Martina CaironiLa Charlie’s Angel italienne du para-athlétisme
Superstar et pionnière du para athlétisme dans son pays, la double championne olympique italienne Martina Caironi, 34 ans, s’apprête à prendre d’assaut la piste des Jeux Paralympiques de Paris 2024. Amputée de la jambe gauche à 18 ans, elle a su se reconstruire grâce au sport, le sport qui a réenchanté sa vie. Une inspiration !
Par Claire Bonnot
Publié le 26 août 2024 à 13h08
« À ce stade de ma carrière, j’attends Paris avec impatience, mais je veux simplement profiter de ma dernière année aux Jeux. Je ne dis pas que je ne me battrai pas mais je ne cours pas pour l’obsession de l’or », confie-t-elle dans la presse italienne. Son moteur ? « Montrer au monde qui nous sommes et pas seulement nos handicaps », comme elle l’expliquait lors du Prefontaine Classic de mai 2024 aux États-Unis.
Car si cette combattante squatte allègrement les podiums – 2 médailles d’or et 3 médailles d’argent depuis ses premiers Jeux Paralympiques à Londres en 2012 et 5 titres de championne du monde d’athlétisme handisport depuis 2013 – elle court aussi pour les valeurs d’inclusion et se bat notamment pour les droits civils des personnes handicapés.
Et pourtant, devenir une championne paralympique n’était pas son plan d’origine… La spécialiste du 100m et du saut en longueur était déjà très sportive, notamment en pratiquant le volley-ball, mais sa vie était plutôt celle d’une ado comme les autres, conjuguant les études et les soirées entre potes. C’est en rentrant d’une fête avec son frère en 2007 que sa vie prend un nouveau virage : « Nous avons eu un accident de scooter. C’était comme une destinée qui m’attendait », dit-elle. Au plus bel âge, 18 ans, Martina Caironi se réveille amputée de la jambe gauche au niveau du genou. La douleur est totale. Très entourée par sa famille et ses amies, elle ressent pourtant un déclic, celui d’avoir la chance d’être en vie.
Et puis, un jour, elle a un flash : alors qu’on lui fabrique sa première prothèse de jambe pour la marche dans un centre à Bologne, en Italie, elle tombe sur la photo d’un para athlète en train de sauter. Elle demande alors à essayer une prothèse adaptée à la course. Cette destinée dont elle parle se met en marche… On lui donne la lame gratuitement.
L’Italie cherchait un nouvel athlète dans cette catégorie, elle va la trouver. Deux semaines plus tard, nous sommes en 2010, Martina Caironi établit le record d’Italie du 100 m, 19,90 secondes. « J’ai découvert que j’avais un talent caché », confiera-t-elle plus tard. « Et puis j’ai voulu recommencer à courir. Je suis passé d’un extrême à l’autre : de ne plus pouvoir courir à courir aussi vite que possible dans un stade ». « Marty » est en place sur son chemin et elle va faire des merveilles…
Un an plus tard, elle intègre la sélection nationale italienne et participe à ses tous premiers Jeux Paralympiques à Londres en 2012. Le miracle continue : elle obtient le titre suprême de championne olympique, pour le 100m T42, ainsi que la médaille d’argent pour le saut en longueur. « J’avais 21 ans. Je n’avais pas peur, mais j’étais émue, curieuse, ravie. Le jour du 100 mètres, je ne savais même pas ce qu’un athlète devait porter pour concourir. Cela montre à quel point j’étais une enfant lorsque j’ai remporté cette médaille d’or. » Martina Caironi accède alors à la célébrité et envisage de devenir professionnelle – un tournant qui s’opérera juste avant Rio 2016. « Mon monde a encore changé. Je dis « à nouveau » parce que mon premier grand changement a eu lieu lorsque j’ai perdu ma jambe ».
Celle qui dit elle-même « avoir atteint le haut niveau sans trop d’efforts » confirme pourtant son talent qui n’est donc pas une chance de débutant avec ses deux médailles d’or aux Championnats du monde handisportde l’année suivante à Lyon, au 100m T42 et au saut en longueur et sa nouvelle médaille d’or au 100m T42 aux Championnats du monde handisport de Doha en 2015.
Pour les Jeux Paralympiques de Rio en 2016, elle se met en mode compétitif, change son mode de vie et devient une athlète pro à part entière. « Aujourd’hui, le niveau est élevé », disait-elle alors. Un grand honneur vient la conforter dans son succès fulgurant : elle est choisie comme porte-drapeau de la délégation Italienne.
Une distinction qu’elle tient haut la main en réitérant son titre de championne olympique sur 100m, et à nouveau la médaille d’argent au saut en hauteur, malgré les difficultés – mais elle s’y connaît dans ce registre : « J’ai remporté la médaille d’or malgré une situation cauchemar survenue pendant la course. Avant les JO, j’ai dû porter des béquilles pendant trois mois. Et malgré tout ça, j’ai décroché la médaille d’or. Autre moment important pour moi : une autre Italienne (Monica Contrafatto) est arrivée troisième. Elle avait été inspirée par ma compétition en 2012 depuis l’hôpital. La boucle est bouclée ».
Martina Caironi est une déjà une grande sportive : elle parvient à défendre son titre et inspire par sa générosité et sa motivation à toute épreuve : « À Rio, j’étais plus consciente de ce qui se passait et de ce qui pouvait arriver si je perdais mon titre. J’ai beaucoup pleuré après avoir gagné cette médaille ».
La suite ? Une chevauchée fantastique. La para athlète s’envole littéralement sur la piste des Championnats du monde handisport en 2017 à Londres et s’octroie deux médailles d’or cette fois, dans ses deux disciplines phares, le 100 m T42 et le saut en longueur. Martina Caironi est également recordwoman du monde du 100m T63 (catégorie dans laquelle elle a été reclassifiée) avec un temps de 14.02 secondes. Mais c’est, avant tout, la première athlète de sa catégorie à être passée sous la barre des 15 secondes, lors des championnats du monde de Londres en 2017.
Et la voilà qui s’adjuge le haut de l’affiche, non seulement du monde du sport, mais aussi du grand écran. En 2018, elle est l’héroïne d’un documentaire sur sa vie ou l’histoire vraie d’une athlète paralympique qui a battu tous les records de vitesse en surmontant la barrière du handicap, « Feel the Wind » en anglais et « L’Aria sul viso », en italien, littéralement « L’Air sur votre visage ». Un zoom sur son quotidien, ses entraînements, ses efforts, ses peurs au travers de sa préparation des Jeux Paralympiques de Rio 2016. Martina Caironi y est décrite comme « la femme la plus rapide au monde avec une jambe artificielle. »
Pour les Jeux de Tokyo en 2021, sa voie pavée d’étoiles reprend du service… Dans une course aujourd’hui devenue iconique sur le 100m T63, elle monte sur la deuxième marche du podium avec ses deux compatriotes italiennes, Ambra Sabatini (or) et Monica Contrafatto (bronze), réalisant le seul triplé des Jeux et posant telles les « Drôles de Dames »/ « Charlie’s Angels » du film mythique avec Cameron Diaz, Drew Barrymore et Lucy Liu. « En Italie, les gens sont devenus dingues. Nous sommes devenus des célébrités. Cette photo a fait la une des journaux dans tout le pays ».
Lors de son TED Talk en 2022, Martina Caironi raconte la force émanant de cette triple victoire : « Nous avons chanté « Volare, cantare … » ! Nous étions trois maintenant. Cela voulait dire que nous pouvions partager un plus grand message. La compétition et l’amitié peuvent coexister. Et le fait de pouvoir dire que le sport est le moyen le plus sain de rencontrer puis de dépasser nos limites ».
Rebelote aux Championnats du monde de para athlétisme de Paris en 2023, le trio refait le même coup. Toute la beauté du sport !Si Martina Caironi connaît ainsi, par deux fois, la déception de la deuxième place, elle est bel et bien reconnue dans son pays comme la pionnière et l’inspiratrice du para athlétisme professionnel « J’ai été reconnue comme celle qui avait fait les premiers pas du mouvement en Italie, qui concourait sans grande motivation au début ». Infatigable, passionnée, optimiste, la championne olympique délivrait un bouleversant TED Talk en 2022 exprimant que « le sport a été la clé pour me libérer de la honte de porter une prothèse à la jambe. C’est le pouvoir du sport ».
Celle qui a su aller de l’avant, coupée dans son élan, est l’exemple même que le sport est ouvert à tous et toutes, et ouvre des chemins inattendus à la force physique et au caractère. Ou la magie de la piste. Pour Paris 2024, nous voilà dans l’attente de cette grande athlète qui s’apprête à prendre sa retraite, mais pas celle de son engagement. Elle est désormais un rôle-model et on lui délivre volontiers la médaille de l’inspiration et de l’engagement !
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