Rikako IkeeLa nageuse qui ne veut jamais perdre, même contre la maladie…

Rikako Ikee
Elle a seulement 20 ans, mais entame déjà sa deuxième vie. Rikako Ikee, grand espoir de la natation japonaise, a bien failli ne pas participer aux prochains JO de Tokyo. Atteinte d’une leucémie diagnostiquée en février 2019, la sextuple médaillée d’or des Jeux Asiatiques de 2018 a dû batailler dix longs mois contre la maladie avant de revenir au premier plan. Portrait d’une battante.

Par Sophie Danger

Publié le 16 avril 2021 à 16h49, mis à jour le 29 juillet 2021 à 12h18

C’était en février 2019. De passage en Australie pour un stage d’entraînement, Rikako Ikee peine. Elle qui d’ordinaire ne s’économise jamais est inhabituellement à la traîne. Un léger passage à vide à mettre, probablement, sur le compte de la fatigue. Sauf que le coup de mou finit par traîner en longueur.

Et que le petit prodige japonais de la natation commence à se plaindre de difficultés respiratoires. Jusqu’au malaise. De plus en plus inquiète, la jeune fille décide de plier bagage et de rentrer au pays.

Quelques examens plus tard, le verdict tombe, brutal : Rikako Ikee, 18 ans, est atteinte d’une leucémie. En une fraction de seconde, son monde s’écroule.

©DR

Quinze ans à présent qu’elle évolue dans les bassins. Quinze années au cours desquelles la natation a pris une place prépondérante dans sa vie, jusqu’à ne plus penser qu’à ça. Il faut dire que la jeune fille a de solides prédispositions et qu’elle sait les exploiter.

Sacrée championne du monde junior sur 50m et 100m papillon en 2015, Rikako Ikee est enrôlée, dans la foulée, dans la délégation japonaise sélectionnée pour disputer les Jeux Olympiques de Rio programmés l’année suivante.

La native d’Edogawa y est alignée dans pas moins de sept épreuves – quatre en individuel, trois en relais – et quitte le Brésil, une encourageante 5e place sur 100m papillon en poche.

©DR

C’est en 2018 que sa carrière va véritablement décoller. Engagée aux Pan Pacific Championships organisés à Tokyo, la demoiselle rafle l’argent du 200m au nez et à la barbe de l’Américaine Katie Ledecky, championne olympique en titre de la spécialité, avant de remporter la mise sur 100m papillon, record national à la clef.

Quelques jours plus tard, Rikako Ikee prend part aux Jeux Asiatiques qui se tiennent à Jakarta. Et continue à enrichir sa collection avec pas moins de six ors – 50 et 100m, 50 et 100m papillon, relais 4x100m en nage libre et en 4 nages – et deux médailles d’argent – relais 4x200m libre et 4x100m 4 nages mixte -.

©DR

Première femme, tous sports confondus, à décrocher six titres lors d’une même édition, elle est élue, dans la foulée, meilleure athlète du rendez-vous indonésien, un honneur, jusqu’alors, jamais attribué à une femme.

« Je déteste vraiment perdre, confiait-elle alors à l’AFP. J’ai probablement gagné sur la pure volonté. Je suis vraiment fière de ça. Le tout, c’est de savoir comment convertir cette performance pour décrocher plus de médailles d’or aux Championnats du monde et aux Jeux de Tokyo. » Las. Son cancer l’en empêchera.

©DR

Contrainte de se soigner, elle renonce à participer à l’édition 2019 des Championnats nationaux, épreuve qualificative pour les Mondiaux de Gwanguy qui doivent avoir lieu quelques mois plus tard en Corée du sud.

Débute alors une période extrêmement difficile pour Rikako Ikee. Le traitement est lourd, le mal terrible. « L’avenir que je prenais pour acquis a basculé du jour au lendemain », expliquait-elle, avouant « lorsque j’étais au plus bas, je voulais mourir. Je me disais que je me sentirais mieux si j’étais morte qu’avec ce genre de douleur. »

Pendant près d’un an, elle va faire le dos rond et encaisser le traitement. En décembre 2019, c’est la libération. En rémission, elle peut enfin sortir de l’hôpital. Sevrée de natation, elle reçoit l’autorisation du corps médical pour reprendre l’entraînement en mars, soit 1 an et 41 jours après avoir été diagnostiquée.

Peu à peu, Rikako Ikee retrouve ses marques.

©DR

Début avril 2021, elle concourt aux Championnats du Japon. Sacrée sur 50m papillon et 50m nage libre, elle échoue toutefois à réaliser les minima nécessaires pour lui assurer une place en individuel aux Jeux Olympiques de Tokyo.

Rikako Ikee sera néanmoins au rendez-vous sur 4×100 m 4 nages. « Il y a un an, j’ai juré que je ne perdrai pas ce combat contre moi-même, se félicitait-elle, émue. Grâce à ma famille, mes amis et tous ceux qui m’ont soutenue, j’ai réussi à l’emporter. »

Ouverture : ©Reuters/Athit Perawongmetha

Vous aimerez aussi…

Souhad Ghazouani... de l’or en barre !

Souhad Ghazouani, la para-haltérophile qui met la barre haut

Cette fille-là, c’est 5 médailles paralympiques dont 1 en or, un record du monde, une foison de médailles en Championnats. La para-haltérophile franco-tunisienne Souhad Ghazouani est une force de la nature. Née tétraplégique, elle porte sa vie à bout de bras, envoie du lourd et espère soulever de l’or aux Jeux Paralympiques de Paris !

Lire plus »
Marine Ménager, ÀBLOCK! jusqu’au bout

Marine Ménager, ÀBLOCK! jusqu’au bout

À 29 ans, elle dispute sa dernière Coupe du monde, en Angleterre, avant de mettre un terme à une carrière marquée par la régularité, la discrétion et l’engagement collectif. Marine Ménager, pilier du XV de France fait partie des joueuses les plus emblématiques du rugby féminin français. Portrait d’une winneuse.

Lire plus »
Cyclisme

La Grande Boucle fait un pied de nez au Covid-19

Le Tour de France aura finalement lieu en août. Il est le seul événement sportif à être maintenu en 2020. Ni reporté ni annulé, la plus célèbre course cycliste prendra la route avec plus d’un mois de retard sur le calendrier, mais ça va rouler malgré tout. Les coureuses, elles, vont (encore) devoir patienter. Autant dire que le Tour féminin n’est plus envisagé.

Lire plus »
Lise Billon

Le best-of ÀBLOCK! de la semaine

Des paroles de filles sur leur métier passion, une as du tir à l’arc qui a un appétit de lionne, une emblématique pasionaria du skateboard, une footballeuse transgenre qui dégomme les barrières, elles étaient toutes ÀBLOCK! cette semaine pour nous régaler de leurs confidences, nous embarquant ni une ni deux sur leur chemin sportif parfois semé de doutes, mais toujours exaltant. Retour sur les (belles) histoires de la semaine.

Lire plus »
Camille Jedrzejewski « Le tir, c'est de la gestion de stress, de la lucidité. »

Camille Jedrzejewski : « Le tir, c’est de la gestion de stress, de la lucidité. »

Elle a commencé par le pentathlon avant de se concentrer sur le seul tir. Camille Jedrzejewski, 22 ans, vice-championne d’Europe en pistolet à 10 mètres vient de décrocher la médaille d’argent pour ses premiers JO. Une première pour l’équipe de France de la discipline. Nous l’avions rencontrée juste après sa qualification aux Jeux. Conversation avec une fille qui met toujours dans le mille.

Lire plus »
Stacey Allaster

Stacey Allaster, la boss de choc de l’US Open

Elle est la première femme à avoir pris les rênes du tournoi américain. Responsable de la Fédération américaine de tennis, la Canadienne qui a présidé aux destinés de l’US Open pendant cinq ans, tout en conservant ses prérogatives au sein de la fédé, s’apprête à tourner la page, mais sans tout à fait quitter le tennis. Portrait d’une pionnière audacieuse.

Lire plus »
Sara Labrousse

Sara Labrousse : « La natation artistique à haut-niveau m’a appris à repousser mes limites… »

Ses rêves ne prennent jamais l’eau. À 32 ans, après avoir participé aux plus grandes compétitions internationales qui la mèneront jusqu’aux Jeux Olympiques, cette championne de natation artistique a quitté les bassins, mais pas l’univers aquatique. Sara Labrousse est désormais docteur en biologie marine. Les souvenirs cependant lui tiennent chaud. Et elle nous raconte avec ferveur comment ces années sous l’eau l’ont aidée à respirer.

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner