
Marie Petitcuénot : « 2020… et si on arrêtait de torturer les athlètes hypertestostéronées ? »
L’an dernier, l’athlétisme a pris des libertés avec les droits de l’Homme, ou plutôt avec les
Publié le 05 janvier 2023 à 16h16, mis à jour le 13 janvier 2025 à 16h27
Vous avez vécu une saison 2022 très chargée avec, pour point d’orgue, une victoire au classement féminin à l’issue de la NatureMan Var Explorer, une course de 370 km, 11 étapes, 7000 mètres de dénivelé positif avec de la natation, du VTT, du vélo de route au programme. Qu’est-ce que représente cette aventure hors normes pour vous ?
Cette épreuve, c’était pour clore la saison en beauté, et c’était parfait. J’ai eu de la chance de tenir le coup parce que j’ai beaucoup enchaîné l’année dernière et j’ai eu pas mal de doutes par rapport à ça. Finalement c’est passé, j’ai su récupérer correctement entre mes différents rendez-vous.
La NatureMan Explorer était, de loin, la plus belle et la plus compliquée des épreuves que j’ai eu à gérer au niveau de la logistique, du sommeil, de l’alimentation. Elle était très complète. C’était la première édition et il n’est pas certain qu’il y en ait une deuxième. On passe dans des massifs forestiers souvent interdits à cette période de l’année par crainte des feux et c’est complexe à gérer au niveau des décrets.
La veille du départ, on ne savait d’ailleurs pas si on allait pouvoir passer partout. Ce sera peut-être la seule et unique fois où cette course a lieu mais j’ai eu de la chance de la faire et de la faire en grande forme, en pleine capacité de mes moyens. C’était incroyable.
Il m’a fallu attendre toutes ces années de sport pour être vraiment prête à disputer ce type de challenge.
Comment vous êtes-vous préparée à ce défi extrême ?
Ce sont toutes mes années de sport, toute mon expérience et, notamment, celle des raids multisports durant lesquels on dort très peu qui m’ont aidée.
En 2022, j’ai fait un raid qui a duré cinq jours et durant lequel on a dormi deux heures et demi. C’est en faisant ce genre d’épreuves que l’on s’aguerrit et que l’on prend confiance. On s’aperçoit, au fur et à mesure, que, même sans sommeil, on y arrive.
Sur la NatureMan Explorer, mes concurrentes se sont arrêtées à un moment et moi, j’ai continué. Ça ne s’est pas fait sans mal, j’ai fait des embardées en vélo, je me suis endormie dessus plusieurs fois mais, comme j’avais déjà vécu ce genre de situations, je savais que ça allait revenir.
Durant des courses comme celle-ci, on passe par des phases pendant lesquelles on est très fatigué mais on arrive à tenir. Je me suis servie de toutes ces expériences passées pour ce jour-là.
Vous êtes arrivée en tête du classement féminin avec quatre heures d’avance sur votre dauphine. Vous vous attendiez à un tel résultat ?
Non et d’autant plus que c’est la première année de ma vie où je charge autant. Pourquoi ? J’avais peut-être envie de me rendre compte de mes capacités. J’avais aussi envie de faire plein de courses que je n’avais pas pu faire pendant les années Covid.
Le temps passe, j’ai plus de 40 ans, et je me disais : « Mince, toutes ces années durant lesquelles on nous a privés d’épreuves sportives, de rencontres… ». J’avais soif de rendez-vous. Je pensais que j’allais passer au travers de certains mais finalement, j’ai réussi.
Cette année, en revanche, je sens que je ne vais pas pouvoir faire la même chose. Je vais commencer ma saison plus tard. J’ai encore besoin de repos. Je ne pourrais pas enchaîner plusieurs années aussi intenses.
Vous qui avez pris part à la Pierra Menta, à l’Ironman d’Hawaï, il représentait quoi ce défi pour vous ?
Moi, ce que j’adore, c’est être au grand air, sentir le vent, toucher les rochers, multiplier les expériences au contact de la nature. J’éprouve un sentiment de liberté, je visite des lieux magnifiques et tout ça grâce au sport nature.
