Annemiek van VleutenLa malchance n’empêche pas l’excellence

Annemiek Van Vleuten, la malchance n’empêche pas l’excellence
Depuis treize ans, elle est l’une des figures de proue du cyclisme féminin. Annemiek van Vleuten quittera les routes fin 2023, laissant derrière elle un des plus grands palmarès de l’histoire de la discipline. Mais il lui reste un deuxième Tour de France à boucler. Portrait de celle dont les échecs ont servi de carburant aux exploits.

Par Timéo Gomes

Publié le 25 juillet 2023 à 7h38

Peu importe le sport, on a nettement l’impression que certaines sont nées pour y briller. Des élues d’une prophétie qui dit que malgré tous les déboires possibles et imaginables, ces championnes accompliront de grandes choses. Annemiek van Vleuten est sans l’ombre d’un doute la prodige du cyclisme international.

Pourtant, pour Vleuty, son surnom, le vélo n’a pas toujours été une priorité. Née le 8 octobre 1982 à Vleuten aux Pays-Bas, elle se prend d’abord de passion pour le football. Une histoire qui va durer jusqu’à ses 23 ans. On est alors en 2005 et la Néerlandaise est contrainte de renoncer au ballon rond en raison de multiples blessures aux genoux.

Il faudra attendre l’année suivante pour qu’elle accepte de tenter autre chose. Elle décide alors de s’inscrire au TCW’79 de Wageningue, un petit club cycliste qui lui fait découvrir le sport dont elle tombe éperdument amoureuse.

Son arrivée dans cette discipline a été comme remettre un poisson dans l’eau et elle ne tarde pas à se faire remarquer. Dès juillet 2010, à 28 ans, Annemiek participe à son premier grand tour, le Giro Rosa (Tour d’Italie féminin) dans lequel elle fera plus que de la simple figuration, grâce à une victoire d’étape.

La confirmation survient le mois suivant lorsqu’elle remporte La Route de France, une course à étapes, ancêtre du Tour de France Femmes. Elle devance de six petites secondes sa poursuivante allemande Judith Arndt. Le monde du vélo est prévenu, elle est venue pour tout rafler !

Les années qui suivent, Annemiek van Vleuten continue sa progression. En 2011, elle remporte le Tour des Flandres et grâce à sa régularité sur les autres courses, elle est même sacrée championne du monde.

©Antonio Baixauli/Unipublic/Cxcling

Seulement, une grande championne ne se forge pas uniquement à coups de victoires écrasantes, mais plutôt à sa capacité de se relever après de lourdes chutes. Nous sommes à l’été 2016, les Jeux Olympiques de Rio battent leur plein et Vleuty semble déterminée à inscrire son nom dans l’histoire de l’olympisme.

La course bien entamée, la Néerlandaise est la seule à pouvoir suivre le rythme de l’Américaine Mara Abbott. Toutes deux seules en tête, c’est un véritable duel au sommet. Une fois l’ascension de la Vista Chinesa terminée vient l’heure de la descente et c’est ce moment que Annemiek van Vleuten choisit pour frapper un grand coup. Elle devance sa concurrente et dévale à toute allure. Malheureusement, dans un virage à seulement dix kilomètres de l’arrivée sur les cent-trente-sept au total, Vleuty perd les pédales et chute lourdement sur une bordure en béton. La championne, inconsciente, est rapidement hospitalisée.

©Luis Angel Gomes

Les médecins lui trouvent une commotion cérébrale et des mini-fractures au niveau de trois vertèbres. Un bilan pas anodin mais plutôt optimiste pour la Néerlandaise, bien consciente et capable de remonter sur le vélo après quelques temps de repos. Et c’est ici que Annemiek van Vleuten va écrire sa légende.

À peine un mois après sa chute, elle remporte le Tour de Belgique. Voici ce qui la caractérise : la ténacité. Cette cycliste est prête à tout pour gagner, parfois trop, mais toujours apte à se relever de ses chutes.

Sa régularité lui vaut de devenir numéro une mondiale au classement World Tour en 2017, mais, avant cela, les gros résultats vont pleuvoir. Elle va remporter son premier grand tour, le Giro Rosa, là où tout a commencé huit ans auparavant. Dans la même compétition, l’année d’après, elle réalise la performance absolue : Vleuty finit avec le maillot rose de leader du classement général, le maillot vert de meilleure grimpeuse et le maillot violet du classement à points, une domination sans pareille pour ce qu’on pourrait appeler un hat-trick du cyclisme !

©Luis Angel Gomes

Mais ce n’est pas assez pour la native de Vleuten qui se fait encore une fois remarquer durant cette même année 2019 grâce à une échappée en solitaire de cent kilomètres. Une échappée qui lui offre la première place lors de la course en ligne aux championnats du monde. Comme si son accident à Rio n’avait rien changé et l’avait même rendue plus forte…

Cependant, ces JO 2016 ne seront pas la seule épreuve qu’Annemiek va traverser. Il y aura ensuite sa chute lors du Giro 2020 et un poignet cassé alors qu’elle était favorite à sa propre succession. Une blessure qui ne l’empêche pas de prendre le départ et d’aller chercher une deuxième place lors des championnats du monde sur route, moins de dix jours (oui, vous avez bien lu) après l’accident.

Mais la nouvelle désillusion vient de nouveau du côté des Jeux. Cette année-là, la Néerlandaise sacrifie le Giro pour être au top de sa forme à Tokyo 2021, malheureusement elle finit deuxième de sa course olympique.

©Fabien Boukla/ASO

Un bon résultat en somme ? Certes, mais il aurait été plus savoureux si Annemiek van Vleuten n’avait pas cru à une médaille d’or en levant les bras au ciel alors qu’elle passait la ligne d’arrivée. L’Autrichienne Anna Kiesenhofer avait franchi la ligne plus d’une minute avant elle. Une déconvenue qui ne l’empêche pas d’aller chercher la médaille d’or sur le contre-la-montre mais qui reste à jamais gravée dans les mémoires.

Pourtant, encore une fois, le retour sur la selle sera plus que triomphant. Quoi de mieux pour faire oublier cette gaffe que de signer un exploit jamais réalisé dans l’histoire du cyclisme ? C’est ce qu’elle fait en 2022 en remportant les trois grands tours : le Giro Rosa, la Vuelta, et le Tour de France Femmes, enfin de retour plus de trente ans après la dernière édition et la victoire de la Française Jeannie Longo.

Un triplé historique qu’elle est pourtant en passe de reproduire cette année, déjà victorieuse de la Vuelta et du Giro juste devant une certaine – cocorico – Juliette Labous, avec désormais, en ligne de mire, le maillot jaune du Tour.

Fin 2023 sera l’heure de raccrocher le cadran pour Annemiek van Vleuten, elle qui déclare vouloir arrêter sa carrière au sommet de son art.

D’ici-là, elle s’offre un dernier Tour avant de rentrer.

©Thomas Maheux/ASO

Ouverture ©Luis Angel Gomes

D'autres épisodes de "Cyclisme, dans la roue des sportives"

Vous aimerez aussi…

Le Beach Handball : sea, sport and sun...

Le Beach Handball : sea, sport and sun…

Sous le soleil, exactement… Du 1er au 3 juillet, la ville de Lacanau accueille le tournoi international de Beach Handball. Entre exploits sportifs et spectacle à ciel ouvert, c’est la deuxième édition de ce Lacanau Beach Handball Xperience qui se tient en bord de mer. De quoi découvrir un sport méconnu et pour le moins original.

Lire plus »
Jessica Vetter : « Le CrossFit, c’est le girl power absolu ! »

Le Best-of ÀBLOCK!

Une crack qui nage à très grande vitesse, une fille qui prend son envol, une danseuse qui rêve de JO, les pionnières du baseball, une championne qui grimpe, une autre qui nous booste avec ses tutos (Jess Vetter sur notre photo) et un nouveau mercredi où les KIDS ont pris le MIC, c’est le meilleur d’ÀBLOCK!

Lire plus »
Il était une fois le skateboard…féminin

Il était une fois le skateboard…féminin

Aujourd’hui, si le monde du skate doit compter sur les filles, elles aussi présentes aux Jeux Olympiques où la discipline a fait son entrée, quelques pionnières ont ouvert la voie pour leur permettre d’être sous les feux de la rampe. Petite histoire du skateboard conjugué au féminin.

Lire plus »
Lucienne Velu, « la reine du stade » des années 30, mais pas que…

Lucienne Velu, « la reine du stade » des années 30, mais pas seulement…

Le sport féminin n’en était qu’à ses prémices lorsque Lucienne Velu s’est invitée au stade. Douée pour l’athlétisme, la Parisienne, recordwoman du disque en 1924, ne s’est pas contentée de briller sur les pistes. Footballeuse reconnue, elle excelle également en basket et deviendra championne du monde de la discipline à l’issue des Jeux Mondiaux Féminins de 1934. Retour sur le parcours d’une pionnière qui a su saisir la balle au bond.

Lire plus »
Claire la sirène

Sport de sirène : enquête sur une vague déferlante

Dans la famille natation, je demande le dernier-né palmé : le “mermaiding“ ou comment nager comme une sirène. Désormais reconnu comme une activité sportive, à l’enseignement encadré, il prend dans ses filets de plus en plus d’adeptes heureux de plonger dans leurs rêves d’enfant. Immersion toute !

Lire plus »
Ons Jabeur, l'histoire est en marche...

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Des joueuses sur les courts à Roland-Garros, le nouveau podcast ÀBLOCK! qui accueille une femme qui n’a pas sa langue dans sa poche ou encore un championnat où tenir bon la barre, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK!. Bonne lecture !

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner