Elizabeth Ryan Sa Majesté de Wimbledon

Elizabeth Ryan
Si elle n’a jamais brillé en simple, elle n’a laissé à personne d’autre le soin de rayonner sur le double. Elizabeth Ryan a dominé, sans partage, en duo à Wimbledon durant plus de soixante ans aux côtés, notamment, des Françaises Suzanne Lenglen et Simonne Mathieu. Avant de passer le relais à sa compatriote Billie Jean King.

Par Sophie Danger

Publié le 29 juin 2021 à 17h27, mis à jour le 27 juillet 2021 à 17h44

Elle a régné sans partage sur le gazon londonien durant près de soixante ans ! Elizabeth Montague Ryan, Américaine de naissance, Anglaise de cœur, a durablement marqué de son empreinte l’histoire de Wimbledon, décrochant sur les vertes pelouses du All England Club pas moins de 19 titres – 12 en double dames, 7 en double mixte – entre 1914 et 1934.

Il faudra attendre l’ère open et la victoire du duo américano-tchèque Billie Jean King-Martina Navratilova lors de l’édition 1979 pour voir son record tomber.

Une domination extraordinaire de longévité pour une épopée initiée aux prémisses du siècle dernier. Été 1914. L’imminence de la guerre rend l’Europe fébrile. Malgré tout, la Grande-Bretagne a encore le cœur à la fête.

Le tournoi de Wimbledon s’apprête à commencer et, avec lui, la deuxième édition du double féminin. Remporté par les Anglaises Winifred McNair et Dora Boothby l’année précédente, le titre, tout neuf, est remis en jeu.

Les Britanniques espèrent un nouveau triomphe maison. Elles devront se contenter d’un demi-succès. Car si Agnes Morton, la native de Halstead, est bel et bien au rendez-vous, c’est une Américaine qui complète la paire. Son nom : Elizabeth Ryan.

La demoiselle, 22 ans, n’est pas totalement inconnue. Pour autant, elle ne s’était jamais imposée dans un rendez-vous de cette ampleur. Née en 1892 dans une famille bourgeoise d’Anaheim, elle a appris les rudiments du tennis sous le chaud soleil californien aux côtés de sa sœur aînée Alice.

C’est en Angleterre, où elle s’est installée, dès 1904, avec sa mère, qu’elle va peaufiner son apprentissage. Et débuter sa carrière.

Son succès à Wimbledon en annonce les prémisses. Elle devra attendre la fin de la Grande Guerre pour confirmer.

Juillet 1919. La paix règne de nouveau sur le Vieux Continent. Elizabeth Ryan, dite « Bunny », a ressorti sa longue tenue blanche du placard avec, pour ambition, de conquérir, une deuxième fois, le gazon londonien.

Wimbledon, 1924 : Suzanne Lenglen défait Elizabeth Ryan en simple, mais en double, elles seront imbattables !

Si son parcours en simple s’arrête en demi-finale, aucun obstacle ne semble en revanche pouvoir stopper son insolente progression en double. Associée à Suzanne Lenglen (qui l’a déjà battue en simple), elle mène vaillamment la charge.

« Bunny » et « La Divine » s’imposent en trois manches et inaugurent, avec bonheur, une association qui va leur permettre de survoler les débats jusqu’en 1925, sans perdre un seul match !

Elizabeth Ryan avec Suzanne Lenglen, en 1914.

Lenglen en fin de carrière, Elizabeth Ryan est contrainte de se trouver une autre partenaire de jeu pour 1926. Sa compatriote Mary Brown lui permettra d’asseoir son emprise avant qu’Helen Wills, Américaine elle aussi, ne l’accompagne sur le chemin de la victoire en 1927 et 1930.

Au total dix titres qu’elle portera à douze après deux ultimes campagnes menées de main de maître(sse) en 1933 et 1934 grâce à l’aide d’une autre Française, Simonne Mathieu.

 

La Française Simonne Mathieu, sa dernière partenaire de double dames…

Une véritable razzia qui ne suffit cependant pas à rassasier totalement sa faim de conquêtes. Malheureuse en solo – elle sera quatre fois demi-finaliste et deux fois finaliste – Elizabeth Ryan joue sur tous les tableaux en double et met, à son tour, le mixte à ses pieds.

Au total, elle décroche pas moins de sept sacres en quinze tentatives avec cinq partenaires différents, dont le Sud-Africain Patrick Spence, l’Australien Jack Crawford et l’Espagnol Enrique Maier.

Reine incontestée de l’enclave londonienne, « Bunny » tire sa révérence en 1934 à l’âge de 42 ans. Sans renoncer, toutefois, à venir parader dans son royaume.

Durant les années qui suivent, elle répondra invariablement présente, suivant, depuis les tribunes, les tribulations de ses héritières, inquiète à l’idée que l’une d’entre elles n’empiète sur son territoire. Une éventualité redoutée à laquelle elle n’assistera pas.

Elizabeth Ryan avec la championne de tennis américaine, Chris Evert Lloyd alias Mrs Lloyd à Wimbledon.

Le 5 juillet 1979, veille de l’entrée en lice de Billie Jean King, 19 succès à son actif elle aussi –  six en simple, 4 en double mixte, 9 en double dames – et de Martina Navratilova, Elizabeth Ryan assiste au double hommes et s’écroule, victime d’un accident cardiaque.

Elle décèdera à l’hôpital quelques heures seulement avant que sa compatriote ne porte à 20 un record qu’elle avait jalousement conservé quarante-cinq ans durant. Elle avait 87 ans.

D'autres épisodes de "Tennis : femmes sur court"

Vous aimerez aussi…

Pauline Ferrand-Prévot

Best-of 2020 : les exquises paroles de nos championnes

Elles nous ont inspirés, nous ont émus, soufflés, amusés ou encore étonnés. Par leurs mots, leurs émotions si bien exprimées. Leurs confidences sont des cadeaux et nous sommes fiers de les accueillir toutes ces filles ÀBLOCK! Merci, girls, d’avoir fait de 2020, année troublée, une année de partage. Merci d’avoir accompagné notre nouveau média. Cela valait bien de réunir ici quelques pépites glanées au gré de nos rencontres. Le choix a été si difficile que nous reviendrons prochainement mettre en lumière d’autres championnes pour d’autres délicieuses petites phrases. Vive 2021 avec vous ! Savourez !

Lire plus »
La question qui tue

Pourquoi, le soir, je suis ballonnée ?

Cette question qui tue, on nous l’a posée plusieurs fois. Genre, des sportives et des pas (toujours) sportives, si si ! Il semblerait que gonfler le soir venu soit malvenu. Et que ça concerne aussi celles qui font leurs abdos consciencieusement. Parce que (hey, on vous le dit, là, tout de suite, ça a pas forcément à voir). Alors, on va tenter une réponse avec notre coach, Nathalie Servais. Mais, on est d’accord qu’on n’est pas gastro, hein ?

Lire plus »
Pauline Déroulède

Pauline Déroulède : « Après mon opération, la première chose que j’ai dit, c’est : « Je vais faire les Jeux Paralympiques ». »

Une guerrière, une winneuse. Sur une seule jambe. Il y a un an, percutée par une voiture, Pauline Déroulède a été amputée de la jambe gauche. Depuis, cette droguée au sport n’a eu de cesse de s’entraîner pour les Jeux Paralympiques de Paris 2024. Sa discipline : le tennis fauteuil. Mais ne vous y fiez pas, ce qu’elle aime avant tout, c’est taper dans la balle…comme avant. Rencontre avec une femme toujours debout.

Lire plus »
Manon Herbulot, les JO pour cible

Manon Herbulot, les JO pour cible

À seulement 17 ans, Manon Herbulot fait déjà ses armes aux Jeux Olympiques. Au tir à la carabine, elle affiche un parcours impressionnant et sa qualification aux JO de Paris se présente comme le couronnement d’un travail qui prouve sa maturité.

Lire plus »
Il était une fois le hockey sur glace…féminin

Il était une fois le hockey sur glace…féminin

Même si l’équipe de France de hockey n’a (hélas !) pas été qualifiée pour les JO de Pékin à partir du 4 février, remisons nos drapeaux et prenons date sans rougir avec les dix équipes féminines du reste du monde qui vont s’affronter sur la glace. Car l’affiche est belle. Et ça valait bien un petit saut dans le passé, lorsque ces dames ont pu mettre la main sur la crosse.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner