« Petite fille, j’étais plutôt prédestinée à pratiquer l’athlétisme parce que je courais très vite pour mon âge et pour mon sexe, mais le club ne prenait les enfants qu’à partir de 10 ans. Donc, j’ai commencé le badminton à l’âge de 9 ans, c’était un peu un choix par dépit. Et au bout d’une saison, mon entraîneur n’a pas voulu me laisser partir pour aller vers l’athlétisme. Il sentait qu’il y avait un truc à faire. Je suis restée dans le badminton jusqu’à mes 23 ans !
Je ne suis pas très grande – je mesure 1,60m- mais au badminton, il n’y a pas trop de standard de taille. Chaque taille va avoir son lot d’avantages et d’inconvénients. Quand tu es petite, tu es plus vive, explosive, mais tu n’auras pas les mêmes qualités que les grandes qui sont plus lourdes. Mais il n’y a pas de morphologie type. Chacun va jouer avec ses armes. Tu as plein de petits paramètres qui entrent en jeu. Moi, je n’étais pas une bonne technicienne pour mon niveau, mais j’étais une mobylette, une pile électrique : j’étais partout sur le terrain, j’étais très explosive. Si je le pouvais, je sautais, je tombais, puis je me relevais très vite. Quelqu’un de plus grand donc plus lourd va plonger, mettre une demi seconde de plus pour se relever mais c’est trop tard, le volant est déjà par terre !
J’ai vite brillé au niveau départemental et régional et à partir de mes 17-18 ans, j’étais installée dans les meilleures Françaises de ma catégorie d’âge et puis toutes Françaises confondues, tout âge confondu. J’ai fait quelques compétitions internationales et ça s’est soldé deux semaines avant mes 18 ans par une rupture du ligament croisé. Là, ça a mis un petit stop dans ma carrière de haut niveau et j’y suis revenue après, mais je suivais alors des études supérieures en parallèle. J’ai continué un temps le haut niveau en national pour finalement décider d’arrêter en 2020.
Tout le monde me demande si ça me manque, mais non, parce que j’ai pas envie de jouer pour jouer, pas envie de faire du loisir, parce que le naturel reviendra au galop, et justement, c’est là où il ne faut pas, là où on peut se blesser facilement, il y a trop de pivots, trop de contre-pieds, trop de trucs comme ça et ça ne va pas le faire ! Et puis, maintenant, il y a l’Hyrox !
L’Hyrox, c’est une course de fitness qui mêle course à pied et exercices de fitness dits fonctionnels. En gros, tout le monde peut être capable de le faire. Alors, avec plus ou moins de difficultés, évidemment, il faut être quand même un petit peu sportif et en bonne santé, mais vraiment, eux, ils vendent, ils prônent des exos qui sont capables d’être faits par tout le monde. A contrario du CrossFit, où tu as des gestes d’haltérophilie compliqués et très techniques. Alors que tout sportif peut se frotter à l’Hyrox. Avec mon conjoint, on y est depuis une toute petite année en double mixte, ça va vite, c’est chouette. C’est une discipline qui correspond bien à nos qualités et, cette année, après quelques semaines d’entraînement, on est 3e aux Europe et 6e aux Monde. Pas mal pour une première année.
Mon ambition, notre ambition à tous les deux, dans ce sport, c’est de devenir champions du monde, parce que 6e c’est chouette mais bon, le titre c’est encore mieux ! En tout cas, on s’entraîne pour ça. Là aussi, je fais en sorte de me débrouiller avec ma petite taille. Les grandes ont un gros point fort en Hyrox pour les stations fonctionnelles de la partie fitness. Sur la partie course à pied, en général, les petites, comme c’est le cas pour le badminton, sont moins lourdes, donc peuvent aller un petit peu plus vite. Mais voilà, encore une fois, chacun y va avec ses armes, même si c’est vrai qu’on est sur une discipline qui favorise davantage les grands gabarits, pas forcément lourds, mais les grands gabarits. c’est pour ça que je me suis spécialisée dans le double mixte avec mon conjoint et pas en simple fille. Là, on a un super truc à vivre ensemble, on est identifiés comme le couple phare double mixte en France, pour le moment on a de très bons résultats : c’est peut-être pour ça aussi que je me camoufle derrière le mixte. Enfin, je l’aide quand même énormément, mais c’est vrai que la tactique fait qu’on peut davantage briller, même si on est petite, en mixte qu’en solo.
En dehors de l’Hyrox, je suis ostéopathe, parce que j’ai toujours été très intéressée par tout ce qui est science, approche du corps. J’ai toujours aimé tripoter les gens quand ils avaient mal quelque part, essayer de comprendre, et ça depuis toute jeune. C’est un job aussi qui me plaisait bien car on est à son compte, on n’a pas forcément de collègues. On rencontre quand même beaucoup de gens, parce que même si je ne veux pas de collègues, j’aime bien les gens ! Ça aide quand même pour le métier. Et du coup, voilà, ostéo, ça me collait bien. Et puis, j’ai eu la chance de rencontrer des ostéopathes qui m’ont beaucoup aidée dans ma carrière de jeune sportive. Du coup, ça s’est fait un peu naturellement.
Il y a parfois de grands ou gros gabarits qui viennent me voir et ça se passe toujours très bien. Ça arrive, mais très rarement, de me frotter à des gabarits pour lesquels il y a certaines manipulations compliquées à exécuter. Parce que, physiquement, ce n’est pas une question de force, seulement je ne peux pas faire le tour sur certaines manipulations. Globalement, ma réputation, c’est que je suis petite, mais que j’envoie la caisse ! Ce n’est d’ailleurs pas parce que les patients sont petits qu’ils vont être plus faciles à manipuler. Il y a des gabarits petits qui sont plus laxes, très compliqués à manipuler, comme les gymnastes, les danseuses. Au niveau sportif et blessures, les conseils vont être les mêmes pour les deux gabarits, en revanche, les morphotypes grands et longilignes auront généralement plus de soucis de dos. Les petits, souvent plus trapus, se rattrapent mieux musculairement.
Bref, y a toujours du plus et du moins. Mais, moi, je suis beaucoup à tirer le positif. Si on fait en sorte que rien n’est un problème, alors ça va bien se passer. Le positif attire le positif. C’est plus facile à dire qu’à faire, mais n’attendez pas que les choses vous viennent toutes crues. On vit dans une société où maintenant on a accès à plein de choses en termes de formations, en termes de rencontres…Il y a plein d’opportunités. Même si beaucoup de filles ne vont pas être d’accord avec moi, je ne trouve pas que ce soit un frein d’être une femme. En tout cas, je me suis interdite de le penser. »
Le témoignage de Mévèna Altiparmak dans le podcast 1m60max dont ÀBLOCK! est partenaire.
Ouverture ©DR