Léa Labrousse« En trampoline, voir un garçon aller plus haut que moi, ça me booste ! »

Léa Labrousse
Pétillante, fraîche et aérienne, elle pourrait bien faire ses plus belles figures aux prochains JO de Tokyo. En attendant, Léa Labrousse, trampoliniste française, continue de prendre d’assaut la toile en compétitions internationales. Du haut de ses 23 ans, elle sait comme personne déchausser les baskets pour se propulser dans les airs avec une puissance et une précision dont elle seule a le secret. Rencontre avec une fille d’une autre dimension. En toute légèreté.

Par Claire Bonnot

Publié le 19 décembre 2020 à 12h46, mis à jour le 30 juillet 2021 à 14h39

Tu es en bonne voie pour être qualifiée aux JO de Tokyo, quel effet ça fait ?

J’étais seulement remplaçante pour les JO de Rio en 2016 donc j’avais hâte que les Jeux arrivent en 2020. Qu’ils aient été reportés d’un an n’a fait qu’augmenter mon envie d’y parvenir. Je ne suis pas encore sélectionnée personnellement, mais j’ai qualifié le pays. Ça se déroule via plusieurs compétitions qui ont débuté l’année dernière avec les Championnats du monde, les Coupes du monde…

On va avoir les Championnats d’Europe au mois d’avril. On est deux en lice, ce sera bien évidemment la meilleure qui fera l’aventure olympique… Si ça marche pour moi, ce sera vraiment un rêve qui se réalise !

©Laurent Daufes

À tout juste 23 ans, tu es donc déjà possiblement en partance pour les JO et médaillée d’or aux Jeux Européens, en 2019. Comment as-tu fait le grand bond vers le trampoline ?

Très simplement. Petite, je faisais de la gymnastique – j’ai commencé vers l’âge de sept ans – et il y avait un trampoline dans la salle. Comme ma sœur m’emmenait souvent plus tôt que l’heure de l’entraînement, j’avais tendance à m’ennuyer… Alors on m’a proposé très vite de tester le trampoline et j’ai continué tout en pratiquant ma gym. Ça me plaisait de plus en plus et, en sixième, j’ai choisi de me consacrer à cette discipline.

Qu’est-ce qui te plaît dans ce sport ?

Tout de suite, ça a été comme un jeu pour moi. On pouvait faire beaucoup plus d’acrobaties qu’en gym et j’aimais beaucoup cette dimension-là ! Je suis aussi compétitrice, j’aime gagner donc je fonce. Je n’hésite jamais à hausser la difficulté de mes figures, je n’ai pas le choix pour rester au top !

Actuellement, je bosse à fond pour perfectionner mes triples rotations (elle est la seule aujourd’hui sur le circuit à maîtriser cette figure, ndlr) et je m’amuse aussi… Disons que je tente d’autres difficultés : j’ai passé les quatre triples rotation récemment !

©FFGym

Quelles sont tes sensations quand tu es dans les airs ? Tu n’as jamais peur ?

J’ai vraiment la sensation de voler. Au début, on croit qu’on va avoir la tête qui tourne, mais on prend vite l’habitude. Ça m’arrive d’avoir peur, oui, notamment pour le placement : il faut savoir arriver dans la toile et faire attention à ne pas atterrir… par terre.

Ça peut m’arriver d’avoir peur aussi pour certaines figures comme les vrilles telles que le « rudy », mais, là encore, si je veux performer, je suis obligée de les passer. Et c’est ce qui me permet de dépasser l’appréhension. Le trampoline, c’est de l’adrénaline, j’aime ça donc je rebondis toujours !

©FFGym

Comment on devient une pro du trampoline, physiquement et mentalement ?

J’ai commencé la gym et les compétitions en gym et trampoline très tôt, je suis rodée en quelque sorte. (Dès l’âge de dix ans, en 2007, Léa est championne de France benjamine et continue sa progression sur la première marche du podium suivant les catégories, en 2008, 2011 et 2012, ndlr). Sinon on est toutes suivies par un psy et, à une époque, j’avais aussi fait de la sophrologie.

Physiquement, je fais de la musculation trois fois par semaine avec un préparateur physique. Pour ce qui est de l’entraînement pur et dur au Pôle France d’Antibes, c’est deux fois par jour quatre fois par semaine et une fois le mercredi et le samedi.

©DR

Quelle est la marque de fabrique Léa Labrousse sur trampoline ? Ton point fort ?

En compétitions de trampoline, on est jugés sur le temps de vol, la hauteur, les difficultés, l’exécution et le déplacement. Je pense que moi, je gère bien la difficulté – je teste de nouvelles figures – et je suis assez stable dans le sens où je vais toujours au bout de mes mouvements.

Une victoire qui t’a fait sauter au plafond ?

Je dirais les Championnats du monde en 2019 avec la qualification olympique en demi-finale et ma médaille aux Jeux Européens la même année. Pour les Championnats du monde, c’était à la fois stressant et inoubliable, l’ambiance était très intense car on y jouait tous notre quota olympique. Je me suis placée à la cinquième place !

Pour les Jeux Européens, c’était ma première médaille individuelle dans une compétition internationale d’une telle envergure.

©FFGym

Un coup dur qui t’a quand même permis de rebondir ?

Mes blessures… En 2013 d’abord, j’avais seize ans, j’étais jeune, et j’ai eu du mal à revenir après mes six mois d’arrêt. J’ai eu peur.

