Nita Korhonen En pole position pour féminiser la moto

Nita Korhonen
Elle milite avec en ligne de mire la mixité dans son sport. Née quasiment sur l’asphalte d’un circuit, Nita Korhonen, motarde et fière de l’être, s’emploie à féminiser le milieu de la moto via ses fonctions au sein de la Fédération Internationale de Motorcyclisme (FIM). Portrait d’une incorrigible bikeuse.

Publié le 13 février 2021 à 12h00, mis à jour le 29 juillet 2021 à 14h22

Elle n’a pas tardé à réagir. Quelques jours après que « l’affaire » Sharni Pinfold a éclaté, Nita Korhonen est montée publiquement au créneau, s’associant à la Fédération Internationale de Motorcyclisme (FIM) dans un communiqué sans équivoque.

Non contente d’apporter son soutien inconditionnel à la jeune pilote, la présidente de la Commission des femmes à moto (CFM) de la FIM a tenu à rappeler posément, mais fermement, que les comportements misogynes dénoncés par l’Australienne n’étaient et ne seraient jamais ni tolérables, ni tolérés.

Quinze ans à batailler pour plus de représentation féminine – que ce soit sur piste ou dans les instances dirigeantes – dans le très masculin bastion de la moto ne pouvaient assurément laisser l’énergique Finlandaise sans voix (lire notre interview de Nita Korhonen).

Une prise d’autant plus logique que le parcours de Sharni Pinfold n’est pas sans lui rappeler le sien. Tout comme sa cadette, la néo quadra est fille de pilote – Paul Pinfold pour l’une, Pentti Korhonen pour l’autre – et l’une comme l’autre ont passé une grande partie de leur enfance dans les paddocks. Tout comme la native de Perth, il lui a toujours été impossible d’envisager sa vie sans moto.

©DR

« Lorsque j’étais enfant, je voulais être pilote, se souvient Nita Korhonen interrogée par drivetribe. Mais à cette époque, mon père venait juste de prendre sa retraite et je ne pense pas que mes parents aient été très heureux de m’entendre dire, à 4 ou 5 ans, que je voulais faire ça. C’était si dangereux dans les années 70 ! Malgré ça, ils nous ont toujours soutenu dans tout ce que nous voulions faire mon frère et moi. Nous avions un cyclomoteur quand nous étions enfants et nous avons même participé à une course avec, mais c’était plus pour s’amuser que réellement sérieux. Le sport automobile a toujours été ma passion, je n’ai même jamais pensé à faire autre chose. »

Nita Korhonen…©DR

Très habile au volant d’un guidon – seule femme à prendre part à l’ATV Supermoto Finnish Championship, elle se classera 4e du Général en 2013 – c’est pourtant hors-piste que Nita Korhonen, contrairement à Sharni Pinfold, va trouver sa voie. Après un baccalauréat en commerce et communication, elle se lance dans des études en science et gestion du sport à l’université de Jyväskylä. Elle poussera jusqu’en thèse.

Son mémoire, écrit pour le compte de la FIM, interroge la métamorphose d’un pilote lambda en champion à travers les témoignages d’une cinquantaine de coureurs finlandais. Elle le publiera sous le titre « Voittamattomat » – « Invincibles » en français – l’année suivante. Le premier opus d’une longue série d’ouvrages parmi lesquels une biographie de Juha Kankkunen, quadruple champion de rallye, intitulée « My Road ».

©DR

« La passion est définitivement la clé du succès, explique-t-elle à drivetribe, et ce, que vous soyez pilote ou que vous soyez amenés à travailler dans un bureau. Si vous aimez ce que vous faites, il est plus facile de bien le faire. Je pense que c’est ce que j’ai retenu en priorité de ces champions ».

Auteur à succès, Nita Korhonen collabore également avec différents organes de presse. Journaliste, reporter, chroniqueuse, animatrice, elle produit et réalise un documentaire sur Mika Kallio.

Insatiable touche-à-tout, elle parvient à dégager du temps, dans son agenda surchargé, pour s’occuper de la communication du vice-champion du monde finlandais de Moto2 et de son équipe tout en travaillant à celle de l’équipe Ajo Motorsport.

« Je n’ai jamais voulu être journaliste. J’étais douée pour écrire et je voulais seulement trouver un moyen de m’impliquer dans les sports mécaniques. C’est arrivé par hasard. Mes études étaient plus généralistes, mais elles m’ont permis de m’ouvrir à différentes perspectives. »

©DR

Et des perspectives, Nita Korhonen n’en a jamais manqué. En 2006, la FIM crée une commission « Femmes et motocyclisme » dans le but de promouvoir et l’usage de la moto et la pratique du haut niveau auprès des femmes. Elle s’engage. Volontaire pendant six ans, elle en devient présidente en 2012.

Très vite, elle impose sa patte en ouvrant la porte… aux hommes ! « Pour moi, il était important d’avoir une commission mixte pour montrer qu’il ne s’agissait pas d’un groupe féministe, rappelle-t-elle à drivetribe. La diversité est importante pour une entreprise, une organisation et nos fédérations. »

Championnats dédiés, mixité dans les compétitions, training camps… l’inépuisable Finlandaise est sur tous les fronts, fidèle à son crédo : l’égalité des chances au-delà même de l’égalité des genres !

« Pour moi, ce n’est pas si important d’avoir des filles ou des femmes en moto, martèle-t-elle dans gulftimes. La chose la plus importante est que tout le monde, quelque soit son genre, puisse suivre ses rêves, faire ce qu’il veut et qu’il y ait les mêmes opportunités pour tous. Si une fille ou une femme veut s’engager dans le domaine de la moto, je l’encouragerai parce que c’est tellement amusant ! »

©DR

Après plus d’une dizaine d’années de bons et loyaux services, Nita Korhonen, également engagée auprès de la Fédération finlandaise de Motorcyclisme (SML),  rejoint en 2019 le siège suisse de la FIM, en qualité de directrice de liaison et des évènements à la demande de Jorge Viegas, son président. « Ça a été un choc, se remémore-t-elle à drivetribe. Je n’ai pas eu trop le temps de réfléchir. Le communiqué de presse est sorti une heure et demi après le coup de fil de Jorge Viegas. Il me connaît et il savait que je ne refuse jamais une opportunité. »

Aux FIM Awards : Nita Korhonen, Lisa Cavalli, fondatrice de MissBiker, la plus grande communauté italienne de femmes à moto, et l’ancien président de la FIM, Guy Maitre.

Aujourd’hui, elle poursuit sa croisade et met toute son énergie à défendre la place des femmes dans le milieu de la moto pour toujours plus de mixité : « Comme le montre le cas de Sharni Pinfold, nous confie-t-elle sur ÀBLOCK!, tout n’est pas parfait et certains aspects de notre sport doivent être améliorés. La course de haut niveau dans un sport aussi exigeant – physiquement et financièrement – ne devrait jamais être affectée par un comportement aussi toxique. Il existe des exemples de mauvais comportement chez les hommes comme chez les femmes. Faire des blagues sexistes ou mal se comporter, ce n’est pas être un homme ou une femme, c’est être stupide. »

D'autres épisodes de "Femmes et moto : à toute berzingue !"

Soutenez ÀBLOCK!

Aidez-nous à faire bouger les lignes !

ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.

Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.

Soyons ÀBLOCK! ensemble ! 🙏

Abonnez-vous à la newsletter mensuelle

Vous aimerez aussi…

Lise Billon

Le best-of ÀBLOCK! de la semaine

Des paroles de filles sur leur métier passion, une as du tir à l’arc qui a un appétit de lionne, une emblématique pasionaria du skateboard, une footballeuse transgenre qui dégomme les barrières, elles étaient toutes ÀBLOCK! cette semaine pour nous régaler de leurs confidences, nous embarquant ni une ni deux sur leur chemin sportif parfois semé de doutes, mais toujours exaltant. Retour sur les (belles) histoires de la semaine.

Lire plus »
15 juillet 1917 Les premiers championnats de France d’athlétisme féminins voient le jour

15 juillet 1917, les premiers championnats de France d’athlétisme féminins voient le jour

En 1917, la France compte de nombreux sportifs, mais elle compte aussi un paquet de sportives qui n’attendent que l’occasion de se mesurer les unes aux autres et de faire parler leur talent. Le moment arrive le 15 juillet avec l’organisation des premiers championnats de France d’athlétisme féminins porte de Brancion. Et qui dit première édition, dit premiers records. Découvrons ces pionnières !

Lire plus »
Madge Syers

Madge Syers, la première Lady du patinage artistique

Les Championnats du monde de patinage se déroulent cette semaine à Stockholm, en Suède. L’occasion d’être ÀBLOCK! sur la glace et de rendre hommage à la première femme médaillée d’or olympique en patinage artistique, la Britannique Madge Syers. Une lady qui a marqué de sa grâce et de sa détermination l’histoire de cet art sportif de la glisse et n’a pas hésité à tracer son sillon moderne dans un petit monde dominé par les hommes. Son talent et son esprit de pionnière ont brisé la glace pour des générations de sportives.

Lire plus »
Carole Castellani : « Le CrossFit me permet de repousser mes limites. »

Carole Castellani : « Le CrossFit me permet de repousser mes limites. »

Elle se définit comme une hyper active survoltée. Carole Castellani, 33 ans, est l’une des plus acharnées de nos crossfiteuses françaises. À son actif : deux participations et une médaille de bronze en équipe aux Games, le championnat du monde de la discipline qui a lieu aux États-Unis. Aujourd’hui, enceinte, mademoiselle chante des berceuses tout en rêvant de repartir sur la route de Madison…

Lire plus »
Maud Thierry

Maud Thierry – Iron(wo)man sinon rien

« Petit format, grande détermination » a-t-elle écrit sur sa bio Instagram. Pour Maud alias « Petit goûter », 26 ans, le sport, c’est un peu l’affrontement de David contre Goliath. Cette triathlète acharnée au petit gabarit a réalisé un exploit sportif envié : l’Ironman. Prenons le top départ avec une sportive généreuse et heureuse qui a fait du sport son mode de vie.

Lire plus »
Chloé Trespeuch

Le Best-of ÀBLOCK ! de la semaine

Des footeuses au quotidien, un photographe qui a su mettre en lumière les maux de la patineuse Sarah Abitbol, une roller-girl pour qui ça roule, une skieuse aux anges (Chloé Trespeuch sur notre photo) ou encore une cycliste que rien n’arrête, c’est le meilleur de la semaine. Let’s go !

Lire plus »
Anaïs Quemener  : « Ma plus grande victoire a été de revenir au niveau après ma maladie. »

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une tenniswoman qui avait la tête dans les étoiles, un petit rab enneigé pour les jeunes, une runneuse que rien n’arrête (Anaïs Quemener sur notre photo), une Question qui tue spécial cardio, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK! Enjoy !

Lire plus »
Retour en haut de page

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

WordPress Cookie Notice by Real Cookie Banner