Tu es un prodige précoce du BMX – premiers titres de Championne de France Cadette en 2013 et 2014, à l’âge de 15 et 16 ans. Ça a débuté comment ?
C’est un sport que je ne connaissais pas du tout, mais comme mon frère en faisait, j’ai voulu essayer. J’avais 8 ans et, tout comme lui, j’ai très vite fait de la compétition. On enchaînait les week-ends de compét’ en famille, nos parents étaient là, ils nous soutenaient.
Qu’est-ce qui te plaisait tant dans ce sport extrême ?
Les compétitions ! J’ai toujours adoré ça, je voulais à tout prix gagner ! Le fait d’avoir rapidement bien marché dans ce sport m’a donné envie de progresser, cette envie du toujours plus, de donner le meilleur.
Et puis, les sensations de vitesse aussi. Encore aujourd’hui, ça me galvanise ! Pour la catégorie Race, huit pilotes s’élancent pour un sprint sur un terrain à obstacles, parsemé de bosses. Il faut arriver au bout de cette piste d’environ 400 mètres le plus vite possible.
Comment vis-tu le sport de haut-niveau sur le plan du physique et du mental ?
C’est assez intense, il faut être à fond, mais j’adore ! Je conjugue mes études de kinésithérapie et la compétition donc, parfois, c’est dur à gérer niveau organisation et stress évidemment. Il faut faire attention à la récupération, ne pas se coucher trop tard, bien manger, être toujours attentif à soi… Mais je suis super heureuse d’avoir pris cette voie.
Tu as rejoint l’Armée des Champions en 2018, un dispositif d’accompagnement pour athlètes de haut-niveau représentant la France et l’armée durant les compétitions et pouvant être amenés à remplir des missions. C’est ce qui te permet presque d’évoluer dans un cadre de cycliste professionnelle ?
C’est impossible d’avoir un petit boulot en étant étudiante et en poursuivant les entraînements, l’Armée des Champions permet donc de vivre et de s’entraîner au maximum. La rémunération mensuelle permet de payer les études, le loyer…
Surtout dans cette période où les compétitions sont annulées et, par la même occasion, les possibles rentrées d’argent liées aux subventions et aux primes de compétition en fonction de nos performances et de nos places.
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Devenir pilote professionnelle, c’est ton objectif ?
C’est un sport assez extrême, ça me semble difficile de faire ça toute sa vie. Il y a trop de risques de blessures.
Quels sont les moments sportifs de ta carrière qui t’ont propulsée et ceux qui ont été difficile à surmonter ?
Ce sont les blessures qui entraînent les moments les plus durs… On se sent fort, on se sent bien et ça arrive comme ça, d’un coup ! Et on loupe des compétitions, on arrête de faire ce qu’on aime. Ça déprime assez vite…
Le vrai coup dur, ce fut en 2018 quand je suis tombée lourdement sur l’épaule, ce qui a provoqué un enchaînement de blessures : déchirement du tendon, tendinites à répétition, c’était très douloureux et en permanence.
J’ai eu beaucoup de mal à m’en relever, mais je n’ai pas laissé tomber, je me suis battue ! Et, au finish, c’est là que j’ai vécu un de mes meilleurs moments sportifs : l’an dernier, après m’être reprise en main, j’ai performé aux Championnats du monde en Élite. Je me suis classée troisième, c’était un rêve ! Je n’ai jamais été aussi heureuse !
Je partais d’un niveau tellement bas, tellement faible, que je n’y croyais pas. J’ai beaucoup travaillé avec un coach mental car j’avais des grosses frayeurs en saut. Mon corps ne voulait plus, je l’étranglais presque, ce qui faisait que je perdais toute mon énergie.
Pendant cette période, il y a eu beaucoup plus de bas que de hauts mais c’est quand j’ai commencé à voir le bout du tunnel que j’ai progressé en force !
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Qu’est-ce que le sport et cette discipline du BMX en particulier t’ont apporté d’un point de vue personnel ?
Le sport m’a fait grandir. J’ai été en Pôle France à l’âge de 15 ans, j’ai dû partir de chez mes parents à ce moment-là et ça te fait gagner en maturité ! J’ai pu découvrir plein de choses, faire des tas de voyages grâce aux compétitions, me faire des amis dans d’autres pays…
Petite, j’étais assez timide, le sport m’a permis de m’affirmer. Je sais me prendre en main et quand je veux quelque chose, je sais que je vais le faire, rien ne m’arrête !
Aussi, avec la compétition, on découvre la pression, celle qu’on se met à soi-même et celle qu’on peut avoir vis-à-vis des autres et c’est excitant. Le sport offre un vrai bouquet d’émotions !
Le BMX est un sport extrême qui peut être vu comme plutôt réservé aux hommes. Est-ce un milieu ouvert aux femmes ?
Effectivement, c’est un milieu plus masculin où il y a assez peu de filles. On le voit dans les organisations de compétitions. Proportionnellement, on est beaucoup moins que les garçons. Les filles, en Élite, ont plutôt des quarts puis des demi-finales, les hommes, eux, débutent en huitièmes de finale. Celles-ci se font à partir de 64 pilotes et les quarts-de-finale à partir de 32 pilotes.
Mais je n’ai jamais eu à combattre des préjugés ou des remarques sexistes parce que mon point fort, c’est ma force, ma puissance musculaire !
Côté féminin, on est de plus en plus à faire de bonnes courses et il y a du niveau !
Que dirais-tu à des jeunes femmes qui n’osent pas se lancer dans un sport comme le BMX qu’elles imaginent réservé aux hommes ?
Aucun sport n’est réservé pour un type de personne ! Si elles ont envie de se lancer, il faut y aller, s’amuser et progresser. Et surtout, ne pas faire attention au regard des gens.
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Après une saison sacrifiée par le Covid, tu te remets dans la course avec les Championnats de France BMX qui se déroulent jusqu’au 18 octobre sur la piste de Lempdes, près de Clermont-Ferrand. Tu fais d’ailleurs partie de l’équipe Lempdes BMX Auvergne. Tu es sur tes terres, comment te sens-tu ?
Je me sens très bien, mentalement et physiquement ! En fait, cette année, je n’ai pratiquement fait que des entraînements et seulement deux compétitions, une en janvier et une en février, ce qui est plutôt rare comme situation…
Donc, au final, j’ai passé mon temps à me préparer et je crois que je peux dire que j’ai progressé sur mes faiblesses ! Pendant le confinement, j’ai fait beaucoup de renforcement musculaire et, juste après, j’ai ressorti mon BMX, j’ai travaillé sur mes épaules, ma souplesse et ma force.
Tu as déjà été couronnée Championne de France Élite en 2017. Qu’est-ce que tu souhaiterais pour cette nouvelle édition ?
J’attends de rouler à mon meilleur et d’enchaîner des tours assez propres. J’espère faire le meilleur résultat possible parce qu’il y a eu peu de courses cette année et j’ai vraiment envie de performer !
Quel est ton grand rêve sportif ? Tu as malheureusement manqué les Jeux Olympiques 2016 suite à une fracture de la cheville, tu étais alors remplaçante dans l’équipe de France…
Actuellement, j’aimerais me qualifier pour les JO de Tokyo en 2021. Il y a deux places à prendre en Élites dames et, en équipe de France, on est trois à pouvoir concourir. Donc, c’est possible, mais tout dépend de mes résultats à venir.
Ramener une médaille olympique, c’est un rêve pour beaucoup de sportifs et c’est aussi une belle expérience. J’espère vraiment pouvoir la vivre.
Depuis notre rencontre, Axelle Étienne a décroché son 2e titre de Championne de France.