Siraba Dembélé« Sur le terrain, mon moteur, c’est l’émotion. »

Siraba Dembélé
Posée, enthousiaste, passionnée, la numéro 17 de l’équipe de France de handball a tous les atouts du capitaine...de vaisseau sportif ! Siraba Dembélé, 34 ans, devenue mère l’an dernier, revient sur le devant de la scène avec plus de gagne que jamais. Une sportive à suivre pour les futurs JO de Tokyo !

Par Claire Bonnot

Publié le 16 novembre 2020 à 14h59, mis à jour le 24 avril 2023 à 11h01

Tu es sélectionnée en équipe de France à l’âge de 20 ans, en 2006, et tu gravis rapidement les échelons avec, à la clé, un tableau de récompenses fabuleux : vice-championne olympique en 2016, championne du monde en 2017 puis championne d’Europe en 2018… Comment as-tu fait du handball ton sport-vocation ?

J’ai vraiment commencé le hand par hasard, je ne connaissais pas du tout ce sport, et rien du milieu sportif, en réalité. Ma sœur avait voulu s’inscrire dans un club de hand, à côté d’où l’on habitait. Je l’accompagnais à ses entraînements et j’ai fini par en faire avec elle.

Depuis, je n’ai jamais quitté les baskets. J’avais 11 ans et ça m’a tout de suite plu. Pour le côté sport collectif, l’interaction avec les copines sur le terrain et toute l’énergie qu’il fallait y mettre ! Je n’avais pas forcément envie de faire du haut-niveau ou d’être professionnelle, je crois surtout que je n’y pensais même pas, je me suis toujours laissée guider… Quand on me proposait des défis, je les relevais !

Siraba Dembélé-Pavlović : « J’arrête ma carrière et c’est sans regret.»
©FFHB

Qu’est-ce que ta carrière dans le handball te procure sur le plan personnel ?

Ça fait tellement longtemps que j’en fais – ça va faire quinze ans ! – que je pense que ça m’a construit en tant que personne. Déjà, à la base, j’étais quelqu’un de très introverti donc je suis certaine que ça m’a aidé à m’ouvrir. C’est tout l’aspect humain qui a permis cela : les rencontres qu’on peut faire au fur et à mesure qu’on change d’équipe et donc aussi la découverte d’autres pays, un véritable enrichissement culturel.

En jouant à l’étranger – aujourd’hui, Siraba Dembélé est dans l’équipe du CSM Bucarest, en Roumanie, après avoir joué pour le Danemark, la Macédoine, la Russie et Toulon pour la France, ndlr – j’ai pu apprendre d’autres langues, par exemple.

Le sport de haut-niveau offre de voir du monde et d’ouvrir l’esprit. C’est une belle école de la vie !

Siraba Dembélé
©FFHB

Tu es devenue maman de jumeaux en 2019, comment gères-tu ta vie personnelle et ton implication dans le handball à haut-niveau ?

Dans le handball, il faut prendre soin de son corps car plus on vieillit, plus notre corps change et on encaisse moins bien. Depuis que je suis maman, je fais encore plus attention à mon hygiène de vie, je suis plus pointilleuse pour rester pleine d’énergie. J’ai une vie à dix mille à l’heure, mais je fais tout pour prendre soin de ma famille tout en restant performante sur le terrain.

Après, le haut-niveau, ça se joue aussi sur le plan du mental. Quand tu commences, tu sais que tu pars sur plusieurs années, il faut être solide mentalement, savoir que tu vas avoir des hauts et des bas et devoir faire face aux défaites et aux contre-performances.

Je suis partie de chez moi assez jeune, par exemple, mais je prenais ça comme une superbe opportunité. C’est vrai, à ce stade, quand on atteint le haut-niveau, on a moins le temps de voir sa famille et ça manque bien sûr, mais j’aime ce que je fais donc je me dis que c’est une chance d’en être là !

Siraba Dembélé
©FFHB

Tu sembles totalement imprégnée de ton sport… qu’est-ce que tu ressens lorsque tu joues ?

Quand je suis sur le terrain, je ne sais pas jouer sans émotions ! Je ne sais pas jouer de façon robotisée : aller à mes entraînements, être payée et rentrer à la maison. Ce n’est pas du tout mon moteur. Moi, j’ai besoin qu’on se dirige toutes vers le même objectif, qu’on ait des interactions émotionnelles pendant les matchs, qu’il se passe quelque chose de fort entre nous toutes, l’équipe.

Siraba Dembélé
©FFHB

Tu es reconnue comme l’une des meilleures ailières gauches au monde… Si tu devais résumer ton style de jeu ?

Ma force, c’est surtout ma combativité, je ne lâche jamais rien, je suis une battante ! Je ne me suis jamais attachée à des modèles du monde sportif pour m’inspirer ou me motiver. Je crois que, dès le départ, j’avais une sorte d’insouciance, d’innocence de jeune qui m’a peut-être permis d’aller aussi loin.

Siraba Dembélé-Pavlović : « J’arrête ma carrière et c’est sans regret.»
©FFHB

Si tu devais te retourner sur ta carrière, quels sont les moments difficiles et les moments d’éclats qui ont forgé la sportive et la femme que tu es aujourd’hui ?

Quand on a perdu en quart de finale aux JO de Londres en 2012, ça a été très difficile. Parce qu’on ne méritait pas de perdre, il n’y avait pas de raison, on jouait très bien, on avait fait une belle compétition, un bon match… Ce n’est pas que l’autre équipe ne méritait pas de gagner, c’est tout simplement que c’est très dur à encaisser quand on sait qu’on a mis tous nos moyens en œuvre dans le jeu, qu’on avait les bonnes sensations et que ça n’a pas abouti.

J’ai mis longtemps à m’en relever, j’ai eu besoin de temps pour accepter.

Le moment de bonheur que je garde en mémoire, c’est en 2010, à Toulon, lorsqu’on a gagné le Championnat de France. C’était une issue géniale car, au départ, nous n’étions pas les favorites… Mais grâce à l’ambiance au sein de notre collectif, cette envie de partir à l’assaut, on a réussi.

C’est ça qui me plaît dans le handball : chaque victoire, chaque combat, sont guidés par quelque chose qui transcende la somme des individus qui y participent.

Siraba Dembélé

Comment gardes-tu l’envie de jouer après les moments de désillusion ?

Grâce à l’expérience… Tu apprends de plus en plus à faire face aux défaites et à accepter. Et au lieu de te prendre la tête, tu vas être dans l’analyse constructive : tu en tires des leçons !

Que penses-tu du manque de médiatisation du sport féminin ?

Pour nous, dans le handball féminin, on a clairement plus d’exposition quand on fait des résultats, quand on ramène des médailles. Au moins, on a cette chance-là. D’autres sports en catégorie féminine ne l’ont même pas !

Siraba Dembélé
©FFHB

Comment vis-tu ces périodes de confinement et d’arrêt des compétitions ?

Pour ma part, je l’ai très bien vécu parce que j’ai pu profiter de mes jumeaux nouveau-nés. J’étais vraiment contente d’avoir ce temps très rare pour un sportif de haut-niveau qui court sans cesse à droite, à gauche. C’est finalement bien tombé. Aujourd’hui, on a repris les entraînements et on joue normalement, donc tout est ok !

Quel est ton (plus grand) rêve sportif ?

Actuellement, ce serait de gagner la Champions League et, bien sûr, les Jeux Olympiques de 2021 à Tokyo !

Siraba Dembélé
©FFHB

Comment tu boosterais toutes celles qui n’osent pas se lancer sur le terrain du sport ?

Le sport, c’est la vitalité, quel que soit l’activité que tu pratiques. Il ne faut pas hésiter à se mettre à bouger, parce que quand tu fais du sport, quand tu te mets en mouvement, tu te sens revivre.

Soutenez ÀBLOCK!

Aidez-nous à faire bouger les lignes !

ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.

Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.

Soyons ÀBLOCK! ensemble ! 🙏

Abonnez-vous à la newsletter mensuelle

Vous aimerez aussi…

Angelina Favario : « Le sport automobile est un sport macho, mais ça ne m’atteint pas. »

Angelina Favario : « Le sport automobile est un sport macho, mais ça ne m’atteint pas. »

Elle n’a pas encore 20 ans mais déjà une détermination de fer. Angelina Favario, jeune pilote, n’a qu’une idée en tête : devenir pro et, pourquoi pas, évoluer, à l’avenir, en Formule 1. La Savoyarde, qui a fait ses gammes l’an passé en F4, sait qu’elle devra, pour cela, se battre tout au long du chemin contre adversaires et préjugés. Rencontre avec une demoiselle que rien ne peut freiner.

Lire plus »

Paris tire à l’arc !

Si les Jeux Olympiques de cet été arrivent à grands pas, les tireurs ciblent encore leur billet pour Tokyo. La Fédération Française de Tir à l’Arc organise un tout dernier tournoi de qualification pour les Jeux, suivi d’une étape de la Coupe du Monde. Armez vos arcs !

Lire plus »
Salomé Gilles

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

La semaine dernière, on fêtait les femmes. Et même si, sur ÀBLOCK!, le 8 mars, c’est toute l’année, on a fait fort : une ministre, deux sociologues, une arbitre, sans compter nos pratiquantes et championnes (comme l’aviatrice Salomé Gilles sur notre photo), les rencontres se sont succédé. Alors, on est aux anges, comme d’hab’. Allez, on vous partage tout !

Lire plus »
La question qui tue

C’est grave si j’arrête de m’entraîner quelque temps ?  

Envie de se la couler douce en vacances, blessé ou victime d’un gros coup de mou ? Rien à faire, le sport passe à la trappe. Et tu culpabilises. Parce que, forcément, ce sera dur de reprendre, tu vas perdre ton niveau (ou du muscle), tu vas grossir… Mais, en vrai, abandonner (un peu) sa routine sportive, c’est grave ou ça passe ?

Lire plus »
Un petit échauffement avec les Jo d'hiver ?

Un petit échauffement avant les JO d’hiver ?

Quand le monde des sports de glisse a les yeux rivés sur les JO d’hiver de Pékin qui commencent le 4 février, une autre compétition s’annonce dans la station de l’Alpe d’Huez. Les Championnats du Monde Open de Ski Augmenté se dérouleront du 28 au 30 janvier. Un apéritif gourmand avant le plat de résistance olympique.

Lire plus »
Prithika Pavade Prithika Pavade, la “ping“ prodige

Prithika Pavade, la “ping“ prodige

C’est une jeune femme pressée. À 16 ans, Prithika Pavade a déjà un palmarès long comme le bras. La Francilienne, phénomène du tennis de table, attendue à Paris en 2024, est également du voyage à Tokyo. Les Jeux Olympiques, pour elle, ça commence aujourd’hui !

Lire plus »
Retour en haut de page

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

WordPress Cookie Notice by Real Cookie Banner