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Publié le 16 mars 2023 à 12h54, mis à jour le 26 avril 2023 à 2h48
Sa vie ressemble à un roman. Alice Marble, figure incontournable du tennis d’avant-guerre, a vécu pleinement une vie riche d’aventures et de rebondissements. Un parcours rocambolesque qui débute le 28 septembre 1913 à Beckwourth, une petite bourgade perdue dans les montagnes de la Sierra Nevada.
Elle a 3 ans lorsque ses parents – Harry, bûcheron, et Jessie, infirmière – décident de prendre la direction de San Francisco pour s’y installer avec leur cinq enfants. C’est là, au bord du Pacifique, qu’Alice Marble va s’initier au sport.
Douée, elle excelle en basket, pratique l’athlétisme, aime la boxe mais sa préférence va au baseball. Supportrice des San Francisco Seals pour qui elle chasse les balles perdues, elle finit par en devenir, officieusement, la mascotte. Elle a alors 13 ans et une seule envie : devenir joueuse de baseball professionnelle.
©Wikipedia
Une lubie à laquelle son frère ainé, Dan, va rapidement mettre fin. Pressé de voir sa petite soeur s’illustrer dans un domaine plus « féminin », il lui offre une raquette de tennis.
Alice Marble se prend au jeu et commence à s’entraîner régulièrement sur les courts municipaux du Golden Gate Park. Talentueuse, elle enchaîne les victoires en compétition et se fait un nom qui résonne bientôt dans tout l’état.
L’année 1932 marque un tournant dans sa carrière. La Californienne, jusqu’alors sans entraîneur, s’associe à Eleanor Tennant qui va devenir son coach, son mentor et son manager. La saison suivante, elle atteint les quarts de finale de l’US National Championships, futur US Open.
Une trajectoire fulgurante qui va néanmoins connaitre un coup d’arrêt brutal quelques mois plus tard.
©Wikipedia
Alice Marble se rend à Paris pour disputer son premier tournoi à l’étranger. En pleine rencontre, elle s’écroule sur la terre battue de Roland-Garros. Les médecins lui diagnostiquent une tuberculose et lui annoncent qu’elle ne pourra plus jamais jouer au tennis. La Franciscanaise va rester hospitalisée deux ans.
Avec l’aide de Tennant, elle parvient à reprendre miraculeusement du service en 1936. Le début d’une épopée sportive extraordinaire. En moins de quatre saisons, la sculpturale blondinette, met le circuit mondial à ses pieds.
Victorieuse de l’US National Championships à quatre reprises en simple (36, 38, 39, 40), elle réalise un incroyable triplé à Wimbledon (Grande-Bretagne) en 1939 en survolant le simple, le double dames et le double mixte.
En tout, elle va rafler pas moins de dix-huit couronnes dans ce que l’on appellera plus tard, les Majeurs : cinq en simple, six en double dames et sept en double mixte.
Alice Marble, victorieuse de la Wightman Cup for America en 1939, compétition de tennis féminin entre les États-Unis et la Grande-Bretagne.
Une moisson exceptionnelle pour la protégée de Tennant qui, non contente de garnir son étagère à trophées, révolutionne le jeu féminin en pratiquant un tennis très agressif, inédit pour l’époque. Un héritage de ses années de baseball. Marble à l’oeil et les bras. Elle excelle à l’engagement et inaugure le style service-volée chez les dames.
En un mot comme en cent, la Californienne détonne. Les journalistes s’emballent pour ce sosie de Greta Garbo qui joue « comme un homme » et fait scandale en délaissant la jupe plissée au profit du short sans se soucier du qu’en dira-t-on.
©Spyscape
En 1940, la redoutable miss Marble décide de passer professionnelle. Elle se produit dans de lucratives tournées d’exhibition, dispense des courts et fraye avec le tout-Hollywood.
Une vie de bohème durant laquelle elle va s’essayer, tour à tour, à la chanson et se produire dans les clubs huppés de New York et de Londres, au cinéma en acceptant un petit rôle dans un film de George Cukor, à la mode en créant des lignes de vêtements et à l’animation à travers des émissions de radio.
Elle collaborera également avec des journaux, des magazines, des comics et prêtera même main forte… aux services secrets américains.
© National Portrait Gallery London
Cet épisode-là remonte à l’année 1945. La guerre touche à sa fin et Alice Marble a vécu son lot de tragédies. Mariée à Joe Crowley, un officier de l’armée de l’air, elle perd son époux au combat quelques jours seulement après avoir fait une fausse couche. Dévastée, elle tente de se suicider.
Quelques temps plus tard, elle est abordée par un officier des renseignements dans un restaurant de Manhattan. Ce dernier veut lui confier une mission : renouer avec un ancien amant, banquier en Suisse, pour confirmer les soupçons de blanchiment d’argent au profit des nazis qui pèsent sur lui. La Californienne s’envole pour l’Europe.
Elle reprend contact avec son soupirant et est à deux doigts de le piéger quand il l’a démasque. S’ensuit une folle course-poursuite dans les montagnes helvètes sous le feu nourri des balles de revolver. Alice, touchée au dos, est laissée pour morte. Elle se réveillera le lendemain dans un hôpital puis sera rapatriée à New York.
Révélée dans sa seconde autobiographie « Courting Danger », sortie après sa mort, cette histoire invraisemblable n’a, en réalité, jamais pu être corroborée mais contribue, aujourd’hui encore, à entretenir sa légende.
Espionne ou pas, Alice Marble continuera néanmoins, toute sa vie, à faire parler d’elle en prenant notamment fait et cause contre la ségrégation raciale. Elle se tiendra, à cet effet, aux côtés d’Althea Gibson, interdite de participation à l’US National Championship en raison de sa couleur de peau.
Introduite au International Tennis Hall of Fame dès 1964, elle finira par s’installer à Palm Spring, en Californie, et continuera à jouer au tennis et partager son savoir auprès de jeunes aspirants champions parmi lesquels une certaine Billie Jean King.
Elle s’éteindra le 13 décembre 1990 à l’âge de 77 ans, terrassée par une anémie pernicieuse. En souvenir, la ville de San Francisco renommera un court de tennis à son nom.
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