
Les filles, pas de quartiers !
Longtemps oubliée, la problématique de l’accès des filles au sport dans certains quartiers est désormais mieux traitée, et les actions se multiplient pour réinjecter un peu de mixité dans ces territoires délaissés.
Publié le 07 mai 2021 à 10h08, mis à jour le 28 juillet 2024 à 15h02
Dernier exploit ? À Bâle, en Suisse, lors des Championnats d’Europe de gymnastique artistique qui se tenaient du 21 au 25 avril. Mélanie De Jesus Dos Santos a su apprivoiser la poutre, allant jusqu’à élever sa prestation en ajoutant une vrille à sa sortie habituelle en double salto arrière groupé.
Bingo ! Mélanie est sacrée championne d’Europe à la poutre, un bon présage pour les JO de juillet prochain.
La numéro 1 française, 21 printemps, a fait ses premiers pas de gymnaste à l’âge de 5 ans, une aptitude innée : « Mélanie bougeait tout le temps, elle faisait naturellement des saltos et avait une détente phénoménale, explique son beau-père au Parisien, en 2019. À l’époque, Mélanie était plutôt garçon manqué et plutôt attirée par le judo, le foot, le rugby, et surtout pas la danse ! La chorégraphie l’ennuyait. »
C’est pourtant là qu’elle fait des étincelles. Son entraîneuse la pousse à s’inscrire à des stages de la fédération nationale de gym où on perçoit déjà en elle une graine de championne. Le destin est en route.
Elle a 12 ans et quitte son île natale, la Martinique, pour rejoindre la métropole. Le Pôle de Saint-Etienne l’attend.
©Laurie Pina
Un an plus tard, la môme, devenue une athlète que l’on suit de (très) près à la fédé, intègre l’équipe de France junior et démontre tout son art et toute sa détermination en remportant, à 15 ans, le titre de vice-championne de France du concours général.
Nous sommes en 2015 et l’horizon, hélas, s’assombrit aussi vite qu’il s’est éclairci : Mélanie De Jesus Dos Santos se blesse grièvement au genou suite à une mauvaise réception au saut de cheval alors qu’elle participe aux qualifications du Festival olympique de la jeunesse européenne. Impossible dès lors de participer aux JO de Rio 2016.
©Duchateau Nolwen
Un coup dur qui l’éloigne des tapis de compétitions pendant neuf mois. Et Mélanie de se forger, par la force des choses, un mental de battante… Lorsqu’elle revient en piste, en juin 2016, en équipe de France senior, elle attaque sa course aux médailles.
À commencer par plusieurs coups d’éclat, en 2017 : Mélanie De Jesus Dos Santos devient la deuxième Française à figurer au palmarès de la prestigieuse American Cup en remportant la médaille de bronze avec, notamment, la meilleure note à la poutre ; mais aussi la première Française depuis douze ans à obtenir une médaille européenne dans le concours général individuel…ce sont ses premiers Championnat d’Europe de gymnastique en Roumanie. Elle décroche la médaille de bronze.
Un mois plus tard, pour couronner le tout, Mélanie De Jesus Dos Santos se classe championne de France au concours général, devant la tenante du titre, Marine Boyer. C’est sa première médaille nationale en senior.
Pour les Championnats du monde de Montréal, elle atteint son objectif en terminant à la cinquième place, devenant la troisième Française à réaliser une telle performance mondiale au concours général.
Son ascension est fulgurante, à l’image de son explosivité sur les tapis et les agrès.
©Duchateau Nolwen
En 2018, miss De Jesus Dos Santos poursuit sa quête de médailles en décrochant, en Coupe du monde, à Doha, le bronze aux barres asymétriques et l’or à la poutre, puis trois médailles d’or aux Championnats de France et un titre de championne d’Europe au sol à Glasgow, la troisième Française à devenir Championne d’Europe à cet agrès.
Même poursuite aux étoiles, en 2019 : elle est sacrée Championne d’Europe du concours général à Szczecin, en Pologne, entrant dans l’Histoire comme deuxième Française seulement à décrocher ce titre. Elle rafle aussi la médaille d’or au sol, conservant son titre sur cet agrès malgré une blessure à l’annulaire gauche…
Une convalescence express et un retour miracle : « C’est la fête dans ma tête », dira-t-elle.
« Team USA », le docu choc sur le plus gros scandale d’abus sexuels dans le sport américain
©Damien Lecatelier
À l’âge de 19 ans, la cheffe de file de la gymnastique française devient, avec trois médailles d’or, la Française la plus titrée aux Championnats d’Europe, femmes et hommes confondus.
Son rêve est désormais d’obtenir une médaille mondiale, mais elle ne parvient qu’à se classer cinquième, à la poutre et au sol, lors des Championnats du monde de Stuttgart, en 2019.
Soulagement : la qualification pour les JO de Tokyo est faite !
©Duchateau Nolwen
Son entraîneur de toujours, Éric Hagard, reste confiant sur le potentiel de sa petite protégée : elle n’aurait « pas su maîtriser son énergie ». Pas évident de tout gérer pour Mélanie de Jesus dos Santos qui « n’a pas pu avoir les conseils des anciennes » puisque, rappelle-t-il, aucune Française n’a jamais réussi à obtenir une médaille mondiale…
To be continued pour la battante Mélanie…
©Annie Photographies
Car ce petit bout de 1,52m a un caractère bien trempé, tourné vers le travail et l’abnégation. La parfaite « championne attitude ».
« Il en faut pour arriver à ce niveau, confiait, en 2019, son entraîneur dans Le Parisien. Mélanie avait déjà le talent. Le travail et l’abnégation lui ont donné la maturité. Il y a trois valeurs dans notre sport : le respect, l’estime de soi-même, et la confiance. Elle a tout, hormis l’impatience. J’apprécie aussi son humilité. Mélanie veut être comme tout le monde. Elle ne se met jamais en avant au détriment des autres. »
©Annie Photographies
Alors qu’en 2020, la pandémie bouleverse son programme pour les JO de Tokyo, Mélanie De Jesus Dos Santos a prouvé, lors des Championnats d’Europe de Bâle, le mois dernier -l’or à la poutre, c’était (encore !) une première pour elle avec une sortie inédite-, qu’elle est bel et bien prête à illuminer les Olympiades de sa grâce virevoltante.
Toute en puissance et finesse, explosive sur les sauts, joyeuse et mutine au sol, Mélanie De Jesus Dos Santos nous rappelle une certaine Simone Biles. Une consœur américaine avec qui elle s’est déjà entraînée, une amie qui l’impressionne, « une machine », dira-t-elle dans un reportage.
Une machine dont elle semble posséder les mêmes rouages. Ça devrait donc pulser aux JO. C’est tout ce qu’on lui souhaite pour Tokyo, ces Jeux auxquels elle « pense tous les jours »…
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