J’aime aussi la multiplicité des épreuves. Sur la NatureMan Explorer, il y avait de la natation, du vélo de route, du VTT avec des passages techniques et un trail, lui aussi très technique, pour terminer.
Ce qui me plaît, c’est d’être capable d’enchaîner toutes ces épreuves et c’est grâce à mes années de sport, d’ultra trail, de VTT, de natation. C’est un aboutissement.
Comment se remet-on d’une épreuve aussi intense malgré l’expérience ?
J’ai tellement d’entraînements au programme de mes semaines que, même si c’est beaucoup plus dense le jour de l’épreuve, le corps est habitué à beaucoup travailler et à se remettre assez vite pour l’entraînement qui suit.
À l’arrivée de la NatureMan Explorer, j’étais fatiguée mais j’ai réussi à faire une course de VTT, la Transvésubienne, quinze jours après avec un podium à la clé. Je ressentais une fatigue profonde, mais c’est davantage en termes d’engagement mental que l’on a du mal à se remettre.
Il y a une sorte de souffrance lorsque l’on dispute une course aussi intense, c’est compliqué d’enchaîner, de replonger rapidement. Mentalement, on se sent un peu las.
D’où vous vient cet amour des sports nature ?
Ça remonte à mes 14-15 ans. Durant l’été, j’ai fait un stage d’aviron et, dans la foulée, j’ai pris une licence pour le reste de l’année.
À l’époque, nous étions un petit groupe de jeunes, on s’éclatait bien avec nos entraînements, nos séances de musculation, d’ergomètre. On s’encourageait les uns, les autres, on avait un super entraîneur et de bonnes sensations de glisse sur la Meuse.
De fil en aiguille, je suis passée au triathlon.
Vous pourriez envisager vous épanouir sans compétition ?
Oui, tout à fait. La compétition, c’est un jeu. C’est sympa d’avoir un bon classement mais ce qui compte, c’est avant tout de se dépasser soi-même, de réussir à terminer une épreuve extrême, hors norme. Il ne faut pas trop se fixer d’objectifs de place, de résultat, tout ça vient après.
Avec le temps, je me dirige de plus en plus vers des épreuves où ce qui me motive, c’est moins de me mesurer à d’autres que de courir avec eux, de me rapprocher de personnes qui, comme moi, ont des défis fous et de partager ces moments.
Durant ces rendez-vous, on se serre les coudes, on échange parfois seulement deux-trois mots mais ils vont avoir beaucoup d’importance. On sait qu’on va y repenser après et, au quotidien, ça nourrit.
C’est vrai que ça se solde souvent par une bonne place à l’arrivée, c’est gratifiant, mais ce n’est pas le but ultime.
Comment les sélectionnez-vous, ces aventures ?
Il est rare que je fasse deux fois la même course. J’aime vraiment faire des choses différentes, essayer plusieurs sports de plein air ou épreuves extrêmes.
Dans ma tête, je me fixe trois-quatre épreuves par sport et par an, des épreuves si possible assez techniques et sur des terrains accidentés.
Cette année, par exemple, comme j’ai fait beaucoup de VTT, je me suis dit que c’était le moment où jamais de participer à la TransRiviera, à la Transvésubienne et au Raid Vauban.
Ce sont des épreuves exigeantes, vous n’êtes pas professionnelle, vous fonctionnez seule, comment adaptez-vous vos entraînements ?
Les bases, je les ai eues jeune avec mon entraîneur d’aviron. Par la suite, c’est en lisant des manuels, des récits d’autres sportifs que j’ai continué à apprendre.
Quoi qu’il arrive, je fonctionne surtout selon mes envies, selon mon humeur. Je n’ai pas vraiment de programme.
De cette manière, je ne me force pas trop, c’est toujours du plaisir et je ne me blesse quasiment jamais.
Ça représente combien d’heures par semaine ?
Environ deux-trois heures de sport tous les deux jours. L’hiver, c’est un peu moins, mais je charge le week-end.
Il m’arrive souvent de faire cinquante kilomètres en ski de fond le samedi et de remettre ça le dimanche. Je fais aussi des sorties de ski de rando qui vont me prendre cinq heures, six heures voire sept heures.
L’été, il peut m’arriver de faire de gros entraînements qui vont me prendre toute la journée. Ça s’équilibre comme ça : certaines journées, ce sera juste un petit footing, une petite sortie vélo avec les enfants mais, en règle générale, tous les deux jours il y a une discipline assez intense au programme.
Passer professionnelle ne vous a jamais attirée ?
Je n’ai jamais souhaité rester dans un seul format de course. Voyager à l’autre bout du monde pour tourner en rond sur un circuit ne m’intéresse pas. Je préfère les grandes traversées, les épreuves extrêmes. Faire du haut niveau ne m’a jamais attirée plus que ça, c’est la variété, la diversité qui me plaît.
Vous êtes totalement libre de vos choix, libre de jeter votre dévolu sur n’importe quel défi. Est-ce que vous vous fixez, malgré tout, des limites ?
Jusqu’à maintenant, je ne me suis pas trop fixé de limites et je participe à des épreuves de plus en plus extrêmes et difficiles à gérer.
La NatureMan Explorer a été la plus compliquée à ce titre et, en 2023, je vais m’inscrire à la French Divide qui sera, et de loin, la plus grande aventure à laquelle il m’ait été donné de participer. C’est une grande traversée de la France, 2 200 kilomètres en bikepacking (soit l’utilisation de sacoches dans lesquelles on transporte tente, vêtements…), sans assistance, en VTT ou en gravel.
En tout, il y a 38 000 mètres de dénivelé et on doit boucler le parcours en moins de quinze jours. C’est une épreuve de fou et mon objectif est d’essayer de finir dans les temps, de passer la ligne d’arrivée en moins de quinze jours.
Je dis que je ne suis pas compétitrice mais si je peux me faire une petite place parmi les finishers, ce serait pas mal !
Prouver que les femmes peuvent boucler ce type d’épreuves hors-normes, c’est important ?
Disons que ça fait toujours plaisir de montrer que la femme est capable de réaliser des épreuves aussi difficiles, d’avoir sa place parmi les hommes.
Sur le long, nous avons vraiment notre place, nous avons une régularité, un courage, une force de caractère… Nous avons plein d’atouts pour ce genre de défi.
De toutes les épreuves auxquelles vous avez participé jusqu’à présent, laquelle a été la plus épanouissante pour vous ?
Je pense que c’est la Pierra Menta. Le ski-alpinisme est vraiment, pour moi, le sport où il faut avoir une caisse de fou, où il faut être le plus préparé. On est amené à grimper, on glisse en descente. Lors des montées, il faut faire un super effort avec les conversions, les portages, les crampons.
Et puis, quand on est en moyenne, voire en haute-montagne, les paysages sont fabuleux. On côtoie les éléments, le vent, le froid, la neige, les rochers, c’est hyper complet.
Celle que j’ai la moins aimée, en revanche, c’est la Vasaloppet en Suède. C’était sympathique, mais j’ai trouvé le parcours assez rébarbatif.
En 2023, il y aura donc la French Divide. Avez-vous d’autres engagements en tête ?
Je m’étais déjà fixée la Corima en gravel mais je dois m’assurer de pouvoir obtenir le matériel nécessaire auprès de mon sponsor, Liv.
Il faut également que je sache si j’en ai vraiment l’envie : je n’ai pas encore retrouvé assez de niaque pour m’engager dans des compétitions. J’ai besoin de beaucoup de repos, je verrai en fonction de ma forme.
Dès que ça ira mieux, je commencerai à m’inscrire à de petites courses dans le coin mais, quoi qu’il arrive, mon programme sera beaucoup moins chargé que celui de l’année précédente.
La French Divide est pour l’heure mon objectif et je sais que ce sera une grosse logistique à mettre en place pour préparer le vélo, l’alimentation, la tente…
C’est sur cette course que je veux me focaliser aujourd’hui.
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