Shirine Boukli « En judo, quand t’es petite, t’es obligée d'être dynamique et ça tombe bien, je suis une pile ! »
Du haut de son petit 1,60m, elle a déjà fait plier plus d'un adversaire. Des femmes, parfois des hommes. La judoka Shirine Boukli, multi-titrée en France et à l'international, est haute comme trois pommes et alors ? Et c'est de ça dont elle nous parle à l'occasion de notre partenariat avec le podcast 1m60max.
Par Marion Griesemann
Publié le 17 avril 2024 à 18h42, mis à jour le 01 mai 2024 à 14h45
Pourquoi as-tu accepté d’offrir ton témoignage à 1m60max en partenariat avec ÀBLOCK! pour cette première saison de podcast* ?
L’occasion de m’exprimer dans ce podcast, c’est aussi l’occasion d’aider les femmes, dans le sport mais pas que, à se valoriser car certaines peuvent être “victimes” de moqueries à cause de leur taille. C’est un sujet qui me parle forcément même si ce n’est pas vraiment un tabou pour moi.
J’ai l’impression que le seul sujet c’est quand les jeunes, les “fans” me voient en vrai et me disent “Ah mais en fait tu es toute petite”. Ils sont choqués car à la télé, à côté de toutes les autres, ils me voyaient grande. Mais non, je suis petite !
Et ça te dérange ou t’as déjà dérangé à un moment de ta vie ?
Cela ne m’a jamais dérangé, j’en suis super fière. Vraiment, je suis trop bien petite moi. Les remarques ne m’ont jamais atteinte parce que je sais que ce je fais, je suis petite mais dans le judo je fais des grandes choses.
Je ne me suis jamais demandé si ça pouvait être un frein pour ma discipline parce que je crois tellement en ce que je fais, j’y vais tellement à fond, que si quelque chose m’arrête, c’est juste que je n’ai pas assez travaillé.
Est-ce que tu mets ta taille au service de ta pratique du judo ?
Être petite fait que je suis plus agile. Je me déplace super vite. J’aime beaucoup mettre du mouvement, créer “du vent” pour générer des réactions. J’ai pris des filles qui étaient parfois beaucoup plus grandes que moi. Je me souviens de l’ancienne championne du monde dans ma catégorie qui mesurait 1,72m. Je me suis retrouvée face à elle et je n’ai même pas essayé de me “servir de ma taille”.
J’ai mes spéciaux, comme des mouvements de hanche qui me permettent de me glisser légèrement en dessous pour pouvoir porter mes adversaires. Comme j’ai un bassin plus bas, avec les filles qui sont plus grandes, je descends sur mes appuis pour pouvoir les soulever. J’utilise aussi des techniques de sacrifices où je m’efface, je me jette sur le dos pour ensuite projeter l’adversaire.
Je dirais que je pratique un judo “enfermant” et quand je combats des plus grandes, j’aime beaucoup monter mon bras pour les descendre à ma taille. C’est très gênant pour elles. Quand on est petite en judo, on est obligée d’être dynamique. Et comme je suis une pile, je mets beaucoup d’énergie, de rythme, j’essaie de toujours trouver des solutions. C’est ça qui fait ma force.
Alors, on me donne plein de surnoms : Mini Corps, Shishou, Shish… C’est parce que j’ai toujours été dans des petites catégories. J’ai toujours été la plus petite depuis que je suis… petite. J’ai des petites jambes, des petites baguettes et dans mon kimono, je sers ma ceinture, elle est plus grande que moi !
Parlons kimono justement, et mode en général, sujet que tu adores je crois, comment ça se passe pour les ajuster quand on fait 1,57m ?
Avant, j’avais des kimonos beaucoup trop longs mais avec les nouvelles règles qui imposent que les kimonos soient justement plus longs pour tout le monde, ça ne pose plus de problème. En plus, il existe maintenant plusieurs gammes et notamment des kimonos slims bien adaptés pour les petites catégories et les filles “skinny” comme moi.
Aux précédents Jeux Olympiques, j’avais un kimono sur-mesure car comme j’ai malgré ma taille de plutôt grands bras, il fallait pouvoir bien le tailler.
Dans la vie de tous les jours, je m’adapte. Des fois, je trouve des jeans que j’adore, je vais les découper, faire un ourlet, les emmener chez le couturier. Les gens me disent “Mais comment ça se fait que ça te va ça ?” et “Bah tiens, regarde comment ça me va”.
J’aime beaucoup l’oversize donc je me suis fait un style où je porte des choses grandes, comme mes survêtements, alors que je suis petite. J’accentue le truc, je le cultive. Par contre, fait étonnant : j’ai des grands pieds. Du 38,5 voire du 39.
La taille, oui ! Ma mère est petite, ma grand-mère maternelle aussi, mes tantes…. On fait toutes la même taille, c’est trop mignon. Bon, mes frères sont grands. Enfants, on faisait tous quasiment la même taille, le même poids, on pouvait se bagarrer, faire du judo ensemble. Ils font tous du judo. Et puis, à l’adolescence, chacun a commencé à grandir, différemment.
Mon petit frère est à peine plus grand que moi mais, par contre, il est vraiment plus costaud. Un autre de mes frères, lui, il est super grand mais il est tout maigre. Ce qui fait qu’en poids, bah il est plutôt comme nous. Et enfin, le dernier, il n’est pas très grand pour l’instant mais je sens qu’il va faire une poussée de croissance ! Quoique mon père n’est pas très grand non plus, il fait 1,71m.
Est-ce qu’on t’a déjà fait des remarques sur ta taille, positives ou négatives ?
Basiquement, quand t’es petite, on te dit que tu es mignonne, ce genre de choses. Je suis identifiée comme la petite toute gentille, toute rigolote et c’est cool parce que c’est de bonnes choses mais, parfois, j’aimerais qu’on me prenne plus au sérieux.
La semaine dernière, par exemple, je suis partie faire du ju-jitsu brésilien comme tous les lundis et il y a un garçon qui a voulu combattre avec moi. Bon, il est plus grand, plus costaud, une ceinture au-dessus de moi mais peu importe le gabarit, moi je dis oui à tout le monde. On commence et, en fait, il se laisse faire, il me sous-estime. Je le regarde, je lui fais comprendre que je vais l’avoir là et il continue quand même. Je lui fais une clé de bras, je l’enchaîne sauf que là il s’énerve. En fait il s’est dit “La petite là, elle fait 40 kilos, on va juste rigoler” sauf que c’est pas dans mon caractère. Si on se bat, on se bat, même si tu me tues à la fin, je m’en fous. Et là, c’est clairement son égo qui en a pris un coup.
À l’inverse, des fois on me surestime. Il y a des petits jeunes dans des catégories au-dessus -moi, je suis en -48kg, qui veulent combattre avec moi et qui, comme je suis une championne, mettent toute leur force.
Mais, les mecs, vous êtes plus grands, vous avez la force d’un homme, calmez-vous !
Où est-ce que tu te vois après ta carrière de judoka ?
Je suis en école de commerce et je m’imagine bien dans le marketing, la communication. Je gère déjà mes réseaux tous les jours. Je n’ai pas beaucoup de temps pour les stages avec le judo mais j’adore ça. Dans le luxe ou la mode, pourquoi pas.
Tu t’es déjà dit que ta taille pouvait être un frein dans ces métiers-là ?
Non. Enfin, je sais, au fond de moi, qu’il peut y avoir des freins mais ce n’est pas ma mentalité de penser comme ça. Tout est possible, il faut y aller et on verra après.
Comme dans mon sport, je sais que je dois prouver ce que je vaux. Je ne veux pas qu’on s’arrête à un physique, je veux montrer mon caractère. Donc j’essaie de bien m’exprimer, dans les vidéos, dans les médias. Dans le judo, je suis une guerrière et je peux utiliser des gros mots pour me motiver mais dans la vie je suis tout sauf vulgaire, je pense que je suis plutôt solaire. J’ai deux caractères complètement opposés.
Mon premier modèle, c’est mon père. C’était l’homme le plus fort pour moi. Mes deux parents sont hyper inspirants, ils nous ont toujours donné les moyens de réussir dans la vie. J’ai toujours voulu les rendre fiers et c’est ma source principale d’inspiration.
Tu aimerais être un modèle pour d’autres, toi aussi ?
Ah ben oui, ce serait incroyable si je pouvais être un exemple. Enfin, je veux forcer personne !
Mais si les valeurs que j’incarne ou mes paroles peuvent motiver des gens, je prends ! Moi je reste naturelle, je dis ce que je ressens, je raconte mon parcours et si quelqu’un se bat après avoir entendu ce que j’ai dit, tant mieux. Si une jeune fille a envie de se mettre à faire un sport de combat alors qu’elle pensait ne pas pouvoir le faire car c’est une fille, tant mieux.
Parfois, on peut avoir des déclics comme ça, en écoutant les autres et pas forcément que des champions.
Qu’est-ce que tu dirais aux jeunes femmes de moins d’1,60m pour les inspirer ?
J’ai envie de dire à celles qui se sentent en retrait, qui ont l’impression d’être trop petites pour faire ce qu’elles rêvent de faire, que ce n’est pas vrai. Qu’elles peuvent le faire. Il faut juste s’en donner les moyens et peu importe le rêve. Il faut essayer pour ne pas avoir de regrets.
Moi-même, parfois, je me suis sentie intimidée et je n’ai pas fait certaines choses. Je m’en veux. Mais, aujourd’hui, je suis contente car j’ai passé des caps sur pleins de choses. Des petits caps hein, mais quand même. J’ai appris à me connaître, étape par étape, et ça a un impact dans ma discipline et dans ma vie aussi. J’ai que 25 ans et j’ai encore des choses à apprendre.
Là, je fais un podcast, c’est cool mais il faut discuter autour de soi pour arriver à ça. Il y a des gens super intéressants autour de nous grâce à qui on va capter des choses pour toute notre vie. C’est trop important. Il faut rester soi-même aussi. Il y a des gens qui ne nous aimeront pas, il y a des gens qui nous aimeront, on en a rien à faire quand on est épanouie et qu’on a une passion.
Je pense que c’est important de s’accrocher à quelque chose, d’avoir une source de motivation, des objectifs. Après, on voit comment on les atteint mais il faut toujours voir le positif. C’est vraiment pour ça que je ne pense pas du tout en négatif dans ma vie.
Je me dis, tout doit être positif, tout va bien. Il fait beau, je me sens bien dans ma peau !
Tu as toujours eu cet état d’esprit ?
Non, je l’ai construit. J’ai appris à avoir de plus en plus confiance en moi, mais ça n’a pas toujours été le cas. J’ai eu des périodes compliquées, que ce soit dans le judo, avec ma famille ou tout simplement au niveau de ma personnalité. Je suis quelqu’un de réservé, de pudique.
Parfois, je n’ose pas dire non pour ne pas blesser les autres, mais c’est finalement moi que ça impacte. Je pense que c’est important d’extérioriser les choses. Quand ça ne va pas, allez faire du judo, de la boxe !
Ah, et je vous conseille la respiration c’est bien aussi. Mais surtout amusez-vous !
Il y a donc eu des périodes où tu as douté de toi ?
Quand je suis arrivée à l’INSEP, c’était vraiment dur. Je suis arrivée sur la terre des champions, parmi les meilleures, et si avant je tuais tout le monde à l’entraînement, là je me fais tuer. Je suis la plus jeune, la plus petite, je ne suis pas assez musclée.
Heureusement, mon entraîneur m’a accompagnée. Il a cru en moi dès le début, même quand ça ne marchait pas, que j’étais frêle et que je pleurais dans ma chambre.
Et la taille n’aide pas. Je voyais les championnes du monde qui faisaient plus d’1,70m, je me posais beaucoup de questions. Mais j’ai découvert le judo japonais et ça a changé ma façon de voir les choses. Que ce soit les filles ou les garçons, ils sont ultra dynamiques. J’adore leur style parce qu’ils savent tout faire, ils sont incroyables.
C’est là que tu te rends compte que toi-même tu es capable de tout faire. Il n’y a pas de techniques pour grands ou de techniques pour petits. Quand tu les regardes, eux, qui réussissent, tu te dis qu’il faut s’accrocher : toi aussi tu vas prendre du muscle, toi aussi tu vas acquérir des compétences et des tactiques. C’est important ça dans le judo.
Demain, si je dois prendre une fille plus grande que moi et que je vois que physiquement ça va être compliqué, c’est simple, tactiquement, je vais essayer de la faire tomber !
Désillusion pour l’équipe de France. Pourtant en très grande forme lors des premiers matchs de cet Euro, les Bleues chutent par deux fois pour conclure la compétition. Pas de médaille et beaucoup de regrets, le bilan est dur malgré tout le talent du groupe tricolore. Le point sur la compet’.
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