« J’ai commencé mon parcours dans le sport par la danse classique pratiquée pendant toute mon enfance, jusqu’à mes 18 ans. C’était dans une petite association, en pleine campagne. C’était vraiment du loisir pour moi, ça me permettait aussi de retrouver mes amis. J’avais déjà le goût pour la performance, mais je n’ai jamais été vraiment confrontée à la compétition. Pour autant, j’essayais d’être la meilleure de mon groupe à chaque fois !
J’ai découvert le street workout ou la callisthénie – mot dérivé de l’anglais calisthenics, terme davantage employé dans les pays anglophones – grâce à mon copain qui suivait des chaînes YouTube sur ce sujet. À ce moment-là, j’étais dans une recherche de prise de muscles, de prise de masse, parce que j’étais extrêmement mince. Je souffrais d’anorexie mentale. Le street workout qui allie force, agilité, technique et souplesse, était tout indiqué.
Au départ, honnêtement, ça m’a permis de trouver une autre obsession au-delà du pur critère esthétique de perdre du poids. Mais je me suis vraiment prise au jeu et j’ai commencé à faire plus attention à mes apports journaliers côté alimentation, pour pouvoir mieux performer. Je me suis aussi beaucoup documentée sur les habitudes santé susceptibles de m’aider à obtenir les figures que je voulais, le plus rapidement et sainement possible. Je suis travailleuse, rigoureuse, investie et dans le souci du détail. Je ne laisse rien au hasard.
En me mettant à cette pratique, mon objectif a donc été un focus sur la performance physique. C’est-à-dire augmenter mon nombre de tractions et commencer à faire des figures. Je suivais de plus en plus de personnalités du street workout sur Instagram et ça me donnait l’inspiration et l’envie de progresser. Ce sport, assez récent en France – apparu depuis une quinzaine d’années – vit beaucoup au travers des réseaux sociaux. J’ai débuté fin 2019 pendant le COVID et, depuis, je suis à fond !
J’ai profité du confinement et de la chance d’avoir un jardin pour m’entraîner, par exemple, à tenir un headstand qui est un poirier sur les coudes ou la tête. C’est un sport qui demande assez peu de matériel et peu de budget, on peut donc déjà faire pas mal de choses à la maison. Grâce à cette discipline qui fait appel aux capacités physiques telles que la force, la mobilité, la souplesse, l’agilité et la coordination, on se sent maître de soi-même et de son corps. C’est en mobilisant tous ces éléments qu’on devient capable de faire des figures. La sensation de se voir évoluer, progresser dans ces capacités physiques-là, c’est extrêmement satisfaisant ! Ça me procure une sensation de liberté, je me sens libre de faire ce que je veux – dans la mesure du possible, bien sûr – avec mon corps. Je me sens plus forte !
Ce que j’observe chez nous les femmes, c’est qu’on est finalement assez limitées dans cette quête de vouloir être fortes, puissantes et compétitives. On nous bride un peu là-dessus. Le street workout nous permet de ressentir cette force en déployant et en exploitant nos capacités physiques.
Côté intégration dans ce milieu en tant que femme, pour moi, ça s’est fait dans la douceur. J’ai débuté à la campagne, il n’y avait aucun pratiquant sur le parc où l’on s’entraînait avec mon copain et un ami. J’ai pu m’approprier les bases sans jugement, ce qui m’a permis de me sentir assez légitime pour aller pratiquer ailleurs. Après, tout dépend de notre caractère, de notre histoire et de l’environnement dans lequel on évolue. Je peux comprendre que ça puisse vraiment intimider quand on débute en tant que femme, surtout qu’il y en a très peu dans ce milieu.
Quand j’ai déménagé à Paris, il n’y avait que des hommes sur mon parc. Mais j’étais tellement confiante, que ce soit en mes capacités ou en mon programme d’entraînement, que tout allait bien. Je pense même que j’étais plutôt fière d’être une femme qui travaille des mouvements de force. Donc, moi, ce que je conseille, c’est de prévoir à l’avance son entraînement et de se concentrer sur ses progrès. C’est une manière de maîtriser et de moins se soucier du regard des autres. Et puis, la plupart du temps, on est très bien accueillies en tant que femme sur les parcs : on échange assez facilement, on nous encourage, même si ça arrive parfois de se faire draguer. Mais ce n’est pas lourd, c’est toujours dans la bonne humeur !
En street workout, on s’entraîne le plus souvent dans les parcs en extérieur, mais aussi en salle de musculation ou dans les espaces dédiés pour le cross-training qui comporte des barres de traction et des barres de dips. Des salles strictement dédiées au street workout se lancent aussi en France dont une à Lyon qui ouvrira en janvier 2025 et dont je suis partenaire. Ça se développe bien, d’ailleurs cette année a été créée la FFSWF, la Fédération Française du street workout freestyle.
Je participe à des compétitions depuis 2021. J’ai débuté par une compétition régionale et, à l’époque, nous n’étions que trois femmes participantes. Mais, au moins, il y avait une catégorie féminine ! Il y a une évolution en ce sens, de plus en plus de filles dans ce domaine. C’est important parce que ça permet aux spectatrices ou aux followers sur les réseaux sociaux de se dire qu’il est possible de faire des compétitions de street workout lorsqu’on est une fille. Ça crée des modèles, un champ des possibles et donc l’envie de s’y mettre car, avant, ce milieu ne brassait que des hommes très musclés, très forts. Difficile de s’identifier quand on est une femme !
J’ai pris goût à la compétition en constatant que ça me faisait énormément progresser. En plus, tu rencontres tellement de gens ! Je suis allée en national, à l’international, en Europe. Ma progression s’est faite naturellement, petit à petit. Et aujourd’hui, je suis vice-championne de France 2024 en street workout freestyle. Lors de cette compétition nationale, l’idée est de faire des figures au poids du corps, sur le sol ou sur les barres, en les enchaînant de manière presque artistique et en y ajoutant des transitions. C’est un peu une chorégraphie. On est dans le concept des battles – des combos de 45 secondes avec des figures à tenir durant deux secondes complètes. Ma figure favorite est le one arm elbow lever.
Maureen lors de la finale des Championnats de France 2024 en street workout freestyle
En parallèle, depuis janvier 2024, j’ai développé mon activité d’accompagnement des femmes dans le street workout. Je me suis lancée un peu sur un coup de tête parce qu’à la base, je suis plutôt du style à avoir un métier et une vie stables. J’étais dans une toute autre branche, le design graphique. Mais c’est en voyant des amis entreprendre dans le domaine du sport, développer des stratégies pour vivre du coaching, que je me suis dit que mes rêves étaient réalisables. Et j’ai décidé de vivre de ma passion.
Comme j’évolue dans le milieu du street workout depuis cinq ans, je me suis rendu compte qu’il y avait un réel potentiel de développement dans le street workout au féminin. Notamment parce qu’il n’y a pas encore de grosses influences en figures féminines, parce qu’aussi je constate que les femmes se dévalorisent beaucoup par rapport à leur capacité physique. Il y a déjà un vrai travail à faire côté mental : je veux qu’elles puissent gagner en confiance en se prouvant qu’elles sont capables d’atteindre des objectifs dans le sport. Cette progression dans le sport et cette estime d’elles-mêmes les poussent ainsi à entreprendre dans d’autres domaines.
De plus, il faut apprendre à gérer le stress face aux contraintes du quotidien. Ensuite, il faut rééquilibrer l’hygiène de vie – alimentation, sommeil, activité physique et sportive – et ça, je le sais d’expérience personnelle. Si on s’alimente mal, on n’a pas les nutriments et l’énergie nécessaires pour obtenir un résultat sportif. Enfin, il ne faut pas oublier l’étape « récupération », indispensable suite aux entraînements. Pour obtenir un résultat de performance physique, il faut conjuguer entraînement, bonne hygiène de vie et récupération.
Avec mon coaching, je propose en réalité de mettre en place des habitudes au quotidien plutôt que de bouleverser tout un système de vie ancré depuis longtemps. Les habitudes ont le pouvoir extraordinaire de faire bouger les choses de manière durable. Avec mes coachées – plusieurs dizaines depuis le lancement – on observe des bénéfices dans les trois mois.
Peu importe le physique, on peut toutes faire des entraînements au poids de corps car il existe des exercices très accessibles dans cette discipline comme les tractions. Au début, on ne va pas forcément se sentir capable de réaliser ces figures. Mais il faut savoir qu’il existe plein d’étapes intermédiaires qui vont permettre d’avancer petit à petit vers ces gros objectifs. Si on n’arrive pas à faire une première traction, par exemple, on peut mettre en place d’autres exercices qui vont nous mener à cette traction : tractions à l’élastique, décomposition du mouvement en mettant moins d’intensité, dips sur un banc, etc, l’idée étant de travailler plusieurs groupes musculaires en même temps.
Chacun avance à son rythme. On peut toujours faire avec. On n’est pas obligés de faire des séances de deux heures, on peut commencer petit avec des séances de sport de 30 à 45 minutes. Il faut plutôt craindre la stagnation que le fait d’avancer lentement.
Le street workout est un sport intéressant car c’est un mode de vie. Si l’on veut optimiser les performances, il faut prêter attention à tout ce qui est autour de l’entraînement : hygiène de vie, mental, programme. C’est une discipline qui permet de garder sa motivation car il se pratique sur le long terme, à la progression, et demande d’observer chaque petite avancée jusqu’à l’objectif final. »
- Pour devenir invincible physiquement et mentalement, c’est sur sa chaîne YouTube Maureen Calisthenics où elle donne mille et un conseils pour débuter la pratique en street workout et sur son compte Instagram @maureen_calisthenics
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