Un petit tour… et puis s’en va. Après une – très – longue bataille pour que le karaté devienne discipline olympique, officiels et prétendants à la médaille ont enfin obtenu gain de cause.
Cet art martial, dont l’origine remonterait au Ve siècle, sera bel et bien présent aux Jeux Olympiques de Tokyo qui débutent le 23 juillet prochain… avant de disparaître purement et simplement des tablettes lors de l’échéance parisienne programmée trois ans plus tard, pour les JO 2024, du 26 juillet au 11 août.
Une déconvenue immense pour les artisans de la candidature qui n’avaient, jusqu’alors, pas ménagé leurs efforts pour intégrer la très convoitée famille olympique.
Une épopée aux allures de marathon qui débute en 1975. À l’époque, l’ITKF décide de faire un appel du pied au CIO.
Le but de l’International Traditional Karate Federation ? Que le « karaté traditionnel », sport dont elle est la garante, soit représenté aux Jeux Olympiques. Première demande, premier refus.
Il faudra attendre les années 90 pour que les représentants du karaté mondial reviennent à la charge. Échaudées par leur précédent revers, les instances gouvernantes du « karaté traditionnel » (ITKF) et celles du « karaté sportif » (WUKO devenue WKF), de plus en plus populaire, avancent l’idée de fonctionner ensemble afin de donner plus de poids à leur requête.
La tentative n’ira, hélas, pas au bout.
La championne française, Leïla Heurtault
Malgré tout, la WKF (World Karate Federation), désormais seule entité reconnue par le CIO, n’abdique pas et reprend le combat à son compte. Dans son viseur, Athènes en 2004. Raté.
Il y aura également Pékin en 2008, Londres en 2012 et Rio en 2016. Nouvelles déconvenues. Jusqu’à 2020 et la validation officielle.
L’heure est à la fête. Après des années à végéter dans l’ombre du judo, intégré en 1964, et du taekwondo, définitivement intronisé en 2000 après un test à Seoul en 1988, le karaté entre, à son tour, dans le giron olympique.
Francis Didier, Président de la Fédération Française de Karaté, évoque alors « une énorme satisfaction » et se réjouit que ce sport « qui véhicule tant de valeurs communes à celle de l’olympisme, fasse partie de cette fête universelle qui se déroule tous les quatre ans ».
Francis Didier, Président de la Fédération Française de Karaté
De leur côté, les organisateurs japonais, conscients du privilège, voient grand. Les meilleurs athlètes de la planète seront reçus dans un écrin à hauteur de l’événement, le mythique Nippon Budokan, théâtre, cinquante et un ans plus tôt, des premiers Championnats du monde de la discipline.
Le mythique Nippon Budokan
La joie sera malheureusement de courte durée. En février 2019, le COJO (Comité d’Organisation des Jeux Olympiques) de Paris annonce la liste des sports additionnels pressentis pour 2024. Le surf, le skateboard et l’escalade, en démonstration au Japon, sont reconduits. Trois disciplines auxquelles viennent s’ajouter le breaking.
À peine intronisé, le karaté est donc déjà prié de prendre la porte. La douche froide. Et l’incompréhension.
« Nous n’avons pas encore eu la chance de prouver notre valeur en tant que sport olympique, puisque nous ferons nos débuts comme discipline olympique à Tokyo en 2020, déplore alors Antonio Espinos, le président de la Fédération internationale (WKF), dans un communiqué. Nous pensions avoir rempli toutes les exigences et que nous avions les conditions parfaites pour être ajouté au programme des sports. Nous avons appris que notre rêve ne sera plus une réalité. »
Leïla Heurtault, l’une des championnes de karaté françaises qualifiées, à l’heure de partir pour les Jeux Olympiques de Tokyo, peut-être pour la première et dernière fois…
La bataille pour la reconnaissance olympique, jusqu’alors essentiellement fédérale, va dès lors dépasser le cadre des seules instances sportives pour prendre un tournant plus politique. Le ministère des Sports est sommé de se justifier.
Sur le papier en effet, le karaté coche toutes les cases imposées par le CIO : une Fédération reconnue, des coûts d’organisation raisonnables, une bonne image et une pratique répandue à travers le monde.
Mais tribunes et autres lettres ouvertes resteront sans effet. Le COJO, fermement décidé à se tourner vers des discipline « plus urbaines » pour attirer un public jeune, campe sur ses positions. Après une apparition éclair au Japon, le karaté ne sera officiellement plus de la partie à Paris.
Ne reste plus, désormais, qu’à se tourner vers l’avenir. Et briller à Tokyo. L’équipe de France, qui espère une délégation plus imposante, devra se contenter de trois représentants, deux femmes – Leïla Heurtault (-61kg) et Alexandra Feracci (kata) – et un homme – Steven Da Costa (-67kg).
Alexandra Feracci, l’une des 3 représentantes de la délégation française
Trois karatékas sur les 80 engagés, mais trois chances de médaille que les Bleus, échaudés comme leur concurrents, mais pas coulés pour autant, espèrent bien convertir en métal précieux.
Ouverture Leïla Heurtault