Sur ton compte Instagram, ce qui saute aux yeux instantanément c’est la mention « I AM IRONMAN ». Quand et pourquoi as-tu eu le déclic pour te mettre au triathlon ?
À la vingtaine, j’ai eu un passage un peu compliqué. Je n’aimais pas trop ma vie à l’école et je n’étais pas très bien dans ma peau. J’ai commencé à me mettre au sport, mais j’en faisais trois heures maximum par semaine histoire de garder la forme et de me réconcilier avec moi-même.
Je faisais surtout du body attack en salle, c’était assez cardio ! J’avais besoin de me vider la tête et d’aimer mon corps.
Et on t’a lancé un défi…
Un jour, un gentil garçon – qui est depuis devenu mon compagnon – m’a lancé un défi : « Tu n’es pas chiche de faire un dix kilomètres ! »
J’avais jamais couru de ma vie mais j’ai dit d’accord. J’avais donc un mois et demi pour me préparer à cette course… et j’ai fais mon premier 10 kilomètres en 53 minutes ! Ça a été hyper dur, j’arrivais plus à respirer ni marcher, mais une fille m’a dit « Non, ne t’arrête pas, continue ! » et je suis repartie.
Je me suis accrochée comme jamais ! Le lendemain, j’avais des courbatures partout mais j’étais super heureuse. C’est à partir de cette course que j’ai découvert l’adrénaline que procurait le passage des lignes d’arrivée.
Après ce déclic, j’en ai refait un autre puis je suis passée aux 20 km de Paris jusqu’au jour où je me suis sentie prête à faire le marathon de Paris. C’était il y’a trois ans.
J’avais comme objectif de le faire en moins de 4 heures même si je ne savais absolument pas ce que je valais ; je n’avais même pas fait de plan d’entraînement.
J’ai réussi et, pourtant, le lendemain matin, j’étais déçue. Je pensais que ça allait être un truc de fou qui allait changer ma vie, mais non. J’avais besoin d’un challenge encore plus incroyable !
Mon copain a eu l’idée de faire le triathlon de Paris qui était… deux mois plus tard. Je n’avais pas nagé depuis sept ans et je n’avais pas de vélo. Mais on s’est mis là-dedans à deux et ça a fonctionné !
Puis, début 2018, j’ai fait mon premier triathlon longue distance.
Ton parcours de sportive se construit d’un challenge à l’autre. À quel moment l’Ironman a fait irruption dans ton esprit de battante ?
Quand j’ai commencé le triathlon. Je savais que je le tenterais un jour, mais je ne voulais surtout pas me lancer dans l’aventure sans me sentir prête.
Et, en 2018, j’ai fait le triathlon longue distance de Cannes. Ça a été horrible. La natation s’est très mal passée et je n’étais pas du tout prête à faire d’aussi longues distances en vélo. Seule la course à pied a été un bonheur car c’était mon terrain de jeu.
Le fait de finir ce triathlon a donc été incroyable car dès la natation, je pensais abandonner.
Comment fais-tu pour ne pas abandonner malgré la douleur et les difficultés ?
Pour Cannes, j’ai failli m’étouffer dans l’eau. On m’a carrément nagée dessus et c’est à ce moment précis que je me suis dit : « Tu es là, tu ne vas pas abandonner maintenant, c’est ridicule. Fais ce que tu peux ! »
Un mois plus tard, j’ai pris le départ du Half Ironman d’Aix-en-Provence sous un temps apocalyptique : il a grêlé en plein mois de mai ! Je me suis retrouvée en hypothermie sur mon vélo et j’étais incapable de freiner en haut d’une montée. J’ai donc fait le choix d’abandonner la course parce que j’avais l’impression que j’allais m’évanouir et tomber. Ça me paraissait beaucoup trop dangereux.
J’ai eu beaucoup de mal à me relever de cet abandon. Je me suis sentie un peu nulle, je me suis remise en question alors que c’était pour ma sécurité. Mais j’ai eu la chance de me remettre en selle très vite avec le Half Ironman de Vichy. Et j’ai pris ma revanche sur moi-même ! Ça m’était impossible de rester sur cet échec.
Après le Half Ironman, comment as-tu pu relever le défi de l’Ironman ?
L’élément très important a été d’acquérir un nouveau vélo. C’est une amie qui m’a vendu le sien, un vélo léger, en carbone. Ça s’est tellement bien passé à Vichy que ça a été le déclic pour mon inscription l’année d’après à l’Ironman en entier. Pour la première fois de ma vie, je n’avais plus de crises de panique à vélo.
Je me suis dit : « Ça y est, l’Ironman, c’est pour moi ». J’ai pris un coach et je me suis entraînée comme une folle.
Heureusement que mon copain me comprend car c’est vrai que pendant la préparation Ironman, on lâche un peu son entourage et ses amis. Mais je les avais prévenus que c’était la course de ma vie et que j’avais vraiment envie de la réussir.
Qu’est-ce qui se passe dans ta tête pendant une telle course ?
