Rechercher

Ana Carrasco La motarde qui fait souffler un vent nouveau dans les paddocks

Ana Carrasco
Première femme à remporter une course de moto dans un Grand Prix, Championne du monde de vitesse, la pilote espagnole est une forte tête, peu soucieuse de ce que l’on dit d’elle. Les clichés, les stéréotypes, elle les balaye d’un revers de main gantée, les yeux fixés sur l’horizon. Son moteur, c’est la moto. Alors, accélérons un peu. Elle n’a pas que ça à faire. Portrait express de celle qui n’a besoin de personne…en Kawasaki.

Par Valérie Domain

Publié le 11 août 2020 à 11h47, mis à jour le 29 juillet 2021 à 15h07

Le 30 septembre 2018, elle entrait dans l’histoire. À 21 ans, la pilote espagnole devenait Championne du monde de moto face à ses concurrents majoritairement masculins. Et de devenir une figure reconnue des paddocks.

Elle est à ce jour la seule femme à avoir décroché une couronne mondiale en vitesse. Une autre pilote avant elle, la Finlandaise Kirsi Kainulainena, avait remporté le titre 2016, mais c’était en side-car.

Ana Carrasco
©FIM

On ne sait si elle en rêvait à l’âge de 3 ans alors qu’elle piquait la mini-moto de sa sœur aînée, mais ce passe-temps est vite devenu une passion :

« Quel que soit le sport de compétition, avec l’objectif d’aller au niveau mondial, il faut commencer très jeune, passer par de nombreuses catégories, et prendre un maximum d’expérience. La moto est comme tous les autres sports, les jeunes garçons commencent le foot, le basket, ou le tennis à trois ou quatre ans. Pour les motos, c’est pareil. Si tu veux apprendre, engranger de l’expérience et être prêt à courir en Championnat du Monde à 16 ans, tu dois commencer jeune et apprendre tout ce qui est possible avant », expliquait Ana Carrasco au magazine espagnol Marca.

Ana Carrasco
©Twitter Ana Carrasco

La jeune pilote décroche à vitesse grand V des victoires en catégories junior lors de championnats 125 cm3. Elle a 12 ans et le bitume lui fait de l’œil.

La p’tite motarde qui a déjà tout d’une grande, participe au championnat FIM CEV International Championship en 2011, devenant la première fille à obtenir des scores dans ces séries et passe deux ans plus tard au Moto3.

Rebelote, elle devient la première femme à marquer des points dans les séries en finissant 15e au Grand Prix de Malaisie puis 8e au Grand Prix de la Communauté valencienne.

Ana Carrasco
©Doug Fawley

Problème de sponsoring, blessure au genou, elle quitte la piste pour l’ombre, avant de remettre les gaz en 2018 lors du Supersport 300 au cours duquel elle devient la première femme dans l’histoire à remporter une course sur piste dans un Grand Prix.

Il aura fallu attendre près de soixante-dix ans depuis les premiers GP moto…

Un titre de championne du monde dans un sport mixte, voilà donc qui n’est pas passé inaperçu !

Ana Carrasco
©kawasaki

Aux commandes de sa Kawasaki Ninja 400, Ana Carrasco a fait fumer l’asphalte et estomaqué les stars du MotoGP dont Valentino Rossi : « Peut-être que ce résultat peut pousser une autre fille à courir », confiait-il alors, ou encore Marc Marquez : « Ce qui est clair, c’est qu’elle a ouvert la porte à d’autres femmes et leur a montré que c’est possible.»

Ana Carrasco
©Gold&Goose

Mais c’est surtout pour elle que l’Espagnole a concouru. Elle l’avait rêvé, elle l’a fait. Néanmoins, le fait qu’elle puisse inspirer les femmes ne semble pas lui déplaire :

« Historiquement, la moto était un sport d’homme, ça c’est clair, note t-elle. Tout est histoire de chiffres, parce qu’il y a beaucoup plus de petits garçons que de petites filles qui se lancent dans ce sport, les garçons ont donc davantage de possibilité d’arriver au top. Quand j’ai commencé, nous n’étions que trois ou quatre filles en Espagne. Avec tout ce que nous allons réussir, la carrière va se féminiser, il y a beaucoup de filles qui ont envie de courir et je pense que dans quelques années, le nombre de femmes augmentera. Pour l’instant, nous allons de l’avant et c’est déjà bien. Je suis sure qu’en obtenant de bons résultats, je permets aux autres que ce soit un peu plus facile. »

Ana Carrasco
©Twitter Ana Carrasco

Quant à savoir si la moto a un genre, la pilote s’étonne : 

« Ce n’est ni féminin, ni masculin. La moto est un véhicule et nous sommes ceux qui le dirigeons. Piloter n’est ni féminin, ni masculin, c’est une question de technique et de savoir-faire. Aujourd’hui, je suis un des pilotes de référence dans la compétition, tout le monde sait qui je suis et je suis dans les points à chaque course. Cela ne surprend plus que nous nous battions pour gagner. Il y a quelques années, quand j’ai commencé le Championnat du Monde, ça pouvait paraitre étrange, mais maintenant c’est normal pour tout le monde. »

