Rechercher

Su-Wei HsiehL’esprit libre du tennis qui n’a rien à perdre

Su-Wei Hsieh
Elle inaugure son 16e Roland-Garros. En double, c’est la magicienne des courts. En simple, elle aime jouer les coupeuses de têtes du circuit féminin, même si elle n’a pas encore trouvé la recette pour gravir les marches des podiums. Mais, à 35 ans, la Taïwanaise Sue-Wei Hseih est l’une des joueuses de tennis les plus attachantes. Polyvalence, jeu atypique et force mentale, la numéro 1 mondiale en double, 64e en simple, séduit le monde de la raquette. Portrait d’une fille aux nombreux rebonds.

Par Manon Gimet

Publié le 30 mai 2021 à 10h23, mis à jour le 28 juillet 2021 à 10h45

Initiée au tennis par son père à l’âge de cinq ans, la raquette est son doudou. Elle rêve alors de disputer les plus grandes compétitions mondiales, comme son idole, l’Allemande Steffi Graf.

Pour battre les meilleures joueuses du WTA (Women’s Tennis Association), elle adopte un jeu (à deux mains) atypique et technique qui, à l’origine, permet de compenser son manque de puissance : “J’ai débuté le tennis très jeune, mais je n’avais qu’une raquette d’adulte. Alors je la tenais à deux mains pour qu’elle me paraisse moins lourde. Plus tard, mon père a essayé de me faire changer de prise, mais je n’ai pas voulu : j’étais à l’aise comme ça », explique Su-Wei Hsieh.

Seule, sans coach, sans sponsors et sans contrat, qui aurait pu penser voir un jour Su-Wei Hsieh sur la scène mondiale ?

Elle affiche, très vite, un beau palmarès : trente-sept victoires consécutives pour lancer sa carrière. Elle connait aussi le succès en double.

À peine âgée de 18 ans, elle atteint cinq finales sur le circuit ITF (International Tennis Federation) et remporte deux titres (Incheon et New Delhi). La même année, elle joue sa première finale de WTA en double à l’Open de Corée.

L’ère Su-Wei Hsieh ne fait que commencer… Son envol pour le top 10 du classement en double ne mettra que trois ans.

Aujourd’hui, elle peut se targuer d’avoir gagné vingt-huit tournois WTA en double dames et notamment celui de Wimbledon en 2013 et en 2019, mais aussi à Roland-Garros, en 2014.

Hommes et femmes confondus, elle est la première joueuse de son pays à avoir remporté un titre du Grand Chelem. Su-Wei Hsieh est une joueuse acharnée qui a réussi à bousculer plus d’une championne du Top 10 féminin. Maria Sharapova a lâché un jour que c’était un cauchemar de jouer contre elle !

Avec Paul McNamee, ancien joueur de tennis devenu son entraîneur « par interim », la relation est, elle aussi, atypique. Lorsqu’elle a besoin de lui, elle le contacte, mais il n’est pas toujours présent lors de ses entraînements.

Elle a toujours su évoluer toute seule, il doit s’adapter à ses habitudes, être un atout sans l’étouffer. Paul McNamee confie d’ailleurs qu’il vaut mieux ne pas être stressé pour coacher Su-Wei Hsieh ! Il la qualifie « d’esprit libre ».

À Wimbledon, en 2013, elle remporte le titre en double et affole son pays, Taïwan, mais aussi… la Chine. Une entreprise chinoise lui propose alors un contrat de sponsoring, seulement voilà, pour ça, elle doit changer sa citoyenneté pour la République Populaire de Chine.

Pas du goût du gouvernement Taïwanais. Les entreprises nationales sont mobilisées, des offres concurrentes affluent : Su-Wei Hsieh restera la meilleure joueuse de Taïwan.

Son atout ? Sa personnalité. Toujours souriante, même lorsqu’elle perd, elle en tire le positif et elle est ÀBLOCK! pendant toutes ses rencontres. « J’aime jouer tous les matchs même si je me fais martyriser sur le court. Par exemple, contre Kvitova (joueuse de tennis tchèque, Ndlr), je perds tout le temps. Une fois, j’ai gagné plus de jeux, j’étais contente et ça l’a fait rire quand je lui ai serré la main. Je ne me soucie pas vraiment de gagner ou de perdre. Je fais de mon mieux et je joue. Toutes les filles ont des jeux différents, il y a bien sûr des situations difficiles sur le court mais c’est très intéressant car tu veux trouver une solution. Au moins, j’essaie. Je n’ai rien à perdre », affirme-t-elle au journal L’Équipe.

 

2017, année de la révélation pour Su-Wei Hsieh qui se bat comme une lionne sur la terre battue parisienne. Elle défie Johanna Konta, alors numéro 8 mondiale, et parvient à remporter le match : « Avant Roland-Garros, en 2017, je n’avais jamais battu de joueuses du top 10, raconte Su-Wei Hsieh dans L’Équipe. Le truc marrant, cette année-là, est que je sortais avec mon petit-ami depuis un an ou deux et c’était la première fois que ses parents venaient me voir jouer. Je jouais tellement mal au début que j’avais l’impression que ses parents dormaient. Alors, je me suis dit : « Ok, peu importe ce qui arrive, je vais essayer de tout renvoyer et de faire mieux. Au moins, je veux les voir réveillés. » C’est comme ça que je suis revenue dans le match et que j’ai gagné. Après ce match, j’ai commencé à battre des top 10 ! »

Renommée sur le tard, certes, mais sa longévité sur les courts reste exceptionnelle. Se faire passer pour une jeune de 18 ans alors qu’elle en a 35, elle adore !

La blessure est sa plus grande crainte, la joueuse solitaire au corps de ballerine (1,62m, 48kg) s’entoure donc désormais d’un entraîneur, d’un kiné et d’un préparateur physique. Elle ne compte pas lâcher sa raquette de sitôt.

Pour tenir, elle se renouvelle, tente de nouvelles approches, de nouvelles partenaires : Su-Wei Hsieh jouera les prochains tournois importants avec Elise Mertens, comme elle vient de le faire à Madrid ou à Rome et ceux du Grand Chelem (Open d’Australie, Roland Garros, Wimbledon et Us Open).

« C’est quelqu’un qui lit très bien le jeu et a de très bonnes volées, confie Elise Mertens à propos de la joueuse taiwanaise. Elle ne va pas balayer ses adversaires du court, mais c’est chouette de côtoyer des joueuses qui pratiquent un tennis différent. Nous nous sommes déjà entraînées ensemble en Australie et elle est assez détendue et a beaucoup d’humour. »

Si l’on en croit ses adversaires et son staff, Su-Wei Hsieh est la joueuse la plus détendue et amusante du circuit. Partout où elle passe, elle enchante même lorsqu’elle déchante.

Miss Hsieh cultive son petit côté singulier. Elle prend le meilleur. Juste le meilleur.

 

D'autres épisodes de "Tennis : femmes sur court"

Soutenez ÀBLOCK!

Aidez-nous à faire bouger les lignes !

ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.

Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.

Soyons ÀBLOCK! ensemble ! 🙏

Abonnez-vous à la newsletter mensuelle

Vous aimerez aussi…

Juliana Buhring

Le Top 10 des livres pour attaquer l’été ÀBLOCK!

La tête et les jambes, ça vous dit ? Le sport, certes, c’est là pour bouger, mais aussi pour nourrir l’esprit. La preuve en 10 ouvrages (comme celui de Juliana Buhring sur notre photo) à dévorer cet été, entre deux séances d’activité physique ou sur son transat, au choix. Et sans que ça nous fasse suer !

Lire plus »
Maria Sakkari

Roland-Garros 2022 : qui gagnera sur terre battue ?

La 121e édition du tournoi de Roland-Garros est officiellement ouverte ! La grande favorite Iga Swiatek confirmera-t-elle les attentes ? Ou bien ses nombreuses concurrentes, dont Maria Sakkari sur notre photo, renverseront-elles la hiérarchie ? Série à sensation du côté de la Ville Lumière.

Lire plus »
Shaïnez El Haïmour « Cette discipline, le karaté kyokushinkai, on y entre et on en sort plus. »

Shaïnez El Haïmour : « Cette discipline, le karaté kyokushinkai, on y entre et on en sort plus. »

Troisième mondiale en karaté kyokushinkai, Shaïnez El Haïmour est la première Française à avoir remporté, fin 2019, la médaille de bronze au Championnat du Monde à Tokyo, au Japon. Également multiple championne d’Europe de la discipline, elle se raconte dans ce nouvel épisode du podcast Premier Crochet signé Audrey Largouët, revenant sur les événements qui lui ont permis de décrocher son titre mondial à travers son rapport à cette discipline qu’elle pratique depuis ses 6 ans.

Lire plus »
Grace Geyoro, la métronome bleue

Grace Geyoro, la métronome bleue

Les jeunes prennent petit à petit le pouvoir en équipe de France. A force de talent et de volonté, Grace Geyoro s’est installée dans le onze de départ des Bleues. Maintenant, la milieu de terrain veut gagner.

Lire plus »
Il était une fois le tir à l’arc… féminin

Il était une fois le tir à l’arc… féminin

Les femmes ont manié l’arc dès la Grèce Antique… De cette époque à la naissance des premières championnes, l’archerie s’est toujours composée au féminin. À l’occasion de la Coupe du Monde organisée du 21 au 26 juin à Paris, retour sur ces archères qui ont tiré en plein dans le mille.

Lire plus »
Framboise Labat

Le questionnaire sportif de…Framboise Labat

Il y a quatre ans, à 60 ans, elle fut la première Française à concourir aux CrossFit Games, les Championnats du monde de la discipline qui a lieu aux États-Unis. Les premières épreuves de qualif’ 2021 viennent de débuter, une actu en or pour faire de la place à cette championne inoxydable qui continue de soulever du lourd et de se dépasser. Elle répond à nos petites questions Proustiennes. En toute simplicité.

Lire plus »
Coupe du Monde féminine de rugby à XV 2022, la guerre des étoiles ovales

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

L’histoire des filles sur les tatamis, la présentation de la plus grosse compét’ féminine du ballon ovale, une accro au sport qui témoigne et tout sur la sortie du livre de la championne olympique de hand Cléopatre Darleux, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK!. Enjoy !

Lire plus »
Louise Lenoble

2020 : Le best-of ÀBLOCK!

9 mois. 9 mois à donner la parole aux championnes et aux sports peu médiatisés, aux pratiquantes enthousiasmantes, aux acteurs et actrices de la sphère sportive. 9 mois à écrire sur des sportives étonnantes, qui nous boostent et nous inspirent, aux quatre coins du monde. Notre nouveau média digital est encore jeune, mais il collectionne déjà une foule de pépites. Confidences, témoignages, tranches de vie… nous plongeons jour après jour dans l’univers des sportives avec gourmandise. Et cela va bien au-delà du sport : dans leur intimité, au cœur de leurs émotions et de leurs ressentis. Petit florilège de ces filles qui ont définitivement marqué ÀBLOCK!

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner