Aurélie Groizeleau « Des exemples comme le mien montrent qu'on peut réussir dans l'arbitrage en étant une femme. »

Aurélie Groizeleau  « Des exemples comme le mien montrent qu'on peut réussir dans l'arbitrage en étant une femme. »
Elle s’appelle Aurélie Groizeleau, 36 ans, et elle est la première arbitre professionnelle de rugby en France. Une exception contre laquelle la Rochelaise lutte à coup d’opérations mises en place sur tout le territoire. Mission : accélérer le développer de l’arbitrage féminin.

Par Sophie Danger

Publié le 06 février 2025 à 18h22

Tu es arbitre de rugby, la seule, en France, à être professionnelle et pouvoir vivre de ton métier. Une exception même si, malgré tout la place des femmes dans l’arbitrage a évolué ces dernières années : on est passé d’environ 4 % d’arbitres féminines en 2019 à presque 7 % aujourd’hui, ce qui donne 190 femmes pour 3 000 arbitres, tous niveaux confondus, dont 24 évoluent au niveau national. Il faut se réjouir de cette progression ou déplorer le temps qu’il faut pour faire bouger les lignes ?

Ça évolue, c’est vrai, mais je trouve que ça n’évolue pas assez vite. Récemment, je me suis amusée à faire des ratios. Si l’on se base sur le nombre de joueurs par rapport au nombre d’arbitres masculins, il faudrait que l‘on double notre effectif pour atteindre ce ratio joueuses-arbitres féminines, ce qui signifie qu’il faudrait que l‘on ait, en gros, 400 arbitres féminines. On sait que le rugby reste un sport masculin et on ne va pas chercher la parité, mais il faut que l‘on continue à évoluer parce que le rugby féminin évolue – il a une croissance d’à peu près à 10 % – et il faut que nous, arbitres, nous arrivions à suivre ce rythme en parallèle, voire même que nous allions un peu plus vite pour que la place de la femme arbitre soit plus importante.

©FFR

C‘est un combat que tu portes malgré toi, lié à ton statut, ou c’est une cause pour laquelle tu as eu envie de t’engager ?

En tant qu’arbitre professionnelle, j’ai aussi pour mission de créer des projets de développement de l’arbitrage féminin. Je suis partie d’une page blanche et c’est assez monstrueux à construire. Je suis aidée par des bénévoles, des gens sur le terrain parce qu’il m’est impossible d’aller dans tous les clubs, dans toutes les villes pour promouvoir l’arbitrage féminin. Cela me permet d’avoir des relais sur le territoire qui aident à mettre en avant la pratique féminine. On a commencé par les clubs féminins et puis, par la suite, il y aura peut-être promotion de la fonction dans le cadre de l’UNSS et des compétitions jeune

Je pense que, pour adhérer à l’arbitrage de manière générale, il faut y avoir goûté un peu et je me dis que ça, ça passe d’abord par de l’éducation à l’arbitrage et ce dès l’école de rugby ou au début de la pratique, avant 18 ans. C’est ça qui, à terme, va faire que l’on y prend goût ou pas. En revanche, si on n’a jamais touché un sifflet, on ne sait pas vraiment à quoi s’attendre, on se dit juste que l’arbitre, c’est le méchant et on ne se projette jamais dans ce rôle. Il y a un gros travail à faire sur l’image de l’arbitre, sur la manière dont nous sommes considérés afin d’amener les gens à se poser des questions concernant cette fonction. 

©FFR

Parmi ces opérations, il y a la semaine de l’arbitrage en collaboration avec La Poste. Depuis combien de temps y participes-tu et en quoi est-elle nécessaire selon toi ?

Tout est arrivé un peu par hasard. L’an dernier, lors de la finale du Top14, j’ai rencontré le responsable de communication de La Poste et je lui ai dit que, au lieu de travailler chacun dans son coin pour l’arbitrage féminin, nous pourrions peut-être envisager de travailler tous ensemble pour trouver des solutions communes. Je pense que, peu importe notre sport, il y a des sujets qui nous rassemblent comme le recrutement, la fidélisation, comment traiter les problématiques de sexisme, de misogynie qui peuvent freiner l’engagement de femmes dans l’arbitrage.

Ce qui a donné naissance à un comité dédié 

Oui, c’est un comité très récent qui existe depuis septembre 2024 et qui ne peut faire que grandir. En matière d’arbitrage, il y a des fédérations qui sont très en avance, celle de handball par exemple qui est quasiment à 50/50 hommes-femmes et qui a mis pas mal de choses en place pour parvenir à ce résultat. Si, parmi elles, certaines n’ont pas eu le résultat escompté, ça ne sert peut-être à rien de perdre notre énergie sur ces choses-là en rugby. À l’inverse, partager ensemble nos idées quand elles ont un impact peut nous permettre de nous faire tous avancer et de mettre en avant la femme arbitre.

Quels sont les principaux freins qui empêchent les filles de s’atteler à la tâche? Est-ce que c’est seulement une question d’image ou une question de légitimité ?

La question de la légitimité, c’est vraiment un point qui revient fortement. Aujourd’hui, quand on est une femme arbitre, on se retrouve à participer à des réunions où l’on est parfois la seule dans un groupe où il y a quarante garçons. Tout cela fait que l’on se met un peu à l’écart dans la pièce, que l’on n’ose pas forcément prendre la parole et on finit par se demander ce que l‘on fait là.

Dans les Ligues, nous avons essayé de mettre en place des réunions féminines, en plus des réunions mixtes, pour parler des thématiques comme celle du sexisme que l‘on peut vivre sur le terrain le week-end, celle de la place et de la légitimité dans un groupe mixte, de la maternitéCe sont des sujets spécifiques à la femme sportive qui doivent permettre aux femmes arbitres de trouver leur place dans notre milieu

©Rugby club Vannes

Est-ce que le fait que vous soyez amenées à arbitrer des matches masculins joue aussi dans le manque d’engagement des femmes dans le corps arbitral ?

En ce qui me concerne, ça n’a jamais été un frein. On dit souvent que la femme a un crédit supplémentaire quand elle débute un match, c’est-à-dire qu’on lui laisse le bénéfice du doute tout en sachant qu’elle peut le perdre beaucoup plus vite qu’un garçon. C’est un peu comme dans la vie professionnelle aujourd’hui, dans certaines entreprises, la place de la femme n’est pas encore beaucoup mise en valeur. Ceci étant, les choses évoluent et, à mon sens, elles évoluent positivement. J‘ai commencé l’arbitrage il y a quinze ans et à l’époque, ce n‘était vraiment pas drôle.

Aujourd’hui, les garçons sont moins choqués de voir une femme arbitre, ça devient plus commun et c’est tant mieux car ce qui est important, c’est le rôle et la qualité de l’arbitre, pas de savoir si c’est un homme ou une femme qui officie.  

Tes débuts, c’était en 2009. Tu es alors joueuse, tu évolues en club et sous le maillot national, mais tu dois renoncer à ta carrière en raison d’une blessure et tu décides quasi immédiatement de passer tes diplômes d’éducatrice et de débuter, en parallèle, au sifflet. Pour toi, l’arbitrage était un moyen de continuer à pratiquer ou plutôt un pis-aller, une sorte de plan B ?

Pour être honnête, au début, l’arbitrage était clairement un plan B parce que, quand on aime le jeu, on sait que l’on ne connaitra plus les sensations que procurent une victoire ou le fait de gagner une compétition avec l’arbitrage. Victoire ou défaite, tout cela nous importe peu quand on est arbitre. Je me suis longuement posé la question de savoir si je tentais ou pas de me lancer dans cette voie et c’est aussi pour cela que j’ai fait de l’entraînement en parallèle.

En tant qu’entraîneur, j’ai trouvé néanmoins que je n‘avais pas assez d’impact. Quand on a 20 ans, on a envie de courir, de participer au jeu et tout ça a fait que j’étais un entraîneur qui criait beaucoup parce que j’avais envie de ça, envie de jouer. L‘arbitrage m’a permis de redevenir actrice du jeu. À partir du moment où j’ai compris ça, j’ai complètement basculé dans ce nouveau rôle.

©Wikipedia

Tu parlais alors d’une révélation. Tu as donc réussi à déconstruire l’image que tu avais de l’arbitrage pour t’approprier la fonction ?   

Il faut savoir que, quand je jouais, je n‘aimais pas les arbitres parce que je les trouvais toujours nuls. J‘étais assez intransigeante. Je trouvais qu’ils rataient toujours des situations, que l’on était toujours désavantagées Il est bien connu que, quand on perd un match, c’est la faute de l’arbitre ! Quand on se retrouve avec le sifflet, on se rend compte de tout ce qu’il faut voir, de tout ce qu’il faut maîtriser. Moi, ça a complètement changé mon image de l’arbitrage. À partir du moment où l’on comprend qu’il y a un humain derrière le sifflet, on comprend qu’il y a un droit à l’erreur, droit à l’erreur qu’on limite évidemment puisque l’objectif n‘est pas d’en faire, mais il existe et il faut en être conscient. 

C’est ce qui t’a permis d’aimer et d’habiter cette fonction sans ressentir de frustration ?

Oui même si, au début, c’était dur parce que je suis hyper perfectionniste. Moi, jaimerais toujours avoir le match parfait mais on comprend, avec le temps, que la perfection n’existe pas dans l’arbitrage, qu’il y a toujours quelque chose à redire. C’est ça qui fait que l’on peut aller vers le haut niveau, cette capacité de se remettre en question, de modifier rapidement ses erreurs et déviter de les reproduire. Tout cela a eu un gros impact sur l’image que j’avais de moi et en termes de caractère car j’ai complètement évolué entre mes débuts à 20 ans et mes 35 ans aujourd’hui. L‘arbitrage m’a permis de me découvrir humainement et ça m’a fait évoluer sur pas mal de plans.

Tu commences par arbitrer en amateur, puis en fédérale 2 masculine, avant d’être contactée pour des matches internationaux féminins en qualité, d’abord, d’arbitre de touche puis d’arbitre principale. Tu évoquais tes débuts difficiles, qu’est-ce qui a été difficile ?

Les insultes sexistes. J‘ai vécu des choses assez violentes, on m’a craché dessus Quand on débute et qu’on a 20 ans, on ne s’attend pas à ça, on croit que le rugby est une grande famille, que tout le monde est copain et on se rend compte en réalité, en tant qu’arbitre, qu’on est très seul, très isolé. Je me souviens que lors de mon 3e ou 4e match, j’ai pris une mauvaise décision et que ça s’était très mal passé. Heureusement, ce jour-là, j’étais accompagnée. Je suis rentrée dans le vestiaire en pleurs en disant que je ne voulais plus jamais vivre ça, que je ne voulais pas passer mon temps à me faire insulter par tout le monde. Et là, la personne qui était à mes côtés m’a dit : « Si, tu vas recommencer la semaine prochaine, il faut passer le cap. »

Moi, je débutais et j’étais nulle car il ne faut pas croire que quand on démarre l’arbitrage, on est bon. Non, il faut apprendre. Résultats des courses, je suis retournée sur le terrain la semaine suivante et ça s’est beaucoup mieux passé. Ce genre de mésaventures, ce sont des épiphénomènes, mais cela fait que l’on perd des arbitres parce que l‘on n’arrive pas à gérer notre stress, à gérer nos émotions. Je pense qu’il y a une partie mentale de l’arbitrage qui est devenue très importante et qui n’est pas incluse dans nos formations. On nous parle de la règle, mais il faudrait peut-être que l‘on parle davantage de savoir être 

Dans un entretien, tu expliquais t’être sentie comme une anomalie lors de tes premiers matches. Cette anomalie, elle est liée à la fonction ou au sexe ?

Il y a quinze ans, le crédit dont je parlais plus haut, celui que l’on a au début du match, on ne l’avait pas. On partait du principe qu’une femme de 20 ans qui vient arbitrer un match de rugby, elle ne connaît rien à ce sport. Il y avait un a priori négatif sur les femmes arbitres. Je suis partie de très loin pour finalement réussir, un peu, à convaincre les gens que j’avais le droit d’arbitrer.

Cette évolution, ce crédit, il est dû à la Fédération qui a su prendre des mesures en faveur des femmes arbitres ou à toi qui es parvenue à prendre confiance en toi et à t’imposer ?

Il y a un peu tout cela. Il y a eu notamment une politique nationale concernant la féminisation du sport et, au niveau du rugby, ça a suivi et permis une évolution des joueuses, plus de médiatisation, de la professionnalisation, ce qui a tiré le rugby féminin vers le haut et, par ricochet, l’arbitrage féminin.

Est-ce que les difficultés sont les mêmes lorsque tu arbitres des matchs féminins que lorsque tu arbitres des matchs masculins ou la pression est plus forte lorsqu’il s’agit de rencontres d’hommes ?

En fait, c‘est presque l’inverse. Entre femmes, on se fait moins de cadeaux et c’est ça le danger. Lorsque je fais un match féminin, je sais qu’il ne faut surtout pas le prendre à la légère au prétexte que ça reste des filles, que ça va un peu moins vite en termes de vitesse de jeu... Entre un match de D2 et un match féminin, j’essaie toujours d’avoir une préparation identique pour ne pas me faire piéger par ce genre de considérations.

©e’rugby

Ce déséquilibre entre hommes et femmes en termes de quantité semble conduire les femmes à s’imposer un devoir d’exemplarité. Il ne faut pas se tromper car non seulement le retour est violent mais ça peut également conditionner la suite pour les autres. Tu l’as vécu ou tu le vis encore comme ça ?

C’est vrai qu’il suffit qu’une fille ne soit pas bonne pour que l’on entende dire que toutes les filles arbitres sont nulles. C’est une grosse pression, d’autant plus que je suis, pour ma part, la seule professionnelle, ce qui signifie que je suis la seule un peu médiatisée et ça, ça me laisse peu de marge d’erreur. Il reste qu’il est important, dans tous les sports, d’avoir une figure qui montre la voie et qui montre que c’est possible.

Toutes les filles ne deviendront pas professionnelles de l’arbitrage mais en tout cas, des exemples comme le mien montrent qu’aujourd’hui, on peut réussir dans l’arbitrage au même titre qu’un garçon, ce qui ouvre la porte, du moins je l’espère, à plein de jeunes filles qui ont envie de s’investir dans le rugby

Tu as entamé ta quatrième saison en Pro D2, l’étape suivante c’est le Top14 – tu as déjà été assistante sur des rencontres de ce niveau. Est-ce que c’est un pallier auquel tu songes ?  

Je n’ai pas vraiment d’idée concernant ce sujet. La marche est encore plus grande que toutes celles que j’ai pu gravir avant. Une femme arbitre de Top14, ça ne s’est jamais fait et, si un jour ça devait m’arriver, j’appréhende davantage tout ce qui va se passer autour du terrain, la médiatisation notamment, que ce qui se passera sur le terrain. On a vu ça avec Stéphanie Frappart. Arbitrer la ProD2, c’est être un peu protégée ; le Top14, c’est autre chose, il y a une énorme ferveur pour ce Championnat avec de retombées mondiales assez importantes.

C’est vrai que c’est quelque chose que j’ai dans un coin de ma tête parce que, même si l’on est arbitre, on reste des sportifs et on aime la compétition, le challenge. Tant que ma carrière n’est pas finie, je veux pouvoir garder cette petite flamme qui me fait croire à cette opportunité mais, en même temps, je suis un peu dans un entre-deux : si montée en Top14 il y a, je ne veux pas que ce soit parce que je suis une femme, mais parce que j’ai des compétences pour y aller. 

Ouverture ©FFR

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