Marie Bolou « J’ai connu une période durant laquelle je ne voulais plus toucher à un bateau. »
Si Rio 2016 s’est joué sans elle, il faudra bel et bien compter sur Marie Bolou pour Tokyo 2021. La jeune Quimpéroise, 26 ans, représentera la France en Laser Radial (petit dériveur) au Japon. Un aboutissement pour cette fille du vent qui, malgré un échec brésilien difficile à digérer, a su tenir bon la barre et garder le cap.
Par Sophie Danger
Publié le 28 décembre 2020 à 10h28, mis à jour le 29 juillet 2021 à 14h33
Les Jeux Olympiques de Tokyo ont lieu dans environ 7 mois. La situation sanitaire rend la préparation complexe, comment elle se passe pour toi ?
Nous avons a mis en place des entraînements, en juin, à l’issue du confinement. Ça a été un peu délicat parce qu’il a fallu trouver des partenaires d’entraînement locaux. Nous avons alors fait appel aux jeunes et ils ont répondu présents.
Nous avons également réussi à faire des « Coach Regatta » : nous organisons nos propres régates sur six jours pour maintenir un rythme, même si ce n’était pas officiel et que le niveau olympique n’était pas là.
J’ai aussi pu reprendre les entraînements avec ma partenaire et ça, c’était vraiment top. Enfin, nous avons eu la chance de pouvoir disputer, en octobre, le Championnat d’Europe qui se déroulaient en Pologne.
Et d’ici Tokyo, quel va être ton programme ?
Encore des Coach Regatta ! Car, pendant l’hiver, la saison s’arrête. Je pars à Quiberon, les conditions météo sont un peu moins cool, mais on s’accroche !
Nous allons aussi à Lanzarote en janvier-février pour, à la fois, chercher un peu de chaleur, mais aussi parce que tout le monde va s’entraîner là-bas. Aux Canaries, les conditions sont assez similaires à celles que l’on peut rencontrer au Japon et c’est important de s’entraîner sur un plan d’eau qui reprend les fondamentaux d’Enoshima.
En parallèle, je fais de la préparation physique. Les Jeux Olympiques ont été reportés d’un an, mais une année de travail supplémentaire, ce n’est pas négligeable. Je n’étais pas favorite et je vais pouvoir arriver encore plus prête à Tokyo, c’est impeccable pour moi !
Les Jeux pour toi, c’est un rêve de petite fille. Tu t’étais imaginée pouvoir y participer un jour ?
J’avais l’ambition d’y participer, mais j’avais du mal à me projeter. En ce qui concerne le Laser, il n’y a qu’une athlète qui représente la France, ce qui renforce la difficulté de se sélectionner. Mais j’ai travaillé dur pour Tokyo, j’y croyais et c’est pour ça que j’ai tout mis en place pour avoir ma place là-bas.
Ça te fait quoi de le réaliser ce rêve ?
J’ai appris ma sélection pour Tokyo début mars. Puis, il y a eu le report des Jeux et le confinement : gros ascenseur émotionnel ! De fait, je pense que je ne réalise pas encore vraiment, tout ce qui se passe a un peu décalé l’euphorie.
Le fait de repartir pour un an est une opportunité, mais ça implique des sacrifices même s’ils valent clairement le coup. Je pense que, quand on va reprendre un rythme normal de régate, je vais réaliser véritablement ce qui se passe.
En revanche, il y a eu pas mal de sollicitations médiatiques et ça, c’est quelque chose de nouveau pour moi. Ça me fait réaliser que c’est moi qui vais représenter la France aux Jeux et j’en suis très fière.
Pour le moment, nous n’avons pas eu tellement l’occasion d’aller au Japon pour nous entraîner, donc ça reste un peu loin. De plus, la voile, c’est un peu particulier car nous sommes en général à des kilomètres des villages olympiques.
Je disais justement à mes parents que je pense réaliser tout ça lorsque j’entrerai dans le stade pour la cérémonie d’ouverture. À ce moment-là, nous serons vraiment avec tout le monde et j’ai hâte.
Cette régate olympique reste une régate, mais il y a toute cette émulation… Le fait de pouvoir rencontrer tous les athlètes français te fait réaliser que c’est quand même différent et que, ça y est, tu as ta place aux Jeux et que c’est maintenant que ça se joue.
On dit souvent qu’il est difficile pour un athlète sélectionné pour la première fois de ne pas se laisser happer par l’ambiance des Jeux, au risque d’en devenir spectateur. Le fait que les épreuves de voile soient délocalisées, est-ce que ce n’est pas quelque chose de rassurant finalement ?
C’est un mal pour un bien. Par rapport à toute cette pression mentale que l’on peut avoir, ça met vraiment en confiance, en tout cas pour moi. Et puis je serai avec l’équipe de France de voile, des personnes que je connais et que j’apprécie.
Cette sélection, tu l’attendais depuis longtemps. Tu étais en effet pressentie pour participer aux Jeux de Rio en 2016 et, même si ça s’est joué sur le fil, ce n’est pas toi qui as été retenue. Tokyo tu le vis comment ? Une revanche ? Un aboutissement ?
Davantage comme un aboutissement. Parce que, effectivement, Rio ça s’est joué à pas grand-chose. C’était un plan d’eau que j’appréciais énormément, mais c’est le jeu, il faut l’accepter comme tel.
Au début, c’est vrai, je l’ai vécu comme un échec : tous les sacrifices, toutes les heures passées sur l’eau… J’ai eu une période durant laquelle je ne voulais plus toucher du tout à un bateau. Avec le recul, je me dis que ces échecs font aussi partie de l’apprentissage.
D’ailleurs, à la suite de cette déception, tu as pris une décision radicale : tout arrêter et partir t’installer au Brésil avec ton compagnon pendant un an. Les Jeux représentent tellement pour toi que l’idée même de ne pas y participer pouvait te pousser à arrêter ta carrière de sportive de haut niveau ?
Totalement. Je pense que j’ai fait une dépression post non-sélection. J’ai eu besoin de temps et ça a guéri un peu les plaies mentales : au fond de moi, j’étais convaincue que j’avais toutes mes chances de me qualifier pour les Jeux Olympiques et d’y faire un bon résultat.
Malgré tout, c’était dur de me motiver à repartir pour quatre ans. Ma détermination a finalement prévalu sur mon projet de tout arrêter.
Cette détermination, elle venait d’où ? De ton envie de participer aux Jeux de Tokyo ou juste le besoin de renouer avec la voile au haut niveau ?
La voile fait partie de ma vie, mais mon retour à la compétition a plus à voir avec le fait que j’étais convaincue de pouvoir aller aux Jeux Olympiques et que je ne voulais pas rester sur cette note négative. Alors j’ai remis le couvert !
J’ai eu la chance d’être intégrée directement en équipe de France pour faire la saison 2016-2017. La difficulté, c’est que je poursuivais des études au Brésil en parallèle : je faisais pas mal d’allers retours Europe-Brésil, ce qui a été un peu compliqué…
D’autant que les résultats n’ont pas été très encourageants : tu as fait une contre-performance au Mondial 2018…
Oui et, en plus, ces championnats servaient de sélection pour les équipes de France aux Jeux. La question s’est de nouveau posée de savoir si mon projet tenait toujours la route. Financièrement, ça commençait aussi à devenir difficile. La voile coûte très cher et, quand on n’est pas dans le système fédéral, tout est à nos frais.
Du coup, j’ai de nouveau arrêté et, entre temps, j’ai été contactée pour travailler au sein de Pôle emploi. Ça a été un déclic ! J’avais vraiment besoin d’un équilibre sportif et professionnel : depuis que j’ai été embauchée, j’ai énormément progressé, sportivement et mentalement. Je me sens bien, je suis contente d’aller au travail mais aussi d’aller m’entraîner. Dans les deux cas, le travail paie.
Parvenir à concilier ces deux volets de ta vie, le volet professionnel et le volet sportif, ça doit quand-même être sportif… ?
La première année, je bossais la moitié du temps et le rythme était assez intense. À partir du moment où j’ai été sélectionnée pour les Jeux, nous sommes parvenus à négocier à ce que je ne travaille que quarante jours jusqu’à Tokyo. Au 1er janvier, je serai à 100 % focalisée sur la préparation olympique.
Décrocher l’or, c’est ton ambition à Tokyo ?
Une médaille, en tout cas ! Je ne suis clairement pas la favorite, mais le travail a été fait et il en reste encore d’ici les Jeux, alors pourquoi ne pas créer la surprise ? Si tous les éléments sont réunis pour que je sois performante, je peux ramener une médaille. C’est totalement faisable !
Sur quoi dois-tu encore travailler jusqu’aux Jeux ? La technique ? Le mental ?
Il faut que je sois plus agressive, que j’aille plus au contact. Moi, je suis beaucoup dans le relationnel et je n’aime pas rentrer en conflit avec les gens mais, aux Jeux, tu as trois places qui comptent alors, à un moment donné, il va falloir que je rentre dedans. Je suis donc en train de développer une autre facette de moi, une facette plus agressive.
Comment on fait pour devenir plus agressive ? Tu as fait appel à un préparateur mental ?
Oui et, à l’entrainement, ma partenaire me rentre dedans pour que je sorte de ma zone de confort, que je progresse de ce côté-là. Ce n’est pas mon profil naturel, c’est dur de me métamorphoser d’autant que, dans la vie, je n’ai pas besoin de me comporter comme ça !
Parallèlement, comme toujours, je travaille sur l’aspect physique. Nous nous entraînons autant en salle que sur l’eau. Il va falloir avoir cette rigueur jusqu’aux Jeux pour arriver fraîche et rester vivante pendant toute la régate !
Même si Tokyo est une forme d’aboutissement, Paris pointe le bout de son nez trois ans après seulement… C’est envisageable pour toi ces Jeux 2024 ?
Il n’y a que trois ans, c’est vrai, mais il y a eu cinq ans de préparation olympique avant pour Tokyo. Tout dépendra donc de mon résultat en 2021, mais Paris 2024, c’est clair que c’est dans ma tête. C’est quand-même à la maison, ce serait sympa, non ?
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