« J’ai toujours été sportive. J’ai fait huit ans de gymnastique au niveau national avant d’arrêter lorsque j’étais au lycée. Par la suite, j’ai fait cinq ans de karaté et encore huit ans de kung-fu. Le problème, c’est que je ne pouvais pas faire de compétition parce qu’à l’époque, je mesurais 1.57m et je pesais 47 kilos or, les catégories de poids commençaient à 53 kilos.
J’avais envie de prendre de la masse, de faire travailler mon cardio et c’est pour ça que j’ai commencé le CrossFit. C’était en 2012. Je faisais du sport dans une salle de fitness et l’un des coaches a monté une salle de CrossFit. Nous étions tout un groupe d’amis et eux ont suivi.
Moi, je n’étais pas convaincue. J’étais habituée à faire des séances de cours collectifs d’une heure et, je ne sais pas pourquoi, j’avais l’impression que le CrossFit, c’était trop court.
Mais tout ça, c’était avant d’essayer ! Dès ma première séance, j’ai adoré. J’ai adoré parce que, même si on avait chacun un niveau différent, des options différentes, on faisait tout tous ensemble et il se dégageait de tout ça une formidable énergie de groupe.
J’ai aimé aussi le fait que, en CrossFit, tu te bats contre toi-même mais, en même temps, tu n’es pas seule. Quand tu es fatiguée, que tu as envie de lâcher, de faire une pause, tu peux regarder à côté et voir l’autre qui continue. Après ça, tu ne te poses plus la question, tu n’entends plus cette petite voix dans ta tête qui te dit d’arrêter.
J’ai trouvé cet aspect à la fois individuel et collectif génial. En CrossFit, on est ensemble et les autres sont là pour nous aider à faire face à nous-mêmes.
Cette facette-là, être face à soi-même, n’est pas toujours facile. Si on pense être une machine de guerre dans un domaine, comme tout est mesurable et quantifiable dans cette discipline, on peut très vite se rendre compte qu’il n’en est rien.
Le CrossFit fait ressortir beaucoup de problèmes d’égo. Il n’est pas facile d’accepter de ne pas être aussi fort que ce que tu crois être ou ce que tu voudrais être. Et notamment chez les filles.
Même si on ne veut pas l’admettre, on est conditionnée et on pense que l’on est incapable de soulever des charges lourdes par exemple. Et puis on s’aperçoit, avec l’entraînement, que c’est tout à fait faisable… On a souvent tendance, à se dévaloriser, à se sous-estimer.
Le CrossFit met un grand coup de pied dans tous nos blocages, il permet de prendre confiance en soi en réalisant des choses que l’on ne se serait jamais cru capable de faire.
Moi, quand j’ai débuté, personne ou presque ne connaissait la discipline. De fait, je n’ai pas eu peur d’essayer. La seule chose qui a été compliquée pour moi, c’est que je voulais prendre du muscle mais j’avais du mal à accepter de prendre du poids.
Je voulais avoir de gros bras, des cuisses musclées mais, quand je montais sur la balance, je me disais « Ah, j’ai pris un kilo ! ». Me dire que je m’en foutais m’a pris du temps.
L’image de la femme que l’on nous a mise en tête a commencé à changer dans mon esprit à partir de ce moment-là. Le CrossFit m’a fait du bien. Grâce à ce sport, j’ai appris à accepter mon corps.
Est arrivé un moment ou, de pratiquante, je suis passée à coach. Lorsque j’étais à la fac, j’avais hésité entre un cursus en maths-informatique ou un cursus en sport. J’ai finalement opté pour la première solution en me disant qu’il serait toujours plus facile de me reconvertir dans le sport si j’étais dans l’informatique que l’inverse.
Après l’université, j’ai travaillé dix ans dans l’informatique. Quand je me suis mise au CrossFit, j’ai eu la sensation que ça pouvait changer la vie des gens en leur apportant de la confiance en eux, confiance au niveau du corps, confiance au niveau mental. Je sentais que je serais plus utile dans ce domaine alors je me suis reconvertie, je suis devenue coach.
J’ai commencé par travailler pour une salle puis l’idée de monter la mienne a commencé à germer. J’ai présenté mon projet à ma banque et j’ai été suivie, j’ai trouvé un local et… on a été confinés. J’ai mis le temps du premier confinement à profit pour tout ce qui est papiers, business plan…
Les salles ont rouvert, j’ai attaqué les travaux, je me suis lancée en septembre et, trois semaines plus tard, on était contraints de fermer de nouveau. Ça a été une période très dure. J’ai réussi à m’accrocher et à survivre mais je suis encore en train d’essayer de remonter la pente.
Quoi qu’il en soit, je suis fière de ne pas avoir coulé parce que ce n’était pas gagné.
Malgré les difficultés, je suis contente parce que j’ai commencé à créer une belle communauté. C’est drôle parce que, maintenant, il y a autant de femmes que d’hommes qui fréquentent ma salle. Parmi elles, cinq sont enceintes et il m’est déjà arrivé de donner des cours uniquement à des pratiquantes.
Peut-être que le fait que je sois une femme y est pour quelque chose. Je pense que ça rassure. Pour autant, je n’ai jamais pensé à ouvrir une salle uniquement à destination des filles. Je trouve frustrant d’interdire l’accès en fonction du sexe.
Je pense que les hommes ont besoin de se prendre une petite calotte par une fille de temps en temps et, a contrario, que les femmes doivent arrêter de flipper parce qu’il n’y a que des mecs dans la salle !
Le CrossFit est un sport ouvert à tous et toutes. C’est sportif, mais ça se passe toujours bien parce que l’important, c’est de se dépenser et de passer un bon moment, non pas de pousser ses limites jusqu’à vomir ou se blesser.
Le CrossFit, c’est avant tout du plaisir ! »
Ouverture ©Geraldine Bramonte
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