois très féminine, mais j’avais un rapport compliqué à mon corps. Je sais aujourd’hui que c’était lié à son histoire, qu’elle ne pensait pas mal faire, mais pour moi, à ce moment-là, c’était pesant, ça m’empêchait de vivre pleinement. 

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©DR/JujuFitcats

Tu t’es alors mise à la course à pied, mais sans plaisir…

J’ai commencé à courir pour pouvoir manger tout ce qui me tentait sans avoir peur de grossir. À la maison, on mangeait sainement, équilibré ; je n’ai pas été élevée aux gâteaux, bonbons ou sodas… J’avais un poids « classique » par rapport à ma taille, un poids qui me permettait d’être en bonne santé à l’époque : je pesais 55 kilos pour 1,60m. Pourtant, je ne me sentais jamais assez bien, et je n’étais pas musclée.  

Avec la course, j’ai commencé à perdre du poids. Je me disais : « C’est cool, je vais avoir le physique que maman veut. » J’ai commencé par 42 kilomètres par semaine, l’équivalent d’un marathon. Mais je n’ai jamais couru par plaisir, seulement parce que je devais le faire. 

Et ça a dérapé ?

Petit à petit, oui. Je courais de plus en plus et je perdais de plus en plus de poids, jusqu’à passer de 55 à 40 kilos, mais pour moi, ce n’était encore pas assez.

Je me rendais compte que ça n’allait pas, mais je n’arrivais pas à régler le problème. J’étais tombée dans l’anorexie mentale. Ça devenait dangereux. J’ai été suivie par une psy, ça me faisait du bien, mais quand le déclic ne vient pas de toi, ça ne fonctionne pas. 

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©DR/JujuFitcats

Finalement, comment est venu ce déclic ?

J’ai déménagé au Canada pour ma dernière année d’études. Là-bas, il y a une vraie culture sportive. C’est ce qui m’a aidée. Je me suis inscrite dans une salle de sport, j’ai réappris à manger, en commençant par réintégrer les féculents, l’huile d’olives, à préparer des plats gourmands.

J’avais envie de reprendre du poids, mais c’est ce qui fait le plus peur quand on est anorexique. Ça a été long, l’anorexie est une maladie qui prend du temps à guérir, je me bats encore aujourd’hui contre ses vieux travers.

Donc, j’ai choisi de reprendre du poids tout en me musclant, afin de me sentir mieux. Petit à petit, je m’en suis sortie, pour aller vers celle que je voulais vraiment être, sans vouloir à tout prix plaire à quelqu’un d’autre.

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©DR/JujuFitcats

Tu as laissé tomber le running pour la musculation ? 

Oui, comme je le disais, je ne courais pas pour les bonnes raisons et la musculation a été une évidence : les filles n’étaient pas maigres, elles étaient musclées. 

J’ai poursuivi la musculation lorsque je suis rentrée en France en 2016. J’avais 21 ans et dans l’idée de participer à une compétition de culturisme. J’ai rencontré un coach et on a préparé la compétition pour l’année d’après, modèle bikini. Ce qui voulait dire huit mois de prise de masse puis quatre mois de “sèche” pour sculpter mon corps.

Ça me motivait de faire tout ça, rien à voir avec l’anorexie, au contraire, ça a été la fin de mon combat. Je me disais : « Je suis maître de moi-même, je contrôle mon corps, c’est moi qui décide. » J’étais devenue plus forte.

Après la compétition- que j’ai gagnée d’ailleurs, mon idée était de revenir à un poids normal, comme la touche finale pour mettre fin à l’anorexie.  

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©DR/JujuFitcats

Tu n’as jamais eu envie de refaire des compétitions de culturisme ?

À la fin de cette compet, j’avais plutôt envie de rester sur cette note-là. Je voulais simplement me prouver que j’étais capable de relever le défi une fois dans ma vie. J’ai su que physiquement et mentalement, je pouvais aller loin.

À la fin de la compétition, j’étais très maigre et c’est difficile à supporter quand on s’est battue pour ne plus l’être. Mon physique était beau, mais seulement sur scène. Je voulais donc retrouver un corps musclé, mais plus en chair. Après, je mentirais si je n’avouais pas que j’ai eu des moments de doute lorsque j’ai repris du poids…

Mais j’ai continué la muscu pendant un an, puis je suis passée au CrossFit. 

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©DR/JujuFitcats

Deux sports qui se complètent, mais qui n’ont pas la même finalité… 

La musculation, c’est pour l’esthétisme, c’est l’art de se forger un physique, comme un artiste qui façonne chaque partie de son corps. Le CrossFit, c’est complètement autre chose. L’esthétisme, c’est bien la dernière chose qui nous importe. Là, le but est d’être complet : un bon cardio pour un cœur qui fonctionne bien, de la force, de l’explosivité, de la souplesse… Cela permet d’être un athlète à part entière. Et puis, il y a une grosse part de mental. Quand on est capable de se pousser au-delà de ses limites, c’est chouette.

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Quand on pratique le CrossFit, le corps devient moins « fit », plus robuste, ça te plaît finalement ?

Ça fait deux ans que je pratique et je suis passionnée par ce sport. Depuis, c’est vrai, j’ai des épaules plus larges, des trapèzes plus importants, une taille moins fine, des cuisses plus développées. Et c’est un physique qui me plaît.

Au final, c’est le CrossFit qui m’a sortie de tout, des problèmes avec mon corps, des troubles alimentaires. On se dépense tellement, on a besoin de manger. Donc, je ne compte plus mes calories car j’ai besoin d’énergie.

Tu défends le naturel, tu parles cash, tu te montres sans maquillage, avec tes défauts… Cette exposition médiatique sur les réseaux sociaux doit avoir un impact sur ta vie. Comment on parvient à prendre de la distance ?

J’ai été très sensible au regard des autres pendant des années, j’ai appris à me créer une carapace, à me blinder contre les critiques, pour ne pas retomber là-dedans.

J’essaye de démontrer que les filles peuvent être aussi impressionnantes que les garçons, qu’elles peuvent être meilleures et que ce n’est pas un problème. Un homme ne doit pas ressentir de honte à être battu par une femme, tout simplement parce qu’il n’y a pas de raison qu’une femme ne puisse pas être plus performante qu’un homme. 

JujuFitcats« Le sport a été ma porte de sortie de l’anorexie. »
©DR/JujuFitcats

Tu es féministe ?

Je ne dis jamais que je suis féministe car je ne veux pas être mise dans une case. Je ne mange pratiquement plus de viande, mais je ne me présente pas pour autant comme végétarienne ou vegan.

Je défends le sport au féminin parce que le sport aide la femme à s’épanouir. Et peu importe qui elle est et comment elle est. La société fonctionne encore sur des clichés : une femme doit être grande, mince, avec de jolis seins, une taille fine… quelle forme il faudrait donc avoir ? Ce sont des critères imposés et absolument irréalisables.

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Ta passion pour le CrossFit, tu la partages avec ton compagnon, le coach Tibo InShape, c’est important pour toi de faire du sport avec lui ?

Aujourd’hui, avec Tibo, on fait des compet de CrossFit en team homme/femme, on se pousse l’un l’autre, on croit l’un en l’autre. Je vis des moments intenses, de partage, avec l’homme que j’aime, c’est génial et gratifiant de rendre l’autre fier de soi.

Le sport nous rapproche : j’ai tendance à garder les choses au fond de moi, Tibo est la première personne avec qui j’ai appris à communiquer.

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©DR/JujuFitcats

Tu défends l’idée qu’on ne doit pas pratiquer un sport parce qu’il est à la mode, mais chercher plutôt celui qui nous plaît réellement. Pourtant, ce que tu fais, le CrossFit, la musculation, influence logiquement celles et ceux qui te suivent…

Le hic avec les réseaux sociaux, même si c’est mon métier et que ça m’a aidée, c’est que les gens pensent que tout le monde doit faire la même chose, comme le fitness parce que c’est tendance, mais je n’impose aucune règle.

Mon but est de motiver à faire du sport, peu importe lequel. Je ne tiens pas à ce qu’ils pratiquent tous le CrossFit ou la muscu parce que j’en fais, mais que chacun trouve le sport qui lui convient, pour souffler, penser à autre chose, être en paix avec soi-même.

Le corps, le mental, il faut les maintenir en bonne santé et pour ça, il faut bouger. Si on est motivé par un sport qu’on aime, on aura envie d’y aller. Même si on ne peut pas être à fond tout le temps, c’est la clé qui permet d’être régulier. 

D’ailleurs, les gens que je suis sur les réseaux sociaux font des sports très différents, je les suis parce que leurs contenus me parlent et me permettent d’avancer. Ils partagent des valeurs qui sont les miennes, ils me font sortir de ma zone de confort, je n’ai pas une idole, mais plusieurs, qui vont m’inspirer pour des raisons différentes.  

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®DR/JujuFitcats

Quand on devient une influenceuse, on doit être un exemple ?

On doit défendre des valeurs en tout cas. J’essaye de partager mon dynamisme, mon optimisme, afin de pousser les gens à se réaliser car je sais qu’on peut changer si on le souhaite, qu’on peut devenir ce qu’on a toujours rêvé d’être. Et le sport, c’est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour y arriver.

Mais un exemple, je ne sais pas… Parce que je ne suis pas un bon exemple, justement. Je m’entraîne à raison d’une heure trente ou deux heures quotidiennement, six jours par semaine, parfois deux fois par jour, pour progresser et me challenger. Ce n’est pas forcément un exemple à suivre.

Mais c’est mon métier. Je ne peux pas le faire en dilettante. Je suis une sportive qui veut partager ses émotions, ses sensations. Je crois qu’au-delà de ma notoriété, au-delà de ma présence sur les réseaux sociaux, je suis juste ça : une sportive. 

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