Ana Carrasco
©Twitter Ana Carrasco

Pour celle qui n’utilise jamais sa deux roues pour rouler au quotidien, la moto doit rester un sport :

« Je monte sur une moto pour faire la course et aller vite, la route n’est pas faite pour cela. Le mieux pour ceux qui veulent faire de la vitesse, c’est d’aller sur un circuit et ainsi de ne pas prendre de risques inutiles. La route n’est pas faite pour tomber : il y a des glissières, des bordures, des arbres et énormément d’autres obstacles. En moto, le choc tue. En compétition, on n’a pas peur parce que tomber fait partie de l’apprentissage. On cherche à trouver la limite et on tombe souvent. »

Ana Carrasco
©Smudge9000

Ana Carrasco qui sera bientôt l’héroïne d’un documentaire sur sa jeune carrière « Ride your dream », vient de remporter sa première victoire de la saison, la première des deux courses de la Monde Supersport 300 sur le circuit de l’Algarve, à Portimao, au Portugal.

« Je suis très heureuse, nous avons très bien travaillé jusqu’à présent, maintenant nous devons continuer à travailler pour demain, pour essayer de gagner à nouveau », s’est exclamée la pilote espagnole, le sourire jusqu’aux oreilles.

Ana Carrasco est ÀBLOCK! Bien joué, chica !

Soutenez ÀBLOCK!

Aidez-nous à faire bouger les lignes !

ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.

Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.

Soyons ÀBLOCK! ensemble ! 🙏

Abonnez-vous à la newsletter mensuelle

Vous aimerez aussi…

Claire Floret : « Le cyclisme m’a permis de devenir une autre femme. »

Claire Floret : « Le cyclisme m’a permis de devenir une autre femme. »

C’est une histoire d’amour qui a donné vie à une autre. Claire Floret a découvert le cyclisme via la passion de son homme, fan de vélo. En 2015, elle lance un pari audacieux : faire renaître le Tour de France au féminin. C’est un peu (beaucoup) grâce à son asso « Donnons des Elles au vélo J-1 » que le Tour de France Femmes a repris la route. Claire Floret est au micro du podcast ÀBLOCK!

Lire plus »
Marie-Amélie Le Fur, une vie (sportive) à cent à l’heure

Marie Amélie Le Fur, une vie (sportive) à cent à l’heure

La présidente du Comité Paralympique et Sportif Français (CPSF) était très attendue pour ces Jeux Paralympiques de Tokyo, ses derniers. La reine française du saut en longueur et ambassadrice du handisport n’a pas démérité et a remporté sa neuvième médaille paralympique, venant couronner une carrière buffante.

Lire plus »
Pierra Menta 2022 : le bonheur est dans le trail

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une triathlète pas comme les autres, un trail grandeur nature (Pierra Menta sur notre photo), une pionnière qui chérit le ballon rond, un retour sur une finale de tennis interminable et sur des JO en noir et blanc et une portière déterminée… C’est le meilleur d’ÀBLOCK! pour bien commencer les vacances !

Lire plus »
J'veux améliorer mon cardio, je fais comment ? La question qui tue

J’veux améliorer mon cardio, je fais comment ?

« Faire monter le cardio », chez toi, ça prend 3 minutes ? Au moindre effort ton cœur s’emballe, tu suffoques ? Pas de panique ! Le cardio, c’est comme tout, ça se travaille ! Reprend ton souffle le temps qu’ÀBLOCK! te dise quel sport pratiquer pour l’améliorer.

Lire plus »
La Chistera rugby

La chistera ? Cékoiça ?

Les amateurs de ballon ovale le connaissent mais, pour les autres, impossible de poser une image sur ce terme. Alors que la Coupe du Monde féminine de rugby à XV se joue en Nouvelle-Zélande, séance de rattrapage pour impressionner son monde. Les sportifs et sportives, les coachs, ont leur langage, selon les disciplines qui, elles aussi, sont régies par des codes. Place à notre petit lexique pratique, le dico « Coach Vocab ».

Lire plus »
Marion Desquenne : « Dans le skate, tu rencontres des filles qui gomment leur féminité. C’est une sorte d’armure. »

Marion Desquenne : « Dans le skate, tu rencontres des filles qui gomment leur féminité. C’est une sorte d’armure. »

Elle est photographe et réalisatrice de documentaires. Son dernier film, « Bande de skateuses », est une épopée immersive sur l’explosion du skateboard féminin en France. Partie à la rencontre de plusieurs générations du milieu de la glisse sur bitume, Marion Desquenne en a rapporté un témoignage qui va au-delà de la simple pratique du skate et en dit long sur une société qui a encore du boulot en matière d’égalité des genres.

Lire plus »
Il était une fois le skateboard…féminin

Il était une fois le skateboard…féminin

Aujourd’hui, si le monde du skate doit compter sur les filles, elles aussi présentes aux Jeux Olympiques où la discipline a fait son entrée, quelques pionnières ont ouvert la voie pour leur permettre d’être sous les feux de la rampe. Petite histoire du skateboard conjugué au féminin.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner