Lauriane Lamperim« Après ma blessure, j’étais presque devenue une autre… »
Elle aimait jouer les acrobates. Tellement qu’elle fut 7 fois championne de France et multi-médaillée internationale en tumbling. Avant de se blesser grièvement. Et de faire son come-back. Mais la flamme n’était plus là. Aujourd’hui, Lauriane Lamperim a quitté le saut pour la vague. Désormais surfeuse, elle profite d’une autre vie de sportive. Rencontre avec une fille qui a su rebondir.
Par Claire Bonnot
Publié le 15 avril 2021 à 16h21, mis à jour le 23 septembre 2021 à 17h03
Douée pour les sauts acrobatiques, la petite Lauriane, née en 1992, a vite sauté avec plaisir dans le tumbling, discipline acrobatique spectaculaire de gymnastique au sol.
Alors que la jeune recrue de l’équipe de France est en pleine ascension, elle subit un grave accident de parcours lors d’un entraînement. Sa longue convalescence va changer sa vie. Lauriane Lamperim reprend le chemin du praticable avant de mettre fin à une carrière de dix ans au superbe palmarès : 7 fois championne de France et multi-médaillée internationale.
Dans son livre « Renaissance », la désormais surfeuse et kinésithérapeute raconte un parcours de reconstruction édifiant en forme de parcours du combattant, un manuel de développement personnel pour sportifs ou toutes autres personnes souhaitant dépasser ses peurs et atterrir au bon endroit.
Un témoignage précieux et ultra-boostant à mettre entre toutes les mains. Ou comment surfer sur la vague de la vie direction ses rêves !
Comment a débuté ta carrière dans ce sport méconnu qu’est le tumbling ?
J’ai d’abord sauté à pieds joints dans la gymnastique. Mon entraîneur encadrait aussi le tumbling et comme je touchais à cette discipline lorsque je travaillais les acrobaties sur le praticable, ça m’a donné l’envie. Surtout que je n’aimais pas vraiment faire les grands écarts, les agrès sur les barres et la poutre.
Je me suis donc vite rendu compte que ce que j’aimais dans la gym, au final, c’était l’acrobatie pure, faire des saltos dans tous les sens !
Qu’est-ce qui te plaisait dans cette faculté que tu avais à pouvoir « faire l’acrobate » ?
Avoir des sensations qu’on ne retrouve quasiment nulle part. Ce sont des sensations extrêmes car on met le corps dans des situations inédites.
Ce que je recherche aussi, c’est de passer au-dessus de cette peur que je pouvais ressentir avant de me lancer. C’est ça que j’ai toujours aimé : me dépasser !
C’est donc ce que tu recherches dans le tumbling et non le « fight spirit » comme tu le dis dans ton livre « Renaissance » ?
Je ne m’entraîne pas spécialement pour gagner, mais vraiment dans l’idée de me surpasser moi-même, pour moi-même, et aussi, avant tout, j’ai l’envie de me faire plaisir.
Le sport a-t-il toujours fait partie intégrante de ta vie ?
Le sport est vraiment un besoin pour moi car c’est à cet endroit, dans ce moment-là, où j’ai l’impression de profiter un max de la vie !
C’est grâce à cette activité que je me sens mieux et que je protège mon corps : en le renforçant, il vieillira mieux. C’est essentiel pour la santé, en tout cas, pour la mienne !
En 2009, tu deviens championne de France junior de tumbling, qu’as-tu ressenti à ce moment-là ?
Ça m’a vraiment fait du bien. Ça venait récompenser mon travail, c’était donc un plaisir de plus !
Ça m’a donné envie de continuer dans cette voie, sans pour autant que je me dise : « Je vais tout péter dans le haut niveau ! ». Je restais plutôt dans le plaisir, que ce soit à l’entraînement ou en compétitions.
Tu as ensuite tout fait pour entrer en équipe de France senior tout en conjuguant tes études et l’obtention du Bac Scientifique, qu’est-ce qui t’a fait tenir ? Tu dis que ça a été « la période la plus difficile de toute ta carrière »…
Au moment où j’ai voulu rentrer en formation de kiné, il ne me manquait vraiment pas grand-chose pour arriver à intégrer l’équipe de France.
Je me suis rendu compte que ce projet sportif était vraiment à ma portée, il fallait donc que je travaille pour y arriver.
Je me suis entraînée très très dur, dès 2012. C’est à ce moment-là que je me suis dit que des choses étaient possibles et atteignables pour moi dans le tumbling.
Après une première médaille en Championnat du monde, en 2011, tu deviens, en 2013, championne de France par équipe, championne de France individuelle et vainqueur de la Coupe de France… La consécration ?
C’était magique de faire les trois la même année, c’était un réel aboutissement : avoir tant travaillé et voir tous ces résultats qui arrivent, être capable de réussir en compétition parce que ce n’était pas trop mon truc… J’ai réussi à aimer cette composante-là.
