Tu es connue dans le milieu des pilotes comme étant « La Tornade », c’était déjà le cas enfant ?
J’ai toujours été très sportive mais la passion de la moto ne m’a pas été inculquée par ma famille, en tout cas, pas sur le plan de la compétition. Alors, c’est vrai que mes parents avaient chacun une moto et qu’ils avaient tout spécialement acheté un side-car pour nous balader, nous, les enfants. Mais ils n’ont jamais eu de motos sportives. Gamine, moi, j’ai fait du judo et, pendant plusieurs années, du kayak à haut niveau, j’étais en sport-étude au lycée. Quand j’ai eu mon permis voiture, j’ai voulu passer mon permis moto en même temps, mais c’était, au départ, pour le côté pratique.
Et à quel moment le virus de la moto sportive te prend ?
Ma première moto, ça a été du très basique. J’avais une 650 Bandit, un petit roadster, pas une sportive. J’avais 25-26 ans, c’était l’époque où, avec ma bande de copains, on roulait très très vite… Quand on a commencé à avoir des potes qui tombaient en balades, on a compris que notre petit jeu était dangereux. On a alors bifurqué sur les circuits. C’était l’occasion d’être dans un cadre où on pouvait vraiment faire des trucs sympas. On a trouvé ça génial et la moitié du groupe n’a plus jamais roulé sur la route.
Tu t’étais engagée en sport-étude, tu avais fait du kayak à haut-niveau, est-ce qu’avec la moto, il y avait aussi cette envie de performer ?
Pas du tout. Je dirais que ça a été une opportunité. En fait, tout s’est déroulé sans que je pense à quelque chose en particulier. C’est après avoir passé mon permis que j’ai décidé d’acheter une petite moto de piste. Et c’est au cours de trois journées de roulage que quelqu’un m’a dit : « Oh, tu roules pas trop mal. Est-ce que ça te dit de faire de la compet’ ? ». J’ai répondu : « Pourquoi pas ? ». Du coup, j’ai acheté une moto un peu plus récente, j’ai fait un championnat de France et j’ai fini quatrième.
Et après, tout est allé un peu crescendo. Il y a peut-être eu aussi une part de chance, mais je ne sais pas en fait, parce que la chance, on la provoque. Je crois juste que je suis arrivée aux bons endroits au bon moment. Et, à ce moment-là, j’ai su saisir les opportunités. À chaque fois qu’on m’a proposé quelque chose, je ne me suis pas dit « Est-ce que ça vaut le coup ? » mais : « Tu essaies : ça marche, ça marche ; ça marche pas, ça marche pas. » Le fait est que ça a fonctionné à chaque fois donc j’ai gravi des marches à une vitesse qui a été, pour moi, la vitesse de la lumière.
Tu as donc démarré la moto à la vitesse grand V ?
Oui, car cette personne qui m’avait vu rouler a voulu m’aider à progresser. Et il a été l’un de mes premiers partenaires, c’est-à-dire que je pouvais venir m’entraîner gratuitement sur ses circuits. Ensuite, c’est devenu mon coéquipier d’endurance. Après, j’ai commencé à connaître d’autres personnes qui m’ont vue rouler et qui m’ont tendu la main. Ça a été un tremplin pour la suite. Je me disais toujours que je n’avais rien à perdre. Il y a quand même eu des moments plus ou moins difficiles, des années beaucoup plus glorieuses que d’autres.
Qu’est-ce qui t’a plu tout de suite dans la moto, finalement ?
Je n’en sais rien. L’adrénaline, peut-être ? Parce que je fais aussi beaucoup de snowboard et je rêverais de faire un saut en chute libre ! Mais, au fond, je pense que soit on est fait pour ça soit on ne l’est pas.
Ta spécialité en moto, ce sont les courses d’endurance, pourquoi ce choix de l’endurance plutôt que la vitesse alors que tu es surnommée « La Tornade » ?
Au tout tout début, comme je n’avais pas un rond, je roulais avec une vieille charrette, un vieux R6, et j’avais une vieille combinaison blanche, plus grise que blanche d’ailleurs, tout comme mon casque qui était hyper vieux. Et j’avais peint ma moto en blanc, à la bombe. On avait un fan de Marvel avec nous et c’est comme ça que j’ai été surnommée La Tornade, car j’étais à moitié blanc, à moitié gris et que je roulais vite. Et c’est resté. Ce pseudo me suit depuis des années.
Pour ce qui est du choix, ça s’est fait assez vite : en fait, j’ai un tout petit gabarit donc, pour les départs en vitesse, c’est toujours un peu la mouise parce que je suis sur un pied. Mais, pour autant, toutes les places que je perdais au départ, je les regagnais dans la course. Mais j’étais ultra frustrée de ne pas réussir à montrer tout ce que je savais faire car j’étais rapide seulement en fin de course. Je n’étais donc pas faite pour la vitesse. Et l’endurance, eh bien, il y a une magie ! Il y a une énorme aventure humaine derrière – trente personnes qui sont là pour nous toute la semaine plus des coéquipiers pour lesquels il faut se battre aussi – alors qu’en vitesse, c‘est soi contre soi. L’endurance, ça a une âme et puis quand même, rouler la nuit, c’est une sensation dingue. En plus, moi, je fais souvent le lever du jour, j’ai l’impression d’être dans un film.
En fait, l’endurance me procure beaucoup plus d’émotions que la vitesse. Et sinon, la grosse différence entre les deux disciplines, c’est que l’endurance va te demander de réfléchir alors qu’en vitesse, il ne faut justement pas réfléchir pour pouvoir rouler vite. Je pense qu’en tant que femme, je suis plus en mode réfléchie.
Quel est ton atout dans la moto justement, en tant que femme ?
Les gars roulent vite parce qu’ils sentent que dalle, c’est-à-dire que, généralement, rien ne les dérange, pas même une vibration de la moto. Alors que nous, les femmes, on perçoit le moindre mouvement de la moto et c’est super important parce que ça évite des grosses gamelles. Parfois, je peux dire à l’équipe que j’ai ressenti une vibration qui est due à la chaîne et qu’il faut donc faire une tension de chaîne. En fait, c’est toujours moi qui diagnostique les pannes et les problèmes. Grâce à ces ressentis, on arrive à désamorcer des pannes futures. Pour moi, une femme est plus à l’écoute, beaucoup plus fine dans la description de ses ressentis et ça apporte vraiment du plus, même au niveau du réglage du châssis de la moto. En tout cas, moi, j’ai beaucoup d’intuition. Mon compagnon, Gabin, qui roule avec moi, ne sent pas ce genre de détails. C’est très bien : on est complémentaires !
En revanche, trouver une moto qui convienne à une équipe de quatre personnes avec deux hommes et deux femmes comme on l’est nous, c’est difficile. On n’a pas du tout les mêmes besoins que les hommes. Une femme aura justement besoin d’une moto qui n’a pas trop de mouvements alors qu’un gars, tout ce qu’il voudra, c’est qu’elle accélère. Je caricature, mais on n’est pas loin de ça.
À quoi tu penses quand tu roules ?
Moi, je ne pense à rien dans le sens où je suis vraiment focus sur l’intégralité des bruits sonores et de ce que je dois regarder pour ma course. J’ai les oreilles qui sont hyper attentives à chaque bruit. Sur une course de 24 heures, tu vas avoir des espèces d’automatismes qui vont se mettre en place : une fois que tu as fait quatre cents tours, tu sais exactement quel bruit doit faire la moto à tel moment. Je suis donc très attentive pour désamorcer un truc qui pourrait se passer. Malgré cette extrême attention, je ne pense à rien. Ça doit faire partie de ces moments de la vie où on arrive à être totalement dans l’instant présent.
C’est quoi toi le truc qui te démarque sur la piste, qui fait ton style de pilotage ?
Par rapport aux autres filles, je n’ai jamais trouvé une pilote plus petite que moi. Donc, je dirais que mon truc c’est mon gabarit atypique. Car il faut savoir qu’il n’y a pas de moto plus lourde qu’une moto d’endurance. Par rapport aux mecs, je dirais la même chose, le gabarit. N’importe quel gars derrière moi va savoir que c’est moi. Ils me disent souvent que la moto est couchée par terre et qu’ils voient à peine le pilote. Et sinon, ils sont assez admiratifs de mon pilotage qu’ils trouvent beau et fluide. Mais ça, honnêtement, c’est pour toutes les filles. Un pilotage où on a l’impression que ça ne force pas.
Quelle a été la première course significative de ton parcours de pilote ?
La toute première course que j’ai faite à l’âge de 26 ans, en 2011 : le Championnat de France d’Endurance où j’ai fini quatrième avec un coéquipier. J’ai toujours couru en relais sauf l’année d’après où mon coéquipier s’est blessé alors qu’on était engagés sur le championnat tout entier. Pour pouvoir finir la saison, j’ai fait des courses de vitesse et donc j’étais seule à courir.
Si tu devais choisir, quelle serait la course la plus forte en émotions pour toi ?
Notre première course des 24 Heures du Mans en 2024 avec Gabin, mon compagnon et co-fondateur de notre team AG Racing Team #241. C’était la première année de notre team. C’est pas notre plus beau résultat, c’est pas notre meilleur feeling non plus mais par contre, sur le plan émotionnel, c’est le moment le plus fort car c’est celui qui marque le début de l’aventure pour nous après avoir créé notre team de A à Z, car on est allés bout de la course ensemble. Ça a une grosse valeur pour moi dans le sens où on l’a fait, quoi !
On s’est donné les moyens, on s’est battus et on est allés au bout. En plus, on était tellement attendus au tournant quand on a commencé à dire qu’on montait notre team en championnat du monde… Je pense que plusieurs personnes auraient rêvé qu’on n’y arrive pas, parce que dans ce milieu, il n’y a pas que de la gentillesse. Donc, aujourd’hui, on mérite notre place et surtout, on a le mérite de dire que ce challenge, on l’a réussi. L’objectif a été rempli !
Et quelle course a été la plus challenging, a failli te faire raccrocher la moto mais t’a permis de prendre un meilleur virage pour ta carrière ?
Alors, pour moi, c’est ce moment où tu oublies d’où tu viens. Tu es tellement portée par l’engouement des gens qui te disent que c’est génial ce que tu fais que tu perds un peu les pédales… Ça s’est passé en 2012, on me disait que je roulais trop bien et qu’il fallait que je m’achète une 1000. J’ai donc pris une S 1000 R, une BMW, et, à partir de là, je pense que ça devait être écrit que rien ne passerait… Je devais faire un championnat avec mon coéquipier. Pour me faire à la moto, je fais une petite course avant et je tombe trois fois en une heure. Il fait nuit, il pleut, j’en ai marre, j’ai mal partout. À chaque fois, je relève la moto, je remonte dessus, mais je me dis : quel enfer ! Même si c’était pas la meilleure des idées de rouler dans ces conditions, je commence à être dégoutée du truc. Bref, finalement, la moto est fracassée, et plutôt que de la réparer, j’en achète une autre. Beaucoup plus vieille. Et on part en championnat comme ça. On fait la première course, on est comme des rois. Et en fait, la course d’après est annulée parce qu’il pleut trop. Et celle encore d’après envoie mon coéquipier à l’hôpital avec un pronostic vital engagé… Il partait sur six mois d’hôpital et je me suis dit que j’allais me battre jusqu’au bout pour lui, dans le même championnat, mais en vitesse. Je n’ai pas terminé une seule course, entre les problèmes mécaniques, les chutes et les mauvaises conditions météo. Les planètes n’étaient vraiment pas alignées.
À la fin de la saison, j’ai vendu la moto et j’étais prête à ne plus en racheter… J’ai fait autre chose pendant tout l’hiver et c’est en début d’année qu’une copine m’a proposé de faire un championnat en 600. Et c’est là où c’est reparti comme sur des roulettes… alors que j’avais vraiment failli tout arrêter, et pour de bon.
Tu es donc repartie sur les chapeaux de roues ?
Oui, c’était en 2015, je suis partie en Championnat de France en 600 et j’ai gagné. En fait, avec le recul, je me dis que mon amie qui débarque à ce moment-là… c’était une manière de me dire que j’étais faite pour ça mais que j’étais allée trop vite, que je devais revenir un peu en arrière et réapprendre. Je suis repartie avec un focus différent, j’ai compris que je m’étais perdue, que je devais conditionner différemment ma tête, mon mental. Le destin m’a mis des bâtons dans les roues parce que j’étais passée direct aux 1000, j’allais trop vite dans mon ascension. En 2021, j’ai gagné le Championnat de France en 1000… Tout vient à point à qui sait attendre.
Qu’est-ce qui te permet d’ailleurs de rester ÀBLOCK!, de ne jamais lâcher ?
Ça, je pense que ça dépend des gens. Je ne suis pas sûre que ce soit quelque chose qui s’apprenne. Il y a un dicton qui dit qu’on ne fait pas d’un âne un cheval de course. Moi, je n’ai jamais douté de mes capacités et, surtout, je me suis toujours donné les moyens. C’est-à-dire qu’au moment où je me suis investie dans un truc, je l’ai fait à 1 000 %. C’est peut-être aussi lié aux aléas de la vie, à ton éducation, tout ça. Moi, j’ai toujours été obligée de me battre. Je n’ai rien eu tout cuit. Je crois que c’est pour ça que j’ai toujours trouvé des solutions à tous les problèmes.
Mon mantra, c’est vraiment : « Il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des solutions. » Après, effectivement, j’ai vu qu’aujourd’hui il y avait des coach mentaux, mais je crois que tu ne refais pas les gens. Moi, depuis toute petite, je suis admirative de Xena la Guerrière. Toutes mes héroïnes étaient des guerrières.
Est-ce que tu étais inspirée par des figures féminines de la moto ?
Trois femmes m’ont beaucoup inspirée. Magali Langlois, une des pionnières en endurance (seule femme pilote des 24H à l’époque en 2008, Ndlr) et qui a vraiment été un moteur pour moi. Je me disais que si elle avait réussi, pourquoi pas moi ? Ce qui est fou, c’est qu’aujourd’hui, j’en ai fait presque plus qu’elle. Lucie Glöckner, une Allemande, première femme au palmarès des 24H motos. Lors d’un de mes relais sur une course, elle était dans une équipe officielle et je me rappelle qu’elle s’était battue comme une guerrière avec des teams de pointe. Bien avant, j’avais vu une fille au Quatar sur une course : elle s’appelait Nina Prinz, une Allemande, qui roulait aussi vite que les hommes. Alors, on n’a pas du tout le même gabarit – là, c’était du 1,80m pour 90 kilos, mais ça m’a boostée aussi.
C’est comment d’ailleurs d’être une femme dans le milieu de la moto ?
Si tu m’avais posé la question il y a quinze ans, je ne t’aurais pas dit la même chose. À l’époque, je n’ai pas très bien vécu cette immersion. Aujourd’hui, ça ne me fait plus rien. Pourquoi ? Parce qu’avant, c’était un milieu beaucoup moins démocratisé et on était encore un peu arriérés sur le sujet des femmes.
Moi, je n’ai pas toujours récolté des propos positifs. Je me souviendrai toujours d’une course, sur le circuit Carole à Paris, où les spectateurs étaient en plein milieu du paddock. Il y avait à peine la place pour les motos de se préparer à partir. Moi, je suis petite, donc même si je suis agile au guidon, mes pieds ne touchent pas terre. Quand j’ai voulu braquer le guidon, à cause de la foule qui s’amoncelait au milieu, il m’a fallu freiner et je suis tombée devant tout le monde… Et j‘ai entendu « Quand on fait 1m20, on ferait mieux d’aller jouer à la poupée ». Moi, ça ne m’a pas du tout flinguée, au contraire, ça m’a confortée dans l’idée de me battre en mode : « Mais il croit vraiment que je ne vais pas y arriver ? ». Ça m’a donné une force supplémentaire, ce spectateur qui ne croyait pas un moi. Dans mon for intérieur, je me disais : « Un jour, peut-être que tu verras mon nom sur les écrans et tu te souviendras ».
Sinon, maintenant dans le monde de la moto, il y a beaucoup de femmes et, d’ailleurs, dans l’endurance, elles sont à tous les postes. Tu vas en avoir en cuisine certes, mais t’en as aux pneus, dans les cabines de panneautage, comme mécaniciennes, etc. Dans les teams, ensuite, il n’y a pas autant de femmes que d’hommes mais, franchement, on n’est pas loin de la parité. Après c’est certain que, encore aujourd’hui, beaucoup de femmes qui ont les compétences ne viennent pas dans ce monde-là, par peur d’être jugée ou par manque de confiance en elles.
Tu détiens le record féminin de participation aux 24 Heures du Mans, est-ce que tu as envie d’ouvrir des voies pour les futures femmes pilotes ?
En fait, je me suis construite seule et, aujourd’hui, je pense que celles qui vont y arriver, c’est celles qui se construiront seules. J’avoue que j’ai beaucoup de mal avec cette nouvelle tendance de certaines jeunes femmes pilotes à faire beaucoup de vues sur les réseaux sociaux et donc à décrocher des sponsors mais qui n’avancent pas un caramel. Ce ne sont pas mes valeurs car j’ai l’impression qu’elles roulent pour les mauvaises raisons. Je suis encore de la vieille école qui ne prône que la performance. Pour moi, quand tu pratiques un sport, peu importe que tu sois beau, moche, gros, mince. On s’en fout parce que si t’es le meilleur, t’es le meilleur. Je pense que les réseaux, ça pourrit beaucoup de choses. Après, je suis quand même obligée d’y rester pour la moto. Mais si j’arrête demain, je supprime tout et je vais vivre dans la forêt. Après, si mon parcours peut aider, tant mieux.
Et justement, comment tu finances tes entraînements et tes courses ?
J’ai des partenaires qui nous suivent depuis longtemps maintenant. Mais cette recherche de sponsors et de financements pour chaque saison, c’est clairement un job. Je suis beaucoup allée démarcher des entreprises. À la base, tous ceux que j’ai réussi à accrocher étaient des gens qui aimaient les sports mécaniques ou le côté atypique d’aider une nenette dans ce milieu-là. Et après, ça vient éventuellement avec mes performances et ce que je dégage comme énergie, comme valeurs. Il y a aussi le bouche-à-oreille. Mais bon, moi, dès le départ, j’y suis allée au culot.
Tu as créé ton team avec ton compagnon, Gabin, en avril 2024 – AG Racing Team #241. Quel est votre objectif ?
Je dirais qu’aujourd’hui, on l’a rempli ! Celui de faire un Top 10 en SuperStock et un Top 15 au général. Ça a été le cas au Bol d’or cette année, en 2025. Après, on en aurait un deuxième mais il est incompatible avec nos capacités financières. Actuellement, on est un peu dans une impasse. Si on veut aller chercher l’objectif d’après, c’est un podium en SuperStock et on n’a clairement pas assez d’argent. On doit changer de motos, mais on n’a réussi à en vendre qu’une seule. On est dans l’attente.
Quels ont été vos accomplissements de la saison 2025 avec le team ?
L’année 2025 avait très mal commencé. Aux 24 heures du Mans, on pensait faire un très bon résultat mais la météo a été apocalyptique, il pleuvait des cordes, il faisait très froid. Pendant les trois premières heures, on a réussi à remonter dans le classement mais l’une de nos coéquipières, Mélodie, a fait une chute qui a mis un terme à notre course. La moto était coupée en deux. Donc là, au niveau moral, ça te plombe. En plus, financièrement et côté logistique, c’était hyper compliqué, il fallait remonter intégralement une moto. Mais on s’est battus comme des lions.
Finalement, on est revenus aux 8 heures de Spa. Rebelote : pluie sur la piste de départ, mais on va au bout de la course. Problème : on ne fait pas le résultat escompté. Je relativise énormément avec Gabin en lui montrant qu’on revient de très loin. On a même été félicités par d’autres teams d’avoir réussi à se remobiliser sur tous les plans en si peu de temps. On a quand même remonté une moto à deux en moins de deux mois, dans notre garage, et seulement le week-end, parce que la semaine, on bosse. Le résultat sportif était pas ouf mais le résultat humain était juste dinguissime. Ça a redonné du baume au cœur à tout le monde et ça a enclenché la suite du championnat qui a été notre meilleur résultat sportif en mondial d’endurance. Donc, tout est bien qui finit bien. Encore une fois, je me dis que c’est le destin qui vérifiait qu’on avait vraiment envie de se battre.
Et au fait, tu n’as jamais eu peur en roulant ?
Jamais pour moi, mais plusieurs fois pour Gab, mon compagnon. Il finit toujours aux urgences et on est toujours entre la limite de la vie et la mort. Parfois, je lui propose même qu’on fasse autre chose. Aujourd’hui, il se consacre beaucoup au triathlon et moi je m’y mets aussi du coup. Il a l’objectif de faire un Ironman. Je trouve ça chouette parce que c’est un dépassement de soi qui est juste extraordinaire. Comme dans la moto !
Et que vous réserve l’avenir ?
Pour le moment, pour 2026, il n’y a pas vraiment de projet. Parce qu’on ne peut pas enclencher un projet si on n’a pas d’argent et pas de moto. Après, pour moi, avec Gabin, on est déjà allés au-delà de mes espérances. Mon rêve a été réalisé. Et puis, peut-être que les étoiles s’alignent pour qu’on pense à notre vie personnelle. Je ne souhaite pas arrêter la moto mais j’ai déjà vécu tellement de belles années que si, demain, ça s’arrête, je n’aurais aucun regret. Parce qu’on est allés au bout de tout ce qu’on pouvait faire avec nos moyens. On ne sera pas inactifs en tout cas : triathlon, trail ou snowboard sont au programme !
Le sport, en général, est donc essentiel dans ta vie ?
Oui, parce que ça fait du bien au moral, c’est une espèce d’apaisement. En fait, moi, dans mon boulot – je suis assistante de direction dans un garage automobile, je suis très sollicitée sur le plan mental, donc j’ai besoin de la bascule avec la fatigue physique pour ne pas péter les plombs. Quand je fais du sport, ça recharge mes batteries.
- Le palmarès d’Amandine Creusot : Championne de france d’endurance 600cc en 2015, Championne de france d’endurance 1000cc à la française en 2021, 24h de Barcelone 3 participations 3 podium, 2013 1ere 600cc, 2014 2eme 600cc, 2015 1ere 600cc, Bol d’or 6 participations, 24h du Mans 7 participations, 24h de Spa 2 participations.
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Ouverture ©Amandine Creusot
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