Lise Billon : « L’alpinisme est un vaste terrain de jeu où exprimer nos libertés. » Métier : guide de haute montagne et coach à l’ENAF (Équipe Nationale d’Alpinisme Féminine)
Elle est une conquérante qui n’a pas froid aux yeux, une aventureuse qui grimpe sur les plus hauts sommets du monde et transmet sa passion avec bonheur. Guide de haute montagne, coach des futures alpinistes confirmées et aspirantes guides, quelques minutes avec elle et la montagne vous gagne ! De quoi emmener une belle cordée de femmes alpinistes dans son sillon…
Propos recueillis par Claire Bonnot
Publié le 25 janvier 2021 à 11h18, mis à jour le 29 juillet 2021 à 14h28
10 métiers du sport, 10 femmes, 10 témoignages. À l’occasion de l’opération « Sport Féminin Toujours » lancée par le ministère des Sports et le CSA, ÀBLOCK! s’associe à Femix’Sports avec pour mission de promouvoir le sport au féminin. Ensemble, nous avons choisi de mettre en lumière les métiers de la sphère sportive, ces métiers à féminiser d’urgence pour davantage d’équité et d’équilibre dans cet univers encore trop masculin.
« Mon papa était guide de haute montagne et même s’il n’a jamais vraiment travaillé en tant que tel car nous habitions dans la Drôme, ça a irrigué mon imaginaire. Je n’ai pourtant commencé la haute montagne que bien plus tard, lorsque j’étais étudiante à la fac. Auparavant, le sport en extérieur était tout de même déjà une passion avec l’escalade notamment.
Et puis les grands espaces m’attirent… J’ai vraiment commencé la haute montagne grâce à la FFME (Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade, ndlr) et ses comités départementaux, régionaux et nationaux. Je suis passée par chacune de ces équipes et étapes avant de moi-même devenir la monitrice qui encadre les futures alpinistes.
En alpinisme, il n’y a pas de compétitions et donc pas d’alpinistes professionnels à proprement parler. On pratique « en amateur », mais on peut arriver à en vivre en partie, grâce à des marques, des sponsors.
En dehors de mon activité professionnelle de guide justement, j’ai fait beaucoup de sommets (Lise est l’une des rares femmes alpinistes à avoir reçu le Piolet d’or. C’était en 2016 pour l’ouverture du pilier nord-est, haut de 1000 mètres, du Cerro Riso Patron (2550 m),ndlr)
Toutes ces ascensions forment, donnent un bagage technique, de l’expérience. Celles qui ont beaucoup comptées pour moi ont été en Patagonie. C’est très formateur parce que c’est un endroit où il n’y a pas de secours, où on n’a pas toutes les infos météorologiques, par exemple, donc l’engagement est réel et total. On part dans l’inconnu !
Pour moi, l’alpinisme c’est vraiment un terrain de jeu, une activité et un territoire assez vaste pour exprimer nos libertés. J’en parlais avec les copains, récemment, et on se disait que, oui, c’était futile d’une certaine façon et que ça ne servait à rien comme le dit si bien l’alpiniste Lionel Terray dans son livre, Les conquérants de l’inutile (1961).
Et justement, c’est comme l’art et c’est fondamental ! Surtout dans un monde où on va vers toujours plus de sécuritaire, avec la haute montagne, on est libres d’engager notre propre vie, c’est notre responsabilité, nos choix, nos actions. C’est vraiment une très belle activité !
Guide de haute montagne, c’est travailler sur plusieurs versants : j’exerce le travail de guide traditionnel à la Compagnie des Guides de Chamonix pour différents clients, allant du débutant au confirmé, et je suis aussi coach de l’équipe nationale d’alpinisme féminin de la FFME, l’ENAF (Équipe Nationale d’Alpinisme Féminine). J’accompagne et j’entraîne des jeunes femmes de 18 à 30 ans. Je travaille aussi avec des marques de l’outdoor pour ma pratique perso.
L’alpinisme français est un sport réglementé par la FFME (Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade) et la FFCAM (Fédération Française des Clubs Alpins et de Montagne). Ces deux fédérations ont des équipes nationales qui sont des cursus de trois ans sur lesquels on sélectionne une partie des jeunes pour les emmener vers le haut niveau en alpinisme. Ils ont déjà un bon niveau mais on est là, en tant que coach des équipes nationales, pour les faire progresser, aller au sommet de leur pratique !
Pour devenir Guide de haute montagne, il n’y a qu’un seul diplôme à obtenir et qui est reconnu internationalement, c’est celui de l’ENSA (l’École Nationale de Ski et d’Alpinisme) que j’ai obtenu et, avant ça, j’ai passé un brevet d’État d’escalade qui m’a permis de travailler en amont.
Ce que j’insuffle à mes apprenties alpinistes et aspirantes guides ? L’autonomie et l’envie d’y aller ! Et, plus largement, à booster leur mental car, lorsqu’on s’aventure en montagne, il faut être bien dans ses baskets et savoir qu’on ne sera pas un super héros tous les jours. Ce que je leur dis toujours, c’est que si le mental ne suit pas, même si les conditions climatiques sont réunies, on doit réussir à mettre son ego de côté et à passer son tour pour cette fois-ci.
La difficulté de ce métier, c’est que les risques sont toujours présents : il peut y avoir des conditions difficiles comme des avalanches, des risques objectifs comme les séracs ou les crevasses, les chutes de pierres, donc on prend de grosses responsabilités pour soi-même et pour nos clients. C’est pour ça qu’il faut réussir à prendre les bonnes décisions.
Je n’ai pas peur sauf lorsque je prends de mauvaises décisions. Si on veut perdurer dans ce métier, il faut toujours se remettre en question, toujours être dans l’observation et savoir faire preuve d’adaptabilité.
L’été dernier, pour une course avec des clients au Mont Blanc, j’avais des éléments qui me disaient de ne pas y aller, pourtant on a fait le sommet, c’était génial ! Mais il y a eu d’énormes chutes de pierre sur le passage. On n’a rien eu, mais on n’aurait pas dû y être !
C’est vrai qu’il y a encore moins de femmes que d’hommes dans ce sport. Pour les Piolets d’or, seulement deux femmes, ont été récompensées depuis la création du prix en 2009. Et on n’est qu’une petite quarantaine de femmes guides en France et ce, depuis la création du diplôme aux alentours de 1820. La première femme guide de haute montagne, c’était en 1983… Heureusement, on est en plein boom, l’alpinisme féminin se défend bien aujourd’hui !
Le nombre de femmes à intégrer le milieu de l’alpinisme a explosé ces dernières années. Si, dans les années 1990, les femmes pouvaient être attendues au tournant même si la formation est exactement la même, ce n’est plus le cas aujourd’hui et c’est même un argument de vente auprès des sponsors. On est plus recherchées parce qu’on est peu nombreuses et donc plus attractives par rapport aux alpinistes masculins.
Moi, par exemple, je ne me suis jamais sentie limitée parce que j’étais une fille, ça doit venir de mon éducation non genrée. Je suis complètement contre cette idée du macho et du mythe du guide grincheux dans le milieu de la haute montagne. Il faut recontextualiser, ce n’est pas le milieu qui est macho, c’est la société et, au-delà de ça, c’est un milieu très ouvert aux femmes. Guide est l’un des rares métiers en France où, à responsabilités égales, les femmes sont aussi bien payées.
Parfois, les clients demandent expressément à avoir des guides femmes et notamment les femmes elles-mêmes : ça leur fait moins peur, ça leur donne confiance. Dans tous les cas, c’est positif, même si les clients ne s’attendent pas à avoir une guide femme. De prime abord, ils peuvent être surpris et ils finissent la journée, impressionnés !
Comment je donne envie de faire ce métier ? J’envoie la vue que j’aie tous les jours sous les yeux depuis mon bureau et mon bureau, c’est la montagne ! Être Guide, c’est être tous les jours dehors, dans un cadre exceptionnel. C’est une chance inouïe ! »
En résumé, le guide de haute montagne est un alpiniste de haut niveau qui conduit et accompagne des personnes dans des excursions ou des ascensions.
Quelle formation ? Pour devenir guide de haute montagne, il faut obtenir le Diplôme d’Etat d’alpinisme-guide de haute montagne délivré par l’École Nationale de Ski et d’Alpinisme (Ensa). La formation s’effectue sur près de 4 ans en alternance. Elle comprend différentes étapes et est accessible après un examen probatoire ouvert sans condition de diplôme. Il est composé d’épreuves orales et techniques. Pour se présenter à l’examen, les candidats doivent fournir une liste des courses et escalades réalisées, dont certaines courses obligatoires apparaissant sur la liste fixée et communiquée par l’École Nationale des Sports de Montagne. Les candidats doivent être âgés de dix-huit ans révolus au 1er janvier de l’année de l’examen. Tous les 6 ans, un stage de recyclage est obligatoire.
Le témoignage de Lise a été recueilli dans le cadre de notre opération visant à féminiser les métiers du sport. En partenariat avec Femix’Sports, l’association qui accompagne le développement et la promotion du sport au féminin et en mixité.
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Elle est basée à Carcassonne, dans le Languedoc. Au sein du 3e RPIMa ou 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine, une unité d’élite de la 11e brigade parachutistes, elle n’a qu’un but : tenir physiquement la distance. Le sport est pour Virginie autant une respiration essentielle dans son quotidien qu’un moyen de se faire respecter dans un monde d’hommes. Vice-championne de cross-country de l’armée de terre, cette adjudante-là n’est pas prête à quitter le terrain.
À 22 ans, Fiona Colantuono, future ingénieure en énergies renouvelables, a décidé de prendre une année sabbatique pour mener à bien un projet un peu fou : parcourir l’Europe de l’Ouest en vélo solaire. Un défi de 8 000 kilomètres pour aller au bout d’elle-même, mais aussi pour mettre en lumière des initiatives locales consacrées à la transition énergétique. On vous embarque !
Championne de France en sauts d’obstacles handisport et journaliste à Radio France, Laëtitia Bernard est aveugle de naissance. Ce qui ne l’a jamais fait reculer et elle a su s’élancer pour trouver sa joie et sa liberté, autant sur le plan personnel que sportif. Un parcours incroyable qui rappelle que tout est possible lorsqu’on dépasse ses craintes. Une femme 100 % ÀBLOCK!
Passionnée de triathlon, Margot Sellem est infatigable quand il s’agit de se relever de ses blessures mais aussi de ses freins. Elle nous raconte le chemin parcouru en à peine trois ans de pratique assidue et acharnée de cette discipline de wonder(wo)men.
Elle a eu besoin de faire jusqu’à six heures de sport par jour. Servane Heudiard est bigorexique, un terme qui désigne une addiction pathologique au sport. Écrire lui a permis de prendre de la distance, de retrouver le plaisir et d’alerter sur les dangers de la pratique à outrance.
Elle n’était jamais montée sur un vélo. Jusqu’à il y a quatre ans. Une révélation. En 2021, après un périple initiatique sur deux roues en Nouvelle-Zélande, Marine Gualino se frottait à la Race Across France, une course d’ultra cyclisme. Témoignage d’une nana qui avale des kilomètres jusqu’à plus soif.
Avec la danse dans le sang et dans la peau, Isabelle Boileau ne pouvait que traverser sa vie en entrechats. C’est ce qu’elle a fait en pratiquant, très jeune, en semi-pro, avant d’opérer un petit saut de ballerine pour aller enseigner la danse. La danse comme une douce thérapie entre sport et création. En piste !
Kayak-poloïste, quésaco ? Tassia Konstantinidis, la vingtaine énergique, est de cette espèce trop méconnue : une athlète de kayak-polo, discipline du kayak qui a porté l’équipe française féminine en championnat national, européen et mondial jusqu’au Graal : la première marche du podium des Championnats d’Europe 2021. Avec, à son bord, cette jeunette de l’équipe senior. Témoignage d’une sportive de haut niveau qui tient bon la pagaie.
Métier : réparer les hommes les plus forts du monde. Massothérapeute pour gladiateurs du XXIe siècle alias les Strongmen, Véronique Grafe -appelez-la simplement “Véro“- envoie du lourd pour les remettre d’aplomb ! « Maman » de cette troupe de mecs super balèzes, l’ex-boxeuse se bat pour institutionnaliser sa discipline. Incursion au cœur de l’incroyable corps humain et de la force poussée à son extrême.
Le terrain du sport féminin, Émeline Dodard le connaît bien depuis qu’elle s’est jetée dans l’aventure du football américain. Passionnée par ce jeu tactique, elle met son esprit d’ingénieure au service de son poste d’attaquante. Et donne de la voix pour le médiatiser. Témoignage d’une fille aussi audacieuse que coriace.
C’est à la force de ses pas et d’une histoire familiale de battants que Laurie Phaï, trentenaire franco-cambodgienne est devenue marathonienne et championne de trails. Après sept ans comme pongiste en équipe de France, elle s’est mise à courir pour conjurer un drame personnel et ça l’a (re)lancée sur le chemin de sa vie. Elle s’apprête aujourd’hui à représenter le Cambodge aux Jeux d’Asie du Sud-Est et s’engage, là-bas, pour le sport féminin.
Marie-Laurence est totalement ÀBLOCK ! sur le sport depuis le plus jeune âge. Avec lui, elle a trouvé sa bouée de sauvetage, un moyen de canaliser son énergie. Mais c’est avec le football américain qu’elle a définitivement plaqué au sol tous ses conditionnements de vie : maintenant, le sport est un pur plaisir dans lequel elle s’engage à fond, comme une professionnelle. Elle souhaite passer le ballon aux plus jeunes, filles comme garçons : le sport peut changer des vies !
Championne du monde de natation, c’est pourtant en traversant pour la première fois, en 1904, le lac de Neuchâtel que Marthe Robert a marqué son temps. Sportive sauvage, nature et authentique, la Suissesse force le respect par son humilité, sa passion de la natation et son courage à toute épreuve, à une époque où les nageurs étaient portés au-dessus des flots, au contraire des nageuses…
Cette fille-là semble n’avoir peur de rien et surtout pas de la fonte qu’elle soulève avec une hargne jubilatoire. Témoignage d’une nana qui aimerait faire comprendre aux femmes que la force n’est pas toujours là où l’on croit.
Une fusée qui glisse comme elle respire, un sang-froid et une concentration inébranlables… Celle qui aime se surnommer « Fast & Curious » a une longueur d’avance : pionnière dans le skeleton féminin français, médaillée de bronze aux JO de La Jeunesse 2016, vice-championne d’Europe junior par deux fois et au bout du tunnel (de glace) : les JO d’hiver 2022. Rencontre tout schuss avec une reine de la luge.
C’est l’athlétisme qui l’a choisie et non l’inverse. Emeline Delanis s’est mise à courir parce qu’elle était douée. Tout simplement. La jeune Francilienne, 24 ans, est rapidement montée en puissance… et en distance. Passée du 800 mètres au 10 000 mètres avec succès, double championne de France espoir 3000m steeple et 5000m en 2017, 3e aux Championnats de France élite l’an dernier, elle ne compte pas s’arrêter là et lorgne désormais du côté de la course sur route, mais aussi du marathon avec, dans un coin de sa tête, les Jeux Olympiques. Rencontre avec une fille endurante !
Elles se sont lancées un défi un peu fou : participer au Rallye Aïcha des Gazelles au Maroc, le seul Rallye-Raid hors-piste 100% féminin au monde. Elles, ce sont Anne et Sandra. Elles devaient nous faire partager leur préparation jusqu’au départ, en 2021, mais le COVID-19 est passé par là et décision a été prise de reporter d’un an. Mais ce n’est que partie remise.
Voisine de l’Océan Atlantique, l’apprentie comédienne et modèle s’est un jour réveillée dans un corps et un mental de… sirène. Fascinée par le monde magique de ces créatures ondulantes, elle a fait de son rêve une réalité en devenant sirène professionnelle. Une féérie qui se travaille !
Elle pratique une discipline spectaculaire avec un flegme qui force le respect. Julia Clair, 26 ans, détient le record français de saut à ski féminin. Voler, rêve des humains depuis la nuit des temps, est sa spécialité, son atout, presque inné. Espérant décrocher une médaille aux prochains JO 2022, elle souhaite faire s’envoler la renommée de cette discipline féminine, trop peu médiatisée. Prenons le tremplin avec elle…
Elle a débuté par le cross country. Avant de basculer vers l’enduro. Une discipline qui a permis à Isabeau Courdurier, Championne du monde 2019 des Enduro world Series, de renouer avec le bonheur de rouler et de tenir à distance la course aux résultats à tout prix. Rencontre avec une rideuse apaisée et engagée.
Elle était lanceuse de disque, il était lanceur de marteau. Elle était tchécoslovaque, il était américain. En plein cœur des Jeux Olympiques de Melbourne, ils ont connu à la fois gloire et déshonneur en décrochant une médaille d’or et en vivant une histoire d’amour interdite entre bloc de l’Est et bloc de l’Ouest. Récit d’une « olympic romance » qui a enflammé le monde.
Les Femmes et la pratique sportive, où en sommes-nous ? À quelques années des JO 2024, comment se porte le sport féminin ? Via notre association Famosport, nous nous battons pour mettre les femmes en mouvement. Toutes les femmes.
Elle entame la compétition du Pacifique en sirène. Dès la première journée des Championnats pan-pacifiques, la nageuse australienne Jessicah Schipper fait des vagues en s’offrant un record mondial du 200m papillon. Tous à l’eau !
Pour accompagner nos pensées en cette période où le #restezchezvous est de rigueur, voici de la lecture motivante et inspirante, en bouquin ou en BD. Une recommandation culturelle qui fait la part belle aux sportives. De quoi être dans les starting-blocks avant la reprise !