Mais ton accident survient cette même année… Tu parles, dans ton livre, d’un « état de grâce qui ne peut durer éternellement »…
Suite à cette année de victoires, les Jeux Mondiaux sont arrivés. C’est l’équivalent des Jeux Olympiques pour les sports non olympiques et j’étais la seule française à y participer, donc ça représentait forcément un événement très important pour moi !
Je me suis donc entrainée dur pour les qualifications puis pour préparer ces Jeux. Dans tout ça, j’ai eu très peu de vacances. Et quand arrive l’échéance de la compétition, je fais une performance décevante : j’aurais pu faire mieux, je pouvais prétendre à une médaille de bronze et j’ai fait 5e à cause d’une erreur et ça m’a beaucoup perturbée.
Je me disais « Il y a bientôt les Championnats du monde donc je dois continuer à travailler ».
J’ai pris très peu de vacances et je suis arrivée très fatiguée à la sélection des Championnats du monde. Je n’étais pas obligée de la faire car j’étais qualifiée d’office, mais la Fédération m’avait dit que ce n’était pas plus mal que je passe les sélections pour voir mon niveau.
J’étais tellement fatiguée de cette année ultra chargée que mon corps a fini par dire stop !
On a beau être des sportifs, on n’est pas des robots et je me suis perdue en l’air dans une acrobatie que j’avais pourtant répétée un million de fois… Et, en pensant arriver sur mes pieds, je suis arrivée sur la tête.
Dans ton livre, tu dis justement que pour les athlètes de haut niveau, « on apprend à ne pas écouter les petites voix parasites qui nous empêchent de performer »… N’est-ce pas dangereux finalement cette course à la performance ?
Oui, en tant que sportif de haut niveau, il faut faire attention à son corps, mais pas trop s’écouter non plus…
La limite entre les deux attitudes est très mince et c’est ce qui est compliqué à gérer. Mais il faut y faire vraiment attention. J’ai passé la limite, je suis allée trop loin à ce moment-là. Ça peut aller très vite…
Ce qui est incroyable, c’est que ton corps et ton mental te permettent de repartir dès 2015 après une longue période de convalescence et de prises de conscience. Et tu réalises ton rêve : poursuivre ta quête de médailles internationales (notamment une deuxième médaille en Championnat du monde en 2017). Comment s’est passé ton retour en piste ?
Avant mon accident, je n’avais quasiment pas peur et, là, je découvre vraiment ce qu’est l’angoisse suite à ma blessure. Ça a été un gros traumatisme et j’ai dû énormément travailler sur moi, notamment à l’aide d’un hypnothérapeute.
Et, petit à petit, on apprend à passer au-dessus de nos peurs. Quand on a vécu la peur, on sait pourquoi on a peur et on en comprend les mécanismes. À partir de là, on peut avancer.
Concernant ma blessure, j’ai appris à me dire que j’avais besoin de repos, que je devais faire et apprendre à faire plus attention à mon corps.
Tu écris que ton corps avait fait de toi « une super héroïne capable de voler mais qu’il t’était désormais devenu étranger »… Cet épisode a été un tournant radical pour toi ?
Complètement, cet accident m’a changée, j’ai eu une autre vision de la vie, j’étais presque devenue une autre personne…
Les sportifs de haut niveau ont parfois mis un terme à leur carrière suite à une grosse blessure et je sais que certains d’entre eux ont été intéressés par mon témoignage suite à cette expérience de vie, comment j’ai pu tirer du positif de ma blessure.
Au début de ta carrière, tu ne travaillais pas autant sur le mental ?
C’est vraiment après ma blessure que j’ai compris que le mental avait une importance énorme, que ce soit pour l’entraînement, pour les blessures ou encore la gestion du stress en compétition.
Par exemple, avoir un préparateur mental est un vrai budget donc finalement, parfois, on apprend un peu sur le terrain…
Tu avais besoin et envie de le transmettre ce changement de vie ? Ton livre, « Renaissance », écrit l’an dernier, est très fort en ce sens…
J’avais vraiment envie que cet accident reste quelque chose de positif dans ma tête. Transmettre tout ce que j’ai pu apprendre de cette période délicate m’a paru être la meilleure manière.
Mon but était de donner des clés que ce soit aux professionnels du sport ou même pour la vie de tous les jours, pour que les gens passent au-dessus des difficultés de l’existence !
Et puis, lire toute mon histoire sur papier et voir tout ce que ça m’a apporté, c’était une façon de mettre fin à un gros chapitre de ma vie et de tourner la page…
En parallèle, les réseaux sociaux et notamment Instagram ont été un vrai soutien professionnel et un support de témoignages tout au long de ta carrière et lors de ta convalescence ?
Oui, ça m’a permis de bâtir ma voie professionnelle. J’ai eu mon diplôme de kiné en 2017, mais j’ai tout de suite travaillé via mes réseaux sociaux que j’avais lancés en 2015. À l’époque, on m’avait dit que ça pourrait m’aider à trouver des sponsors de façon à continuer le tumbling.
Suite à ma blessure, j’ai créé une méthode préventive* pour renforcer le tronc. Au départ, c’était pour mon retour : j’avais envie de revenir au niveau sans avoir de douleurs au dos et les méthodes traditionnelles qui existaient ne me renforçaient pas de la bonne manière.
J’ai consacré mon mémoire de kiné à cette recherche. Grâce à ma méthode – un renforcement abdominal des muscles profonds -, je n’ai plus aucune douleur de dos.
Mes followers me posaient plein de questions à ce propos et je me suis dit que c’était une bonne idée de proposer à la vente cette méthode innovante. Je suis, en quelque sorte, une kiné à distance.
As-tu envie de partager cette expérience et les outils que tu en as retirés au sein du monde du tumbling ?
Je suis toutes les compétitions de tumbling et j’adore voir l’évolution des « petites » que je connaissais. J’aimerais bien intervenir et faire un partage d’expériences pour elles au niveau de la Fédération de gymnastique et des Clubs de tumbling.
J’avais parlé de cette possibilité de témoigner, mais ça ne s’est jamais fait, c’est dommage. Je me dis que s’ils avaient eu besoin, ils m’auraient appelée !
Il faut savoir aussi que le tumbling est très peu médiatisé, s’il y a un temps de communication, ce sera pour la gymnastique, on est relégués au second plan. Il n’y a pas d’argent, beaucoup d’entraîneurs sont bénévoles et passionnés.
Aujourd’hui, tu as activé la « deuxième partie de ta vie », en quelque sorte, après avoir arrêté la compétition et le tumbling en 2019 et bouclé la boucle avec la sortie du livre en 2020. Comment as-tu su que c’était le moment de sortir du praticable ?
Je faisais du tumbling depuis quinze ans avec des médailles nationales et internationales, une blessure, un retour en équipe de France et à nouveau des médailles internationales.
Je me suis dit que j’avais fait le tour de ce que j’étais capable de faire, du meilleur que je pouvais donner et du plaisir que je pouvais y trouver.
En plus, j’étais déjà la « vieille » dans l’équipe : d’habitude les retraites sportives en tumbling sont à 24 ans, moi j’en avais déjà 27. J’ai voulu découvrir de nouveaux horizons et apprendre de nouvelles choses autrement, ailleurs !
Ma blessure m’a apporté cette réflexion-là : que veux-tu faire à la fin de ta carrière ? Je savais que je ne pourrais pas arrêter le sport, je me sens obligée d’en faire dans le sens où c’est un besoin pour moi. Donc, quel sport ? Et j’ai choisi le surf.
Est-ce qu’alors tu as décidé de surfer sur la vague de la performance à nouveau ?
Non, pas vraiment. Je suis dans la même démarche qu’au début avec le tumbling, celle de me faire plaisir et de progresser. En plus, l’environnement de ce sport est super agréable, je ne suis plus enfermée dans une salle, je profite énormément de ce nouveau facteur.
Les paysages sont fous au niveau des spots de surf ! Je me dis qu’on verra bien où ça me mène, sans me prendre la tête même si, malgré tout, j’ai pris un coach parce que je veux vraiment progresser. Je m’entraîne dur. C’est ma façon d’être, quand je fais quelque chose, c’est à fond !
L’année dernière, j’ai terminé 5e aux Championnats des Landes et j’attends la suite pour l’après-Covid.
Profiter de la vie ! On n’en a qu’une et ça peut très vite basculer. Au-delà de ma blessure, j’ai aussi eu une grave maladie, petite.
J’ai eu beaucoup de chance qu’on l’ait détectée à temps donc tout ça m’a permis d’avoir la philosophie de vie que j’ai aujourd’hui : avoir la santé est une chance et il ne faut pas hésiter à en profiter pour découvrir toutes les belles choses qui nous entourent !
Avec cette nouvelle façon de voir la vie, comment vois-tu le sport aujourd’hui et quels conseils tu donnerais à des jeunes filles qui souhaitent se lancer dans la compétition ?
Je pense que le sport aide à prendre confiance en soi car on voit à quel point on est capables de faire des choses qu’on n’imaginait pas, petit à petit. On se sent plus forte !
Personnellement, je suis quelqu’un qui doute beaucoup et me remet beaucoup en question donc le sport m’a aidée à prendre confiance en mes décisions.
Dans ce cadre, le sport et surtout le sport à haut niveau, c’est se dire qu’on n’est jamais seuls. C’est toute une équipe qui est derrière !
Sinon, encore une fois, je pense qu’il faut partir du plaisir que le sport procure, ne pas en faire pour de mauvaises raisons sinon ça ne tient pas sur le long terme. En fait, la question à se poser, la seule, c’est : « Qu’est-ce qui me fait vibrer ? «
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