« Mon histoire avec le football américain commence presque par hasard. En 2015, pour suivre mon compagnon de l’époque qui avait obtenu une mutation, je décidais d’emménager à Bordeaux, avec le souhait de rapidement me reconstruire un cercle social, couplé d’un besoin de pratiquer une activité sportive et ainsi retrouver la forme.
Avant cela, je n’avais jamais vraiment eu de grande activité sportive : au collège et au lycée, les cours d’EPS étaient un calvaire pour moi qui suis très introvertie.
Plus tard, dans une optique de perte de poids et de remise en forme générale, j’ai commencé à faire des footings. Rapidement, j’ai compris que j’en avais besoin bien au-delà de cet objectif initial.
À Bordeaux donc, il se trouve que mon ami qui avait pratiqué le foot US auparavant, a trouvé un club dans lequel il y avait une équipe féminine : les Lions de Bordeaux. J’ai très vite, si ce n’est tout de suite, accroché…et voilà maintenant six ans que je suis dans ce club que j’affectionne. Il est la principale raison d’ailleurs qui aujourd’hui me rattache à cette ville alors que je pourrais très bien déménager ! Il est vrai que je me vois difficilement enfiler le maillot d’un autre club que celui qui m’a formée…
Moi qui suis si discrète et introvertie, j’ai réussi à m’intégrer dans mon équipe justement parce que, tel qu’on nous l’enseigne dans mon club, c’est un véritable sport d’équipe, dans sa pratique et dans son esprit : sans cohésion, nous n’allons nulle part, et c’est là toute la beauté de ce sport. Mon coach lui-même a pour habitude de parler de compétences individuelles au service du collectif.
Mon poste consiste à être sur la ligne tantôt offensive, et tantôt défensive : je protège la quaterback ou porteuse de ballon de mon équipe et, lorsque nous sommes en défense, je vais chercher la quaterback ou porteuse adverse pour la plaquer.
C’est un rôle qui, à mon sens, a beaucoup de signification : un travail de l’ombre car nous n’avons jamais le ballon -ce qui me convient tout à fait, je ne souhaite pas être dans la lumière-, mais un poste clé qui n’a pas toujours la reconnaissance qu’il mérite. J’ai la chance d’avoir un entraîneur qui croit beaucoup au travail de la ligne, c’est pour cela que je ne suis pas certaine que je me serais autant épanouie dans un autre club.
Par ailleurs, occuper ce poste m’a permis de me découvrir des qualités sportives. Cela va même au-delà : tout ce qu’auparavant je considérais chez moi comme des défauts s’est révélé être des qualités : je suis d’un naturel plutôt bourru, maladroit, et côté physique je suis grande et assez carrée…pas vraiment le modèle de femme féminine ou tout du moins, pas au sens véhiculé par la norme dominante de notre société.
Longtemps, j’ai mal vécu ce physique, mais il se trouve que grâce à ce sport, et à mon rôle sur le terrain, mon corps a trouvé sa place.
Je me suis découvert un grand potentiel et, à force d’investissement, j’ai rapidement pu progresser.
À toutes les personnes qui affirment que c’est un sport violent, cliché relativement répandu, je répondrais que c’est un sport intense, à impacts certes, mais maitrisés, règlementés, et qu’indéniablement, sa pratique a boosté ma confiance en moi.
Il m’a fait découvrir une autre forme de féminité : je m’affirme, je n’ai pas peur d’aller au contact. On y apprend à encaisser les coups, parfois à les rendre, à tomber, se relever, et passer à l’action suivante.
Aujourd’hui j’en suis convaincue, quel que soit le sport qu’on pratique, ce sera toujours plus efficace que tous les régimes alimentaires du monde et toutes les crèmes qu’on pourra s’appliquer pour être bien dans sa peau…et dans sa tête. »
- Ouverture ©Florent Van Liefde
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