« Depuis toute petite, j’ai rêvé de percer en tennis, et ce rêve je l’ai réalisé. Si je devais refaire ma vie, je ne changerais rien. Jusqu’à mes 15 ans, j’ai toujours eu de bonnes notes à l’école, mais, après, j’ai abandonné mes études pour le tennis. Je n’ai pas le moindre regret, je crois que n’importe qui, à ma place, serait fier de ce que j’ai fait dans ma vie. »
Martina Hingis, née le 30 septembre 1980 à Košice, en Slovaquie (alors la Tchécoslovaquie), débute le tennis très jeune : dès l’âge de cinq ans, elle participe à ses premiers tournois. Son entraîneur n’est autre que sa mère, qui l’a déjà placée sous une bonne étoile en la prénommant comme la championne de tennis Martina Navratilova.
Le destin ne tarde pas à se manifester : la toute jeune tenniswoman remporte Roland-Garros Juniors en 1993. Elle n’a que 13 ans et continue sur sa belle lancée en devenant Championne du monde junior en simple filles, toujours sur la terre battue française, un an plus tard. Du haut des ses quatorze printemps, Hingis entre alors dans le cercle des pros…
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Une « Swiss Miss » au sommet
L’ascension est fulgurante : en 1996, elle remporte son premier titre du Grand Chelem (qui consiste à gagner la même année, les quatre tournois majeurs du circuit international organisé par la Fédération internationale de tennis : Championnats d’Australie, de France, des Etats-Unis d’Amérique, et de Wimbledon).
Elle, ce sera en double, à Wimbledon et, rebelote, en tant que joueuse en simple, à l’Open d’Australie en 1997. La voici la plus jeune joueuse de l’ère moderne à remporter un tournoi du Grand Chelem, à l’âge de 16 ans, 3 mois et 26 jours !
Cette même année, elle réalise un Petit Chelem, empochant aussi la première place à l’US Open et à Wimbledon. Toujours en 1997, après son sacre à Miami, elle accède à la première place du classement WTA, devenant, à 16 ans et 6 mois, la plus jeune numéro 1 mondiale de l’histoire du tennis.
En à peine trois ans, Martina Hingis devient l’étoile du tennis mondial, la « Swiss Miss » comme la surnomme la presse. Mais quelle est donc sa formule tennistique magique ?
Un jeu de génie inégalé
« Avant Roger Federer, c’était elle l’ambassadrice du tennis suisse. Une technique parfaite. Une intelligence du jeu rarement égalée », expliquait le journal suisse Le Temps, dans un article en 2012.
L’une de ses adversaires, la championne Mary Pierce, confie quant à elle que la joueuse de tennis parfaite devrait avoir « la sélection des coups de Martina Hingis » : « Elle était une joueuse très intelligente. Elle jouait au tennis comme si elle jouait aux échecs. Elle était super efficace. Pas la joueuse la plus puissante, mais vraiment, vraiment intelligente. »
Pour Arnaud Jamin, journaliste et auteur, qui a consacré un livre à la joueuse en 2019, Le Caprice Hingis*, Martina Hingis incarne « une exception splendide dans l’histoire du tennis, un personnage littéraire qui évoque des mouvements de grand lyrisme et de grande beauté ».
La patte Hingis ? « Je gagnais mes matchs en jouant intelligemment. (…) Depuis les Juniors jusqu’à aujourd’hui, cela a toujours été mon point fort : j’analyse, je joue juste, je m’adapte à ma partenaire et à l’adversaire, je trouve toujours une solution. Il le faut parce que je n’ai pas la puissance », révélait l’intéressée au Temps en 2017.
Ainsi, la championne compensait son manque de puissance par la précision de ses balles et sa fluidité de mouvement. Une beauté du geste qu’elle savait associer à des victoires… jusqu’à ce match fatal à Roland-Garros en 1999.
Un match historique au goût d’inachevé
« Son échec signe la fin d’un certain tennis flamboyant », nous résume Arnaud Jamin, lui qui a conté ce match telle une guerre fondatrice entre deux déesses mythologiques. C’était le 5 juin 1999. La finale de Roland-Garros. Une sorte d’affrontement moderne de David contre Goliath, Martina Hingis, petite princesse de la terre battue, numéro 1 mondiale, 18 ans, et Steffi Graf, grande championne de 30 ans en fin de carrière, que le public parisien veut voir gagner pour couronner toutes ses belles années à tenir le monde du tennis en haleine.
Pendant un set et demi, la jeune Suissesse fait des merveilles, a toujours un coup d’avance, impose sa science du jeu à son aînée. Jusqu’à la balle litigieuse… L’arbitre ne retrouve pas la marque et applique la règle qui est de conserver l’annonce originale : le point était accordé à Graf.
Mais la jeune impétueuse refuse, demande à rejouer le point, traverse le court et passe de l’autre côté du filet pour montrer elle-même la marque. Erreur : le règlement l’interdit.
Le public parisien ne lui pardonnera pas ce faux pas : « Un public représente la société. Quand une jeune fille remet en cause l’arbitrage contre la reine Steffi Graf, sacrée cinq fois à Roland-Garros, ça ne passe pas. Je crois qu’on en veut à ceux qui ont du talent trop jeune », analyse Arnaud Jamin.
Le juge arbitre du tournoi et la superviseure de la WTA descendent sur le terrain pour « raisonner » cette jeunesse rebelle. « On la voit refuser un contexte d’arbitre et elle a raison, la balle est bonne et elle lui permettait de marcher vers la victoire. Mais l’arbitre annonce « faute ». Elle s’avance vers le filet et elle dit « Non ! ». C’est le cri d’une jeune fille qui va être étouffé. Steffi Graf ne prend pas part à la contestation tandis que le public français hurle « Steffi ! ». Ce public va tuer l’esprit du jeu ».
Arnaud Jamin a ressenti toute l’injustice de ce match qu’il retranscrit parfaitement dans son livre : « Ce livre, c’est sa défense et, par extension, la défense d’un certain style de tennis où la force n’est pas l’essentiel. »
La fougue perdra contre l’expérience.
Huée par la foule, vaincue, Martina Hingis fuira la terre battue. Avant de revenir, en pleurs sur le court central, ramenée quasi de force par sa mère, pour assister à la remise des trophées et honorer le fair-play sportif.
La fin d’un rêve sur terre battue
Hingis vient de perdre pour la deuxième fois ce tournoi du Grand Chelem et ne le gagnera jamais. Pour Arnaud Jamin, « la fin de Martina Hingis, à l’aube de l’an 2000, c’est vraiment la fin d’une époque, d’un style de tennis où l’on pouvait avoir des exceptions magnifiques comme elle l’était. »
Elle le confirmera elle-même quelques années plus tard : « Les temps ont changé. C’est plus physique. C’est une génération différente. »
Épique, ce match restera dans les annales du sport et marquera un réel bouleversement pour la peut-être trop sensible étoile du tennis.
Si elle continue à gagner des tournois et reste numéro 1 pendant longtemps, elle ne gagnera plus de tournois de Grand Chelem en simple et se verra confrontée aux « cogneuses », les sœurs Williams, symbole de ce tennis basé sur la puissance.
En 2003, suite à plusieurs blessures au pied, elle annonce prendre sa retraite. Elle a seulement 22 ans.
Martina Hingis fera deux comebacks dont un de 2013 à 2017 pendant lequel elle redevient numéro 1 mondiale, mais en double.
Cette joueuse d’exception aura donc remporté tous les tournois du Grand Chelem, que ce soit en double, en double mixte ou en simple. À l’exception de… Roland-Garros.
Après avoir définitivement pris sa retraite du circuit professionnel en 2017, Martina Hingis semble déjà préparer sa fillette Lia – née en 2019 ! – à prendre la relève.
Lia is just practicing some volleys for @Wimbledon 😋 🎾 🌱🌱🌱 #risingstar pic.twitter.com/LDZ6Ni1RRc
— Martina Hingis (@mhingis) April 11, 2020
ÀBLOCK! de mère en fille et de génération en génération, la beauté du sport…