Olivia Piana « Le plaisir est le moteur de la performance, tant qu'il y a du plaisir, je continue ! »
Une championne multi-cartes. Olivia Piana a eu plusieurs carrières dans la glisse, et peu importe la discipline, elle fait partie des meilleures. Si elle a dû faire face à des obstacles, la reine française du stand-up paddle ne s'est jamais découragée. Aujourd'hui, elle vit à 200 %, jamais bien loin de l'océan. Rencontre avec une fille qui n'a pas sa langue dans sa poche.
Par Alexandre Hozé
Publié le 23 août 2024 à 16h01, mis à jour le 24 août 2024 à 9h54
Au départ, le sport c’est une histoire de famille pour toi…
Mes parents étaient sportifs, mais sans trop l’être non plus ! Ils faisaient vraiment ça pour le plaisir, et ils m’ont toujours encouragée à faire ce que je voulais comme discipline. Donc, j’ai testé plein de sports différents, en étant accompagnée en toute bienveillance par mes parents.
Dans ton enfance, est-ce que tu appréciais la compétition ?
J’en ai fait dans tous les sports que j’ai pratiqués, sauf la natation, parce que j’étais nulle ! J’ai fait pas mal de compét’ d’athlétisme notamment, ce qui m’a permis de réaliser qu’il ne fallait pas se mettre trop la pression sur le résultat. Mon professeur d’EPS, qui s’occupait du cross, m’a fait comprendre que tant que je donnais tout ce que j’avais, c’était ça le principal.Ça m’a fait du bien d’entendre ce discours à 12, 13 ans, alors qu’à l’école tu es constamment évalué, sous la pression de la note, du résultat.
C’est une leçon que j’ai gardé tout au long de ma carrière d’athlète. Même quand la performance était importante, qu’il y avait de l’enjeu, j’essayais au maximum de rester dans le moment présent, afin d’éviter tout stress parasite.
Grâce à ma mère ! C’était une windsurfeuse plus jeune, elle avait arrêté un temps, mais elle a repris quand j’avais 11, 12 ans, donc j’ai suivi. Mes grands-parents en faisaient aussi avec nous, découvrir ce sport en famille était vachement cool ! J’ai fait beaucoup de clubs par la suite, mais ces moments familiaux restent des souvenirs très sympas.
Je pense que c’est grâce à ces débuts avec ma famille que j’ai plus accroché au windsurf qu’aux autres sports que j’avais essayés avant. Ça, et aussi la sensation de liberté et d’évasion que tu retrouves quand tu pratiques le windsurf. Quand tu prends de la vitesse sur l’eau, parfois assez loin de la côte, c’est une connexion hyper-forte avec ce qui t’entoure à ce moment-là. C’est tellement plaisant qu’on en vient presque à oublier qu’on fait un effort physique !
Quand tu t’es lancée dans le windsurf de compétition, comment ça s’est passé ?
J’ai fait beaucoup de compétitions, mais c’était loin d’être simple ! Quand je me suis lancée, toute l’industrie du windsurf ne tournait qu’autour des hommes, il n’y avait absolument aucune aide pour les femmes. Le matériel était à nos frais, idem pour les déplacements… Alors que je faisais des coupes du monde, de vraiment gros événements, je n’ai jamais eu de sponsors pour m’aider.
C’est pour cela qu’en 2011, 2012, je bascule vers le stand-up paddle. À l’époque, c’était un sport naissant, et il y avait bien plus d’opportunités pour les femmes. Et comme j’ai eu des résultats rapidement, les contrats ont suivi également, et très vite, je pouvais partir à l’autre bout du monde pour des compet’ tous frais payés.
Finalement, tu es passée au stand-up paddle (SUP) plutôt par pragmatisme…
Complètement ! J’ai très vite adoré le stand-up paddle, mais je n’en aurais jamais fait à ce niveau si j’avais pu faire carrière dans le windsurf. Si les soutiens financiers des marques de windsurf avaient suivi, je ne me serais pas posé de questions. Quitter le windsurf, ça m’a fait pleurer ! Je l’ai mal vécu et j’en ai énormément voulu à ce système qui n’est centré que sur les hommes, sur leurs performances, et qui ne donnent absolument rien aux femmes. Idem pour l’ambiance, les hommes n’étaient déjà pas sympas entre eux, mais alors avec les femmes, je vous laisse imaginer…
Alors qu’en stand-up paddle, c’est complètement différent. La discipline naît en 2011, et seulement trois ou quatre ans plus tard, les primes hommes et femmes étaient égales sur toutes les compétitions internationales. À cette époque, j’avais entre 20 et 25 ans, et d’être témoin de cette évolution, c’était énorme !
Tu as récolté de nombreux trophées en stand-up paddle pendant ta carrière. De quels résultats es-tu la plus fière ?
Mes trois titres de championne du monde. Le premier est en décembre 2018, la compet’ avait lieu en Chine. Avant ce mondial, j’avais été sept fois vice-championne du monde dans les différentes disciplines de stand-up paddle, notamment sur la longue distance et le sprint.
Quand je gagne pour la première fois le championnat du monde, c’est sur longue distance et je ne m’y attendais pas du tout ! Les conditions étaient très dures, je n’avais pas envie d’y aller. Et finalement, une fois sur l’eau, j’étais presque en transe, connectée avec moi-même, j’étais quasiment en train de voler sur l’eau ! J’ai fait une course de dingue, et j’ai été championne du monde pour la première fois. C’était un moment incroyable, j’attendais vraiment ça, après toutes mes secondes places…
Au championnat du monde suivant, je me loupe un peu sur la longue distance, je finis deuxième et je suis un peu déçue. Le lendemain, il y avait l’épreuve de sprint, sur laquelle je ne m’étais presque pas entraînée ! Mais à cette période, j’avais commencé le foil, et on retrouve l’intensité du sprint dans cette pratique. Sans le savoir, je m’étais préparée ! Personne ne m’attendait, moi j’étais très relâchée, en plus je n’aime pas particulièrement le sprint… Et, par miracle, je remporte la finale ! Personne, et surtout pas moi, ne s’attendait à ça ! J’étais très étonnée, c’était complètement fou !
Je remporte mon troisième titre de championne du monde le lendemain sur un autre format, avec ma meilleure amie qui finit derrière moi, c’était aussi un moment très fort, avec beaucoup de partage, de bienveillance et d’amour.
Tu arrêtes le stand-up paddle en compétition en 2020, ça n’a pas été une décision trop difficile ?
Le Covid a entraîné cette décision, mais ça a été très dur de quitter la compétition. L’ambiance était tellement bonne entre nous, c’était comme une seconde famille. Il a fallu faire le deuil de tout ça.Ce qui m’a aussi aidé, c’est ma transition vers le foil. J’ai commencé en parallèle du stand-up paddle en 2018, à l’époque, personne n’y croyait. J’ai pris de l’avance en quelque sorte, et aujourd’hui, je suis une des pionnières du foil.
Pour autant, le paddle de course me manque, mais ça demande tellement d’entraînement, de temps et de sacrifices que je ne suis plus capable de m’aligner sur des compet’.
Le 29 juin 2023, tu as établi un record en reliant Péniches à Sagres au Portugal, en stand-up paddle foil. 285 kilomètres en 14 heures et 36 minutes, personne n’avait jamais fait ça avant toi. Qu’est-ce qui t’a poussé vers ce défi ?
J’adore l’inconnu, ne pas savoir ce qui va arriver, m’adapter, complétement sortir de ma zone de confort tout simplement. Pour cette traversée, j’ai été inspirée par un ami australien, qui a été le premier à se lancer dans de longues traversées similaires. Il avait notamment navigué pendant 211 kilomètres chez lui, près des côtes australiennes. C’est clairement un précurseur, avant lui, personne ne pensait que c’était possible. Il faut bien se rendre compte qu’il n’y a aucun moteur, donc on est vraiment dans la houle avec notre planche et notre pagaie, en fin de compte.
Il a ouvert la voie, et quand j’ai vu ça, j’ai voulu me lancer aussi. J’adore partir seule, faire de longues traversées… En France, j’en ai fait notamment entre Marseille et Hyères, 105 kilomètres. C’est vraiment quelque chose que j’adore !Et il y a autre chose : ça fait maintenant six ans que je vis au Portugal, et dans la région où je vis, notamment la côte, plusieurs industries mettent clairement en danger l’écosystème. Avec du tourisme de luxe, de l’agriculture intensive et également des panneaux solaires, ces industries-là achètent énormément de terrains sur lesquels elles déforestent et détruisent l’environnement à des fins commerciales. Avec ma traversée, j’ai voulu donner de la visibilité aux associations qui combattent ces pratiques.
L’alliage entre soif de l’aventure et venir en aide à des associations m’a beaucoup motivée, j’ai alors battu le record de mon ami australien pour la plus longue traversée. Et l’année prochaine, j’ai bien envie d’améliorer encore ce record…
Tu organises également l’Altamente Festival, un événement qui permet aux femmes de découvrir ces sports que tu pratiques et qui ne sont pas forcément simples d’accès. Quelle est la genèse de ce projet ?
Ce festival est né avec la projection du film de ma traversée, que j’ai voulu partager avec les habitants de la région dans laquelle je vis. Je me suis dit que la meilleure façon de transmettre ce que j’avais fait, c’était de permettre aux personnes d’aller sur l’eau, d’expérimenter le foil.Pour le nom, on a choisi quelque chose de sympa, Altamente, qui veut dire génial en portugais. Quand des Portugais essayent pour la première fois le foil, ils tombent, mais en sortant de l’eau, ils crient : Altamente ! Le nom vient donc de là.
Pour l’organisation, on a vu avec une association qui regroupe toutes les écoles de surf, de kayak et autres disciplines de la région.Ensuite, en tant que femme, en tant que féministe, je me suis dit que ce serait trop cool de faire ce festival lors de la Journée des droits des femmes, afin de permettre aux femmes d’essayer ces disciplines.Malheureusement, lors de cette première édition 2024, on a eu une météo super-difficile. Mais l’année prochaine, avec on l’espère un meilleur temps, on aura cinquante professeurs issus de dix disciplines qui nous permettront d’accueillir trois-cents femmes sur deux jours. Il y aura aussi des musiciennes et des musiciens, un marché de créatrices…
L’ambiance était géniale lors de la première édition, on a donc hâte d’être à la prochaine ! Tout le monde est le bienvenu, les hommes aussi évidemment !
Avec le recul, quel a été le meilleur moment de ta carrière sportive ?
Ce n’est pas en compétition, mais lors de ma traversée record. C’est un moment où je navigue à cinquante kilomètres des côtes avec mon bateau d’assistance à côté de moi. À ce moment-là, je ne vois plus la côte, je suis vulnérable mais connectée avec l’océan en quelque sorte, je suis en transe sur ma planche, et je me rends bien compte que, ce que je suis en train de vivre, c’est quelque chose d’unique.
Quand je m’approche des deux-cents kilomètres de traversée, je sens que je fatigue, ce qui est normal. Et là, une famille de dauphins est arrivée. Ils ont d’abord tourné autour du bateau d’assistance, avant de venir vers moi. Ils passaient sous ma planche, ils sautaient, je pouvais voir les petits… C’était absolument incroyable, et ça m’a reboostée pour la dernière partie de ma traversée.
Quand la marque qui me sponsorisait m’a lâchée sans raisons valables. Après m’avoir assuré qu’ils allaient renouveler mon contrat, ils ne l’ont finalement pas fait, avec comme argument que, sur un tel événement je n’avais pas aidé à gonfler les paddles… Aussi, la personne qui m’annonçait tout ça au téléphone, m’a dit qu’elle ne travaillait qu’avec ses copains. Et je n’étais pas une copine. En faisant ça, ils m’ont fait perdre plus que leur contrat, mais également le contrat qui me liait avec la marque à l’international qui était bien plus conséquent que le leur.
Ça a été très dur sur le coup, j’ai hésité à arrêter. Mais, aujourd’hui, je remercie ces hommes d’avoir fait ça. Grâce à cela, je me suis éloignée d’eux, je n’avais absolument rien à faire avec ces personnes. Aujourd’hui, je travaille avec des hommes ouverts d’esprit, sans ego qui pollue la relation, je suis la manager Europe de la marque pour laquelle je travaille… J’ai tiré des leçons de tout ça.
Quel est la suite pour toi, sur les prochaines semaines, les prochains mois ?
Ce week-end, je serai à la Yaka paddle, une compétition qui a lieu à Larmor. Je serai là pour représenter ma marque, montrer nos nouveaux produits, et aussi pour donner le départ et peut-être même faire les courses en foil et paddle.En octobre, je serai à l’Open de France de foil en Bretagne avec plusieurs disciplines. Ce sera un gros événement, des athlètes du monde entier seront présents, ça va être cool. En octobre également, il y aura une traversée de quarante kilomètres qui aura lieu près de Saint Tropez.
Aussi, en juillet 2025, il y aura trois courses importantes à Hawaï, on fait des traversées d’île en île. Cet évènement est le plus important de notre sport, c’est en quelque sorte la Mecque pour nous.Ce sera une saison bien active, la motivation est là.
Pour moi, le plaisir est le moteur de la performance, tant qu’il y a du plaisir, je continue !
Cinquante ans. Voilà pile un demi-siècle que la pratique du foot par les filles a été reconnue officiellement par la fédé française. Parfaite occasion pour s’inviter sur le terrain d’une des meilleures équipes féminines au monde, celle de l’OL, star d’un documentaire qui tire en pleine lucarne !
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Une revanche. En 1968, lors des Jeux Olympiques de Mexico, la plongeuse américaine Maxine « Micki » King captive le monde avec son courage et sa persévérance. Son retour en 1972 est d’autant plus remarquable.
Ce n’est peut-être plus l’heure des résolutions de fin d’année, mais il n’est jamais trop tard pour se lancer dans une nouvelle aventure sportive. Et pour aider les jeunes à s’y mettre, le ministère des Sports a la solution pour en motiver plus d’un.
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Un parcours de 200km à vélo destiné aux filles, c’est l’initiative inédite du jour ! Le top départ sera donné le 26 juin 2021. Le Club Audax Parisien allie le cyclisme et la région parisienne pour valoriser une pratique féminine de longue distance. En selle !
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