Madge Syers La première Lady du patinage artistique
Les Championnats du monde de patinage se déroulent cette semaine à Stockholm, en Suède. L’occasion d’être ÀBLOCK! sur la glace et de rendre hommage à la première femme médaillée d’or olympique en patinage artistique, la Britannique Madge Syers. Une lady qui a marqué de sa grâce et de sa détermination l’histoire de cet art sportif de la glisse et n’a pas hésité à tracer son sillon moderne dans un petit monde dominé par les hommes. Son talent et son esprit de pionnière ont brisé la glace pour des générations de sportives.
Par Claire Bonnot
Publié le 21 mars 2021 à 17h54, mis à jour le 14 janvier 2022 à 19h17
Tournoyer en jupons sur la glace ne pouvait effrayer une cavalière émérite et une nageuse accomplie. Madge Syers, née en 1881 à Kensington, s’est vite élancée sur la glace avec grande classe et une modernité qui lui a ouvert les portes des plus beaux succès.
La jeune anglaise, habituée au style rigide et guindé de l’époque, a été initiée à « l’international style » rendu célèbre par le pionner du patinage moderne, l’américain Jackson Haines.
Formé aux techniques du ballet, ce bel athlète libéra et rythma le patinage artistique en lui offrant grâce et mise en scène musicale.
C’est le propre mari de Madge Syers, le patineur émérite Edgar Morris Wood Syers, son partenaire sur la glace pour les compétitions en équipe, qui la propulsa vers ce style de glisse. Son entrée en piste fut pareille à celle d’une étoile !
En 1902, pour les Championnats du monde de patinage artistique, la jeune femme, de 21 ans à peine, change le cours de l’histoire du patinage.
La belle frondeuse, découvrant que les règles de l’Union Internationale du Patinage (ISU) ne précisent pas le sexe des participants, décide de s’élancer sur la glace d’une compétition officieusement réservée aux hommes et clairement dominée par les hommes.
Membre influent de la National Skating Association de Grande-Bretagne avec son mari Edgar, Madge put alors entrer en scène. Vêtue d’une jupe allant jusqu’aux chevilles, d’un chemisier en satin, d’un collier de perles et d’un chapeau, une vraie tenue de ville qui aurait pu entraver ses mouvements, Madge Syers éblouit pourtant les juges par sa technicité.
Époustouflés, ils la classent deuxième. Plusieurs personnes, dont le vainqueur de la compétition Ulrich Salchow, sont alors persuadées que la jeune athlète mérite la première place.
Étrangement, un règlement est créé à l’issue de ce championnat qui empêche désormais les femmes de concourir contre les hommes… La raison avancée ? La longueur des jupes empêche les juges de bien discerner les pieds des patineuses.
Pourquoi ne pas leur offrir la panoplie de leurs acolytes masculins ? L’époque n’est, semble-t-il, pas prête à raccourcir les jupes des filles…
Ni une ni deux, Madge Syers, la stratège, se pique de porter des jupes à mi-mollet, de quoi offrir son jeu de jambes en or à la vue de tous et contribuer, un jour, à libérer les sportives d’une tenue correcte exigée contre-performante.
Nouvelles victoires sur un terrain mixte pour la princesse des glaces : en 1903, elle remporte la Challenge Cup suédoise au nez de… son propre mari, qui se classe deuxième. Un joli pied de nez aux jaloux pour ce duo sur glace et dans la vie, bien établis dans sa pratique gagnante et égalitaire. Elle réitère l’audace de supplanter tous ses concurrents masculins en 1904. Ce n’est qu’en 1905, sous l’impulsion de la National Skating Association qu’une épreuve féminine distincte est créée, le Championnat féminin de l’ISU. Invincible, Madge Syers devient championne du monde pour femmes en 1906 puis 1907.
C’est en 1908 qu’elle se propulse reine des glaces pour l’éternité, année où le patinage artistique fait son entrée historique dans le prestigieux monde olympique.
« Il apparut très vite, peut-on lire dans le rapport officiel de la compétition, que Mme Syers, de retour en compétition après un an d’absence, était toujours une classe au-dessus. La précision merveilleuse de ses figures, combinée à une position et un mouvement parfaits, a été la principale caractéristique du patinage de la matinée. »
Les épreuves ont lieu à Londres, chez elle, et la jeune femme, forte de ses derniers titres, est prête à en découdre avec la glace.
Elle gagne le concours individuel femmes et réalise un doublé avec son programme libre du lendemain : « Le patinage libre de Mme Syers avait plusieurs longueurs d’avance sur celui de ses adversaires, comme ce fut le cas lors des figures imposées ».
