
Escalade : les femmes, pas encore à bloc !
Si on grimpait ? Même si ce sport se féminise peu à peu, les femmes sont encore trop peu nombreuses à choisir l’escalade comme pratique sportive.
Publié le 16 septembre 2021 à 18h05, mis à jour le 13 janvier 2025 à 16h54
Vous vous apprêtez à faire vrombir la bécane pour votre énième Bol d’Or, ce week-end au Castellet, après plus de quarante ans de carrière. Comment avez-vous atterri sur une moto ?
J’habitais dans un village et mes copines fréquentaient des garçons qui avaient des petites motos. Au lieu d’avoir un coup de foudre pour les garçons, je n’ai eu d’yeux que pour les motos.
J’en suis tombée amoureuse, je ne sais pas pourquoi. En fait, je suis passée de la poupée à la moto !
Le soir même, j’ai dit à mon père : « Je veux une moto ! ». Il m’a répondu : « Dans deux ans, quand tu aras tes seize ans, tu iras travailler pour t’en acheter une ! »
Et c’est ce que j’ai fait. Ça a vraiment été mon premier amour.
Quel a été le regard autour de vous, c’était répandu une fille qui aime la moto ? Comment ça se passait avec les motards ?
À l’époque, il y avait très très peu de femmes dans la moto donc les garçons me regardaient bizarrement, un peu comme une extraterrestre.
Moi, j’étais timide en plus donc je n’allais pas vers eux… En fait, il fallait prouver ce que je valais. Et même maintenant, à mon âge, c’est la même chose…
Quelle sportive étiez-vous quand vous avez commencé à parcourir les routes ? Quel était votre caractère, fonceur ?
Je suis plutôt très calme étrangement, mais fonceuse, ça oui ! J’avais fait beaucoup de sport avant ça, de l’athlétisme, de la piscine, c’était mon truc.
Quand on est jeune, on n’a pas de bobos, on a peur de rien, on est invincible. Ce qui me drivait, c’était l’adrénaline, la vitesse et le fait de rouler avec les hommes.
On jouait des coudes, on se faisait des freinages en catastrophe. J’ai beaucoup appris à leur contact.
Vous commencez la compétition en 1978, à l’orée de la vingtaine, sans entraînement précis, et vous remportez tout, presque comme une fleur…
J’ai passé mon permis moto que j’ai eu du premier coup, j’ai roulé sur la route jusqu’à l’âge de 21 ans, j’allais voir les Grands prix, les courses d’endurance en sillonnant la France de long en large et en travers, je me suis mariée et… je rêvais de concourir mais ça n’existait pas pour les filles motardes.
Jusqu’à ce que ce soit annoncé, l’année suivante, une course de motos pour filles. En 1978, je participais donc à ce championnat de France féminin.
On a vendu tout ce qu’on avait avec mon mari pour acheter la 125 BPS et un fourgon pour que je puisse me lancer dans ce championnat. Et je l’ai remporté !
J’ai aussi fait 2e en endurance en championnat de France avec les hommes. C’est là où j’ai compris que la moto, c’était mon truc.
Quelles sont vos sensations lorsque vous pilotez ?
Quand je suis sur une moto, j’ai une totale impression de liberté, je ne pense à rien, c’est comme si j’étais sur une autre planète. Ma team me dit toujours que sur le départ, mon regard change.
C’est une sensation presque indescriptible. Je n’ai aucune stratégie, je fonce à l’instinct !
Vous démarrez donc sur les chapeaux de roues…
Oui, puisqu’après mon titre de Championne de France féminine en 1978, j’en remporte un autre en 1988 et je fais le Bol d’Or 24H sur la même Honda RC30 que j’ai actuellement.
Y a-t-il eu un virage compliqué dans votre carrière, qui vous a tout de même permis de redémarrer sur la bonne route ?
Oui, juste après, en 1989. Je me suis cassée aux essais des 24H du Mans et, suite à ça, j’ai dû arrêter la moto. Ça a été horrible car c’était mon rêve et que mes os ne se ressoudaient pas.
Résultat : je ne suis plus remonté sur une moto pendant dix-huit ans. J’ai tout de même beaucoup voyagé avec mon sac à dos mais ça n’a jamais remplacé cette passion viscérale. Je suis revenue à la moto en 2007.
C’est mon second mari qui m’a remise sur les roues et sur la route ! J’ai alors refait un championnat féminin en 2007 et j’ai fini 4e. J’aurais pu gagner mais je suis tombée deux fois, c’était la reprise et avec des motos modernes, complètement différentes de ce que j’avais connu.
Paty Audebert avec Aurélie Hoffmann alias Lil’Viber
Peu importe, vous avez continué…
Oui, je suis passionnée de moto depuis toujours, c’est comme une drogue ! Pourtant aujourd’hui, j’ai 66 ans, mais, dans ma tête, j’ai toujours 20 ans…
En 2009, on me propose de rouler en moto classique et je participe alors à mon premier Bol d’Or Classic sur des motos mythiques des années 1980, telles que la Kawasaki 1135 Godier-Genoud, ou la Honda 750 RC30. Je termine 7e. Je me suis régalée !
Depuis je participe, chaque année, au Bol d’Or Classic, au Sunday Ride Classic et Europeen Classic.
Maintenant, je préfère rouler avec des filles : Anne Marie Spitz, ma première coéquipière, Karine Sliz, Rachel Pesin et Aurélie Hoffmann alias Lil’ Viber.
Ce weekend, c’est le Bol d’Or Classic, nous sommes les seules filles, elles et moi à concourir avec nos motos classiques, la Kawasaki 1135 Godier-Genoud, et la 750 Honda RC30, la même sur laquelle j’ai roulé en 1988 !
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Les palmarès dont vous êtes le plus fière ?
J’ai été plusieurs fois championne de France, mais je crois que ce qui me rend la plus fière, c’est d’avoir participé au Bol d’Or en 1988. C’était un 24 heures (maintenant, les courses classiques ne durent que quatre heures) et j’étais la seule femme dans la course à l’époque.
Ce sentiment qui vous envahit quand vous voyez les gradins remplis de monde qui vous encourage ! C’est très impressionnant et émouvant, c’était un plaisir de jeunesse.
Je suis fière de moi aussi parce que je fais encore de très beaux chronos ! Comme les d’jeuns ! Même si je suis beaucoup plus prudente qu’avant…
Est-ce que ce sport extrême vous a forgée et vous a aidée à avoir confiance en vous en tant que femme ?
Je ne saurais pas dire… Je crois surtout que c’était mon destin…
Vous n’avez jamais eu peur ?
C’est vrai que lorsque je regarde mes grosses motos et que je me dis que je fais 56 kilos, je n’en reviens pas.
Mais une fois dessus, j’oublie tout ! On fait corps toutes les deux !
Que diriez-vous à des jeunes femmes qui ont peur de se lancer dans un sport qui les attire et qui se mettent des barrières ?
Qu’il faut qu’elles foncent ! Souvent, elles ont peur par rapport aux hommes mais maintenant il y a plein d’écoles pour les débutantes et c’est très bien accepté pour les filles, ce n’est pas comme à l’époque. Elles apprendront à leur rythme !
Encore des rêves à accomplir au volant d’une moto ?
Vu mon âge, je ne peux pas parler de rêves. Je n’ai plus la condition physique pour refaire des 24 heures par exemple même si je m’entraînais beaucoup.
Mais, aujourd’hui, être sur les circuits avec mes amis, partager tous ces bons moments, c’est tout ce que je demande.
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