Amandine Giardino« En volley, j’ai toujours écouté mon cœur et ça m'a rarement porté préjudice. »

Amandine Giardino : « En volley, j’ai toujours écouté mon cœur et ça m'a rarement porté préjudice. »
Elle vient de fêter ses 30 ans. Amandine Giardino, capitaine de Nantes, a derrière elle quinze années de haut niveau. Un parcours précoce en club et en bleu qu’elle compte continuer à mener tant que la passion l’anime. Rencontre avec une fille aussi ambitieuse que généreuse.

Par Sophie Danger

Publié le 28 mars 2025 à 17h39, mis à jour le 29 mars 2025 à 19h41

Ce 29 mars, la veille de tes 30 ans, tu vas disputer la finale de la Coupe de France face à Mulhouse. Ça va se passer à Chartres avec, possiblement, pour toi, une deuxième victoire de rang dans cette compétition, la troisième de ta carrière. Comment abordes-tu cette échéance ?

C’est une finale, je l’aborde bien évidemment comme un match important. Sur ce genre de rencontre, ce qui prime le plus, c’est l’aspect mental : quand on évolue à ce niveau, on sait toutes jouer au volley, la question est plus de savoir comment tu vas réussir à gérer tes émotions, ton stress, à être dans le moment présent. Quoi qu’il en soit, je sais que ça va être top avec pour adversaire Mulhouse que l’on a joué samedi (défaite 2-3 pour les Nantaises, Ndlr) et que l’on va rejouer encore d’ici la fin de la saison pour une troisième rencontre en play-offs. Si ça continue comme ça, je pense que les Mulhousiennes risquent de devenir nos coéquipières !

©Amandine Giardino/Facebook

Ce nouveau titre pourrait venir enrichir un peu plus encore un parcours qui a débuté il y a une vingtaine d’années. Tu avais 6 ans et… tu as été repérée sur une plage varoise !

C’est ça, c’était sur une plage de la Seyne-sur-Mer. Petite, j’étais une enfant hyperactive, il fallait tout le temps que je bouge et je jouais constamment au ballon, que ce soit aux raquettes, au foot… Un jour, alors que je n’avais jamais joué au volley, je fais des passes et des manchettes avec mon père sur la plage et un monsieur s’arrête, regarde et lui dit : « Si un jour votre fille se met au volley, elle sera pro » et il lui indique l’adresse d’un club qui est situé pas loin, le club de Toulon Six-four.

Mon père m’a demandé si ça me tentait, je lui ai dit : « Pourquoi pas ». C’est comme ça que j’ai commencé et je n’ai jamais arrêté. Depuis, je me demande si ce monsieur n’était pas un ange ! On parle souvent de lui avec mes parents parce que, sans son intervention, moi qui viens d’une famille de non-sportifs, le volley n’étant pas un sport très connu, il est certain que je n’aurais jamais pratiqué.

©Amandine Giardino/Facebook

Avant le volley, est-ce que tes parents t’avaient déjà inscrite à une activité sportive pour tenter de canaliser un peu ta belle énergie ?

À l’époque, les mercredis, il y avait le multisport : en une après-midi, tu pouvais t’essayer à 1 000 sports. Avant le volley, j’ai donc fait du trampoline, également de l’équitation mais là, il y a eu une question de budget car c’est une discipline qui coûte chère. Je jouais également au football avec mes cousines notamment, mais le volley a été le premier « vrai » sport que j’ai pratiqué sur la durée. La licence ne coûtait quasi rien, il fallait juste une paire de baskets et tu faisais l’année !

Et le football ? Tu sembles avoir également beaucoup aimé ce sport.

Le football pour ma mère, c’était non ! J’ai un grand-frère qui y jouait et, quand tu es petite, tu as envie de faire comme ton grand-frère ou ta grande-sœur mais quand j’étais enfant, le football n’était vraiment pas un sport de filles ! Pour ma mère, ça a été un non catégorique.

©Amandine Giardino/Facebook

Le volley était acceptable ?

Le volley, c’était oui. C’est un sport qu’on ne connaissait pas, alors on a regardé sur internet. Contrairement au football, c’était un sport où il y avait des filles qui jouaient, elles étaient en t-shirt, dans un gymnase, à l’abri de la pluie. Mes parents m’ont dit ok et ils m’y ont emmenée tous les jours.  

Tu as pratiqué d’emblée tous les jours ?

Comme c’est un sport avec peu de licenciés, on a rapidement trouvé que j’étais bonne. Donc, j’ai été surclassée et j’ai commencé à jouer tous les jours. Quand on est jeune, on ne se rend pas compte, mais mes parents ont vraiment fait beaucoup de sacrifices pour moi parce qu’il fallait venir me chercher à l’école, me faire goûter, après il y avait l’entraînement puis les devoirs. J’avais déjà un rythme de sportive de haut niveau et, plus tard, rentrer en sport-études s’est avéré plus simple pour gérer tout cela.

©Amandine Giardino/Facebook

Tu débutes donc sous les couleurs de l’ES Toulon-Six-Fours La Seyne et tout va s’enchaîner très vite. Par la suite, tu vas intégrer le Pôle France de Boulouris. Tu envisages la suite du côté de Toulouse où se trouve l’Institut Fédéral de Volley-Ball (IFVB) mais ton club, qui évolue en deuxième division nationale, te propose une place de titulaire. Tu as 15 ans et tu es projetée dans le grand bain.

J’ai eu de la chance car, dans mon club – qui n’existe malheureusement plus aujourd’hui -, il y avait une équipe féminine qui évoluait en 2e division, ce qui signifie que les filles étaient déjà pros. Le week-end, après les matchs, mes parents m’emmenaient les voir. Moi, je ramassais les balles, j’avais des papillons dans les yeux quand je les regardais et elles, elles disaient : « Cette petite-là, elle est super forte ! ».

Puis, je suis rentrée à Boulouris. J’y suis restée deux ans et j’ai intégré l’équipe de France jeunes. La suite logique était que je fasse deux années à l’IFVB qui évoluait aussi en 2e division mais à ce moment-là, mon club m’a proposé d’être titulaire. Jouer au même niveau mais à la maison et avec des adultes, mon choix était vite fait !

©Wikipedia

Comment qualifierais-tu cette expérience très précoce ?

C’était une aubaine et une super expérience. Quand tu vis ça, tu grandis vite. Heureusement, j’étais chez mes parents à ce moment-là parce que j’avais vraiment un rythme de fou. Les structures, quand on a envie d’être athlète de très haut niveau, ça aide énormément. Moi, à 15 ans, je me couchais à 1h du matin tous les jours, c’était chaud. Mes parents, qui n’avaient jamais fait de sport, passaient une partie de leur temps enfermés dans un gymnase et ça, tous les jours ! Ils tenaient à être là du premier au dernier ballon, alors ils alternaient. Je les remercie à chaque fois pour ce qu’ils ont fait pour moi et, aujourd’hui, ils font la même chose pour mon neveu qui fait du football.

Est-ce que ça signifie que tu as mis l’école entre parenthèses ?

Ah non ! J’allais à l’école et je m’entraînais le soir, des entraînements de trois heures. J’avais un entraîneur bulgare à l’époque et il me traitait comme une adulte, ça m’a fait progresser énormément. Il n’y a pas de secret, lorsque tu veux être athlète de haut niveau, il faut s’entraîner tous les jours avec des gens qui mettent la barre haut. C’est ça qui fait la différence.

©Amandine Giardino/Instagram

Cette pratique précoce à haute dose, ce rythme si intense si jeune ne t’a jamais dégoûté du sport de haut niveau ?

Jamais. Il m’est arrivé de pleurer parfois parce que c’était dur mais mes parents m’ont toujours dit que si je n’avais plus envie de faire de volley, ce n’était pas grave. Pour moi, il était hors de question d’arrêter, et c’est la même chose encore aujourd’hui : j’arrêterai quand je n’aurais plus cette passion qui, pour l’instant, ne m’a pas quittée une seconde. Et puis, il faut se remettre dans le contexte : j’évoluais avec des filles de 30 ans et c’était top. Et puis, après ma 2e année, j’ai décidé de rejoindre l’IFVB parce que j’ai bien compris que, pour être en équipe de France seniors, c’était vraiment un passage obligé.

©Amandine Giardino/J!P/FFVolley

Lorsque tu rentres à l’IFVB lors de la saison 2012-2013, tu te projettes déjà en équipe de France séniors. Tu sais, à cette époque, que le volley va être une part importante de ta vie ?

Tout à fait. Lorsque je suis rentrée à Boulouris, je ne savais pas que l’on pouvait être pro. Encore une fois, ma famille n’est pas sportive, le volley n’est pas une discipline médiatisée et, à cette époque, il n’y avait pas les réseaux sociaux pour nous montrer des filles qui jouent au volley et qui sont de véritables stars. En revanche, à partir de 15 ans, quand je commence à être en pro et que, par la suite, on me dit que je peux être en équipe de France seniors, que je peux gagner ma vie avec le volley, ça devient la seule chose dont je veux vivre.

Comme j’avais sauté une classe plus jeune, je passe mon bac quand je suis chez mes parents et quand j’arrive à Toulouse, je m’inscris en STAPS, mais la seule chose que je veux faire, c’est du volley et passer mon permis pour être indépendante. Pendant cette année-là, je ne vais donc quasiment pas aller à l’école, je vais jouer au volley et bosser mon code et ma conduite.

Amandine, 2e en partant de la gauche…©Amandine Giardino/Facebook

L’école, ce n’était pas une passion pour toi ?

J’étais bonne élève parce que mes parents étaient derrière moi, mais ça ne m’a jamais plu. Je me suis dit : qu’est-ce que je vais faire après l’école ? Quelque chose qui ne va pas me plaire ? Je n’avais pas de vocation pour devenir médecin par exemple, la seule chose c’était le volley et je n’ai aucun regret d’avoir fait ce choix. Je n’ai d’ailleurs toujours pas peur de l’après-volley.

Lors de la saison 2013-2014, tu portes les couleurs de l’AS Saint-Raphaël, un club proche de chez toi et qui évolue en deuxième division. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ? Tu avais d’autres propositions ?

Saint-Raphaël, c’est encore une histoire de fou et je me dis, avec le recul, que j’ai vraiment une bonne étoile ! En fait, lorsque je suis à l’IFVB, on fait des stages dans des clubs pros pour voir comment ça se passe. J’avais sélectionné le Hainaut – Saint-Raphaël n’était pas dans la liste – où officiait Félix André qui était également entraîneur adjoint de l’équipe de France et qui me connaissait depuis toute petite. Le stage se passe super bien et le club me fait une proposition pour être première libéro en ProA. Mais après cela, je suis appelée par Riccardo Marchesi, un entraîneur italien, qui me dit qu’il va entraîner le Cannet, qu’il m’a repérée et qu’il a un projet pour moi sauf que, pour le moment, je suis trop jeune. Ceci étant, il m’explique qu’il y a un autre coach, Giulio Bregoli, qui va devenir le coach de ma vie, qui arrive en France et va prendre Saint-Raphaël en main. Le club évolue en 2e division et l’idée est de me former pendant un an et après, de rejoindre le Cannet.

Mon destin était quasi écrit, c’était seulement à moi de savoir si c’était ce dont j’avais envie. J’ai réfléchi. D’un côté, je me disais que la proposition du Hainaut était la chance de ma vie, mais de l’autre, je me demandais si j’étais prête à partir à l’autre bout de la France et à tout faire toute seule. La réponse était non. J’ai donc décidé de ne pas aller au Hainaut et j’ai signé mon premier contrat pro à Saint-Raphaël.

©Neptunes de Nantes

Est-ce que le deal a été respecté ?

Oui, tout s’est passé comme Riccardo me l’avait dit. Pendant un an, je travaille comme une folle. Giulio devient mon mentor, je rencontre des étrangères exceptionnelles qui vont devenir mes amies, je suis à côté de la maison, on gagne tout et on monte en ProA. Après cela, je pars au Cannet où je signe pour deux ans. À ce moment-là, le club recrute celle qui, pour moi, est l’une des meilleures libéros du monde, Nicole Davis, une Américaine qui a fait les Jeux un million de fois, qui a joué partout dans le monde. Je sais, de fait, que je ne vais pas jouer mais je me dis que je n’aurai plus jamais l’occasion d’évoluer avec une libéro comme elle de ma vie alors je fonce.

Durant la saison, j’ai dû jouer en tout et pour tout quatre matches, mais je m’inspire de Nicole tous les jours. Le Cannet fait une saison de fou furieux, on gagne tout mais forcément, à 19 ans, je n’ai pas le niveau suffisant pour jouer une Ligue des champions. Ricardo et Giulio se mettent d’accord. Pour eux, il ne faut pas me garder sans me faire jouer car je risque de perdre du temps et ils me proposent de revenir à Saint-Raphaël, qui est aussi en ProA, mais où je sais que je pourrais jouer. Tous les deux ont donné priorité à la joueuse plutôt qu’à leur intérêt personnel.

©Amandine Giardino/Facebook

Avec Saint-Raphaël, la saison régulière est difficile, vous gagnez seulement 10 victoires en 22 matches mais vous décrochez malgré tout une place en play-offs. Et là, tout change. Au bout, il y a la victoire en Championnat face à un monument, le RC Cannes, qui est sacré sans discontinuer depuis 98 !

Sur le papier, on jouait le maintien et puis, mi-saison, arrive Liesbet Vindevoghel qui restera une des plus belles joueuses avec qui j’ai joué. Elle a 36 ans à l’époque et c’est un monstre physique comme on n’en a jamais vu. On arrive en play-offs, on est 8e je crois, on a gagné effectivement dix matchs en tout et pour tout, mais à partir de ce moment-là, tout est remis à zéro et on se met à gagner. On joue la finale contre le RC Cannes qui a disputé vingt finales consécutives et a décroché vingt trophées. On se dit qu’on n’a rien à perdre et… on gagne le Championnat en mettant fin à l’hégémonie cannoise !

©Amandine Giardino/Facebook

Tu as 21 ans et tu es championne de France. Comment est-ce que tu expliques cette fin de saison et en quoi elle t’a permis de franchir un cap en tant que joueuse ?

Il y avait d’abord notre entraîneur, Giulio, qui était un coach phénoménal. En matière d’analyse des matches, il avait toujours un coup d’avance et il était tellement bon que les filles mouraient pour lui ! Et il y a quelque chose qui s’est passé dans l’équipe. On était pas toutes des tops joueuses mais par contre, on avait toutes la dalle et on faisait beaucoup de choses ensemble : après les matchs, on sortait, on se faisait des restos, quand il faisait beau, on allait à la plage… on est devenues un groupe de copines et ça l’a fait.

Il y a même eu un engouement pour notre équipe dans la ville, la salle commençait à être blindée, c’était un truc de fou. La saison d’après d’ailleurs, les 3/4 des filles sont restées pour jouer la Ligue des champions.

©LNV

En tout et pour tout, tu restes trois ans à Saint-Raphaël. Tu décroches une Supercoupe… et tu reviens au Cannet mais sous le maillot du Voléro cette fois, un tout nouveau club né de la fusion entre l’ES Le Cannet-Rocheville et le club suisse du VBC Voléro Zurich.

La Voléro, c’est une équipe dans laquelle il y a beaucoup de jeunes qui veulent tout gagner, que des monstres qui ont joué dans les meilleurs clubs du monde et Jelena Lozančić, la présidente m’appelle en disant qu’elle me veut. C’est un club qui ne se cache pas, un club qui annonce qu’il veut tout gagner, qui a les moyens de remplir ces objectifs et les joueuses pour. Je me dis que c’est ce qu’il me faut pour franchir un nouveau pallier dans ma carrière et je signe pour trois ans.

Là-bas, c’est comme si j’évoluais à l’étranger. On est deux Françaises, les autres viennent de Russie, de Serbie, de Slovénie, de Cuba… Je retourne dans un club dans lequel j’ai déjà évolué mais, en même temps, ça n’a plus rien à voir avec ce que j’ai connu. Au Voléro, c’est vraiment la culture de la win avec kinés à temps plein, gros staff, tout pour la performance.

Durant ces trois ans marqués par le covid, on ne va pas gagner de titre mais j’apprends énormément sur moi. Après ça, je sens qu’il me faut autre chose et je prends la direction de Venelles.

Amandine Giardino se confie sur le début de saison avec son équipe du Volero Le Cannet, c’était fin 2019.

De l’extérieur, il est difficile de comprendre qu’on puisse quitter une telle structure, tu ne t’y retrouvais plus ?

Je ne me sentais pas de rester et ce, pour plein de raisons. J’ai toujours eu la chance d’avoir des clubs qui me voulaient, avec toujours plus d’attentes à mon endroit que je n’en avais moi. J’ai fait le choix de Venelles parce que j’avais besoin de me retrouver, que j’avais également besoin de rester dans le Sud pour des questions liées à ma famille, à ma vie amoureuse. Quand j’ai signé, Alexandre Hubner arrivait en qualité de président, il avait des ambitions et avait fait venir Alessandro Orefice, un entraîneur italien que je connaissais car il était adjoint à Saint-Raphaël. Je connaissais également pas mal de joueuses qui évoluaient là-bas et je me suis dit : « J’ai envie de marquer l’histoire du club, on y va ! » On fait une magnifique saison, on ne gagne rien mais je me sens hyper bien.

©Venelles

Ça rejoint ce que tu expliquais plus tôt, ton moteur est et reste le plaisir avant même le résultat.

Oui, c’est ça. On m’a souvent demandé pourquoi je n’étais pas partie à l’étranger, mais j’ai toujours fait ce que je voulais, je n’ai jamais fait de choix par défaut, j’ai toujours écouté mon cœur et ça m’a rarement porté préjudice. C’est comme ça que je vis le volley, pour moi et pour personne d’autre, et j’ai de la chance d’avoir une famille qui ne connaît rien au sport de haut niveau et qui a toujours privilégié mon bien-être.

Tu rempiles une deuxième saison à Venelles avec l’ambition, comme tu dis, de marquer l’histoire du club, chose que tu sembles t’autoriser à penser pour la première fois de ta carrière.

Oui, et je vais pourtant vivre la pire saison de ma vie ! Je ne suis pas très bien, il se passe beaucoup de choses dans ma vie que je ne vais pas évoquer, mais qui font que j’arrête ma saison plus tôt que prévu, soutenue par le club. Je ne sais plus si j’ai envie de jouer au volley, mais j’ai toujours l’équipe de France et j’y retrouve mes amies. Ça me permet de me rendre compte que j’adore toujours autant mon sport et je décide de rejoindre Nantes la saison suivante. À l’époque, le club a trouvé un investisseur et veut tout gagner, ce qui signifie des joueuses avec des noms, des salaires et un nouvel entraîneur.

Ils suivent mes péripéties mentales à Venelles, ils sont là pour moi, ils m’appellent pour savoir comment je vais, de quoi j’ai besoin. Avant de rejoindre le club, je fais l’été de ma vie : avec l’équipe de France on se qualifie pour la Volleyball Nations League (VNL) et j’enchaîne avec ma première saison chez les Neptunes qui restera, là aussi, comme la plus belle saison de toute ma vie.

C’est-à-dire ?

Cesar Hernandez Gonzalez arrive alors que ce n’était pas prévu, un entraîneur exceptionnel, humain, qui a des attentes de haut niveau, les joueuses deviennent mes amies et ensemble, on gagne tout. On a dû perdre trois matchs en saison régulière, on est en finale de la Coupe de France qu’on gagne, en finale de la Coupe d’Europe ce qui, hormis Cannes, n’était jamais arrivé à une équipe française, et en finale du Championnat que l’on perd contre Paris.

Finalement, quitter ton Sud natal te réussit bien. Tu avais peut-être aussi besoin de t’éloigner ?

Mentalement, avant Nantes, j’étais très down et je me suis posé plein de questions. Je me suis demandé si tout ce que je faisais en valait vraiment la peine mais cent fois oui finalement. Tout avait toujours coulé de source pour moi jusqu’à présent, il fallait peut-être, à un moment donné, que je vive ce moment difficile. J’avais signé très tôt à Nantes, en décembre, et je pense effectivement qu’il fallait que je m’en aille. C’était un super choix. Nantes est une ville sportive, ce n’est pas si loin de chez moi, je rencontre des gens exceptionnels et je m’y sens comme à la maison.

©Amandine Giardino/Instagram

Pour revenir sur l’équipe de France A, tes débuts remontent à 2016, mais tu as eu une blessure au pied qui t’a empêchée de t’y épanouir plus vite. 2018, tu commences à t’y faire une place et en 2019, premier trophée avec la Savaria Cup. Ce parcours en bleu aussi était très important pour toi ?

Oui, quand on a su que la France allait organiser les Jeux Olympiques en 2024, la fédération a monté le projet « France avenir 2024 » auquel j’ai participé. Avec ce groupe, on va se suivre pendant six ans. On gagne la Savaria Cup, un tournoi amical mais en même temps, c’est la première petite coupe de l’équipe de France.

Par la suite, on va gagner la Golden League qui va nous amener en Challenge Cup, le passage obligé pour se qualifier pour la VNL, Challenge Cup que l’on va gagner. On participe également à des Championnats d’Europe, on va aller jusqu’en quarts de finale, ce qui n’était jusqu’alors arrivé qu’une fois dans l’histoire de l’équipe de France.

©Amandine Giardino/Instagram

Tu es actrice, non pas du renouveau de l’équipe de France, mais de la montée en puissance de l’équipe nationale qui n’a jamais été aussi performante.

Oui, ce qui était beau c’est qu’on était un groupe de copines et on avait un objectif commun. On savait que les garçons faisaient des trucs exceptionnels. Nous, quand on a commencé, on était 55e mondiales, on n’avait jamais été titrées mais on y a cru, on y croit encore et on veut toujours faire plus. On a décroché le premier trophée, on a gagné la première Golden League, la première Challenge Cup, les premières qualifications en quarts de finale des Europe… Il faut être lucide, il y a des équipes qui sont au sommet du volley mondial depuis toujours mais, malgré tout, avec nos résultats, on a commencé à parler de l’équipe de France féminine en France, ce qui n’était jamais arrivé. On joue une VNL, jamais une équipe de France ne l’avait fait, on va y rester grâce à nos résultats.

Les débuts ont été compliqués parce que je passe d’une saison où je gagne tout en club, à un été où on perd tout en bleu mais on se maintient en VNL, on se rend compte de ce que c’est que de jouer aux quatre coins de monde, d’enchaîner quatre matches en cinq jours contre des top équipes à n’importe quelle heure, avec des décalages horaires et c’était la meilleure chose à faire avant les Jeux.

©Amandine Giardino/Instagram

C’était tes premiers Jeux puisque la qualification pour Tokyo vous avait échappée trois ans plus tôt. Comment est-ce que vous êtes parvenues à gérer ce rendez-vous et les émotions qui vont avec ?

Je ne sais pas, tout coule : je fais la plus belle saison de ma vie en club et l’été, je suis avec mes amies, on vit des choses exceptionnelles, ma famille est là durant les Jeux de Paris, il y a 12 000 personnes qui chantent la Marseillaise avec nous… Quand tu reviens chez toi après, c’est étrange mais comme on a fini les Jeux tôt, il y a la prépa en club, ça devait faire dix ans que je n’en avais pas fait. Quand tu te poses cinq minutes, tu te dis que ce que tu viens de vivre c’est wahou mais, très vite, les objectifs s’enchaînent : le Championnat va commencer, on a une nouvelle équipe, la Supercoupe à jouer…

Est-ce que tu ne penses pas que ce rythme qui est le tien depuis quinze ans, à savoir championnat durant la saison régulière et équipe de France l’été avec quasi pas de coupure si ce n’est une coupure d’une semaine, peut aussi expliquer qu’à un moment, il y ait un trop plein pour toi ?

Ce sont des questions que l’on se pose mais une carrière, c’est tellement court et les émotions que tu vis, tu ne peux malheureusement les vivre nulle part ailleurs. Alors oui, le rythme est super dur, tu n’as qu’une semaine de vacances mais ça en vaut tellement le coup ! Physiquement, on marque un peu le pas, c’est souvent au mois de janvier, on est fatiguées, il ne fait pas beau, c’est un peu chiant mais ça va, même si je ne me vois pas encore faire ça pendant dix ans. Je pense que je vais lever un peu le pied. Quand ? Je ne sais pas, à tout moment, on se rappelle dans dix ans et je continue sur le même rythme, je ne me suis pas vraiment posé la question, je me laisse porter.

©Amandine Giardino/Instagram

Ton avenir, pour le moment, continue à s’écrire et en bleu et à Nantes.

Oui, le club a connu des soucis financiers mais finalement on a gagné la Supercoupe, on va jouer la finale de la Coupe de France, on est bien classées en saison régulière, c’est vraiment un truc de fou. Tout est encore à notre portée, on a un trophée, on peut potentiellement en gagner encore deux autres, la saison est loin d’être terminée et pour ma part, la mienne commence vraiment maintenant.

Et pour l’équipe de France, c’est quoi les objectifs à long terme, tu penses à Los Angeles ?

Quand on était aux Jeux et que l’aventure a pris fin, on s’est dit qu’on allait se qualifier pour les Jeux de Los Angeles. On a faim et effectivement, L.A. c’est dans ma tête. Entre-temps, cet été on a encore la VNL, on va disputer nos premiers Championnats du monde, ce qui va encore être une grande première. Mon objectif est de me donner à fond pour être sélectionnée et pouvoir vivre ça.

©Amandine Giardino/Instagram

La place de titulaire en équipe de France est toujours à gagner, même après tant d’années en bleu ?

Oui, bien sûr. En premier lieu parce qu’une blessure est vite arrivée et puis aussi parce qu’il y a des jeunes qui poussent, des filles qui se donnent à fond. Je ne me dis jamais que ma place est acquise, au contraire. Chaque saison, je me dis qu’il faut que je sois la meilleure, que je fasse mes preuves. Le sport, je considère que c’est au mérite. Je vais avoir 30 ans, mais je vais faire tous les extras possibles, je vais finir la dernière à l’entraînement, je vais toujours en demander plus, demander plus de vidéos parce que c’est comme ça que je vois la chose : je ne suis pas la meilleure joueuse du monde mais par contre, je mets tout en place pour être la meilleure. À mon poste, il y a aussi Juliette Gelin, elle est super jeune, titulaire dans l’un des meilleurs clubs du monde, je ne peux pas me permettre de me relâcher.

Tu as débuté en bleu en étant la plus jeune et désormais, tu es la plus âgée…

Oui, je suis la daronne ! Dans mon club, je suis la plus vieille et cette année, en équipe de France, c’est la même chose depuis que Christina Bauer a mis terme à sa carrière internationale. Tout ça est passé très vite. J’ai claqué des doigts, je me réveille et j’ai 30 ans, encore 20 ans dans ma tête et il s’est passé un million de trucs. Il faut vraiment profiter, c’est ça la morale de l’histoire !

©Amandine Giardino/Instagram

Ouverture ©Amandine Giardino/Instagram

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