Adjudante Virginie V. : « Le sport, ce n’est pas loin d’être ma vie. »Adepte de cross-country et duathlon, militaire parachutiste, 31 ans

Adjudante Virginie V. : « Le sport, ce n’est pas loin d’être ma vie. »
Elle est basée à Carcassonne, dans le Languedoc. Au sein du 3e RPIMa ou 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine, une unité d’élite de la 11e brigade parachutistes, elle n’a qu’un but : tenir physiquement la distance. Le sport est pour Virginie autant une respiration essentielle dans son quotidien qu’un moyen de se faire respecter dans un monde d’hommes. Vice-championne de cross-country de l’armée de terre, cette adjudante-là n’est pas prête à quitter le terrain.

Propos recueillis par Valérie Domain

Publié le 19 avril 2022 à 8h48, mis à jour le 21 mai 2022 à 10h48

« Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours fait du sport. Pas à haut niveau, mais constamment. Du handball, de la gym, du vélo, je courrais pour le plaisir, je marchais aussi. Je vivais dans l’Ariège où une tante, qui pratiquait le cyclisme sur route à haut niveau, m’emmenait faire de la randonnée, j’adorais ça. J’avais 8 ans et la montagne, je la parcourais à pied, à vélo…

Pourtant, je viens d’une famille modeste, pas très sportive, mais j’avais besoin de bouger, ça me permettait de m’évader. J’étais à l’école, au lycée, lorsque j’ai su que j’entrerais dans l’armée. On se demande alors ce qu’on va faire comme métier et je me suis dit : cohésion, sport, patriotisme, trois mots qui me définissent bien.

Et puis, je n’étais pas faite pour rester derrière un bureau.

©3eRPIMa

Les campagnes de recrutement pour servir dans l’armée m’ont tout de suite plu : les militaires se tirent la bourre, ils ont un côté “tout ce que je fais, je le fais à fond“, ce challenge permanent dans le but de gagner, de se dépasser. Je voulais jouer la gagne, par fierté, certes, mais en faisant les choses avec le cœur.

Je suis entrée à L’École nationale des sous-officiers d’active à Saint-Maixent puis au Centre national d’entraînement commando, à Mont-Louis, dans les Pyrénées-Orientales.

Dans ce centre, je me suis régalée ! On multipliait les stages : brevet d’alpinisme militaire, brevet de skieur militaire, brevet parachutiste et activités commando avec des parcours d’obstacles, des pistes d’audace (exercices d’escalade, entraînements en milieu humide, de jour comme de nuit… le tout visant à lutter contre ses peurs, Ndlr), mise en œuvre d’explosifs, techniques de combat, techniques d’optimisation du potentiel… Il faut aimer se faire mal et c’est mon cas !

©3eRPIMa

J’ai ensuite été mutée dans un Groupement de soutien de la base de défense de Carcassonne. C’était différent, il y avait moins d’action. Mais je poursuivais mon sport. Où que je sois, je continue le sport. Le militaire se doit de s’entretenir un minimum.

En 2016. J’ai rejoint le 3e RPIMa, toujours à Carcassonne. Un régiment para avec des critères exigeants, des tests d’entrée pour devenir parachutiste. Physiquement, il faut tenir la distance, mais c’est possible, la preuve. Il faut du physique, c’est vrai, mais le mental joue beaucoup. Quand les jambes ne suivent plus, la tête fait le reste.

©3eRPIMa

Je m’y sens à ma place. Nous sommes peu de femmes ici, mais le regard des hommes n’est pas un problème. Je pense, qu’à un moment donné, un homme sera plus fort qu’une femme, même si je cours plus vite que certains, la nature est ainsi. Mais les hommes voient tout de suite si vous mettez du votre : celle qui montre qu’elle se dépassent, celle qui est dans l’effort.

Je me rappelle avoir fait des marches pendant mes formations, où les hommes arrêtaient avant moi. C’est une fierté personnelle, c’est vrai. Pour eux, pour leur égo, la pilule est parfois dure à faire passer, mais, derrière, c’est du respect.

Un respect qui vient des deux mondes : militaire et sportif. Le sport aide à être respecté, le résultat impose le tempo. Il y a quelques filles, ici, quand elles mettent des gants de boxe, les mecs viennent les voir sur le ring et les regardent au début comme deux femmes qui se battent, et s’aperçoivent très vite, que ce n’est pas que ça, que ça tape dur.

©3eRPIMa

Je suis plutôt réservée de nature mais, un jour, d’autres coureuses sont venues me voir, dans l’idée de se préparer pour les championnats sportifs militaires par équipe. Ça a « matché » et j’ai dit ok.

Au programme, séance de sport tous les matins, entre 8h et 9h30. On s’entraîne ensemble, pour notre unité. Peu importe le grade. On est en mode sport, la hiérarchie n’est pas un problème.

En 2018, nous avons été Championnes de France militaire par équipe de cross-country armée de Terre et interarmées en 2019. Cette année-là, j’ai aussi décroché la 3e place au championnat de France militaire de duathlon et j’ai été vice-championne armée de Terre de cross-country individuelle.

C’est singulier, on ne court pas face à des athlètes de haut niveau, même s’il y en a certaines. Mais j’en suis fière !

©3eRPIMa

Et puis, il y a les sauts en parachute : j’ai passé le brevet de chuteur militaire. C’est un mode de vie d’être parachutiste. Tout le monde ne saute pas d’un avion en vol. C’est une grande famille, les paras, on est là dans les bons et les mauvais moments : cohésion, dépassement, il faut le vivre !

Mon compagnon est également militaire, ex-parachutiste. Mais on ne fait pas forcément du sport en couple car on pratique des disciplines différentes ou alors en mode détente, même s’il arrive qu’on se challenge, je crois qu’on ne sait pas faire sans ça !

À travers le sport, on en apprend beaucoup sur soi-même, sur nos propres limites. Après treize ans de service, je connais mieux mon corps, c’est aujourd’hui que je fais mes meilleures performances.

©3eRPIMa

Je vais bientôt rejoindre un Groupement de soutien du Gabon. J’espère, là-bas, pouvoir pratiquer mon sport comme ici, participer à quelques compétitions. Je vais emmener le vélo, on va chasser, pratiquer la pêche sous-marine. J’aime l’idée de me renouveler dans le sport. Ça permet de se découvrir.

J’ai déjà fait l’Afrique et je sais qu’il faut le temps de s’adapter au climat, mais ça va le faire, le sport, c’est pas loin d’être ma vie. »

Ouverture ©3eRPIMa

Elles aussi sont inspirantes...

Guila Clara Kessous : « En montant à la corde, j'ai osé faire ce qui me freinait depuis des années. »

Guila Clara Kessous : « En montant à la corde, j’ai osé faire ce qui me freinait depuis des années. »

Formée à Harvard et par le théâtre, elle a plusieurs cordes à son art. Guila Clara Kessous, entrepreneure diplomatique, s’engage depuis plus de quinze ans pour les droits des femmes. Et voilà que le sport entre dans la danse en un geste politico-artistique : grimper à la corde. Une ascension symbolique, une allégorie de la difficulté des femmes à s’élever dans la société. Prenons de la hauteur.

Lire plus »
Lison Bornot : « Je veux mettre en avant l’Ultimate. C’est lui qui m’anime. »

Lison Bornot : « Je veux mettre en avant l’Ultimate. C’est lui qui m’anime. »

Avec sa sœur Éva, elle truste les premières places depuis 2015 en Ultimate. Membre essentiel de l’équipe de France, Lison Bornot est Championne d’Europe outdoor 2023 et championne du monde d’Ultimate sur sable 2023. La voici maintenant en piste pour les World Games, l’antichambre des JO, qui se déroulent en Chine, du 7 au 17 août 2025. Témoignage d’une fille pétillante devenue l’une des ambassadrices françaises d’un sport trop peu connu.

Lire plus »
Diane Servettaz : « Avec le vélo, j’ai compris que même si ça flanche côté mental, t’en as encore sous la pédale. »

Diane Servettaz : « Avec le vélo, j’ai compris que même si ça flanche côté mental, t’en as encore sous la pédale. »

En à peine trois ans, cette passionnée de vélo a décroché un podium sur 500 kilomètres et bouclé sa première course d’ultra, la fameuse BikingMan, en tant que première féminine. Carburant aux défis, pédalant sans relâche, surmontant tous les obstacles grâce à un mental d’acier, la Savoyarde n’a pas fini d’enfiler les kilomètres dans ce sport de l’extrême. En piste !

Lire plus »
Emelyne Heluin: « Je sais pourquoi je cours, pourquoi je lutte. »

Emelyne Heluin : « Je sais pourquoi je cours, pourquoi je lutte. »

Gymnaste jusqu’à son adolescence, Emelyne Heluin a dû raccrocher le justaucorps après une prise de poids inexpliquée et d’autres symptômes invalidants. Diagnostiquée d’une maladie endocrinienne chronique et évolutive, le SOPK, à l’âge de 17 ans, elle erre pendant des années entre perte de confiance en elle et détresse psychologique avant de retrouver le chemin du sport comme outil de santé. Ce sera la marche, puis la course à pied jusqu’à se lancer sur des marathons.

Lire plus »

Vous aimerez aussi…

Sophie Carpentier

Sophie Carpentier : « Dans la médecine comme dans le sport, il faut que les femmes y aillent ! »

Médecin de l’équipe féminine de rugby Rouen, elle a aussi été celui de l’équipe de France de rugby féminin. Militante du sport santé, Sophie Carpentier n’a pas hésité, il y a quelques années, à se spécialiser dans le sport pour apporter à son quotidien médical un souffle nouveau. Et de prouver que les femmes ont toute leur place dans un métier encore trop souvent conjugué au masculin.

Lire plus »
Motardes, vous avez un Bol…d’Or !

Motardes, vous avez un Bol…d’Or !

Le week-end prochain, ça va faire du bruit au circuit Paul Ricard ! Le Bol d’Or reprend la route au Castellet après plus d’un an de restrictions. Sur des dizaines de gars, vous pourrez compter les motardes sur les doigts d’une main. Alors, on les suit plutôt deux fois qu’une !

Lire plus »

Peterson Ceus : « La Gym Rhythmique masculine renvoie une image féminine de l’homme et ce n’est pas bien vu… »

Pour lui, c’est sa gym, sa bataille. Peterson Ceus se bat depuis sept ans pour que la gymnastique rythmique masculine soit reconnue par les instances sportives et devienne discipline olympique. Un combat contre les inégalités de genre qu’il espère mener à terme pour les générations à venir. Rencontre avec un athlète que rien ni personne n’est parvenu à mettre au tapis.

Lire plus »
Manon Herbulot, les JO pour cible

Manon Herbulot, les JO pour cible

À seulement 17 ans, Manon Herbulot fait déjà ses armes aux Jeux Olympiques. Au tir à la carabine, elle affiche un parcours impressionnant et sa qualification aux JO de Paris se présente comme le couronnement d’un travail qui prouve sa maturité.

Lire plus »
Raphaëlle : « La voile m’a aidée à me reconstruire après mon AVC. »

Raphaëlle : « La voile m’a aidée à me reconstruire après mon AVC. »

Elle a su prendre la vague d’une nouvelle naissance grâce à la voile. Suite à un AVC, Raphaëlle avait quasiment perdu sa motricité. Mais il en fallait plus pour qu’elle lâche le sport. Et la voilà qui plonge dans une expérience sportive et humaine : la pratique de la voile avec la Team Jolokia, une asso qui prône l’inclusion par le sport. Une très belle leçon de vie.

Lire plus »
Extreme Cordouan

Cordouan se jette à l’eau !

Propulsé par le vent ou par la pagaie, c’est le premier événement longue distance nautique multi-supports. L’Extrême Cordouan revient ce week-end pour sa 3e édition et trois jours de compétitions exceptionnelles. À vos rames et voiles !

Lire plus »
Il était une fois le water-polo… féminin

Il était une fois le water-polo… féminin

Les 22 et 23 avril, se terminaient les Playoffs du Championnat Elite Féminin de water-polo. À domicile, le champion en titre, Lille, a battu Mulhouse en finale. Hé oui, les poloïstes du LUC Métropole Water-Polo sont championnes de France pour la 9e fois ! Un palmarès impressionnant qui mérite de regarder un peu en arrière… pour se pencher sur l’histoire du water-polo féminin.

Lire plus »
Le questionnaire sportif de…Lil’Viber

Le questionnaire sportif de…Lil’Viber

Le week-end prochain, elle fera vrombir sa bécane au Bol d’Or. Aurélie Hoffmann alias Lil’Viber formera avec sa copine des circuits, Patricia Audebert, l’unique team 100 % féminine de l’événement du Castellet pour la course du Bol d’Or Classic. Entre deux entraînements sur l’asphalte, elle répond à notre petit questionnaire de Proust à la sauce ÀBLOCK!

Lire plus »
Bethanie Makett-Sands

Le Best-of ÀBLOCK! de la semaine

Une aviatrice américaine au sacré culot, une joueuse de tennis aussi colorée que ses médailles (Bethanie Makett-Sands, notre photo), une pionnière de la nage qui défiait les eaux en 1900, une autre, toute jeune, sacrée championne de natation, une chronique sur le sport féminin, le fameux 5 infos sur une tenniswoman aux allures de Grand Chelem, une question qui tue, une initiative qui rassemble et un peu d’actu avec l’Euro Basket 2021, vous n’avez qu’à demander, c’est sur ÀBLOCK!

Lire plus »
Margaux Hubeny

Margaux Hubeny : « Sur ma moto, je n’ai pas peur, je me sens vivre ! »

Équipements et moto rose, comme un étendard, elle tient à démontrer que, sur la piste, les femmes aussi font surchauffer le moteur ! En 2019, cette douanière de 23 ans rafle le titre de Championne de France 600cc lors de la Women’s Cup. Surnommée « l’extraterrestre », Margaux Hubeny est une autodidacte du deux roues. Cette victoire est le premier titre d’une longue série pour une prodige de la piste qui n’est pas prête d’en sortir. Accrochez-vous, ça va secouer !

Lire plus »

Recherche

Soyez ÀBLOCK!

Abonnez-vous à la newsletter

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner