Jean-Michel Aulas « Dans le foot féminin, j’avais l’impression que j’avais une mission à mener. »

Jean-Michel Aulas : « Dans le sport féminin, j’avais l’impression que j’avais une mission à mener. »
Il a été, et est encore, l’un des grands artisans du football féminin. Jean-Michel Aulas, ancien homme fort de Lyon qui a porté ses joueuses au pinacle, continue à s’investir en faveur des footballeuses mais, cette fois, à l’échelle nationale. Et sur ce terrain, il est redoutable.

Par Sophie Danger

Publié le 29 avril 2024 à 10h01, mis à jour le 13 janvier 2025 à 16h14

Vous êtes membre du jury de Sensationnelles*, une opération dont le but est de soutenir des clubs engagés dans le développement du football féminin amateur. Prêter votre concours a été une évidence ?

Bien sûr ! C’est ce qui permet de donner une dynamique et du sens à tout ce que nous faisons. Avoir la conviction de développer le football féminin est évidemment quelque chose de spontané et d’inné mais, après, il faut véritablement avoir les moyens de l’exposer. Ce que fait Sensationnelles est tout à fait particulier et permet, concrètement, de montrer des initiatives qui vont servir le projet général.

Cette initiative s’adresse aux 3 798 clubs amateurs de football ayant au moins une équipe féminine, moins de 4 000 donc sur environ 12 000 clubs amateurs actifs sur le territoire, ce qui signifie qu’un club sur trois est doté d’une équipe féminine. Ils vous évoquent quoi ces chiffres ? Ils sont plutôt encourageants ou ce n’est pas encore assez ?

Ce n’est évidemment pas assez, mais c’est également encourageant parce que cela veut dire que tout le monde s’intéresse au football féminin. C’est aussi pour cela que nous avons une action de fond à mener.

Nous pourrions avoir plus de clubs parce que nous avons plus de demandes de jeunes filles qui souhaitent pratiquer le football mais l’organisation actuelle des clubs, de la Fédération, des pouvoirs publics fait que nous n’avons pas la possibilité d’accueillir tout le monde.

Nous avons développé un grand plan au niveau de la Fédération. Aujourd’hui, nous avons 220 000 licenciées féminines – sur le plan féminin, le football est le premier sport français et de très loin – et nous voudrions arriver à 500 000 d’ici cinq ans.

Pour ce faire, il faut, d’une part, avoir un certain nombre de clubs qui accueillent les jeunes filles mais aussi, toutes les infrastructures en termes de terrains et de ressources humaines pour permettre à ces futures licenciées de pouvoir pratiquer leur sport favori. 

Comment atteindre cet objectif  ?

Ce grand plan a été édicté avec de nouveaux moyens, des discussions extrêmement poussées auprès du ministère des Sports, mais aussi au niveau de l’éducation car notre projet est de faire en sorte que nous puissions inscrire le football féminin à l’école et ce, dès la primaire.

Il y a déjà des clubs qui proposent d’envoyer des éducateurs dans les écoles afin de promouvoir la pratique de manière systématique. Sur ce point, nous nous heurtons à des problématiques que nous sommes en train de résoudre comme l’acceptation d’une certaine forme de mixité dès la scolarité qui permet aux jeunes filles d’aller jouer dans la cour comme les garçons.

Dans les faits, en quoi consiste ce plan en faveur du football féminin ?

C’est un projet qui s’étale sur cinq ans et qui doit, sur le plan de la pratique généralisée, permettre à toutes les jeunes filles qui le souhaitent de pouvoir adhérer et s’inscrire dans un club. Il s’étale sur trois niveaux.

Le premier est donc d’atteindre les 500 000 licenciées pour le football amateur, le second concerne la création d’une Ligue professionnelle féminine dont le lancement officiel, même si elle fonctionne déjà de manière tout à fait efficace, est programmé pour le 29 avril prochain. Le troisième niveau concerne la cohérence avec l’équipe de France, une équipe de France forte.

Nous nous sommes rendu compte qu’il fallait développer la base, consolider le secteur professionnel et, surtout, faire évoluer l’élite qui est souvent la vitrine qui permet aux jeunes filles d’avoir envie de se lancer à leur tour. À ce titre, nous venons de prendre part à la finale de la Women’s Nations League, nous sommes engagés dans la compétition des Jeux Olympiques avec des ambitions légitimes, et cela non pas uniquement parce que nous voulons être parmi les premiers mais parce que cela va servir toute notre politique vis-à-vis des jeunes filles qui se mirent dans les meilleures joueuses françaises qui sont également les meilleures joueuses européennes, voire mondiales. 

Vous êtes l’un des grands artisans du développement de la pratique en France avec Louis Nicollin. Qu’est-ce qui vous a poussé à l’époque vous, dirigeant d’un grand club masculin, à vous intéresser au football féminin ?

En premier lieu, il y a une conviction, celle que la parité féminine doit s’inscrire non seulement dans le droit du travail, la société, mais également dans le sport et puis il y aussi cette impression que c’était une mission que j’avais à mener.

Ensuite, il y a eu mon travail. Je ne suis pas issu du monde du football mais de la technologie et j’ai officié aux Etats-Unis or, là-bas, le football féminin est une institution : quand nous, nous avons 200 000 licenciées, elles sont, je crois, deux millions aux États-Unis.

Il est vrai que c’est Loulou Nicollin qui, au départ, m’a donné cette opportunité et Thierry Braillard, qui était adjoint aux sports avant de devenir ministre des Sports m’en a fourni l’occasion en m’appelant pour me parler des difficultés du Football Club de Lyon (FCL). Ça a été l’occasion de reprendre, développer et de s’intéresser à un destin qui n’était plus seulement local mais qui est devenu national et international.   

Vous expliquiez les difficultés auxquelles vous avez dû faire face. À l’époque, Lyon est un club exclusivement masculin et il a fallu changer les mentalités, un changement philosophique, un changement culturel. Comment on se prépare pour la révolution en sachant que l’on va être attendu par une multitude de fusils pointés sur soi ?

J’étais naïf, je ne pensais pas que l’on allait m’attendre avec des fusils. À l’époque, c’est tout juste si on me prenait au sérieux. On ne m’a pas dissuadé tout de suite, on m’a juste pris pour quelqu’un qui avait des idées saugrenues, j’ai plutôt été ridiculisé qu’empêché mais, petit à petit, les choses se sont développées.

Il y a l’opportunité de développer Lyon sur le plan international et je me suis investi partout où c’était possible : à la FIFA où j’étais membre de la commission de développement du foot féminin sur le plan mondial, j’ai également travaillé avec l’UEFA sur le plan européen.

Lorsque je suis parti de l’OL, je me suis dit que ça serait quand même formidable de pouvoir servir le football féminin au sein même de la Fédération et nous avons pu trouver un cadre général avec Philippe Diallo, le président.  

Pour convaincre de l’intérêt du football féminin, il était nécessaire pour vous de mettre en place une stratégie qui allait au-delà de nos seules frontières ?

Il a été plus rapide de passer par la voie européenne c’est-àdire que j’ai tout de suite rejoint l’European Club Association (ECA) le syndicat des clubs européens et convaincu tous les grands clubs européens comme le Real, Barcelone, le Bayern qui avait déjà une section féminine – Manchester City ou encore Manchester United, de l’intérêt et de la légitimité d’avoir un football féminin fort à l’intérieur de leurs formations respectives.

Depuis cinq ans, nous avons multiplié par deux le nombre de licenciées et nous avons également rendu possible un autre regard des présidents de club hommes sur le football féminin.

Sous votre impulsion, les Lyonnaises vont décrocher leur premier titre de championnes de France à l’été 2007, il y en aura 15 autres, il y aura également 10 Coupes de France, 8 Ligue des championnes et 3 trophées des championnes. Cette recette peut fonctionner au niveau national ? 

Nous avons abordé le sujet du football féminin au niveau national en imaginant que c’était tout un écosystème qu’il fallait bâtir. Nous sommes donc allés chercher des ressources, nous avons également construit une convention collective avec les syndicats afin d’apporter à nos joueuses, non seulement ce qui est nécessaire et indispensable, mais en allant également vers un certain nombre de choses qui n’existent pas chez les garçons comme les garanties en matière de maternité, la participation des enfants sur le lieu de travail et même en déplacement dans les équipes professionnelles ou en équipe de France.

Parallèlement à cela, nous avons noué des relations avec le ministère des Sports pour développer tout ce qui va permettre d’amplifier ce mouvement. Le premier point a été la négociation sur les centres de formation. En octobre dernier, nous avons eu l’autorisation d’en ouvrir un certain nombre, ce sont des centres labelisés avec des garanties, des licences et des conditions de travail identiques à celles des garçons. Six clubs ont immédiatement créé le-leur qui sont d’ores et déjà opérationnels, trois nouveaux clubs pros sur les douze que compte la D1 Arkema ont également opté pour.

Avec ça, il faut protéger ceux qui font de la formation donc nous nous sommes inscrits dans un développement national de protection des joueuses formées localement et aussi dans la discussion avec la FIFA sur le plan international pour aller vers ce qui est valable et utilisé chez les garçons à savoir une indemnité de formation 

Qu’attendez-vous de ce plan en termes de résultats sportifs ?

Nous avons l’ambition dêtre la première ligue européenne. C’est compliqué parce que les Anglais sont très avancés, mais nous avons l’expérience de ce qu’il convient de faire et nous avons les meilleurs clubs européens  pour preuve, cette année, la France était le seul pays à avoir trois clubs en Women’s Champions League ! Tout cela montre que nous faisons aussi bien que les garçons voire même un peu mieux.

Nous voulons préparer l’avènement économique du football féminin et pour cela, nous avons signé un accord de six ans avec Canal + afin de promouvoir la retransmission des matches.

Les premiers succès sont tout à fait patents : la progression des téléspectateurs sur les matches de D1 retransmis le vendredi soir et le dimanche soir, en concurrence avec le football pro mais aussi le TOP14, obtiennent des résultats conséquents. Lors du dernier match diffusé il y a trois semaines entre Lyon et Paris, nous avons ainsi fait des pointes à 900 000 téléspectateurs soit plus que le Top14 ou la plupart des matchs de la Ligue 1 quand ils sont retransmis en direct. 

Comment faire pour inciter les amateurs à venir plus nombreux encore dans les stades ?

Il faut que le plan de développement du football professionnel, si on parle affluence, s’inscrive sur une durée longue et c’est pour cela que nous avons signé un plan de six ans avec Canal+. Il faut également des règles de compétitivité au niveau du football pro qui permettent une plus grande attractivité.

En d’autres termes, il ne faut pas que nous ayons un PSG ou un OL sacré champion tous les ans. Pour éviter cela, nous avons instauré des play-offs qui opposeront les quatre premiers du championnat dans des matches uniques à confrontation directe afin d’attirer de plus en plus de spectateurs.

Sur le plan des licences, des terrains, des tribunes, de l’accessibilité, nous avons également mis en place un certain nombre de règles qui vont favoriser l’arrivée de plus en plus de spectateurs.

À savoir ?

Il y avait, par exemple, un truc complètement odieux : le football féminin jouait sur des terrains synthétiques or, il y a deux ans, avec l’Association européenne des clubs (ECA), nous avons fait sortir une analyse médicale qui montrait qu’il y avait plus de ruptures des croisés chez les féminines que chez les garçons. On peut imaginer que le terrain synthétique a joué un rôle là-dedans.

Nous avons donc fait en sorte, dans la licence, d’obliger à faire jouer les filles sur un terrain en herbe, comme les garçons. Depuis cette année, il n’y a plus de terrain synthétique pour les jeunes filles qui évoluent en D1… Il y a tout un ensemble de choses qui permettent la promotion progressive du football féminin et cela paye.

Lorsque nous avons organisé à Lyon le match entre la France et l’Allemagne pour le compte des demies de la Nations League, nous avons eu 31 000 spectateurs payants. Cela prouve que la gratuité n’est pas l’unique solution pour faire venir les amateurs. 

Quels sont les chantiers à venir pour continuer à avancer ?

Il faut continuer à améliorer les conditions d’accueil, proposer de belles affiches, nous aurons également une réflexion concernant les heures des matches. Nous avons lancé une grande enquête afin de mieux connaitre le public qui s’intéresse au football féminin car il n’est pas le même que celui des garçons.

Il ne faut probablement pas jouer aux mêmes horaires, preuve en est, quand les féminines jouent le mercredi ou le vendredi soir, il y a beaucoup plus de monde parce qu’il y a de jeunes enfants… L’intérêt est là et il n’est, pour s’en convaincre, qu’à citer trois arguments que j’ai donnés dernièrement lors d’une conférence de promotion du football féminin à Londres, arguments qui sont assez parlants.

Tout d’abord, le football féminin est très technique – regardez la vidéo publiée par Orange . Deuxièmement, on me dit toujours que, sur le plan foncier, athlétique, le foot féminin est très loin or, j’ai sorti des stats de kilomètres parcourus par les milieux de terrain dans la dernière Champions League et garçons et femmes ont couru autant !

Le dernier point qui montre tout l’intérêt du football féminin, c’est le temps effectif : il y a entre 11 et 15 % de temps effectif en plus pour les matches féminins, pourquoi ? Parce qu’il n’y a pas de contestation et parce que les femmes ne se roulent pas par terre. Ces arguments sont les meilleurs, à mon sens, pour vendre le football féminin 

Si, pour clore cet entretien, je vous demandais ce que vous pensez avoir apporté au football féminin, vous diriez quoi ?

De la crédibilité, je pense. Je m’engage et les gens se disent : « Il va réussir à la Fédé ce qu’il a réussi avec Lyon. » Je dirai donc de la crédibilité mais je tiens à signaler que je suis entouré par une équipe formidable. Evidemment, ça aide.

*Le prix Sensationnelles initié par Intermarché est une opération lancée en 2022 pour soutenir le football féminin amateur. Elle est menée en collaboration avec la Fédération Française de Football à travers son dispositif Toutes Foot, moteur opérationnel de la mixité destiné à conforter le développement de la pratique féminine et à renforcer la place des femmes dans le football. Sensationnelles offre aux clubs engagés pour la pratique féminine la possibilité de gagner des dotations, dont une expérience au Centre National du Football à Clairefontaine, le temple du football français, et 10 000 € pendant 3 ans pour soutenir leurs projets. 

Ouverture ©Jean-Michel Aulas/X

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