« Je me sens vraiment fière et privilégiée de devenir la première femme au poste de directeur sportif, en rejoignant l’une des meilleures équipes du monde, et d’être chargée de diriger de grands coureurs légendaires ».
Le 4 décembre dernier, Cherie Pridham a été nommée directrice sportive pour la saison prochaine par l’équipe Israël Start-Up Nation. Elle comptera sous ses ordres de solides gaillards comme le quadruple vainqueur du Tour de France Christopher Froome (tout récemment arrivé dans l’équipe) mais aussi Daryl Impey (premier cycliste africain à endosser le maillot jaune en 2013), André Greipel (22 victoires d’étapes sur les grands tours), ou encore Dan Martin (deux étapes du Tour de France et du Tour d’Espagne à son palmarès).
Comment cette ancienne cycliste professionnelle se trouve-t-elle à la tête d’un tel peloton ? « Elle a mérité ce poste au travers de son expérience et de ses succès dans différents rôles tant au sein d’équipes masculines que féminines. Cherie est une grande professionnelle » a expliqué Sylvan Adams, le propriétaire de l’équipe.
Cherie Pridham est en effet loin d’être une débutante. Cette native britannique, née le 22 mai 1971, qui a grandi en Afrique du Sud a débuté le cyclisme là-bas avant, dès l’âge de 21 ans, de participer à des courses cyclistes internationales. Parmi elles, la Grande Boucle Féminine (ancien Tour de France féminin de 1984 à 2009) qu’elle court huit fois et le Tour d’Italie féminin, deux fois.
Sa deuxième vie sportive débute après un accident à l’entraînement, en 2006, qui l’empêche de poursuivre sur sa belle lancée. Mais il en faut plus pour la faire tomber et elle remonte vite en selle en prenant la tête de l’équipe junior Merlin Development Squad en tant que manager dès 2006 ainsi que de l’équipe masculine Team Raleigh dès 2011, devenant ainsi la première femme directrice sportive en Grande-Bretagne.
Elle fonde dans la foulée sa société « Cherie Pridham Racing » en 2014 et dirige l’équipe masculine Vitus Pro Cycling jusqu’en 2020.
Manager une équipe de mecs ? No problem pour Cherie Pridham : « Quand j’ai commencé à courir au Cap, en Afrique du Sud, il n’y avait pas beaucoup de filles, il n’y avait pas de femmes qui couraient et je courais avec les hommes, donc j’étais tout le temps avec des garçons » rappelle-t-elle au site VeloNews.com.
« Ensuite, j’ai pris ma retraite dans une équipe de garçons juniors et j’ai rejoint directement l’équipe continentale masculine à partir de là. Je n’ai donc jamais envisagé les choses autrement que d’être directeur sportif et chef d’équipe en charge d’une équipe masculine. »
Avec un flegme tout Britannique, la première directrice sportive d’une équipe au masculin, conclut : « Je suppose qu’il y a un peu d’appréhension et de nervosité de ma part. Mais, au final, j’ai fait six Tours de Yorkshire qui est du niveau WorldTour, six Tours de Grande-Bretagne, les convois sont les mêmes, les objectifs sont les mêmes. Je ne vois pas de défis pour moi l’année prochaine. Une course est une course, n’est-ce pas ? » L’esprit sportif à son meilleur !
« En ce qui me concerne, je veux bien faire les choses car je sais que cela pourra être une source d’inspiration pour d’autres, ce qui signifie beaucoup à mes yeux. » La nouvelle directrice sportive a déjà de la suite dans les idées : faire advenir une nouvelle génération de directeurs sportifs, fonction qui se conjuguerait – bien plus qu’avant – au féminin !
Pour autant, elle s’est chargée de remettre bien vite les choses à leur place. Pas de débat sur une probable différence homme-femme ici. La nouvelle directrice sportive ne veut pas d’un traitement différent sous prétexte de son genre, et encore moins dans un milieu sportif dominé par ses acolytes masculins : « Mon rôle est celui de directeur sportif, pas de femme directeur sportif et je sais qu’on attendra de moi que je me concentre sur cet aspect. Je vais devoir faire face aux mêmes problèmes que mes collègues, je ferai les mêmes erreurs et j’aurai les mêmes succès. »
Une parole forte pour toutes les femmes du sport qui rêveraient de manager ou d’encadrer et s’en empêcheraient par manque de confiance en leurs capacités !
Cherie Pridham n’a jamais considéré qu’être une femme pouvait changer la donne, que ce soit en positif ou négatif. Elle n’y pense tout simplement pas : « Je ne me suis jamais considérée une seule fois comme une sorte de modèle, mais l’impact de ma nomination m’a fait réaliser que je devrais peut-être assumer ce rôle », a-t-elle déclaré à VeloNews.com.
« Pour moi, c’est tout simplement naturel de faire ce que je fais, du vélo, et ce depuis l’enfance. Tout au long de ma carrière, je ne me suis jamais concentrée sur mon sexe ou sur le fait que je suis une femme. Je n’ai jamais joué dessus. Je suis une directrice sportive, pas une femme directrice sportive. Et franchement, pas seulement moi, que ce soit au football, au basket-ball, peu importe, si vous êtes assez bon pour le travail, alors pourquoi ne pas le faire ? »
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