Amy BondLa Pole danseuse qui voulait se réconcilier avec son corps

Amy Bond
Elle est l’une des « putains » d’héroïnes à avoir trouvé dans la barre de Pole Dance un exutoire, un réconfort, puis, une deuxième vie. Nous l’avons découverte dans le docu de Netflix « Pole Dance, Haut les corps ! ». Impossible, depuis, de la quitter des yeux ! Amy Bond s’envole, sens dessus-dessous, vertigineuse. Portrait d’une fille qui balance son corps comme elle se jetterait du haut d’une falaise.

Par Claire Bonnot

Publié le 10 avril 2021 à 12h12, mis à jour le 02 juin 2023 à 9h29

Corps d’athlète aux muscles puissants, visage mutin au petit nez retroussé, Amy Bond a l’air d’une fée qui ne s’en laisse pas compter. Et c’est le cas.

Mais il y a eu du chemin entre la jeune fille candide qui rêvait de faire carrière à Hollywood et la championne, patronne du San Francisco Pole Dance. À l’écran, dans le documentaire de Netflix, la performeuse et femme d’affaires, avocate et autrice par ailleurs, dévoile ce qui l’a menée à prendre la barre de la Pole Dance : comme tant d’autres femmes, un besoin de guérir le corps, honteux, malmené, vilipendé.

©Christy Usher

Lorsqu’elle arrive à Los Angeles pour faire carrière, Amy Bond a 20 ans et elle galère. Repérée par l’industrie du sexe, elle se perd dans un milieu qui lui collera à la peau : bien des années après avoir arrêté, Amy sera harcelée et traquée.

La clé qu’elle trouve alors pour lui permettre de refermer la porte de son passé ? Les cours de Pole Dance : « Dans le sous-sol d’un Gold’s Gym, j’ai regardé des femmes aux corps imparfaits (selon les standards commerciaux) danser avec confiance, se déshabiller pour révéler des abdominaux avec des vergetures et des cuisses molles. J’ai voulu avoir ce genre de confiance dans mon corps », raconte-t-elle dans le Huffington Post.

Une façon de se construire une nouvelle existence, dit-elle : « Je mettais mon ancienne vie derrière moi. » Alors étudiante en droit, en 2011, Amy Bond doit refaire face à son histoire passée.

Une amie lui confie avoir été contactée par un journaliste sur Facebook : « Il dit qu’il fait un reportage sur une star porno qui étudie à l’Université de Boston. Il dit que c’est toi. Il m’a envoyé une vidéo d’une minute. D’autres personnes de notre classe ont eu le même message. »

Amy Bond confie dans le Huffington Post avoir de nouveau ressenti la honte et la menace de se voir ainsi exposée : « Alors que je l’avais repoussée jusque-là, elle est remontée, bouillonnante, à la surface. »

C’est grâce à sa communauté Pole Dance et à ses mouvements sportifs et sensuels l’aidant à reprendre possession de son corps, au-delà des qu’en-dira-t-on, qu’Amy Bond assure avoir trouvé la paix : « Humiliée pour mon passé dans le porno, la Pole Dance m’a aidée à me relever ».

Amy Bond entre alors réellement en piste.

©Christy Usher

La Pole danseuse se lance dans la compétition dès 2012. Elle est la gagnante de la division semi-pro Pole Theatre Pole Comedy, en 2016, puis, participe à la division professionnelle Pole Theatre Pole Comedy, un an plus tard. Avant de participer à l’émission « So You Think You Can Lapdance » dont elle remporte l’épisode 7 de la saison 3, terminant à la seconde place lors de la finale.

Ce qu’elle aime le plus dans cette discipline ? « La combinaison de l’artistique et de la performance ».

Amy Bond, en 2018, au championnat Golden Gate Pole, représentant son centre de danse, le San Francisco Pole and Dance, médaillée d’argent dans la Division féminine professionnelle.

La suite ? Diplômée en droit et devenue avocate, la pole danseuse bosse dans le domaine des technologies et dirige un cabinet avant de fonder, en 2016, le San Francisco Pole and Dance. Elle dirige désormais trois studios et enseigne la discipline.

Amy Bond raconte, toujours dans le Huffington Post, sa fierté de pouvoir offrir un refuge aux personnes qui cachent leur « honte sexuelle » : « Au cours des cinq années où j’ai dirigé et bâti ces studios et les communautés qui les composent, j’ai fini par comprendre que bien des gens – pas seulement des femmes – cachent la honte sexuelle comme une sorte de squelette dans leur placard. Tant de personnes m’ont écrit pour me raconter leurs expériences de cette honte. 

(…)Tant de gens, tant de nuances de honte et si peu d’espaces pour explorer la sensualité sans honte, sans excuse, et pour son propre plaisir. Partout dans le monde, les communautés de Pole Dance sont des refuges. Les studios offrent des lieux sûrs pour ce qu’on ne trouve pas ailleurs, c’est-à-dire la découverte de sa sensualité et de sa sexualité. »

Son autre fierté ? Voir les préjugés sur la Pole Dance diminuer au profit d’une admiration grandissante pour cette discipline sportive difficile : « Avant, on me disait : “Oh, alors tu es une strip-teaseuse ?“ Une grande partie du style de mouvement sensuel qui est incorporé dans la Pole Dance provient du mouvement de base développé par les strip-teaseuses, mais ce n’est pas la même chose. Maintenant, les gens disent : “Oh mon Dieu. J’ai une amie qui fait ça, et ça a l’air vraiment difficile.“

Si certains danseurs optent pour l’exploration de leur sensualité, d’autres utilisent la Pole Dance comme un sport intensif de renforcement musculaire, à l’image de la gymnastique.

Amy Bond est heureuse de pouvoir contribuer à l’émergence et à la diffusion de la Pole Dance comme discipline sportive autant qu’artistique. « Pour moi, la Pole Dance, c’est comme si je m’envolais. Parfois, je le fais presque quand je balance mon corps à l’envers autour du poteau. (…) J’adore cette sensation de sauter du bord d’une falaise ! »

Une discipline qui l’aide à tenir bon la barre. Et à être enfin elle-même.

Ouverture ©Don Curry

Vous aimerez aussi…

Naomi Osaka

Naomi Osaka, la petite prodige engagée du tennis

Sportive la mieux payée de l’Histoire devant sa challenger Serena Williams, la toute jeune Naomi Osaka a plus d’une corde à sa raquette de tennis. Au top 10 du classement mondial WTA, forte de deux titres consécutifs de Grand Chelem, elle garde la tête froide et donne l’exemple en haussant la voix contre le racisme. Portrait de l’une des sportives les plus influentes en 2020.

Lire plus »
Emmanuelle Bonnet-Oulaldj

Emmanuelle Bonnet-Oulaldj : « Faire du sport n’est pas juste une finalité pour être en bonne santé, mais un processus d’émancipation… »

Il y a des décisions qu’on ne prend pas à la légère. Ce fut mon cas, soutenu par la Fédération Sportive et Gymnique du Travail (FSGT), dont je suis la co-présidente, concernant ma candidature à la présidence du CNOSF. Femme, quadragénaire, représentante d’une fédération multisports, n’ayant jamais été sportive de haut-niveau, cette démarche inédite a surpris. Tant mieux !

Lire plus »
Luc Arrondel « En France, le salaire moyen d’une joueuse de foot est à peu près celui d’un footballeur des années 70. »

Luc Arrondel : « En France, le salaire moyen d’une joueuse de foot est à peu près celui d’un footballeur des années 70. »

Économiste du sport, directeur de recherche au CNRS, Luc Arrondel s’est penché sur l’aspect business du football et plus particulièrement du foot féminin. Son livre « Comme des garçons ? » propose de mieux comprendre son essor et ses opportunités dans notre pays où la discipline conjuguée au féminin en est encore à ses balbutiements.

Lire plus »
Bgirl India Sardjoe, un flow olympique

Bgirl India Sardjoe, un flow olympique

Plus que quelques mois avant que le breaking ne fasse officiellement son apparition aux Jeux Olympiques. Un rendez-vous qui fait rêver les Bgirls et Bboys. La Néerlandaise India Sardjoe est prête à se lancer dans la battle pour l’or. Portrait d’une breakeuse d’exception.

Lire plus »
Alice Modolo

Alice Modolo, le cœur en apnée

En avril, elle remportait la compétition internationale d’apnée qui se tenait au Blue Hole de Dahab, en Égypte, battant à trois reprises le record de France en se propulsant en bi-palmes à 85, 87 et 89 mètres. L’apnésite française Alice Modolo est de nouveau dans la place pour le Championnat de France en eau libre, ce week-end.

Lire plus »
Bgirl Kimie : « La breakdance, c’est de l’énergie pure ! »

Bgirl Kimie : « La breakdance, c’est de l’énergie pure ! »

Elle est l’une des étoiles montantes de la piste de breakdance, cette danse acrobatique urbaine issue de la culture hip-hop qui fera son entrée dans l’arène olympique en 2024. Kimie Alvarez alias Bgirl Kimie, 15 ans, trimballe sous ses longues nattes de petite fille-modèle une dégaine ultra relax, celle d’une sportive heureuse et appliquée qui « kiffe » danser avant tout. Championne de France et du monde des moins de 16 ans, ce petit ange tournoyant pourrait bien faire un bond pour les JO de Paris.

Lire plus »
Charlotte Yven : « En voile, il est urgent d'ouvrir les portes aux filles. »

Charlotte Yven : « Les courses au large, ça te transforme. »

Après avoir remporté la Transat Paprec, disputée en équipage mixte pour la première fois, elle vient de s’élancer pour sa 3e Solitaire du Figaro. Navigatrice professionnelle, membre du programme Skipper Macif, Charlotte Yven espère que son exemple ouvrira la voie à d’autres femmes, trop rares au départ des courses au large.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner