Helene Mayer L’athlète juive qui rejoignit les rangs allemands aux Jeux de 36
Son appartenance à la communauté juive allemande lui a valu d’être exclue des rangs de l’équipe nationale dès 1933. Elle les réintégrera, à la demande du régime nazi, lors des JO de Berlin en 1936. Helene Mayer, championne olympique de fleuret, n'expliquera jamais les raisons qui l’ont poussée à accepter de s’engager dans cette aventure.
Par Sophie Danger
Publié le 25 avril 2023 à 18h33
Une date : 1er août 1936. Berlin inaugureengrandespompes les Jeux de la XIeolympiade de l’ère moderne. Deux décenniesaprès avoirétédésignée ville hôte de l’édition 1916, la capitale allemande tientsa revanche. Annulé, à l’époque, en raison de la guerre, le grand raout antique, remis au goût du jour en 1894 par le Français Pierre de Coubertin, n’a, cettefois-ci, pas disparu du calendrier. Ce qui n’a pas empêché le pays de passer à deux doigts de la catastrophe.
Écartée des festivitésen 1920 et 1924, l’Allemagne, qui navigue sous pavillon nazi depuis trois ans, n’acessé, depuis, d’inquiéter la communautéinternationale. En cause, notamment, le traitementréservé aux sportifsjuifs. Exclus, dès avril 1933, des organisationsdédiées, cesderniersont, par la suite, étépurement et simplementinterdits de pratique.
Une mesure qui leur barre, de facto, l’accès à l’équipenationale. Et aux Jeux. Un manquement flagrant aux règlesédictéespar la Charteolympique.
Pour autant, Adolf Hitler, qui n’aréalisé que tardivementl’intérêtqu’ilavait à recevoir le monde entier à la maison, ne veut pas prendre le risque d’être mis, unefois encore, au ban des nations. Les frondeurs, États-Unis en tête, luidemandent de montrerpatte blanche ? Qu’à cela ne tienne ! Pour amadouer les sceptiques, le Führeraccepte de rétropédaler. Du moins à minima.
Après avoirété écarté des rangs de la sélection allemande, Rudolf Ball, célèbrejoueur de hockey sur glace, estainsi « invité » à reprendre du service sous le maillot allemand. Pour ce qui est des femmes, le régime jette son dévolu sur Helene Mayer. Tout comme son compatriote, l’escrimeusea fait les belles heures du pays.
Championned’Allemagne pour la première foisen 1925 alorsqu’elle n’étaitâgée que de 14 ans, la fleurettiste a, par la suite, collectionné les honneurs. Invitée à grimper sur la première marche du podium olympique aux Pays-Bas, à Amsterdam en 1928, elle a, par la suite, remporté par deux fois le Championnat international d’escrime (1929, 1931).
Depuis, la demoiselle a pris le large et réside en Californie, à plus de 9 000 kilomètres d’Offenbach am Main, savillenatale. Elle qui se rêvait un avenir dans la diplomatie a pubénéficier d’un programmed’échange avec le ScripsCollege de Claremont pour poursuivreses études après la mort de son père, Ludwig Carl Mayer, médecin réputé et personnalitéincontournable de la communautéjuive locale.
Séparée des siens, Helene Mayer s’estrapidementadaptée. Et a continué à manier le fleuret. Sélectionnée dans l’équipe allemande pour les Jeux Olympiques de 1932 à Los Angeles, elleéchouemalheureusement à conserver son titre. Perturbée par la nouvelle du décès accidentelde l’un de sesamisavant la finale, elle doit se contenterd’unecinquième place.
Un rendez-vous manqué pour le petit prodige qui se voit signifier, peuaprès, son exclusion du club d’Offenbacham Main, structure dans laquelleelleest encore licenciée.
Exilée à des milliers de kilomètres de son pays, Helene Mayer n’échappe pas aux mesuresrépressives mises en place par le régime nazi. Quelquesmois plus tard, c’estsa bourse d’étude qui luiestretirée. Le motif ? « Raisons raciales ».
Soutenuefinancièrement par le ScripsCollege, la jeuneétudianteparvientvaille que vaille à menerses études à terme. Et décroche, coup sur coup, ses deux premierstitres de championne des USA en 1934 et en 1935. De quoi susciterl’intérêtgrandissant des représentants du IIIe Reich.
Le 24 septembre 1935, soitneufjoursaprès l’adoption des « lois de Nuremberg » qui privent les Juifs de leurcitoyenneté allemande, Hans von TschammerundOsten, le commissaire pour la Gymnastique et le Sport, lui propose, par courrier, de réintégrer les rangs de l’équipenationaleenvue des Jeux de Berlin.
La réponse tarde à venir et les spéculations vont bon train. Va-t-elle accepter ? Va-t-elle refuser ? Le suspense prend fin début novembre. Et contre toute attente, Helene Mayer dit oui. « Maladie m’empêcha vous répondre et à von Tschammer und Osten, mon acceptation, explique-t-elle dans un télégramme adressé au comité olympique allemand reproduit par le quotidien Paris-Soir. Réponse partie hier. Affectueusement.» Pourquoi avoir accepté de servir de caution au régime hitlérien ? Nul ne le sait.
Certains évoquent son ignorance de la situation réelle en Allemagne, quand d’autres avancent des menaces qui auraient pesé sur sa mère et ses frères, restés au pays. Ses rapports, distants, à la religion de son père sont également invoqués. Quelles que soient ses motivations, elle ne se justifiera jamais.
En août 1936, Helene Mayer rejoint donc les rangs de la sélection allemande. Après un début de tournoi sans faute, elle trébuche dans le round final, battue par la juive hongroise Ilona Elek-Schacherer à l’issue d’un combat très serré. Mais l’histoire ne s’arrête pas là.
Appelée sur le podium, la vice-championne olympique se fend d’un salut nazi et s’attire de nouveau les foudres des opposants au régime ainsi que d’une partie de la presse internationale. Au scandale, l’Offenbachoise oppose une nouvelle fois le silence. Et retourne aux États-Unis sans explications ni excuses. Loin de la guerre et de ses tourments, la néo-californienne reprend le cours paisible de son existence.
Professeur d’Allemand et d’escrime, elleenseigne pendant onzeans au Mills Colleged’Oaklandavant de rejoindrel’équipepédagogique du City College de San Francisco. Côté sportif, elleenchaîne les succès aux championnats des Etats-Unis – huit au total entre 1934 et 1946 – et s’offre le titre de championne du monde en 1937.
Il faudraattendrel’année 1952 pour qu’ellerevienne, définitivement, enAllemagne. Fraîchementmariée à Erwin Falkner von Sonnenburg, uningénieur civil, Helene Mayer s’installe avec son époux à Munich. Un bonheur de courte durée. Moins de deux ansaprès avoirquitté la Californie, ellemeurt à quelquessemaines de fêterses 43 ans, emportée par un cancer du sein.
Une décennie plus tard, elle sera intronisée, à titreposthume, au Hall of Famed’escrime dans sapatried’adoption.
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