Les rapports officiels décrivent ses prestations avec emphase : elle a « excellé dans le rythme et le chronométrage, dans ses pas de danse et les pirouettes ». Elle décroche enfin le bronze dans la compétition en couple avec son patineur de mari.
Si, juste après cette belle saison olympique, elle prend sa retraite sportive – due à une santé déclinante -, elle laisse sa trace glacée sur papier en co-écrivant avec son mari un troisième livre en 1913, devenu une référence dans le patinage artistique, « The Art Of Skating (International Style) ».
Elle meurt très jeune, à l’âge de 35 ans, en 1916, d’une crise cardiaque. Madge Syers reste célébrée pour l’éternité grâce à son élection au Hall of Fame du patinage artistique, en 1981.
Première femme à concourir dans ce sport, elle demeure, pour la postérité, la femme ayant ouvert la voie au patinage artistique au féminin.
D'autres épisodes de "Patinage, ces filles qui ne laissent pas de glace"
ÀBLOCK! est un média indépendant qui, depuis plus d’1 an, met les femmes dans les starting-blocks. Pour pouvoir continuer à produire un journalisme de qualité, inédit et généreux, il a besoin de soutien financier.
Pour nous laisser le temps de grandir, votre aide est précieuse. Un don, même petit, c’est faire partie du game, comme on dit.
Depuis le 5 janvier, six waterwomen s’attaquent à un défi jamais réalisé : 8000 kilomètres sur l’Océan Pacifique, sur des planches de paddle et à la force des bras, entre le Pérou et la Polynésie Française. Le tout pour la bonne cause. Petit point d’étape.
Incontournable du paysage tennistique, arbitre féminine française la plus gradée avec le badge d’argent en 2014 puis le badge d’or en 2017, Aurélie Tourte, qui a fait ses classes dans le circuit féminin, a aussi réussi à se faire sa place sur la terre battue au masculin en étant la première femme à accéder à cette chaise. Portrait d’une fille qui parcourt le monde pour l’amour de la balle jaune.
Mais qu’est-ce qui fait courir les filles ? Le plaisir, pardi ! Elles sont de plus en plus nombreuses à enfiler des baskets pour partir s’aérer le corps et l’esprit. Ce qui n’a pas échappé aux équipementiers et aux organisateurs d’événements. Sport gratis, le running est devenu un business en or.
Sa personnalité sulfureuse et rebelle froissa le CIO. Championne Olympique en 1932, la nageuse américaine Eleanor Holm ne put réitérer l’exploit en 1936 à Berlin. À cette époque, champagne, bagatelle et sport ne faisaient pas bon ménage.
« Ce qu’un homme fait, Violette peut le faire ! ». Ce cri féministe date des années 1920. Son porte-voix ? Violette Morris, athlète omnisports qui fit sensation sur les terrains. Esprit libre s’habillant en homme et aimant des femmes, la sportive aux seins coupés fit scandale, traçant la voie d’un féminisme ultra contemporain. Histoire peu ordinaire d’une pionnière du sport féminin au destin hors du commun.
Entre les conseils des sportifs du net, des coachs qui écrivent des livres, de ceux qui n’en écrivent pas, des scientifiques, du type qui va trois fois par an à la salle de sport mais qui croit tout savoir… Créer sa routine sportive idéale peut-être un VRAI casse-tête. Et si on mettait les choses au clair ?
Les Jeux Olympiques de Pékin sont maintenant à porté de skis. En attendant le 4 février, ÀBLOCK! vous propose de (re)plonger dans l’histoire féminine des JO d’hiver. Retour sur 6 pionnières olympiques (dont les soeurs Goitschel sur notre photo) qui ont fait de la neige et la glace leurs podiums.
Une dingue du volant, une croisière solidaire, un retour sur l’histoire des volleyeuses, une winneuse dans l’âme qui s’attaque au Paris-Roubaix (Marie Le Net sur notre photo), une course mythique qui s’est déroulée ce week-end et qui n’aura plus de secrets pour vous. C’est le meilleur d’ÀBLOCK! Et c’est juste pour vous.
C’est ce qui s’appelle une révélation. À 25 ans, lorsqu’elle découvre le foot américain, Cléa ne se doute pas du chemin qui s’ouvre devant elle. Ni qu’il allait donner naissance à une autre…elle-même. Un témoignage qui en dit long sur les vertus et les valeurs du sport. Paroles d’une discrète devenue lionne.