Et puis, en 2018, j’ai eu une période compliquée : je suis tombée lors de plusieurs compétitions et deux fois dans la même compétition, à chaque fois sur la même figure. On se remet alors beaucoup en question, c’est assez stressant.

Mais on arrive toujours à dépasser ça car il y a une autre compétition derrière à préparer… Et parce qu’on s’entraîne et quand ça repasse une fois… C’est bon !

©FFGym

Tu gères bien le rebond alors ?

Le mental joue beaucoup. Je me dis « Il faut que j’aille au bout de l’enchaînement ». Parce qu’on ne sait jamais ce qu’il va se passer avec nos adversaires. Il faut réaliser nos passages.

Le monde du trampoline est sympa pour les filles ?

Il n’y a pas de groupes séparés. Il y a vraiment une bonne relation avec les garçons, on est toujours ensemble, on s’entraîne ensemble. Et puis voir un garçon aller plus haut que moi, quand même, il faut le dire, ça me booste ! On prend exemple, on essaye de saisir ce que ça peut nous apporter.

©Laurent Daufes

Être une sportive de haut niveau, ça t’aide dans ta vie quotidienne ?

Question difficile : je vis dans le sport depuis tellement longtemps ! J’y suis plongée quotidiennement depuis toujours. Je n’ai pas de recul. Mais je crois bien que ça m’a permis d’être autonome jeune, sûrement plus rapidement que d’autres. Je suis partie de chez mes parents à l’âge de quatorze ans.

Comment s’est passé le confinement pour toi ? Pas trop dur de rester sur la terre ferme ?

Le premier confinement, ça a été un coup dur, oui, parce que les Jeux Olympiques et les compétitions ont été reportés. Et puis, les séances de muscu en visio avec les coachs, ça manquait d’énergie ! Le deuxième confinement, je ne l’ai pas vu passer…

©FFGym

Quel est ton plus grand rêve sportif ?

Gagner les Jeux de Tokyo ! J’aimerais aussi participer à ceux de Paris en 2024, mais, ça, on verra plus tard… Pour l’instant, j’attends, j’espère, le grand bond de 2021 !

©FFGym

Soutenez ÀBLOCK!

Aidez-nous à faire bouger les lignes !

ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.

Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.

Soyons ÀBLOCK! ensemble ! 🙏

Abonnez-vous à la newsletter mensuelle

Vous aimerez aussi…

K-Méléon

K-Méléon

Très jeune, K-Méléon développe une sensibilité aigüe pour la musique tous styles confondus. Ses premières influences

Lire plus »
Ashleigh Barty, la (trop) discrète patronne du tennis mondial

Ashleigh Barty, la (trop) discrète patronne du tennis mondial

Elle est une des favorites incontestables de l’Open de Melbourne qui s’ouvre ce lundi en Australie. Ashleigh Barty n’a pas connu que des succès sur les courts, mais a toujours su rebondir. Celle qui trace sa route sans esbroufe est l’une des joueuses les plus talentueuses du moment. Portrait d’une drôle de fille devenue N°1 mondiale.

Lire plus »
Kasey Badger, l'héroïne au sifflet

Kasey Badger, l’héroïne au sifflet

Le 24 octobre dernier, lors d’un match de la Coupe du monde masculine de rugby à XIII, la star n’était pas ballon en main, mais sifflet en bouche. L’Australienne Kasey Badger est devenue la première de l’histoire de la discipline à avoir arbitré un match d’un tel niveau.

Lire plus »
Dominique Carlac’h : « Grâce au sport, j’ai appris que la peur de l'échec ne l'emporte pas. Il faut y aller. »

Dominique Carlac’h : « Grâce au sport, j’ai appris que la peur de l’échec ne l’emporte pas. Il faut y aller. »

Elle aime se définir comme une femme d’engagement. La Bretonne Dominique Carlac’h co-préside, du haut de son 1,84m, aux destinés du Medef. Elle est aussi cheffe d’entreprise et ex-sportive de haut niveau, championne de France au 400m. Le sport l’a nourrie, construite, presque façonnée. Mais il l’a aussi fragilisée, bouleversée. Entretien XXL avec une drôle de dame qui n’a plus peur de rien.

Lire plus »
Camille : « Le sport outdoor me permet de revenir à l'essentiel.»

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une Question qui tue pour la fin de séance, le parfait alliage entre sport et bronzage, une fan du sport outdoor (Camille sur notre photo) et une gymnaste qui a l’Europe dans la peau, c’est le meilleur d’ÀBLOCK! de la semaine. Bon récap !

Lire plus »
6 juillet 2018, des cyclistes amatrices font le Tour de France un jour avant les hommes

6 juillet 2018, des filles donnent des Elles au vélo sur le Tour de France

Elles sont Treize, treize coureuses cyclistes de l’association « Donnons des Elles au vélo » qui veulent prouver que le cyclisme féminin mérite qu’on se batte pour lui. Ce 6 juillet 2018, c’est la quatrième année consécutive qu’elles prennent le départ pour la Grande Boucle un jour avant les hommes. L’objectif ? Obtenir une meilleure visibilité pour les femmes dans le cyclisme et faire en sorte qu’elles puissent avoir, un jour, leur petite reine.

Lire plus »
Retour en haut de page

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

WordPress Cookie Notice by Real Cookie Banner