À l’image d’une Simone Biles, championne avant-gardiste de la gymnastique, Surya Bonaly marqua le monde du patinage artistique dans les années 1990 de ses prouesses interdites. La multi championne de France et d’Europe et vice-championne du monde par trois fois, a toujours voulu briser la glace des conventions pour faire évoluer son sport, au grand dam des juges, mais pour le plus grand plaisir du public. Ou comment devenir une Reine des glaces en 5 (r)évolutions !
Par Claire Bonnot
Publié le 21 mars 2021 à 17h10, mis à jour le 29 juillet 2021 à 13h06
1. Avoir la puissance d’une gymnaste
Sportive douée, précoce, la petite Surya, née à Nice en 1973, se prend de passion pour la gym dès l’âge de 4 ans. Elle s’offrira un titre de championne du monde espoirs de tumbling (discipline de gymnastique acrobatique) et de vice-championne du monde senior par équipe, en 1986. Elle a 13 ans.
« C’est une discipline spectaculaire. Elle adorait ça », confiait son père. Un entraînement de haut vol qui la prépare à sa seconde carrière, le patinage artistique, qu’elle aime plus que tout et avec lequel elle devient membre de l’Équipe de France en 1988.
Sa mère adoptive, professeure d’éducation physique, l’avait mise sur les patins à l’âge de 2 ans, le temps que la petite patiente pendant ses cours de sport.
La gym offre à Surya Bonaly une musculature et un avantage sur la glace que n’ont pas les autres patineuses : « Surya était déjà une athlète confirmée quand elle a commencé à patiner, analyse Scott Hamilton, médaillé d’or aux Jeux de Sarajevo dans Losers, la série documentaire de Netflix. Elle était championne du monde de tumbling. Elle avait déjà le physique, la détente, l’élévation, le sens de la rotation, c’était extraordinaire. »
Un corps d’athlète à l’impulsion jamais vu qui diffère de la finesse des « ice queens » de l’époque et qui fera à la fois sa grandeur et sa décadence.
La « Bonaly », comme on la surnommera ensuite, brise la glace des standards du patinage : « Dans ce monde, les juges font la loi. C’est un univers de gens bien comme il faut. C’était le règne de la jolie petite patineuse dans sa boule à neige », décrit Tara Lipinski, médaillée d’or en 1998 à Nagano, dans Losers.
Noire (l’une des premières dans ce milieu du patinage artistique majoritairement blanc), petite, avec les cuisses musclées, Surya Bonaly ne coche pas les cases stéréotypées du milieu.
Déterminée, frondeuse, elle enchaîne alors les exploits et brave les interdits. Sa spécialité ? Les sauts et saltos qu’elle pratique dès ses débuts sur la glace.
Surya Bonaly a toujours tenté les sauts les plus inédits sur la glace sans jamais pourtant parvenir à ajouter l’or olympique à son palmarès qu’elle a cherché à atteindre par trois fois, en 1992, 1994 et 1998.
Désillusion ultime, en 1994, aux Championnats du monde de Chiba. Elle y obtient le même score que la Japonaise Yuka Sato mais par cinq voix contre quatre : les jugent ne lui offrent que la deuxième marche du podium.
Elle refusera d’y monter, en larmes. Quand elle s’y décide, elle retirera sa médaille. Elle expliquera encore des années plus tard son incompréhension totale : « Je n’en revenais pas. C’était incompréhensible. Qu’est-ce qu’il fallait que je fasse ? Les juges auraient pu être justes pour une fois. »
Elle demeure encore aujourd’hui un talent brut du patinage artistique mondial et la première patineuse à avoir tenté de nombreuses combinaisons de sauts en compétition, mais aussi des quadruples rotations.
1994, Championnats du monde de Chiba
3. Détenir une figure de patinage artistique à son nom
En prime d’afficher un palmarès exceptionnel en dix ans de carrière – 3 fois vice-championne du monde senior, 9 fois championne de France et 5 fois championne d’Europe – Surya Bonaly n’a pas hésité à faire trembler la discipline en pionnière qu’elle est et qu’elle veut être.
Le salto arrière, jambes tendues, pieds décalés, réceptionné sur un pied, aussitôt dénommé le « Bonaly », fait d’elle la première patineuse de l’histoire à oser réaliser ce saut vertigineux en compétition.
Ce coup d’éclat a lieu le 20 février 1998, aux JO de Nagano, au Japon. Le « backflip » considéré comme trop dangereux est officiellement interdit par la Fédération, mais Surya Bonaly s’élance. « Elle voulait le tenter quand même, car c’est une athlète qui voulait faire changer les choses, faire évoluer sa discipline », affirme Peter Biver, son compagnon, patineur artistique.
Cette prouesse exceptionnelle lui offrira les honneurs éternels du public – et même une standing ovation ! – mais lui ravira la couronne sportive.
Surya Bonaly termine à la dixième place. La rude et belle loi du sport : une légende est née. Celle de la patineuse sacrifiée, mais pour toujours en liberté.
Le 20 février 1998, aux JO de Nagano, au Japon et le fameux « backflip » interdit de Surya Bonaly.
4. Faire le show
Nagano marque la fin de sa carrière en amateur. La patineuse désormais mythique devient pro, mais arrêtera quelques années plus tard la compétition.
Sa carrière se poursuit dans des spectacles sur glace. Le public n’a d’yeux que pour elle. Surya Bonaly fait vibrer les foules de backflip en backflip dans la troupe « Champions on Ice », à Las Vegas, de 1993 à 2007, ou encore lors de la tournée française d’« Holiday on Ice », en 2014.
5. Une rôle modèle qui marque la glace de son empreinte
« Rebel on Ice » ou le doc d’une star des écrans qui s’est vue inspirée par la rebelle de la glace. Cette star de télé, c’est Eva Longoria, la Desperate Housewife de Hollywood.
En 2015, elle produit un documentaire sur Surya Bonaly dans le cadre d’une série consacrée aux obstacles rencontrés par les grands sportifs. « Je me souviens. La première fois que je l’ai vue sur la piste, j’étais surprise : « Wow, c’est une fille black ! » Je n’avais pas l’habitude d’en voir dans ce milieu et en plus, elle était extraordinaire… », commente Retta Sirleaf, la réalisatrice du documentaire.
Surya Bonaly ne sait pas si sa couleur de peau a été un facteur dans les embûches qui ont jalonné sa carrière, mais la question s’est posée : « En tant que sportive noire, je considérais que j’étais obligée de faire mieux que bien. Je devais être parfaite ».
Dans ce milieu codé, la surdouée dénotait. Après avoir été membre du conseil fédéral de la Fédération française des sports de glace de 2010 à 2014 et marraine officielle des Championnats du monde de patinage artistique en 2012, elle a été l’ambassadrice de « La France des talents et des couleurs », une association qui lutte contre le racisme, la violence et la discrimination dans le sport.
Pour autant, la sportive expliquait à l’AFP à cette époque qu’elle ne voulait pas qu’on extrapole sa démarche : « Je n’aime pas trop associer mon image. J’ai fait ma carrière, je ne veux pas y revenir pour dire que j’ai eu des problèmes. Je fais ça pour les jeunes. Mon but n’est pas de dire que j’ai envie de soulever un truc vingt ans après ».
Aujourd’hui, la reine des patins entraîne des pros aux États-Unis où elle vit et n’hésite pas à aller partager sa powerful attitude auprès de jeunes patineurs et son inspirante story. Une sportive et une femme ÀBLOCK!
D'autres épisodes de "Patinage, ces filles qui ne laissent pas de glace"
Une fête du cinéma en haute altitude, une combattante à écouter sans modération, une championne à l’agilité hors du commun, le départ du plus mythique des tours du monde (avec Samantha Davies sur notre photo) et notre spécial Kids, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK!. Enjoy !
La 5e édition du Festival Femmes en Montagne s’est ouverte à Annecy. Jusqu’au 17 novembre, elle proposera une immersion à haute altitude dans le monde du court et long métrage avec la montagne pour décor. Sur les 26 films projetés, 6 seront récompensés. Il est encore temps d’y participer, sur place ou en ligne !
Un jour, ta progéniture rentre de l’école très déçue : « Maman, la gym c’est trop dur ! » Pour la consoler, tu lui dis que, toi non plus, tu n’as ni équilibre, ni souplesse. Comme si nos capacités dans tel ou tel sport pouvaient être héréditaires… Allez, ABLOCK! vérifie !
Un couple qui s’envoie en l’air, une aventurière à découvrir sous plusieurs formats et une navigatrice qui se prépare à un tour du monde mythique, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK !. Bon rattrapage !
Une nouvelle ambassadrice ÀBLOCK! qui nous partage ses exploits de triathlète, le questionnaire sportif d’une légende du coaching, une boxeuse qui a fait du ring son cocon, une escrimeuse maman avant tout et notre spécial Kids bi-mensuel avec notamment l’ado de 14 ans star du skate français (Lucie Schoonheere sur notre photo), c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK!
Un historien qui fait un zoom sur les JO, une skippeuse qui va partir à l’abordage de ses peurs, une escrimeuse aux deux colliers olympiques et une course caritative au parfum de Top Gun, c’est le meilleur de la semaine sur ÀBLOCK!. Enjoy !
Ce dimanche 20 octobre, la première édition de l’AéroRun a lieu au cœur de l’aéroport historique du Bourget. L’ONG Aviation Sans Frontières ouvre ses pistes aux runners, l’occasion de faire un footing pour la bonne cause dans un cadre exceptionnel. En piste !
La lutte est, dans l’imaginaire collectif, l’un des sports les plus « virils » qui soit ! Pourtant, selon la légende antique, il aurait été inventé par Palaestra, fille de Hermès et, devinez quoi, déesse de la lutte…
Comme tous les ans, Octobre Rose est de retour ! Pendant un mois, la lutte contre le cancer du sein est sur le devant de la scène…sportive. Un max d’événements solidaires vont se dérouler dans toute la France, ça va bouger !
Ce vendredi 27 septembre, la deuxième édition du Festival Les Evadées sera lancée pour 3 jours d’ateliers et de conférences sur le bien-être physique et mental dans la forêt de Compiègne. Le tout sous la direction experte d’Aurore Tonnerieux et Virginie Garnier.
On va encore atteindre des sommets ! La billetterie pour l’édition 2024 du Festival Femmes en Montagne est ouverte. Ce week-end d’exception aura lieu du 14 au 17 novembre à Annecy et ÀBLOCK! est, une fois de plus, partenaire !
On les regarde descendre des sentiers de montagne, rouler à toute allure entre les obstacles ou réaliser des figures impressionnantes. Et parfois, quand ces vététistes retirent leur casque, surprise, ce sont des filles ! Hé oui, le VTT se conjugue aussi au féminin, la preuve…
Elle a fait du softball sa passion. Un sport qui a changé sa vie. Car sur le terrain rien n’est anodin : gestion de la défaite, construction d’un collectif, prise de conscience de ses capacités physiques et mentales. Témoignage d’une fille, toujours en mouvement, qui frappe fort et juste !
Un ouvrage qui se dévore d’une traite ou qui se picore avec gourmandise. Dans « Une histoire des grandes exploratrices », Caroline Riegel, ingénieure en constructions hydrauliques, écrivaine, réalisatrice et grande voyageuse, rend hommage à quarante-huit femmes qui ont repoussé les frontières de l’exploration.
On ne va pas se mentir, il y a des sports qui ont l’air plus accessibles que d’autres. Par exemple, une fois équipé d’une bonne paire de sneakers, tout le monde peut (à priori) se mettre au footing. Mais quand on est un poids plume, difficile de s’imaginer pratiquer des sports de force comme l’haltéro. Et pourtant…
Claire Pola, coach à Limoges, nous a fait partager chaque semaine durant le confinement ses journées actives entre quatre murs. Aujourd’hui, elle s’apprête à ressortir son vélo. Et nous offre un dernier témoignage pour la route.
Elle n’aimait pas qu’on lui impose des limites. Et l’a prouvé. Après une tentative avortée, Gertrude Ederle devient, en 1926, la première femme à réussir la traversée de la Manche à la nage. L’Américaine, tout juste 20 ans, va aussitôt devenir la coqueluche de son pays. Avant de sombrer dans l’anonymat le plus total.
Les obstacles, elle les a toujours survolés. Née en 1892, dans le sud des Etats-Unis, Bessie Coleman a bravé les lois Jim Crow pour devenir la première aviatrice noire de l’Histoire. Portrait d’une voltigeuse audacieuse dont le souvenir perdure à travers les cieux.