Pendant toute ma course, je pensais aux personnes qui étaient derrière moi, ça me motivait à avancer, et puis j’étais super heureuse à chaque fois que je passais un check point. Je pensais : « Regardez-moi les gars, je suis en train de faire un truc de fou ! ». Je me disais que je n’avais pas donné huit mois de ma vie pour rien. J’y arrivais et je me sentais bien !
Ce qui me permettait de tenir aussi, c’était de savoir que dans 30, 20, 10 kilomètres, j’allais voir mes parents et mon copain, venus pour m’encourager.
L’avantage avec l’Ironman, c’est qu’il y a des points de repère car il y a trois sports. Comme s’il y avait trois épreuves différentes. Psychologiquement, c’est plus simple à encaisser qu’une seule épreuve.
Après cette « folie », on a envie d’un challenge encore plus dingue, non ?
Eh bien, non en fait. Alors, soit c’est parce que je savais que, malgré tout, ça n’allait pas révolutionner ma vie, ou soit, tout simplement, que je n’ai pas le temps de faire plus que l’Ironman.
C’est beaucoup trop chronophage, ça m’a pris huit mois d’entraînement intensif. J’ai souvent pleuré en entraînement, c’était très éprouvant, et il faut faire beaucoup de sacrifices.
Je préfère pour l’instant m’améliorer sur des plus petites distances, faire en sorte d’être plus rapide et explosive.
Comment s’organise ta vie sportive aujourd’hui ?
J’ai minimum deux séances par sport par semaine, donc minimum 6 heures, sachant que le vélo c’est plutôt des sorties de 3 heures. Donc on monte rapidement à huit ou dix heures de sport par semaine.
C’est un travail de titan, tout est millimétré, il ne faut pas avoir peur de se réveiller à 6 heures du matin pour s’entraîner.
Où puises-tu cette détermination à toute épreuve ?
C’est un mode de vie plus qu’autre chose, c’est une passion. Et surtout, je me dis que si j’abandonne, je vais le regretter et à quoi bon ?
Si j’ai mieux à faire, évidemment, je peux annuler un entraînement. Si c’est la flemme, je ne vois pas l’intérêt d’arrêter sauf si j’ai mal.
Le sport, ça t’apporte quoi, c’est important pour toi en tant que femme ?
Je suis un minuscule gabarit : je mesure 1,60m et je ne dépasse pas les 44 kilos… Donc ça me plaît de pouvoir dire : « Même si j’ai l’air d’être une enfant, d’être toute petite et toute frêle, je peux t’enquiller un Ironman ! »
Aujourd’hui, j’ai un coach et j’avoue que ça aide beaucoup pour la motivation. On ne se pose pas de questions. On suit un planning.
Mais il faut quand même garder en tête l’idée du « sport plaisir » ! Je fais du sport parce que ça m’en apporte.
Le sentiment d’appartenir à une communauté, c’est essentiel dans ta pratique ? Tu partages beaucoup de ton quotidien sportif sur ton compte Instagram et ton blog…
Ça me permet personnellement de mettre sur papier tout ce que je ressens et ma communauté m’apporte beaucoup par ses retours, les discussions qu’on peut avoir.
Ça permet de savoir qu’on n’est pas seuls quand on a des doutes. On se tire vers le haut. Quand on fait des courses, on retrouve des sportifs ou des gens qui nous encouragent.
À Zurich pour l’Ironman, certains ont crié mon nom « Petit Goûter ! » sur le bord de la route. Je n’aurais jamais imaginé ça !
La motivation sportive selon Maud
« Il ne faut pas commencer en se fixant des objectifs trop élevés et il faut trouver le sport qui nous fait vibrer. Il faut commencer par étape pour apprendre à aimer le sport et ne pas subir dès le début. Et il faut rester constant dans sa pratique.
Quand c’est dur, ma devise de sportive est de me répéter en boucle dans ma tête : « Entraînement difficile, course facile ». »
L’Ironman, une course de wonder (wo)man
La traduction française de cette épreuve de triathlon longue distance – 226 kilomètres, soit la course la plus longue du monde – donne immédiatement la couleur… « L’Homme de fer » doit pouvoir enchaîner trois épreuves sportives de haut vol.
Au top départ, enfiler sa combinaison pour nager sur 3,8 kilomètres, continuer en pédalant pendant 180,2 kilomètres et atteindre la ligne d’arrivée à pied après un marathon de 42, 195 kilomètres.
Créée en 1978 à Hawaï par un commandant de la Navy qui proposa aux meilleurs athlètes nageurs, cyclistes et coureurs de mesurer la difficulté de leur sport dans un défi global, l’Ironman a pullulé à travers le monde.
Désormais une marque déposée, l’Ironman est la propriété de la World Triathlon Corporation qui organise une quarantaine de courses qualificatives sur les six continents pour le Championnat du monde qui a lieu à Hawaï tous les ans.
Amateur et professionnel, homme et femme, tout sportif chevronné et motivé peut y participer. Le tout est de garder en tête la devise originelle : « Tout est possible » !