Romane Baud « Avec le combiné nordique, je réalise un rêve, je vole ! »

Romane Baud : « Avec le combiné, je réalise un rêve, je vole ! »
À seulement 17 ans, Romane Baud a confirmé qu'en combiné nordique, elle fait partie des meilleures, héritage familial oblige... Rencontre avec une prodige qui compte bien incarner l'avenir de la glisse tricolore.

Par Alexandre Hozé

Publié le 20 février 2024 à 22h04

Tes débuts sur les pistes, c’est une histoire de famille ? 

Oui, mon père a fait du haut niveau et mon frère en fait actuellement, donc je les ai suivis sur les skis. C’était assez naturel, j’ai commencé le ski de fond à 7 ans. 

Mais j’ai fait plein d’autres sports avant de choisir la glisse. La danse, la gym… Mais le ski m’a particulièrement attirée. La glisse m’a toujours plu, et quand on baigne dans un environnement où tout le monde skie autour de toi, forcément, il y a plus de chances que tu t’y mettes aussi ! 

Et donc tu as commencé par le ski de fond… 

C’est ça, puis j’ai enchaîné sur le biathlon jusqu’à mes 13, 14 ans. Je faisais déjà des courses et tout ça… Mais je ne me faisais pas vraiment plaisir en compétition. Et en 3e, j’ai commencé le combiné*. J’ai toujours connu et vu le saut, comme mon père et mon frère en font. 

Je n’avais pas forcément envie de faire comme eux, mais en fin de compte, je pense que c’est une discipline assez exceptionnelle. J’ai essayé, et ça m’a plu ! 

Est-ce que dès tes premières courses, la compétition a été importante pour toi ? 

Le plaisir passe avant tout, mais c’est vrai que j’ai toujours eu l’esprit de compétition. Je me suis d’ailleurs lancée dès petite. Mais je ne sais pas si, plus jeune, c’était très important pour moi de gagner. En tout cas, maintenant, ça l’est ! 

Comment s’est positionné ton entourage lors de tes débuts en compétition ? 

Ma famille a toujours respecté mes choix, ce sont mes décisions avant tout. J’aurais même pu arrêter le ski que ça n’aurait rien changé. J’ai choisi toute seule, et ils étaient fiers de moi, peu importe que je fasse du biathlon, du ski de fond ou du saut. 

Encore aujourd’hui, le combiné nordique féminin n’est pas au programme des Jeux Olympiques d’Hiver… Est-ce que ça t’a fait hésiter au moment de te lancer dans cette discipline ? 

Au début, je ne pense pas que j’ai fait attention à ça. Je n’étais pas trop au courant de la médiatisation du combiné, du nombre de participants, car au final on n’est pas nombreux. 

Mais quand j’ai commencé à aborder ce sujet, ça m’a motivé, je me suis dit que je pouvais faire partie des filles qui développeront le combiné et qui le rendront plus populaire. 

Tes débuts dans le combiné, ça ressemblait à quoi ? 

J’ai bien aimé l’ouverture d’esprit dans cette discipline, les gens ne mettent pas la pression. Et d’ailleurs, je ne m’occupais pas des avis extérieurs. Maintenant, c’est forcément un peu plus sérieux, mais ça me plaît toujours autant ! 

J’aime beaucoup la complémentarité des deux épreuves : pour moi, l’une ne va pas sans l’autre. Même si tu te loupes dans une épreuve, tu peux te rattraper dans l’autre. J’ai tout de même une préférence pour le saut mais, parfois, je suis bien contente de me dire que ce n’est pas fini et qu’il reste le ski de fond. 

Sinon, j’ai commencé tard dans le combiné, je n’étais pas forcément au niveau des gens de mon âge au début. Mes premières compétitions étaient avec des plus jeunes, ce qui n’était pas très amusant. Mais c’était nécessaire, et j’ai progressé assez vite, jusqu’à égaler voire dépasser ceux de mon âge aujourd’hui. 

À quel moment as-tu senti que le travail payait et que tu rattrapais le niveau de ta catégorie d’âge ? 

Au bout d’un an à peu près. Je ne me faisais pas de film sur mon niveau, j’étais en retard par rapport à celles de mon âge, mais je voyais que j’avais beaucoup rattrapé. Mais il a fallu continuer de se battre. 

Aujourd’hui, je dirais que ça fait six mois que j’ai un niveau vraiment correct et que je peux réussir lors de belles compétitions. 

Comment le combiné est-il devenu ton projet professionnel ? 

C’est vraiment arrivé au fur et à mesure, il n’y a pas eu de déclic. Je pense que c’est à force d’être de plus en plus à l’aise en compét‘, et aussi le fait que mon frère, Mattéo, soit dans le combiné de haut niveau a poussé aussi. J’ai de l’admiration pour lui, j’ai un peu envie de faire pareil ! 

Est-ce que tu as déjà eu des doutes sur ton engagement dans le combiné ? 

Pas vraiment. Il y a eu des moments où j’étais moins en forme, où les résultats ne suivaient pas, mais comme pour n’importe quel athlète en fin de compte. Dans ces moments-là, ma détermination a fait que je n’ai pas envisagé de m’arrêter. Ce n’est pas toujours facile, mais j’essaye de toujours me dépasser dans les moments difficiles. 

Comment ça se passe au lycée, pour mêler cours et compétition ? 

Je suis en Terminale dans un lycée classique à Pontarlier, avec tout de même une section sportive. Cette classe était plus dédiée aux fondeurs et biathlètes, les tremplins de combiné n’étant pas à côté. Mais je suis quand même allée dans ce lycée par rapport à mes spécialités. 

On a deux demi-journées d’entraînement par semaine, en plus du mercredi et du week-end. J’arrive donc plutôt bien à lier les compét’ et cours. Ce n’est pas toujours simple, surtout au niveau des absences, mais je m’en suis bien sortie. 

Comment en es-tu venue à représenter la France lors de compétitions internationales  ? 

Je faisais partie du Comité du Doubs, et j’ai intégré le Centre National d’Entraînement en juin 2023. Je suis avec sept autres athlètes, ce qui entraîne un suivi un peu plus personnalisé qu’auparavant. Je ne sais pas si c’est grâce à ça, mais ça joue forcément je pense. 

Mon arrivée au CNE provient forcément un peu de mes résultats, j’avais été sélectionnée au Festival Olympique de la Jeunesse Européenne, j’ai performé à d’autres belles compétitions… Ma détermination et ma persévérance ont aussi joué je pense. 

Avec des enjeux de plus en plus importants, comment as-tu apprivoisé la pression de ces courses plus prestigieuses ? 

Il y a toujours de la pression, même en la transformant en bon stress. À chaque fois, j’essaye de me détendre et de me concentrer sur ce que je sais faire. Pour l’instant, ça a toujours plutôt bien marché ! 

L’une de tes premières compétitions sous le maillot bleu a eu lieu en janvier 2023, au Festival Olympique de la Jeunesse Européenne (FOJE). Comment ça s’est passé ? 

J’avais déjà participé à quelques compétitions pour la France, j’avais déjà un peu apprivoisé le sentiment de représenter son pays. Mais quand même, le FOJE était un événement plus particulier. J’étais super contente de pouvoir y participer, une vraie fierté ! 

Même si les résultats n’ont pas été excellents, aussi bien en individuel qu’en équipe, ça reste une très belle expérience. 

Comment s’est passé l’après FOJE ? Quel impact a eu cette compét‘ sur la suite pour toi ? 

Ça m’a bien motivé à m’entraîner davantage pour encore plus performer, mais j’ai quand même fait attention à ne pas griller les étapes. Tout ne se joue pas en un an, le projet se construit sur plusieurs années. 

Mais la préparation pour cette saison a été bonne, aussi bien en saut qu’en ski de fond, donc maintenant j’ai hâte de continuer tout ça. Le début de l’année se passe très bien, je me suis qualifiée aux JOJ en étant la meilleure Française… On va voir ce que ça va donner pour la suite. 

Tes Jeux Olympiques de la Jeunesse se sont en effet bien passés, tu fais huitième en individuel, sixième par équipe… Tu es satisfaite de ces résultats ? 

Ah oui ! Surtout l’individuel, je suis super contente car je ne savais pas trop où me situer, il y avait des filles que je n’avais jamais vues, je n’avais participé qu’à des compétitions européennes au maximum. Il y avait un gros niveau ! 

Je suis fière de moi, je finis sixième du saut, et j’ai réussi à ne pas trop reculer lors du ski de fond ! C’était mon but de faire partie du top 10, je suis très contente ! 

Mis à part l’individuel, quelle expérience tires-tu de ces JOJ ? 

Aller jusqu’en Corée était super. Un long mais beau voyage ! Avec les autres athlètes du combiné ont été trop contents d’être là, les conditions étaient parfaites pour la compét‘… C’était une super expérience, de représenter la France, de participer à des JOJ d’un tel niveau… J’ai hâte de remettre le maillot bleu maintenant ! 

Comment imagines-tu la suite, aussi bien pour le combiné que pour le reste ? 

Je ne sais pas encore exactement ce que je vais faire l’année prochaine, le design m’intéresse pas mal tout de même, mais ce n’est visiblement pas simple d’allier ce type d’études et le sport, donc je continue de chercher… 

Le sport est très important évidemment, mais je sais que c’est un peu aléatoire, il vaut donc mieux avoir quelque chose à côté qui me plaît également. Mais mon plan A, c’est de réussir dans le combiné, d’aller le plus loin possible. 

Si tu devais convaincre les filles de se lancer dans le combiné, qu’est-ce que tu dirais ? 

Avec cette discipline, on peut réaliser un rêve, on peut voler ! Ce sont des sensations un peu inexplicables, aussi bien en vol qu’en glisse, ce qui fait toute la beauté de ce sport. De l’extérieur ça peut faire peur, mais je peux vous dire que quand on y est, notamment le vol, c’est tout simplement incroyable ! 

* Le combiné nordique est une discipline composée de deux épreuves, le saut et le ski de fond. En saut, des notes sont attribuées selon la longueur et le style du saut. Et pour le ski de fond, la course prend la forme d’une poursuite selon le classement de l’épreuve du saut. Le classement à la fin du ski de fond est le classement final du combiné nordique. 

Ouverture Lilian Tréand KMSP/CNOSF

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