Camille Depuiset « L'équipe de France n'est pas un dû, je vais me donner à fond dans cet Euro. »

Camille Depuiset, « Il n'y a rien sans travail, c'est forcément la base de tout. »
Elle a conscience de sa chance. Mais elle a travaillé pour ça. Sélectionnée à la dernière minute pour l'Euro 2022 de handball, la jeune gardienne messine ne cesse de progresser. Reconnue comme une des meilleures gardiennes de première division française, Camille Depuiset intègre néanmoins le groupe de l'équipe de France avec humilité et soif d'apprendre.

Par Alexandre Hozé

Publié le 08 novembre 2022 à 9h55, mis à jour le 08 novembre 2022 à 10h10

Avant le handball, tu t’es essayée à d’autres sports ? 

Non, il n’y a toujours eu que le hand pour moi, je ne suis jamais allée voir ailleurs. 

Pourquoi ? Ta famille était fan de la discipline ? 

Mon père en a fait, mais il ne m’a jamais forcée à rien. Je voulais pratiquer un sport quand j’étais petite, j’ai participé à un forum et je me suis naturellement tournée vers le hand. Et j’y suis restée ! 

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Gardienne de but, c’est aussi apparu comme une évidence dès le début ? 

Non, c’est à partir du moment où il fallait choisir son poste, mon équipe avait besoin d’une gardienne…

Au début, ça tournait pas mal pour voir comment tout le monde s’en sortait, puis il s’est avéré que je ne me débrouillais pas trop mal et que ça me plaisait.

Depuis mes treize ans, je suis donc dans les cages ! 

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Et tu t’es fait remarquer ! Tu as intégré le Pôle espoir de Dijon, puis le centre de formation de Toulon Saint-Cyr Var Handball… D’après toi, qu’est-ce qui a fait la différence ? Ton mental, tes capacités physiques 

J’ai beaucoup travaillé. Je me suis inspirée d’autres gardiennes, donc beaucoup de répétitions, d’analyses et de préparation aussi.

Ce sont des défis que chaque athlète de haut niveau doit affronter, il faut avoir de l’abnégation, du sérieux, de la rigueur, de l’envie… Il n’y a rien sans travail, c’est forcément la base de tout. 

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Devenir handballeuse professionnelle, ça a toujours été ton projet, ou est-ce que c’est venu plus tard, après tes études supérieures par exemple ? 

J’ai très tôt eu envie d’être handballeuse pro. Pendant mes études, j’étais au centre de formation de Toulon, donc le hand restait mon objectif, tu n’es pas dans ce genre d’organisation pour rigoler.

Quand j’ai intégré le Pôle espoir de Dijon, je savais que c’était ce que je voulais faire. Le centre de formation, c’est vraiment pour devenir professionnelle. 

J’ai tout de même fini mes études, parce qu’une carrière de la sorte, on ne sait jamais vraiment quand ça peut s’arrêter et puis ça ne dure pas toute une vie. Je pense également que c’est important de faire autre chose que du handball, d’avoir plusieurs cordes à son arc dans le cas où cela s’avérerait nécessaire. 

Alors que tu étais encore jeune, tu as quitter la maison familiale pour le centre de formation de Toulon. Comment ça s’est passé ? 

Plutôt bien, et ma famille n’était plus à Dijon à ce moment-là, elle était plus proche de Toulon. Mais de toute façon, quand tu t’engages sur la voie du sport de haut-niveau, ça demande énormément de sacrifices, peu importe l’âge. 

Mais d’un autre côté, ça nous aide dans notre vie personnelle, on est autonome plus vite, on apprend plus tôt à se débrouiller tout seul.

Je pense vraiment que tout ça nous aide à nous forger aussi dans la vie extra-sportive. 

Une fois au centre de formation, tu joues avec l’équipe de Nationale 1, avant de faire tes premiers matchs de première division alors que tu viens d’avoir 18 ans. Comment as-tu vécu cette progression ? 

Au moment de débuter avec les pros, j’avais forcément de l’appréhension, c’est le grand bain ! Mais c’était surtout une superbe chance pour moi de toucher au haut niveau et à la première division. C’était pour ça que j’avais intégré le centre de formation. 

J’ai pu comprendre le niveau d’exigence requis, accumuler un peu d’expérience et aussi voir que c’était possible de jouer dans des équipes de ce statut. Faire ça aussi jeune, c’était vraiment très bien, car quand je suis retournée en Nationale 1, je travaillais encore plus pour retourner dans la première équipe et m’y installer. 

Finalement, je suis partie de Toulon pour avoir plus de temps de jeu, pour jouer en première division et ainsi profiter de ce très haut niveau afin de continuer de progresser. 

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Tu rejoins le club de Bourg-de-Péage en 2019 pour vraiment t’installer au plus haut niveau français. 

Oui, je voulais du temps de jeu en D1, prendre du plaisir à jouer, voir si le projet du haut niveau m’animait toujours. Ma dernière année à Toulon a été compliquée, donc c’était logique pour moi d’aller voir ailleurs, de partir sur quelque chose de nouveau, de m’intégrer dans un collectif qui me permettrait de donner le meilleur de moi-même. 

Donc, Bourg-de-Péage a clairement été le bon choix pour moi. Le club avait des ambitions mais j’ai eu ma chance, ce passage m’a vraiment enrichie. 

Et il t’a permis de montrer que tu avais toute ta place au très haut niveau, tu t’es imposée comme une des meilleures gardiennes de la première division française…

Oui, ça a pris un peu de temps, il y a eu la Covid, puis je me suis blessée au genou, je suis revenue et c’est vrai que la saison dernière était très bien. J’ai joué les matchs, j’ai réussi à apporter ce qu’il fallait à l’équipe. 

Ces trois années à Bourg-de-Péage ont été extrêmement enrichissantes, j’ai appris sur beaucoup de choses, aussi bien en tant qu’athlète qu’en tant que femme et que personne.

Les moments hauts comme les moments bas m’ont permis d’avancer et de signer à Metz, donc de goûter à la Ligue des Champions, ce qui était un rêve. 

Mon passage à Bourg-de-Péage restera très important, aussi bien dans ma carrière sportive que dans ma vie. 

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Tu as aussi été confrontée à une grosse blessure suivie d’une longue rééducation durant ton passage à Bourg-de-Péage. Tu as beaucoup témoigné à ce sujet, c’était important pour toi de montrer les dessous de telles épreuves ? 

Oui, très important même. Malheureusement, une blessure de la sorte fait souvent partie de la carrière d’un sportif, il y en même de plus en plus aujourd’hui, avec le nombre de matchs qui augmente, notamment. 

Ça fait partie du jeu et j’avais envie de montrer que, même blessée, je continuais de travailler pour revenir au meilleur niveau, que je gardais ma motivation.

Et témoigner peut aider celles et ceux qui vivent ces mêmes situations. Je voulais vraiment montrer qu’en avançant jour après jour, une blessure reste juste une parenthèse. 

Après cette blessure, tu réalises une très grosse saison 2021-2022, et cet été tu signes avec Metz, un des si ce n’est LE meilleur club français, aussi candidat très sérieux en Ligue des Champions… Tu as dit que c’était un rêve d’enfant de pouvoir jouer dans un tel club, comment se passe ce changement de statut ? 

Bien, c’est aussi pour ça que j’ai signé à Metz, pour avoir ce niveau d’exigence et changer d’univers en quelque sorte.

C’est ce que je voulais, je suis allée dans ce club pour jouer en Ligue des Champions, toucher au meilleur niveau européen, progresser et accumuler le plus d’expérience possible. 

C’est un choix qui forcément me demande encore plus de travail pour m’adapter à ce nouvel environnement et ainsi mettre tout ce qu’il faut sur la table pour que ça marche. 

En tout cas, j’ai hâte de voir ce que la suite de la saison nous réserve, je compte bien continuer mon intégration dans le projet du club et ainsi profiter le plus possible de cette expérience. 

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Ton début de saison n’est d’ailleurs pas passé inaperçu. Pour pallier à l’absence de Laura Glauser, Olivier Krumbholz t’a convoquée pour cet Euro. Tu rejoins ainsi, dans les cages, Cléopâtre Darleux et Floriane André. Comment s’est passée cette sélection de dernière minute ? 

Oui, c’est vrai que ça a été un petit peu le rush, ce n’est jamais facile d’arriver dans un groupe dans ces conditions. Je suis là parce que Laura s’est malheureusement blessée et est donc forfait. Ce n’est clairement pas simple, d’autant plus que c’est une joueuse et une fille que j’adore et admire beaucoup. 

Tout est allé très vite, je n’ai pas eu le temps de cogiter, mais ça reste une superbe opportunité évidemment. Il faut que j’arrive à m’adapter rapidement pour emmagasiner tout ce qu’il y a de positif à retenir. 

Ma première semaine dans ce groupe a été très riche et intense, l’équipe est top. Donc, cette chance de faire ma première compétition internationale avec l’équipe de France A, il faut vraiment que j’en profite à fond.

Peu importe ce qu’il se passe, c’est génial de faire partie de ça et de vivre tous ces moments avec ce groupe. J’espère apporter ce je peux à l’équipe et profiter un maximum. 

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Tu as donc connu ta première sélection lors du match de préparation contre la Pologne, tu as arrêté un penalty… Tout ça facilite ton intégration dans le groupe 

Oui, je pense que c’était important de faire ce premier match et j’espère évidemment que ce ne sera pas le dernier.

Les filles m’ont bien accueillie, elles ont été super contentes pour moi quand j’ai fait mon premier arrêt… Donc, j’espère continuer sur cette voie, apporter ce que je peux à l’entraînement, en match également si j’ai la possibilité de jouer… 

Je prends chaque jour comme il vient, en essayant de faire du mieux possible et en prenant plaisir avec toutes ces joueuses incroyables autour de moi. 

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Et la mentalité du groupe, comment est-elle ? Les Bleues débarquent pour tout casser ? 

Bien sûr, l’équipe de France vise toujours le sommet lors de championnats internationaux. Même avec plusieurs nouvelles têtes, un groupe qui a donc évolué, les objectifs restent très élevés. Il faut que tout se mette en place, sur et en-dehors du terrain, mais le groupe est déterminé à continuer sur la lancée des derniers résultats de cette équipe de France. 

Et je ne suis pas inquiète pour ça, il n’y a que des filles superbes qui sont au service du collectif, donc j’ai hâte de voir ce que ça va donner. 

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Tu l’as dit, les filles performent depuis pas mal de temps sur les terrains. Est-ce que le handball a bien suivi cette dynamique ou y-a-t-il encore des efforts à fournir pour plus d’égalité hommes-femmes dans ce sport ? 

Je ne pense pas qu’il ne s’agisse que du handball, c’est toute la société qui doit continuer d’avancer dans ce sens.

Mais pour rester à notre échelle, si on compare par exemple la médiatisation hommes-femmes, même s’il y a eu des efforts récemment, il y a encore du chemin à faire. Que ce soit en club ou même pour l’équipe nationale. 

Nous, ce que l’on peut faire à ce sujet, c’est continuer de performer et d’en parler. 

Après, il y a aussi du positif. Au niveau des jeunes, la fédération accompagne au mieux pour perpétuer les grosses performances des équipes de France…

Je pense que la structure est très solide, bien organisée et avance dans la bonne direction pour que ces problèmes d’inégalité soient résolus. 

Et pour le futur, quels peuvent être tes objectifs ? Faire partie du groupe de l’équipe de France pour les Jeux Olympiques de 2024 à domicile ? 

Je ne veux pas avoir la prétention de m’imposer de la sorte. Déjà, pour cet Euro, ce n’était pas prévu que je sois présente. Je vais tout faire pour montrer au groupe que je suis bien là et ce que je peux apporter, et on verra par la suite. 

Je suis déjà super contente de faire cette première compétition, c’est une opportunité que certaines joueuses n’ont jamais ! 

Je vais continuer de travailler fort en club pour peut-être avoir la chance d’être de nouveau sélectionnée. L’équipe de France n’est pas un dû, il faut à chaque fois remettre les ingrédients nécessaires pour ensuite avoir la fierté de représenter son pays.

Donc, je ne vais pas trop me projeter et je vais prendre tout ce je peux de cet Euro. 

Ouverture ©LFH

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