Il était une fois l’haltérophilie… féminin

Abbye Stockton alias Pudgy
Le monde du muscle a eu bien du mal à accepter les femmes robustes et puissantes. Petite histoire de ces « phénomènes » qu’on a fini par prendre au sérieux.

Par Clotilde Boudet

Publié le 05 septembre 2023 à 19h45, mis à jour le 23 février 2024 à 11h29

Saviez-vous que l’haltérophilie est le seul sport de force des Jeux Olympiques modernes ? Sport ancestral par excellence, dès la première édition organisée à Athènes en 1896 par Pierre de Coubertin.

Soulever des poids n’est pas très « féminin », paraît-il… C’est sans doute pour cela qu’il faut attendre cinquante ans pour voir les premières compétitions féminines d’haltérophilie, quatre-vingt-dix ans pour que les championnats du monde ouvrent leurs portes aux femmes et cent-quatre ans pour qu’elles puissent participer aux JO.

Depuis, la Chine domine clairement les classements, avec seize des vingt records féminins détenus par des haltérophiles chinoises !

Laverie Vallee alias Charmion, artiste de cirque féministe américaine (1875-1949)…©Wikipedia

Avant la reconnaissance de la pratique comme un authentique sport, les femmes capables de soulever de grosses charges étaient considérées comme des « phénomènes ».

À l’image des deux stars de la disciplines d’alors :  la Galloise Miriam Kate Williams dite Vulcana et l’autrichienne Katharina Brumbach dite Katie Sandwina.

Miriam Kate Williams dite Vulcana

À la fin du XIXe siècle et au début du XXe, ces « strong woman » se donnaient en spectacle dans toute l’Europe et les États-Unis. En France, les performances de Vulcana impressionnèrent tant l’Haltérophilie Club de France (fondée en 1896) qu’elle fit la Une du journal “La Santé par les Sports“.

Quant à Katie Sandwina que l’on appelait volontiers « Lady Hercules », elle devint la « femme la plus forte du monde » après avoir battu Eugen Sandow, le père du culturisme moderne, « l’homme à la musculature parfaite ».

Katie Sandwina alias the Lady Hercules

Dans la seconde partie du XIXe siècle, deux autres femmes révolutionneront l’haltérophilie féminine : l’Anglaise Ivy Russel dont on oubliera trop vite le nom, et l’Américaine Abbye Stockton – également connue sous le nom de Pudgy – véritable coqueluche des médias.

Abbye Stockton alias Pudgy

À la veille de la Seconde Guerre Mondiale, Ivy Russel démocratise le sport en Grande Bretagne et se tourne vers la « British Amateur Weightlifting Association » pour réclamer une compétition officielle d’haltérophilie féminine. Ce qui sera sans doute sa plus grande victoire.

Car si elle fait office de pionnière de ce sport de force, elle est aussi une sportive engagée dans l’égalité des sexes. Dommage que l’histoire l’ait largement oubliée.

De son côté, Pudgy Stockton démocratise l’haltérophilie aux États-Unis et participe à l’organisation du premier concours d’haltérophilie officiel ouvert aux femmes dans son pays. Peu à peu, on ne les regarde plus comme des monstres de muscles, mais comme des athlètes. Merci Pudgy !

En France, l’haltérophilie fait parler d’elle dès 1840 avec Hippolyte Triat, cependant la pratique ne s’ouvre aux femmes que dans les années 1980.

Pudgy Stockton, une poignée de main virile

En 1989, en France, elles sont trois-cents femmes à pratiquer ce sport en compétition. En 2016, leur nombre passait à 31 312, soit 33 % des licenciés du pays.

Aux derniers JO de Tokyo, la Française Dora Tchakounté a manqué de peu le podium en se plaçant 4e. Elle n’a pas dit son dernier mot et se prépare pour 2024. Ce sera musclé.

Dora Tchakounté

Ouverture Abbye Stockton dite Pudgy

D'autres épisodes de "Il était une fois le sport... conjugué au féminin"

D’autres actus en brèves…

Quiz : connaissez-vous vraiment le sport féminin ?

Quiz : Connaissez-vous vraiment le sport féminin ?

Vous pensez tout savoir sur le sport féminin parce que vous avez vu un match de foot des Bleues une fois en 2019 ? Vous confondez Allyson Felix avec une marque de baskets ? Ou, au contraire, vous êtes incollable sur les pionnières badass qui ont ouvert la voie ? C’est le moment de vérifier tout ça !

Lire plus »
Manelle Inaho

Le Q&A de la gymnaste Manelle Inaho

Elle fait partie des têtes d’affiche de la gymnastique rythmique. Manelle Inaho, 21 ans, est une des pépites de la fédé française de gym. D’une grâce toute aérienne, elle émeut le public à chacun de ses passages sur le tapis. Elle a répondu à notre Q&A express.

Lire plus »
Pilates, stretching, yoga, c’est quoi la différence ? La question qui tue

Pilates, stretching, yoga, c’est quoi la différence ?

Il parait que Pilates, yoga et stretching est le mix parfait pour se détendre. Moins de stress dans nos vies ? Ici, on dit oui ! Mais c’est quoi exactement ces pratiques qui ont l’air perchées ? Allez, on quitte un instant notre chien tête en bas pour t’en dire plus sur ces sports dans lesquels corps et esprit travaillent en harmonie.

Lire plus »
Pourquoi quand je cours, je suis essoufflée ? La question qui tue

Pourquoi quand je cours, je suis essoufflée ?

Courir, t’adore ça ! Ou plutôt… tu aimerais adorer ça. Le problème, c’est que t’as tout de suite le cardio en PLS. Les poumons brûlent, le souffle est saccadé… Au secours ! Si tu t’es déjà demandé pourquoi t’as l’impression que t’es au bout de ta vie quand tu fais un petit footing, cette mise au point est faite pour toi.

Lire plus »
Il était une fois le karaté...féminin Sophie Berger

Il était une fois le karaté…féminin

Avec plus de 35 % de femmes licenciées, la Fédération Française de Karaté est l’une des premières fédérations sportives féminine du pays. Pourtant, la présence des filles sur les tatamis n’a pas toujours été de soi… Dans le monde de la compétition en tout cas. Petit tour d’horizon de cet art martial conjugué au féminin.

Lire plus »

Vous aimerez aussi…

Les triathlètes (re)débarquent à Paris !

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une course d’orientation nouvelle génération, un triathlon en capitale (celui de Paris, le retour, sur notre photo), une pro de la ride, une volleyeuse qui nous bluffe et une question qui tue, c’est le meilleur d’ÀBLOCK! pour cette semaine. Enjoy !

Lire plus »
Adjudante Virginie V. : « Le sport, ce n’est pas loin d’être ma vie. »

Adjudante Virginie V. : « Le sport, ce n’est pas loin d’être ma vie. »

Elle est basée à Carcassonne, dans le Languedoc. Au sein du 3e RPIMa ou 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine, une unité d’élite de la 11e brigade parachutistes, elle n’a qu’un but : tenir physiquement la distance. Le sport est pour Virginie autant une respiration essentielle dans son quotidien qu’un moyen de se faire respecter dans un monde d’hommes. Vice-championne de cross-country de l’armée de terre, cette adjudante-là n’est pas prête à quitter le terrain.

Lire plus »
Iga Swiatek

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Les 7 dernières « queen » de Roland-Garros, celles qui peuvent prétendre au sacre sur terre battue cette année, le portrait d’une gardienne de la petite balle jaune, une légende de la Porte d’Auteuil et une Question Qui Tue, c’est le meilleur d’ÀBLOCK! cette semaine. À vos raquettes !

Lire plus »
1er août JO 1936 Berlin

1er août 1936 : les Jeux Olympiques s’ouvrent à Berlin

Ils vont vite prendre une signification très politique. Les Jeux Olympiques de Berlin, en 1936, vont devenir le lieu idéal d’une propagande du parti nazi par le sport. Ce 1er août, c’est donc dans une atmosphère festive, mais néanmoins tendue, que s’ouvrent ces Jeux de la XIe olympiade de l’ère moderne.

Lire plus »
Elizabeth Ryan

Elizabeth Ryan, sa Majesté de Wimbledon

Si elle n’a jamais brillé en simple, elle n’a laissé à personne d’autre le soin de rayonner sur le double. Elizabeth Ryan a dominé, sans partage, en duo à Wimbledon durant plus de soixante ans aux côtés, notamment, des Françaises Suzanne Lenglen et Simonne Mathieu. Avant de passer le relais à sa compatriote Billie Jean King.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner