Adeline Trazic : « Les Championnats du monde d’Ironman ? Jamais je n'aurais pensé faire ça dans ma vie ! »Triathlète amateur, professeure d’arts plastiques, 41 ans
En juin dernier, elle est arrivée première de l’Ironman de Nice dans la catégorie 40-44 ans, la voilà maintenant en route pour les Championnats du monde de la spécialité qui se dérouleront à Hawaï le 14 octobre. Adeline Trazic, professeure d’arts plastiques, n’a qu’une ambition : franchir la ligne d’arrivée et faire le plein d’émotions sur la terre du triathlon.
Propos recueillis par Sophie Danger
Publié le 25 septembre 2023 à 12h43, mis à jour le 27 décembre 2023 à 10h34
« Le 14 octobre prochain, je vais participer aux Championnats du monde d’Ironman à Hawaï dans la catégorie 40-44 ans et, plus l’échéance approche, plus je commence à sentir la pression monter. Tout s’est enchaîné très vite depuis que je suis me qualifiée à Nice, mais j’attends ce rendez-vous avec impatience parce que ce n’est pas quelque chose que je pensais faire un jour dans ma vie, et surtout pas cette année !
J’ai commencé le triathlon en 2016 après mon divorce. À cette époque-là, je n’étais pas du tout sportive, je ne savais pas nager – disons que je nageais la brasse comme Madame tout-le-monde -, je n’avais jamais mis mes fesses sur un vélo de route, jamais mis de chaussures avec des cales.
Je faisais un peu de course à pied, un peu de trail pour me maintenir en forme et aussi un peu d’aquabike dans un cabinet de kiné pour finir de perdre les derniers kilos de ma dernière grossesse…
C’est mon kiné qui m’a suggéré de me mettre au triathlon. Au début, je lui disais que c’était impossible, que je ne savais pas nager, que j’allais me noyer et puis, peu à peu, je me suis laissé tenter, probablement pour me prouver à moi-même que j’étais capable de faire quelque chose.
Quoi qu’il en soit, j’ai été mordue tout de suite et j’ai investi dans du matériel, acheté mon premier vélo. Cette année-là, celle de mes débuts, j’ai fait une dizaine de triathlons, essentiellement des courtes distances, des « S », et puis je me suis mise au défi de faire un « M » en fin de saison.
J’ai continué comme ça jusqu’au COVID. À ce moment-là, même si je sais que je n’ai pas un niveau exceptionnel, que je ne sais toujours pas nager – je suis toujours en brasse – j’ai envie de voir ce que je vaux sur du long pour me prouver à moi-même, une fois encore, que je suis capable de passer à la distance supérieure.
Mon premier long a lieu à Chantilly et hormis la natation, ça se passe bien, je sors en moins de 6h. Je suis plutôt contente de moi et je choisis alors de m’inscrire sur mon premier label Ironman à l’occasion de la première édition des Sables-d’Olonne.
L’expérience est magique – je termine en 5h35 si ma mémoire est bonne – et tout ça me donne envie de poursuivre dans cette voie. Comme je vais sur mes 40 ans, je me lance un nouveau défi, celui de faire un Ironman, cette fois.
J’explique ça à des copains et à mon second mari en leur demandant quel est celui qu’ils me conseilleraient et ils me conseillent de m’aligner à Nice parce que c’est une course magnifique, que l’ambiance est géniale et que c’est un rendez-vous mythique.
Pour moi, ils sont cinglés : je sais faire du vélo mais, sur du plat, je ne suis pas très douée avec les dénivelés (le triathlon de Nice comporte 3,8 km de natation, 180km de vélo avec un dénivelé positif de 2500m et 42,2km de course à pied, Ndlr) mais je les écoute quand même et je m’inscris sans être certaine de pouvoir réussir.
Pour mettre toutes les chances de mon côté, je fais appel à quelqu’un pour me préparer. J’avais le choix entre une personne extérieur et mon mari qui, à ce moment-là, est professeur de judo, pratique aussi le triathlon et a toutes les qualités requises pour, mais j’opte pour la première option histoire de ne pas mélanger famille et sport.
Résultat, je passe la ligne d’arrivée après 13h d’efforts, je suis contente mais mon mari, lui, est persuadé que je peux faire largement mieux. C’est comme ça que je lui ai proposé de m’entraîner et de recommencer cette année.
Il m’a préparée des plans d’entraînement très précis que j’ai suivis à la lettre, ça me prenait entre quinze et dix-huit heures par semaine. Heureusement, il est très présent à la maison et j’ai une grande fille exceptionnelle qui va bientôt avoir 18 ans et qui me seconde à 3 000 %.
Au quotidien, il a quand même fallu que je m’adapte, je suis professeure d’arts plastiques et, entre deux heures de cours, si j’avais une heure de perm’, c’était pour aller faire une séance de piste. Le soir, quand je rentrais et que j’avais fini de m’occuper de mes enfants – nous en avons quatre à nous deux – je montais sur le traîneur jusqu’à 23h. Mais tout cela a payé.
En juin dernier, lors de mon deuxième Ironman de Nice, j’ai gagné en 11h47 de temps et je me suis qualifiée pour les Championnats du monde d’Hawaï. Ce n’était pas du tout mon objectif : moi, je voulais simplement faire mieux que l’année précédente, mais mon mari, lui, avait ça dans un coin de la tête.
Pour lui, je pouvais finir dans le Top3. C’était drôle parce que, au 30e kilomètre du marathon, il m’annonce que je suis première et il me demande où je veux partir en vacances à la rentrée. Moi, à ce moment-là, j’ai mal partout, j’en bave mais ça mobilise mon attention et ça me fait penser à autre chose.
Au demi-tour, il me pose de nouveau la question, je lui dis que je n’ai pas réfléchi et là il me lance : « Tu as 25 minutes d’avance, je te paye le dossard, on part à Kona ! »
Faire les Championnats du monde d’Ironman à Hawaï c’est quelque chose que je n’avais jamais envisagé de faire parce que, pour moi, c’était inaccessible. C’est merveilleux.
Je vais là-bas avec une seule ambition : passer la ligne d’arrivée et vivre le plein d’émotions – j’en ai la chair de poule en en parlant et les larmes qui montent – sur les terres du triathlon.
Je sais que, sur un Ironman, tout peut arriver, mais si je vais au bout en donnant le meilleur de moi-même, l’expérience sera pour moi exceptionnelle. »
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